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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME EST SAISIE DES RAPPORTS DE SES EXPERTS CHARGÉS DES SITUATIONS DES DROITS DE L'HOMME DANS QUATRE PAYS

01 Avril 1999

MATIN
HR/CN/99/18
1 avril 1999


Le Ministre russe des affaires étrangères dénonce le cynisme de l'OTAN au Kosovo

La Commission des droits de l'homme a poursuivi, ce matin, ses travaux consacrés à l'examen des violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elles se produisent dans la monde. Les Rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo, au Burundi et au Myanmar, ainsi que le Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme au Rwanda ont présenté leurs rapports. Elle a également entendu les interventions de personnalités de haut rang du Luxembourg, de la Russie et du Burundi.

M.Vassily Sredin, Ministre des affaire étrangères de la Fédération de Russie, a condamné l'agression en cours dans les Balkans. Il a dénoncé le cynisme de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord qui tente de justifier cette agression en invoquant la nécessité d'empêcher un désastre humain. La population de la Yougoslavie est privée de son droit à la vie et est soumise au néo-colonialisme de l'OTAN.

M.Eugene Nindorera, Ministre des droits de la personne humaine du Burundi, a déclaré que les avancées du processus de paix sont incontestables. L'objectif prioritaire pour la protection et la promotion des droits de l'homme dans son pays est que l'ensemble des Burundais s'engagent dans le processus de paix, y compris ceux de la diaspora.

La Secrétaire d'État aux affaires étrangères du Luxembourg, Mme Lilye Eer a rendu hommage à l'action de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme dans le domaine de l'assistance technique et a annoncé que son gouvernement a décidé de verser une contribution volontaire de 1,5millions de dollars. Elle a dénoncé la purification ethnique menée par le régime de Belgrade au Kosovo et a appelé à la condamnation de ces atrocités par la Commission.

Présentant son rapport sur la situation en République démocratique du Congo, M.Roberto Garretón a déclaré que les étapes annoncées pour avancer vers un régime démocratique n'ont pas été suffisantes. D'une façon générale, les droits de l'homme ne sont pas respectés, notamment en ce qui concerne le droit à la justice. La situation est encore bien plus grave dans les territoires occupés par la rébellion. Le représentant de la République démocratique du Congo a pris la parole pour répondre au Rapporteur spécial.

M.Paulo Sérgio Pinheiro, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Burundi, a vivement recommandé que le Haut-Commissaire aux droits de l'homme prenne l'initiative de convoquer une nouvelle réunion des trois Rapporteurs spéciaux avec les pays intéressés. Il a préconisé une approche régionale des enjeux communs au Rwanda, au Burundi, à la République du Congo et à la République démocratique du Congo.

M.Michel Moussali, Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme au Rwanda, a fait part de son souhait d'organiser une Table ronde à laquelle pourraient être invités des membres compétents de la société civile ainsi que deux ou trois présidents de commissions nationales de pays voisins. La délégation du Rwanda a fait une déclaration.

M.Rajsoomer Lallah, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, a déclaré que depuis 1990, les autorités du Myanmar continuent de harceler sans relâche les partis politiques d'opposition en vue de restreindre leurs activités. Il semble également que soit appliquée une politique officielle de déplacements forcés s'appliquant presqu'exclusivement aux minorités ethniques. La délégation du Myanmar a fait une déclaration à la suite de l'intervention de M.Lallah.

Les délégations de l'Allemagne (au nom de l'Union européenne et des pays associés d'Europe centrale et orientale), du Japon, du Qatar et des États-Unis se sont exprimées dans le cadre du débat sur la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elle se produise.

La séance reprendra à 15 heures avec la présentation d'autres rapports sur les situations des droits de l'homme dans divers pays et la suite du débat sur la question.

À 16h30, la Commission tiendra un débat spécial consacré à la situation au Kosovo. La Haut-Commissaire aux droits de l'homme fera une déclaration.


Déclarations dans le cadre du débat général

MME LIDYE ERR, Secrétaire d'État aux Affaires étrangères, au commerce extérieur et à la coopération du Luxembourg, a indiqué que son pays appuie les efforts visant à la réforme, dès cette session, des mécanismes de protection des droits de l'homme instaurés par la Commission. Elle a rendu hommage à l'action de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme dans le cadre du développement de l'assistance technique. Cependant, faute de moyens, le Haut-Commissariat risque d'être confiné dans un rôle de laboratoire, a-t-elle déclaré. C'est pourquoi le Gouvernement luxembourgeois a décidé de verser au budget 1999 une contribution volontaire de 1,5 millions de dollars.

Mme Err a déploré que la pratique de la mise à mort légale continue de faire recette quel que soit l'environnement culturel et le degré de développement des pays concernés. Le Luxembourg soutient la résolution présentée par l'Union européenne demandant l'abolition de la peine de mort ou du moins un moratoire sur son application, surtout dans les cas concernant les mineurs et les handicapés mentaux.

Le Gouvernement luxembourgeois a regretté que la situation des droits de l'homme en Chine demeure inquiétante. Certes, la signature par la Chine du Pacte relatif aux droits civils et politiques et la réforme du code pénal chinois constituent un progrès, mais ces engagements doivent être suivis par des actes concrets.

Concernant la situation des enfants victimes de violations des droits de l'homme, et particulièrement des enfants en guerre, réfugiés ou déplacés, la Secrétaire d'État a appelé à la finalisation de l'élaboration des protocoles facultatifs à la Convention sur les droits de l'enfant sur les enfants dans les conflits armés et sur l'exploitation sexuelle des enfants. La représentante a déclaré que la défense des droits de l'homme implique le devoir de mettre en question l'autorité aveugle de la tradition, notamment dans les cas d'excision.

La Secrétaire d'État a dénoncé la purification ethnique menée par le régime de Belgrade au Kosovo en violation flagrante des droits de l'homme. Elle a appelé au jugement des responsables de ces crimes par le Tribunal international de La Haye.

