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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND DES DÉCLARATIONS DE DIGNITAIRES DE LA COLOMBIE, DU TOGO, DE L'AUTRICHE, DE L'ALLEMAGNE, DE CUBA ET DU PÉROU

27 Mars 2001



Commission des droits de l'homme
57ème session
27 mars 2001
Matin






Elle poursuit son débat sur le racisme et
toutes les formes de discrimination
en entendant plusieurs organisations non gouvernementales


La Commission des droits de l'homme a entendu ce matin les déclarations de plusieurs dignitaires : le Vice-Président de la Colombie, le Premier Ministre du Tongo, et les Ministres des affaires étrangères de l'Autriche, de l'Allemagne, de Cuba, ainsi que le Ministre de la justice du Pérou.

Le Vice-Président de la Colombie, M. Gustavo Bell Lemus, a indiqué que la volonté indéfectible du gouvernement et de la population en faveur du processus de négociation est le résultat de l'exercice de la souveraineté nationale et des libertés publiques. Il a déclaré que la lutte pour créer les conditions du plein exercice des droits de l'homme passe par la réconciliation et la paix. Rappelant que la problématique des droits de l'homme en Colombie s'inscrit dans le cadre du conflit armé, le Vice-Président a mis l'accent sur la lutte déterminée du gouvernement contre les groupes d'auto-défense.

Le Premier Ministre du Togo, M. Agbeyome Messan Kodjo, a réaffirmé l'engagement total de son gouvernement en faveur de la protection des droits de l'homme. Il a déclaré que la raison principale de sa présence devant la Commission était d'éclairer la communauté internationale sur les accusations graves et sans fondement pour la plupart portées par Amnesty International contre son pays. Il a fait observer que la Commission d'enquête établie par les Secrétaires généraux de l'ONU et de l'OUA n'a pu ni confirmer ni infirmer les faits allégués par Amnesty International. En outre, les informations non vérifiées contenues dans le rapport d'enquête ONU/OUA, telles qu'elles furent présentées à grands renforts de publicité sur les médias internationaux, laissaient apparaître qu'il s'agissait plutôt d'une manoeuvre de déstabilisation à l'endroit du Togo et de ses dirigeants.

Le Ministre des affaires étrangères de l'Autriche, Mme Benita Ferrero-Waldner, a déclaré qu'il était nécessaire que les États reconnaissent les sombres épisodes de leur passé, acceptent la responsabilité morale du mal qui a été commis, et soient disposés à un dialogue constructif qui peut seul conduire au respect mutuel et à une vraie réconciliation. L'Autriche a assumé sa responsabilité morale et a pris des mesures pour répondre aux plaintes liées à l'ère nationale-socialiste ou à la deuxième guerre mondiale.

Le Ministre des affaires étrangères de l'Allemagne, M. Joschka Fischer, a déploré les revers observés en matière de droits de l'homme, cette année, notamment au Moyen-Orient. Il a également mis en garde la communauté internationale contre les nouvelles divisions qui peuvent naître d'une mondialisation mal maîtrisée et de l'accentuation du fossé entre riches et pauvres. Il a exprimé sa préoccupation face à la situation des droits de l'homme en Afghanistan, en Chine et en Russie. S'agissant de la lutte contre le racisme et la discrimination, qui revêt une importance particulière pour l'Allemagne, M. Fischer a déclaré que l'expression «plus jamais ça» traduit l'essence de la façon dont les Allemands appréhendent l'histoire. L'État et la société allemands sont déterminés à lutter résolument contre toutes les formes de radicalisme d'extrême droite, de racisme et d'antisémitisme.

Le Ministre des relations extérieures de Cuba, M. Felipe Pérez Roque, a lancé un appel pour que cesse l'injuste blocus économique contre Cuba et a plaidé pour une démocratisation du système international. Le Gouvernement cubain lutte pour une société de plus en plus tolérante et humaine, pour un peuple de plus en plus éduqué et instruit, c'est-à-dire plus libre.