Mme Err a également souligné l'importance de l'éducation en matière de droits de l'homme, soulignant que les deux tiers de la coopération bilatérale de son pays sont concentrés dans les secteurs de la santé et de l'éducation. La représentante a exprimé son soutien à la prochaine Conférence mondiale contre le racisme.

M.VASSILY SREDIN, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a déclaré que son intention avait été de parler des défis à relever pour le nouveau millénaire, mais qu'il se voyait contraint de s'exprimer sur l'agression menée actuellement dans les Balkans - la première du genre en Europe depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Ces derniers jours, nous avons été les témoins de la destruction d'hôpitaux, d'usines, de la mort de femmes et d'enfants. Les missiles ne sont pas équipés de systèmes permettant de reconnaître les amis des ennemis. Le Ministre russe des affaires étrangères a dénoncé le cynisme de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord qui tente de justifier cette agression en invoquant la nécessité d'empêcher un désastre humain. Il s'agit en fait d'un nouvel avatar du colonialisme, «l'OTAN-colonialisme», a déclaré M.Sredin. L'intérêt légitime de la communauté internationale de protéger les droits de l'homme ne doit pas servir à dissimuler des intérêts géopolitiques. P
endant des années, la Commission des droits de l'homme a fait d'importants progrès pour créer un climat de confiance entre les États, et voilà qu'en une heure certains de ses membres se retrouvent dans des camps adverses. Si l'on a créé les Nations Unies, c'est bien pour que l'usage de la force ne soit possible qu'en passant par l'Organisation.

Le Ministre russe des affaires étrangères a d'autre part estimé que la Conférence contre le racisme devrait discuter de toutes les formes de ce phénomène. À cet égard, il a déclaré que son pays ne laisserait pas l'extrémisme politique se développer dans son pays. La situation économique de la Russie est complexe, mais elle ne négligera pas la nécessité d'assurer la défense des droits de l'homme. Le Président Eltsine a décrété 1998 année des droits de l'homme en Russie. Les campagnes d'information menées dans ce cadre ont permis de mieux faire comprendre la problématique des droits de l'homme en Russie, y compris dans les régions les plus isolées du pays. Au cours de cette année, la Russie a ratifié la Convention européenne des droits de l'homme et la Convention européenne contre la torture.

Le Ministre a regretté que dans certains pays de l'ancienne Union soviétique, tels que la Lettonie et l'Estonie, l'idéologie du nationalisme et l'hostilité à l'encontre des autres êtres humains se développent. Ces pays ne veulent pas résoudre le problème principal qui est de donner l'opportunité à des dizaines de milliers de personnes de jouir de leur droit à la citoyenneté. Ces pays ont essayé de stopper le processus de naturalisation. Ils ont l'intention de préserver le statu quo et de retarder le plus longtemps possible l'intégration des minorités nationales dans les sociétés d'Estonie et de Lettonie, a-t-il dénoncé.

M.NINDORERA EUGÈNE, Ministre des droits de la personne humaine, des réformes institutionnelles et des relations avec l'Assemblée nationale du Burundi, a déclaré que les avancées du processus de paix sont incontestables. Il a souligné que la sécurité est globalement assurée dans la capitale et dans la quasi-totalité des seize provinces. De plus, le programme d'action du Gouvernement en matière de protection et de promotion des droits de la personne a déjà atteint des résultats palpables, a t-il déclaré. Il s'est félicité des efforts conjugués du Gouvernement, des organisations internationales, des organisations non gouvernementales nationales et internationales, des États et autres bailleurs de fonds qui ont apporté un soutien technique et financier substantiels au Burundi. Il les a remercié au nom de la population et leur a demandé de poursuivre et d'accroître leurs efforts.

Le Ministre a précisé que son intention n'est pas de faire croire que le Burundi est devenu un paradis. Toutefois, les lacunes et insuffisances des services gouvernementaux ne justifient pas des sanctions lorsque celui-ci s'achemine dans la bonne direction.

Le Ministre a déclaré que des événements dramatiques survenus récemment sur la scène internationale ont révélé des problèmes graves. Les contraintes de tout plan militaire sont trop souvent appréciées suivant l'identité et la force de ses auteurs, a t-il regretté.

Le Ministre a également déploré que la situation des droits de l'homme dans son pays devienne un enjeu politique, voire un élément de chantage économique, au détriment des populations les plus vulnérables. Il a déclaré que l'objectif prioritaire pour la protection et la promotion des droits de l'homme dans son pays est que l'ensemble des Burundais s'engagent dans le processus de paix, y compris ceux de la diaspora.


Présentation de rapports dans le cadre de l'examen de la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise

M.ROBERTO GARRETÓN (Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans la République démocratique du Congo) a expliqué qu'il a finalement été autorisé à visiter la République démocratique du Congo (RDC) du 16 au 23 février derniers. Il a pu visiter les prisons et lieux de détention, ainsi qu'un camp de déplacés de guerre. Il a été autorisé à visiter la zone occupée.

Au titre de ses motifs de préoccupation, le Rapporteur a noté que le conflit interne, limité au territoire de la République démocratique du Congo, oppose au moins douze groupes armés irréguliers à neuf armées nationales. Un véritable climat de terreur règne dans la zone occupée. Le Rassemblement Congolais pour la démocratie (RCD) est clairement perçu par la population comme une force d'occupation rwandaise. La guerre du 2 août 1998 n'a fait qu'aggraver le sentiment anti-tutsi. Selon le Rapporteur, les étapes annoncées pour avancer vers un régime démocratique n'ont pas été suffisantes, et surtout, n'ont pas bénéficié de l'adhésion de la population civile, des organisations de droits de l'homme ou des partis politiques. D'une façon générale, les droits de l'homme ne sont pas respectés, notamment en ce qui concerne le droit à la justice. En effet, la Cour d'Ordre Militaire continue de juger des militaires et des civils lors de procès qui ne respectent pas les normes d'équité et condamne très fréquemment à la peine capitale. Il convient cependant de noter qu'aucune des sentences n'a été exécutée en 1999. Par ailleurs , les défenseurs des droits de l'homme, les dirigeants politiques et les journalistes sont constamment menacés et emprisonnés. Mais la situation est encore bien plus grave dans les territoires occupés par la rébellion. En conclusion, le Rapporteur a néanmoins déclaré qu'il y a des raisons d'espérer que la situation s'améliore.

Dans son rapport (E/CN./1999/31), le Rapporteur spécial explique que les autorités qui ont pris les rênes du gouvernement le 17 mai 1997 se sont refusées à toute coopération avec le Rapporteur spécial. Avant la rébellion d'août 1998, le Gouvernement de l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (ADLF) n'avait pas mis un terme aux haines intestines. Les conflits ethniques n'avaient pas disparu et la logique des vainqueurs primait toujours. La rébellion, pour sa part, a imposé un régime que la population perçoit comme une occupation étrangère, caractérisée par la forte prédominance d'une ethnie et le mépris de la population autochtone. Le Rapporteur spécial estime que les deux parties au conflit armé n'ont tenu aucun compte des règles du droit international humanitaire; cela est vrai tout particulièrement des rebelles qui ont fait preuve d'une rare cruauté. De part et d'autre, les victimes principales de la guerre sont les civils. Les carences dont souffrent les hôpitaux ont empêché de sauver de nombreuses vies, ce qui était particulièrement grave lors du brutal rationnement d'électricité et d'eau provoqué par les rebelles à Kinshasa. Ni les rebelles ni le Gouvernement ne reconnaissent avoir commis de crime et les deux parties s'opposent à toute enquête indépendante. Pourtant, certains signes permettent l'espoir, notamment la création d'un ministère des droits de l'homme, ainsi que l'annonce faite par son ministre le 10 décembre 1998 d'une coopération avec le Rapporteur spécial, l'annonce de la ratification de nouveaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et l'annonce d'une réforme du système pénitentiaire.

Le Rapporteur spécial recommande au Gouvernement de la République démocratique du Congo d'assurer par des mesures effectives le plein respect des droits de l'homme dont les violations sont exposées dans le rapport. La liberté d'expression et les droits des défenseurs doivent être rétablis immédiatement. Aux forces rebelles et à leurs alliés étrangers, il a recommandé de respecter strictement les règles internationales applicables au cas de conflit interne. Enfin, il adresse des recommandations à la communauté internationale. Il demande l'élargissement du domaine de compétence du Tribunal pénal international pour le Rwanda. Une réunion internationale, organisée sous les auspices de l'Organisation de l'unité africaine et de l'Organisation des Nations Unies, pourrait aider à parvenir à la paix. Il est toutefois indispensable pour cela qu'un terme soit mis immédiatement à l'assistance aux belligérants et à la vente d'armes. Une force militaire multinationale isolant la République démocratique du Congo de ses voisins de l'est pourrait aider à établir la paix et à protéger la population civile. La communauté internationale doit trouver dans les pays étrangers à la région, un asile pour les personnes poursuivies et les victimes du conflit. Il conviendrait d'élargir la représentation du Haut-Commissariat aux droits de l'homme pour permettre une coopération plus efficace avec le Rapporteur spécial.

M. MAVUNGU MVUMBI(République démocratique du Congo) a informé la Commission qu'il déposera bientôt un document sur la situation des droits de l'homme dans son pays. Il a déclaré que les efforts entrepris par le gouvernement sont ralentis du fait de la guerre d'agression dont le pays est victime de la part des armées régulières du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi; la guerre en elle-même est une violation grave des droits de l'homme, a-t-il déclaré.

Concernant la qualification du conflit, le représentant s'est déclaré en désaccord total avec le Rapporteur. Il s'agit d'un conflit international, a-t-il déclaré, c'est-à-dire d'une agression de la part de certains pays qui ont reconnu avoir des troupes sur le territoire de la République démocratiqus du Congo. Le label «rébellion» n'est qu'une mascarade qui dissimule les visées hégémoniques des agresseurs qui veulent créer un Tutsiland dans le Kivu, a-t-il déclaré. Par ailleurs, s'agissant de la présence d'enfants soldats au sein de l'armée régulière, l'état-major des forces armées congolaise a mis en place un programme de démobilisation des enfants soldats. Il a proposé d'organiser une conférence pan-africaine sur ce sujet en collaboration avec l'UNICEF. De son côté, la Cour d'Ordre Militaire est en pleine restructuration et une juridiction du second degré est prévue. D'autre part, une commission nationale d'enquête indépendante est en train d'être créée pour enquêter sur les massacres de réfugiés Hutus. Il a noté en outre que, contrairement à la campagne mensongère orchestrée par les extrémistes tutsis, l'État congolais assure la protection des tutsis depuis le début de la guerre. En ce qui concerne le processus de démocratisation, le représentant a déclaré que le Président Kabila venait de signer trois décrets relatif au débat national inter-congolais.

M.PAULO SÉRGIO PINHEIRO, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Burundi, a salué les efforts déployés par les autorités burundaises pour promouvoir les processus de paix dans le cadre des négociations d'Arusha, malgré les obstacles à la réconciliation nationale et les séquelles du conflit qui privent bon nombre de citoyens de leurs droits civiques et d'un environnement démocratique. Les nouvelles dispositions régissant le partage du pouvoir entre le Gouvernement, les partis politiques, l'Assemblée nationale et la société civile ont permis de réduire les antagonismes qui divisaient les parties en présence et de restaurer un minimum de confiance. La communauté internationale se doit donc de soutenir les efforts de médiation de l'ancien Président Nyerere et les négociations d'Arusha, même s'ils pèsent lourdement sur les moyens financiers mis à disposition. Le Rapporteur spécial a également salué comme autant de pas décisifs vers la recherche d'une solution durable au conflit burundais d'autres initiatives comme celles de l'Organisation des NationsUnies pour l'éducation, la science et la culture, en septembre 1997, et de Morat-Fribourg, en mars 1998, qui ont enclenché une dynamique visant à entretenir et faciliter le processus des négociations. Toutefois, a t-il souligné, le processus de paix reste fragile.

Il a rappelé que le Burundi est le pays de la région des Grands Lacs qui compte le plus grand nombre de populations déplacées et de populations regroupées. En outre, plus de 30 000 Burundais ont fui, essentiellement vers la Tanzanie. Les populations déplacées et regroupées au Burundi dans des sites de fortune ont des conditions de vie extrêmement précaires. Une étude du Fonds des Nations Unies pour la Population indique que 46% des femmes vivant dans ces sites ont subi des actes de violence physique, 39% ont souffert de violences psychologiques et 11% des abus sexuels. Le sort des dispersés cachés dans les forêts n'est pas plus enviable, dans la mesure où leur isolement ne permet pas de leur faire parvenir une assistance. Tant que perdurera cette instabilité, il est illusoire de penser que le Burundi recouvrera une situation normale dans un proche avenir, a souligné le Rapporteur spécial.

M.Paulo Sérgio Pinheiro s'est réjoui de la suspension par les neuf pays de l'Afrique de l'Est, le 23 janvier 1999, des sanctions économiques imposées au Burundi il y a presque trois ans. Cette mesure contribuera à alléger les souffrances endurées par la grande majorité de la population et notamment les femmes, les enfants et les personnes âgées. Il est à souhaiter que la minorité Twa, environ 1% de la population nationale, puisse également bénéficier de cette amélioration et sorte de l'isolement économique, politique et social dans lequel elle a été maintenue jusqu'ici.

Le Rapporteur spécial a déclaré que, depuis sa dernière visite au Burundi, de nombreux massacres ont été perpétrés. De plus, les civils continuent de souffrir le plus des conséquences de la guerre. Les enfants et les femmes sont des cibles extrêmement vulnérables. Les enfants et les jeunes sont de surcroît utilisés par les militaires et les rebelles en tant que sentinelles, éclaireurs, porteurs de lourdes charges et d'armes, voire comme combattants. Il a exprimé sa vive préoccupation face aux risques encourus par les témoins de crimes perpétrés, lorsqu'ils s'entretiennent avec les observateurs du Haut-Commissariat aux droits de l'homme.

Le Rapporteur spécial a attiré l'attention de la Commission sur la pratique des sentences de mort qui continuent d'être prononcées par les trois chambres criminelles du Burundi où déjà quelques 260 personnes ont été condamnées à mort. Le droit à la liberté et la sécurité de la personne continuent d'être violés. La situation des mineurs détenus en milieu carcéral est très préoccupante, a t-il déclaré.

Les problèmes devant être traités en priorité sont : l'intégration progressive des femmes aux affaires du pays, l'ouverture du système éducatif à la majorité des Burundais, l'alphabétisation des adultes et la réforme de l'administration de la justice. Il est également indispensable d'engager une réforme de l'armée et de la police burundaises, a t-il déclaré. Enfin, le Rapporteur spécial a vivement recommandé que le Haut-Commissaire aux droits de l'homme prenne l'initiative de convoquer une nouvelle réunion des trois Rapporteurs spéciaux avec les pays intéressés. Il a préconisé une approche régionale des enjeux communs au Rwanda, au Burundi, à la République du Congo et à la République démocratique du Congo.

Présentant son rapport, M.MICHEL MOUSSALLI, Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme au Rwanda a indiqué qu'à l'issue des quatre visites qu'il a effectuées dans le pays depuis le mois d'avril dernier, il est en mesure d'affirmer que, malgré le courage et les efforts du Gouvernement et de différents éléments de la société civile, le traumatisme qui hante la société rwandaise depuis le terrible génocide de 1994 reste constamment présent dans les esprits et affecte les actions et le comportement d'une grande partie de la population. M.Moussalli a également constaté que le génocide de 1994 a pratiquement anéanti toute la structure administrative du pays et tout son fondement économique, même si des progrès notables ont été enregistrés depuis. Des efforts considérables restent encore à accomplir et le soutien de la communauté internationale reste indispensable. L'énorme défi qui se pose aux autorités rwandaises est le suivant : comment ramener le calme et la coexistence au sein de la société rwandaise si ne sont pas jugés et punis les auteurs reconnus de ces crimes? Mais comment le faire avec un appareil judiciaire encore très affaibli alors que près de 125000 personnes sont détenues? M.Moussalli a par ailleurs souligné que la majorité des rescapés du génocide sont des femmes et des enfants.

M. Moussalli a souligné que l'institution nationale des droits de l'homme prévue par les Accords d'Arusha et la Loi fondamentale du Rwanda n'était pas encore en place lors du départ de la mission des droits de l'homme des Nations Unies. M.Moussalli a déclaré qu'il a fait part au Gouvernement de son souhait d'organiser une Table ronde à laquelle pourrait être invités des membres compétents de la société civile ainsi que deux ou trois présidents de commissions nationales de pays voisins. Cette Table ronde aurait pour but de permettre à la nouvelle Commission nationale rwandaise de bénéficier de l'expérience de commissions des pays voisins.
M.Moussalli a affirmé que de nombreux génocidaires des milices interahamwe sont déterminés à poursuivre leurs actions criminelles afin d'empêcher que se développe le climat de réconciliation que le Gouvernement s'efforce d'établir. Leur objectif fondamental est la reconquête du pouvoir et l'élimination de tous ceux qui ne partagent pas leur obsession criminelle, a déclaré le Rapporteur spécial. Il a souligné que ces milices utilisent le Congo voisin comme base arrière de leurs attaques et y reçoivent du soutien et de l'aide leur permettant de mener ces actions criminelles. C'est ce qui explique l'intervention rwandaise au Congo et c'est l'un des aspects majeurs de la crise qui règne actuellement dans la région des Grands Lacs. Il est donc absolument essentiel que les pays de la région se mettent d'accord sur un plan de paix et sur une solution régionale à long terme.

Dans son rapport (E/CN.4/1999/33), le Représentant spécial regrette que le Gouvernement rwandais et la Haut-Commissaire aux droits de l'homme n'aient pas pu parvenir en 1998 à un accord sur le mandat de l'Opération sur le terrain pour les droits de l'homme au Rwanda dont le retrait est intervenu en juillet 1998. Les conditions de détention restent déplorables au Rwanda, affirme le rapport. Il conviendrait d'envisager sérieusement de relaxer, à titre humanitaire, les malades et les personnes âgées, les mineurs et les enfants pour lesquels d'autres solutions que l'emprisonnement peuvent être trouvées. En ce qui concerne le Tribunal international d'Arusha, le Représentant spécial recommande qu'aucun effort ne soit épargné pour garantir une relation étroite avec les tribunaux nationaux ainsi qu'avec la population rwandaise, afin que le processus international soit perçu comme contribuant de la manière la plus large possible à l'élimination de l'impunité dans le pays.

Le Représentant spécial propose de convoquer un atelier qui rassemblerait des experts nationaux, des experts africains et d'autres experts internationaux dans ce domaine, pour tenter de parvenir aux meilleures solutions possibles. Le Représentant spécial invite aussi le Gouvernement à envisager sérieusement de prendre des mesures pour instituer un système d'enseignement public ainsi qu'un système de santé publique gratuits. Il se félicite que la situation en matière de droits de l'homme et de sécurité présente depuis juillet 1998 des signes d'amélioration dans le nord-ouest en particulier et dans le pays en général.

M.GERALD GAHIMA (Rwanda) a regretté que le rapport du Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme au Rwanda ne mette pas suffisamment l'accent sur les progrès enregistrés ces derniers temps dans le pays. M.Gahima a assuré que son pays a fait beaucoup de progrès depuis 1994 et a souligné, par exemple, que les tribunaux continuent d'effectuer leur travail et que la croissance de la population carcérale est stoppée. Il n'y a pratiquement plus de troubles dans le nord-ouest du pays et les populations qui avaient été déplacées dans cette région par les insurgés sont sur le point de rentrer dans leurs foyers. M.Gahima s'est dit disposé à maintenir le dialogue avec le Haut-Commissariat pour voir ce qu'il pourrait faire en faveur de la cause des droits de l'homme dans le pays sur la base d'une coopération mutuellement acceptée.

Répondant par ailleurs au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo, qui évoque souvent le Rwanda dans son rapport, M.Gahima a déclaré que les Rapporteurs spéciaux devraient veiller à la vérification des informations qu'ils reçoivent. M.Garretón n'est pas resté suffisamment de temps en République démocratique du Congo pour rédiger un rapport objectif et fiable, a-t-il estimé. À la fin du génocide, en 1994, le Gouvernement, l'armée et les milices sont passés en République démocratique du Congo (le Zaïre d'alors) pour entamer un travail de propagande dans les camps de réfugiés et y trouver de nouvelles recrues pour l'invasion du Rwanda. Alors que le Rwanda espérait que le nouveau Gouvernement au Congo mettrait un terme, une fois pour toute, à l'insécurité que faisait peser sur le Rwanda les groupes armés opérant depuis le territoire congolais, il est apparu que le Gouvernement de la République démocratique du Congo était en train d'entraîner et de former et de regrouper les forces de l'ex-FAR. L'idéologie du génocide est encore vivante dans la région des Grands Lacs et un grand nombre d'armes circulent encore dans la région, ce qui laisse mal augurer de l'avenir, a déclaré M.Gahima. Le Gouvernement de la République démocratique du Congo incite à la haine et au génocide contre les Tutsis, a affirmé le représentant rwandais. C'est pourquoi le Gouvernement rwandais demande à la Commission de prendre des mesures pour lutter contre le génocide et les crimes contre l'humanité perpétrés par la République démocratique du Congo.

M.ROBERTO GARRETÓN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo, a répondu à la délégation du Rwanda en soulignant qu'il s'est rendu dans trois camps et a rencontré plus de 40 personnes. Il a traité de la guerre du «Zaïre» depuis le Rwanda car il n'a pas pu s'y rendre à cette époque. Enfin, il a déclaré s'être rendu à Goma, occupée par les rebelles. «Dire que je n'ai pas parlé à toutes les parties en présence est un manque de compréhension de mon rapport», a-t-il conclu.

M.RAJSOOMER LALLAH, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, a regretté que, depuis sa nomination en 1996, il n'ait toujours pas été autorisé par le gouvernement de ce pays à se rendre sur place. Néanmoins, il a reçu une assistance et des informations précieuses de la part de plusieurs sources gouvernementales et non gouvernementales. Il a indiqué que son rapport met l'accent sur deux problèmes essentiels, à savoir la répression politique et militaire menée par le Gouvernement du Myanmar et la situation inquiétante qui prévaut dans l'est du pays.

Le Rapporteur spécial a indiqué que les représentants élus du peuple ne sont pas en mesure d'occuper les fonctions qui devraient être les leurs. La répression envers le NLD s'est intensifiée et a abouti à des arrestations massives parmi ses dirigeants et ses adhérents. Malgré des progrès enregistrés dans le cas de personnalités du monde politique, les arrestations arbitraires se sont multipliées et la situation des détenus reste très préoccupante. Toutefois, la Secrétaire générale du NLD est victime de harcèlements politiques continus qui ont récemment atteint un point culminant lorsqu'elle a été empêchée de rendre visite à son époux malade, décédé cette semaine. En outre, de nombreux autres citoyens ont été obligés de s'exiler car leur sécurité était menacée.

Dans l'Est du Myanmar, un grand nombre de civils continuent de mourir dans un contexte de mépris total des règles élémentaires du droit humanitaire international et des droits de l'homme. La situation dans ces États ethniques mènera inévitablement à un désastre humanitaire, a t-il déclaré. Il devient urgent que les autorités du Myanmar remplacent les solutions militaires par une solution politique. Le Rapporteur spécial a appelé les autorités à respecter les dispositions du droit humanitaire international et à épargner les populations civiles, en attendant l'adoption de mesures adéquates. Il a déploré que les agences des Nations Unies soient très limitées dans leurs interventions sur le terrain et a appelé la communauté internationale à intensifier ses efforts unilatéraux pour assister et protéger les populations se trouvant dans les États de Shan, Karen et Karenni. Regrettant la pratique du travail forcé qui n'est toujours pas interdite, le Rapporteur spécial a souhaité que le Myanmar respecte les recommandations d'une récente commission d'enquête menée par l'OIT sur cette question.

Dans son rapport (E/CN.4/1999/35), M.Rajsoomer Lallah précise qu'il s'est rendu en Thaïlande en décembre 1996 où il a recueilli des informations auprès de personnes déplacées récemment venues du Myanmar et qui vivent dans des camps de réfugiés le long de la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar. Il note que, depuis 1990, les autorités du Myanmar continuent de harceler sans relâche les partis politiques d'opposition en vue de restreindre leurs activités. Les actes de harcèlement ont atteint un point culminant en septembre 1998 avec l'arrestation de 200 membres de l'opposition dont certains élus.

De plus, et ainsi que s'en alarme la Haut-Commissaire des droits de l'homme dans un communiqué du 6 octobre 1998, il ressort de la Commission d'enquête établie par l'Organisation internationale du travail que la pratique du travail forcé existe toujours au Myanmar. Et il semble également que soit appliquée une politique officielle de déplacement forcé s'appliquant presqu'exclusivement aux minorités ethniques, en conséquence de laquelle de nombreuses personnes sont déplacées à l'intérieur du pays ou réfugiées dans des pays voisins. On estime que plus de 500 000 personnes déplacées, vivant dans les États de Mon, Karen, Shan et Karenni, ont besoin d'une assistance humanitaire et qu'un nombre considérable de personnes ont cherché refuge en Thaïlande, au Bangladesh et en Inde. Ces personnes se heurtent au problème de la désintégration de la famille et de la communauté.

La violence contre les civils semble être un élément fondamental de la stratégie globale de l'armée du Myanmar. Cette stratégie vise d'abord à amener la population locale à lui fournir des vivres, des combattants et de la main d'oeuvre, et ensuite à affaiblir la base des ressources des groupes rebelles et leur aptitude à gouverner. À cette fin, l'armée a entrepris non seulement de détruire systématiquement la plupart des villages mais aussi l'économie locale reposant essentiellement sur l'agriculture, de déplacer et réinstaller par la force la population rurale de manière à désorganiser la production agricole. L'armée pratique également la confiscation des terres pour les redistribuer à des officiers ou à des soldats, ce qui est une autre cause majeure de déplacement.

Les civils capturés lors d'attaques de villages sont souvent victimes de viols et d'exécutions arbitraires ou gardés prisonniers pour cultiver la terre et nourrir l'armée, ou encore astreints à travailler ou à faire du portage pour les militaires. D'après les informations du rapporteur spécial, le centre de l'État de Shan a connu l'un des plus vastes programmes de réinstallation forcée. Les enfants ne sont pas épargnés par le travail forcé, souffrent de mauvais traitements et de malnutrition.

Enfin, les conditions de détention dans les prisons du Myanmar sont loin de satisfaire aux normes internationales minimales établies par les Nations Unies. Les prisonniers seraient privés d'une nourriture suffisante et de soins de santé, ils seraient logés dans des conditions déplorables sur le plan de l'hygiène et dégradantes et ils seraient soumis à des peines disciplinaires cruelles ou à des tortures.

Étant donné que la situation des droits de l'homme au Myanmar se dégrade et que la répression des droits civils et politiques ne se relâche pas, le Rapporteur spécial réitère ses recommandations détaillées qu'il a fourni lors du précédent rapport à la Commission des droits de l'homme. Il note qu'à l'évidence l'option militaire que le Gouvernement a retenue dans les zones où vivent des minorités ethniques ne résout rien et devient même un problème grave. Si l'on veut éviter que le désastre humanitaire ne s'aggrave encore, il devient urgent de mettre en oeuvre une solution politique dans les régions concernées.

M.U AYE (Myanmar) a déclaré que le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, M.Rajsoomer Lallah, a mentionné des allégations douteuses et non étayées de preuves émanant de dissidents et de personnes qui sont toujours en conflit armé contre le Gouvernement. En revanche, M.Lallah a omis de tenir compte des informations fournies par les sources officielles des autorités. Le Myanmar bénéficie actuellement des succès enregistrés grâce au processus de consolidation nationale et aux efforts déployés en faveur des projets de développement, tout en protégeant les droits des habitants du pays. M.U Aye a souligné que le rapport de M.Lallah s'étend sur les droits politiques sans mentionner les droits de l'homme fondamentaux tels que le droit à être nourri, vêtu et logé de manière adéquate ou le droit au développement, qui sont essentiels pour un pays tel que le Myanmar. M.U Aye a affirmé qu'il est absolument faux de prétendre, comme le fait le rapport de M.Lallah, que certains membres d'un parti politique sont harcelés ou arrêtés. Le fait est que divers partis politiques existent légalement dans le pays.

D'autre part, M.Lallah lui-même a admis qu'il ne disposait pas de statistiques vérifiées et indépendantes sur le nombre de personnes déplacées. Il n'en donne pas moins des chiffres émanant de sources hostiles au Gouvernement, a souligné le représentant du Myanmar. En réponse au rapport de M.Lallah, qui met en cause les mesures anti-insurrectionnelles qui ont étét prises, M.U Aye a affirmé qu'aucun pays au monde ne peut tolérer le terrorisme et la destruction de vies et de propriétés perpétrés par des insurgés. Toutefois, le Gouvernement du Myanmar a entrepris d'évaluer et de traiter les causes profondes de l'insurrection, à savoir le manque de développement, d'infrastructures et d'écoles ainsi que la faiblesse des soins de santé et des niveaux de vie. M.U Aye a assuré que les projets de développement et de construction sont menés à bien par des sous-traitants privés qui doivent payer des salaires compétitifs, par les personnels des forces armées et en ayant recours à des machines et des équipements lourds. En outre, avec les cessez-le-feu et les redditions qui ont pu être obtenus avec les insurgés, la nécessité de recourir au système des porteurs, autrefois permis en vertu de la loi, a pratiquement disparu.

Une solution politique a toujours été et reste l'objectif déclaré du Gouvernement, a affirmé le représentant. Le Gouvernement est disposé à aider MmeAun Saan Suu Ky si elle désire se rendre à l'étranger suite au décès de son mari. Il ne fera aucun problème pour son retour dans le pays à l'issue de ce voyage qui répond à des préoccupations humanitaires.

M.NOBUTOSHI AKAO (Japon), évoquant la situation sur le continent africain, a estimé que le conflit persistant en République démocratique du Congo était un obstacle majeur à l'amélioration des droits de l'homme dans ce pays. Il a plaidé en faveur de la réconciliation nationale et de la démocratisation, conditions d'un retour à la stabilité politique et économique, avec l'aide de la communauté internationale. Il s'est en outre félicité de l'évolution récente de la situation au Nigéria. Il a en outre formulé l'espoir que les efforts de paix se poursuivent au Soudan et que la situation au Rwanda et au Burundi s'améliorera. M.Akao a par ailleurs exprimé sa vive préoccupation face à la situation qui prévaut au Kosovo et a condamné fermement les violations massives des droits de l'homme qui s'y produisent. Le Japon annoncera sa contribution pour une nouvelle opération de soutien aux réfugiés. Il a par ailleurs exhorté le Gouvernement iraquien à coopérer avec les mécanismes de droit de l'homme des Nations Unies et espéré que le programme «pétrole contre nourriture» aidera à alléger les souffrances du peuple iraquien. Se félicitant des derniers développement en Afghanistan sur le chemin de la paix, M.Akao a exhorté les parties, en particulier les taliban, à respecter les droits de l'homme et surtout ceux des femmes et des minorités. Il a également souhaité voir une amélioration de la situation des droits de l'homme dans les territoires occupés au Moyen-Orient et au Sud-Liban, ainsi que davantage de progrès dans ce domaine en Iran. Le Japon est également préoccupé par la situation des droits de l'homme à Cuba et à Chypre.

S'agissant du continent asiatique et en dépit de la crise économique qu'il traverse, M.Akao a estimé que les efforts des pays de la région pour renforcer les droits politiques, sociaux, économiques et culturels de leurs peuples étaient respectables. Il s'est également félicité des progrès accomplis vers un règlement pacifique de la question du Timor oriental. S'agissant de la Chine, il estimé que ce pays avait démontré sa volonté d'améliorer la situation des droits de l'homme et l'a encouragé à renforcer les droits politiques, civils ainsi qu'économiques, sociaux et culturels de sa population. Il a appelé à une plus grande ouverture et transparence dans ce domaine, notamment par la ratification des deux Pactes internationaux dans le domaine des droits de l'homme. Enfin, il a appelé à la fin des violations des droits de l'homme au Myanmar et à l'ouverture de négociations honnêtes entre la junte et l'opposition. En conclusion, M.Akao a plaidé pour une approche des droits de l'homme, globale et équilibrée,
faisant leur part au dialogue et aux encouragements.

M.WILHELM HÖYNCK (Allemagne, au nom de l'Union européenne et des pays d'Europe centrale et orientale associés à l'Union européenne : Bulgarie, République tchèque, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Slovaquie et Slovénie) a affirmé qu'à la lumière des attitudes racistes, xénophobes et violentes ainsi que des problèmes sociaux et les dysfonctionnements de la justice qui peuvent se manifester dans les sociétés européennes, l'Union européenne reste constamment consciente qu'en matière de droits de l'homme, il n'y a pas de place pour la complaisance. Il a précisé que l'Union européenne traiterait des situations en République démocratique du Congo, au Soudan, en Iran, en Iraq, au Nigéria, au Timor oriental, au Myanmar et en Colombie lorsqu'elle présentera les initiatives qu'elle entend prendre sur ces questions.

M.Höynck a condamné tous les crimes commis au Kosovo et a affirmé que la situation des droits de l'homme en Serbie continue d'être très préoccupante. Il s'est dit préoccupé par le manque d'indépendance du système judiciaire dans les deux entités qui composent la Bosnie-Herzégovine. Il s'est également déclaré préoccupé des restrictions à la liberté d'expression au Bélarus. L'Union européenne est très inquiète de la situation des droits de l'homme en Angola et demande à toutes les parties d'accorder aux organisations humanitaires l'accès à toutes les régions. Elle demande par ailleurs à l'Érythrée et à l'Éthiopie de mettre en oeuvre sans délai l'accord cadre de l'Organisation de l'unité africaine. M.Höynck a déclaré que la situation du système juridique au Burundi est une source de préoccupation car 80% des prisonniers sont détenus sans procès. Au Rwanda, en dépit des progrès enregistrés, l'Union reste préoccupée par la situation des personnes déplacées et encourage la réinstallation de ces personnes dans leurs villages. L'Union européenne est également préoccupée par la situation très fragile au Sierra Leone où elle condamne les mutilations, les meurtres et la torture à l'encontre de la population civile. Elle est par ailleurs préoccupée par la situation en Somalie et recommande que toutes les personnes reconnues comme ayant une autorité respectent les droits de l'homme. L'Union européenne est en outre préoccupée par les enlèvements, les meurtres et viols de civils perpétrés dans le nord de l'Ouganda.

En Afghanistan, l'Union européenne se dit choquée par les violations systématiques des droits de l'homme des femmes et des filles et se félicite de la proposition du Secrétaire général visant le déploiement de personnels civils de surveillance internationaux chargés d'empêcher de nouveaux abus. Au Cachemire, l'Union européenne encourage l'Inde à prendre toutes les mesures appropriées pour mettre un terme aux violations des droits de l'homme et demande au Pakistan de prévenir toute infiltration armée au-delà de la ligne de contrôle. L'Union européenne encourage les gouvernements indien et pakistanais à continuer de protéger les droits des minorités religieuses. Elle dénonce par ailleurs les disparitions, les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires et la torture perpétrés par les paramilitaires, les forces armées et la police au Sri Lanka. L'Union européenne condamne en outre les attaques terroristes perpétrées par les Tigres tamouls et le recrutement d'enfants-soldats.

L'Union européenne demande aux autorités du Guatemala de renouveler ses efforts afin d'assurer qu'une enquête soit menée sur le meurtre de l'évêque Gerardi, et que les responsables soient traduits en justice. Elle se dit par ailleurs préoccupée par les conditions qui prévalent dans les prisons péruviennes. Elle souligne en outre que la République populaire démocratique de Corée s'est coupée du monde et qu'il semblerait que les violations des droits de l'homme soient courantes dans ce pays.

M.SHEIKH AL-THANI (Qatar) a déclaré que la communauté internationale a fait des efforts non seulement pour inclure les droits de l'homme dans les lois nationales, mais aussi pour responsabiliser tous les pays en ce qui concerne leur protection. L'histoire humaine est une succession de batailles pour bénéficier des fruits de la liberté dont nous jouissons chaque jour. Le représentant a réitéré l'importance que tous les pays ratifient les Conventions internationales en rapport avec les droits de l'homme et les intègrent dans leurs lois nationales. Le Qatar envisage d'adopter une constitution permanente et une loi accordant aux hommes et aux femmes des droits égaux en matière de participation aux élections de représentants siégeant au sein d'un Conseil national.

Le représentant a lancé un appel à la communauté internationale pour que tous les efforts possibles soient faits pour éliminer toutes les formes de racisme. Il a soutenu l'idée de tenir une Conférence sur les solutions à apporter pour lutter contre le racisme. La préparation d'une telle Conférence devrait commencer sans attendre. Le représentant a fermement soutenu le droit des Palestiniens à déclarer un État indépendant, le droit des Libanais d'en finir avec l'occupation israélienne, la lutte de la Syrie pour libérer le Golan de l'occupation. La règle de droit inclut le droit de tous les peuples à déterminer leur destin, ce qui garantirait la fin des violations des droits de l'homme à l'encontre des peuples des territoires arabes occupés.

M.HAROLD HOGJU KOH (États-Unis) a indiqué que son pays est fier de son bilan en matière de droits de l'homme, tout en reconnaissant que la situation n'est pas parfaite. Les États-Unis n'acceptent pas la position selon laquelle ils n'auraient pas le droit de commenter la situation des droits de l'homme dans les autres pays sous prétexte que la situation aux États-Unis n'est pas parfaite. Il a également rejeté les arguments selon lesquels les particularités régionales, nationales, ethniques , culturelles ou linguistiques peuvent justifier des violations des droits universels de l'homme. M.Hogju Koh a appelé toutes les nations à condamner la junte birmane qui tente de politiser la tragédie humaine et réprime les droits fondamentaux de l'homme. Mettant l'accent sur le lien indéfectible entre droits de l'homme et démocratie politique, il s'est félicité de la tenue des dernières élections au Nigéria et invité la communauté internationale à soutenir les efforts du nouveau gouvernement dans ce pays ainsi que les efforts déployés par le Gouvernement indonésien. Il a condamné l'escalade de la violence en ex-Yougoslavie et en particulier au Kosovo, qui sont le résultat de l'absence de démocratie sous le régime de Slobodan Milosevic. Il a dénoncé de même les violations systématiques des droits de l'homme au Sierra Leone et en République démocratique du Congo.
Répondant à ceux qui estiment que la Commission ne devrait pas porter son atttention sur la situation dans des pays donnés, M.Hogju Koh a estimé que dans certains pays, les violations des droits de l'homme sont trop graves et systématiques pour être traitées de façon thématique. À cet égard, il a évoqué la situation en Afghanistan, en Iraq et au Soudan, estimant que la Commission avait le devoir de les traiter à travers des résolutions contre les pays.

Le représentant des États-Unis a annoncé que son pays présenterait cette année un projet de résolution concernant la Chine dont les autorités répriment l'opposition politique et restreignent la liberté de culte, en particulier au Tibet. Le projet de résolution exhortera la Chine à respecter la liberté de conscience, d'expression, de religion et d'association, mais aussi le droit à un jugement équitable, à la sécurité personnelle et à un climat politique pacifique. Il a également appelé à soutenir le projet de résolution contre Cuba. Enfin, M.Hogju Koh a exprimé sa préoccupation face aux violations des droits de l'homme au Bélarus, en Algérie, en Iran et en Corée du Nord.

Rectificatif :

Dans notre communiqué HR/CN/99/13 daté du 30 mars, le dernier paragraphe de la page 4 et le premier de la page 5 auraient dû se lire comme suit, le nom du Représentant permanent du Nicaragua ayant été omis :

M. ÁLVARO MONTENEGRO MALLONA (Nicaragua, au nom également du Costa Rica, d'ElSalvador, du Guatemala, du Honduras, du Panama et de la République dominicaine) a exprimé la préoccupation de ces pays face à la résurgence et à la consolidation de nouvelles formes de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie à travers le monde. Il a affirmé que le nettoyage ethnique, les mesures tendant à faire coïncider les frontières politiques avec les frontières ethniques et la mise en oeuvre de politiques fondées sur la supériorité raciale, religieuse, ethnique, culturelle ou nationale, constituent un défi que la communauté internationale doit affronter en faisant preuve de responsabilité et de fermeté. Le représentant a exprimé sa préoccupation, en particulier, face aux manifestations de racisme, de discrimination raciale et d'intolérance dont sont victimes les personnes appartenant à des minorités et aux groupes vulnérables de nombreuses sociétés, parmi lesquels figurent souvent les migrants. Il a insisté sur la nécessité d'intensifier la lutte pour l'élimination inconditionnelle de ces formes d'intolérance.

Le représentant nicaraguayen a souligné le rôle important que peut jouer l'éducation pour que les nouvelles générations soient exemptes de tout préjugé à l'origine de ces phénomènes. Il a mis l'accent sur la nécessité de promouvoir des programmes nationaux orientés vers l'enseignement, à l'intention de tous les secteurs de la société, des valeurs énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l'homme. Le représentant a par ailleurs préconisé que les États passent en revue leurs politiques en matière d'immigration en vue d'éliminer toutes les pratiques discriminatoires à l'encontre des migrants qui ne sont pas compatibles avec les instruments pertinents des droits de l'homme.

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