Le Ministre de la justice du Pérou, M. Diego Garcia-Sayan, a déclaré que le gouvernement actuel a réalisé un travail intense ces quatre derniers mois. Il s'est engagé à combattre la corruption et à poursuivre ceux qui ont commis des délits. D'importantes lois ont déjà été élaborées pour lutter contre le crime organisé et la corruption.

La Commission a par ailleurs poursuivi son débat sur le racisme, la xénophobie et toutes les formes de discrimination en entendant les déclarations des représentants des organisations non gouvernementales suivantes: Nord-Sud 21; Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples; Parti radical transnational; Pax Romana; Institut international de la paix; Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques; Robert Kennedy Memorial et Cairo Institute for Human Rights Studies. La plupart des intervenants ont souligné qu'il était urgent de se pencher, dans le cadre de la Conférence mondiale contre le racisme, sur la situation des minorités, et notamment des castes. Certains ont estimé que la Conférence devra établir les responsabilités s'agissant des causes historiques du racisme et de la discrimination raciale.

Le représentant de la Belgique, s'exprimant au nom de l'Union européenne, a pris la parole dans le cadre du point consacré à l'organisation des travaux de la session. Il a rendu hommage à l'intégrité personnelle et professionnelle avec laquelle la Haut-Commissaire aux droits de l'homme a rempli son difficile mandat avant de déplorer que nombre d'activités du Haut-Commissariat ne sont toujours pas financées par le budget ordinaire de l'ONU.

Au cours de sa prochaine séance plénière, qui aura lieu cet après-midi à 15 heures, la Commission devrait conclure son débat sur le racisme et entamer son examen du point de l'ordre du jour consacré au droit au développement.



Déclarations de dignitaires

M. AGBEYOME MESSAN KODJO, Premier Ministre du Togo, a déclaré que son gouvernement adhère entièrement à la philosophie des droits de l'homme et s'attelle à les consolider chaque jour davantage, dans l'intérêt de la paix et de l'unité nationale. Il a indiqué que la raison principale de sa présence devant la Commission était d'éclairer la communauté internationale sur les accusations graves et sans fondement pour la plupart portées par Amnesty International contre son pays et qui ont pour objet de ternir l'image de marque du Togo et d'accélérer l'alternance au pouvoir des forces politiques de l'opposition. Le Premier ministre a rappelé que, à la demande du Gouvernement togolais, les Secrétaires généraux de l'ONU et de l'OUA ont mis sur pied une Commission d'enquête internationale chargée de vérifier si les allégation d'Amnesty International selon lesquels avant, pendant et après les élections de juin 1998, des centaines de personnes, civiles et militaires ont été sommairement exécutées et jetées dans la mer. Au terme de leur mission d'investigation, les membres de la Commission ont conclu qu'ils ne pouvaient ni confirmer ni infirmer les faits allégués par Amnesty International. M. Kodjo a déclaré qu'il ne pouvait pas en être autrement car il s'agit d'une manoeuvre et d'une manipulation. En outre, les informations non vérifiées contenues dans le rapport d'enquête ONU/OUA, telles qu'elles furent présentées à grands renforts de publicité sur les médias internationaux, laissaient apparaître qu'il s'agissait plutôt d'une manoeuvre de déstabilisation à l'endroit du Togo et de ses dirigeants. La position du gouvernement se trouve confortée par les appréciations des Secrétaires généraux de l'ONU et l'OUA qui estiment que ce rapport comporte des lacunes et des insuffisances graves. Selon le Premier Ministre, il est manifeste qu'Amnesty International a été abusé par ses informateurs, et qu'il a failli à sa mission pour n'avoir pas pris les précautions d'usage qui s'imposaient au regard de la gravité des faits.

Le Premier ministre a réaffirmé l'engagement total de son gouvernement en faveur de la protection des droits de l'homme, qui est un combat permanent et qu'il faut situer dans un esprit de compromis, entre des impératifs contradictoires. Il a ensuite rappelé les agressions armées de 1986, 1993, 1994 et 1998 subies de l'extérieur et organisées par les opposants au pouvoir en place. Toutefois, dans le but d'améliorer la situation des droits de l'homme au Togo, le gouvernement a ratifié la quasi-totalité des instruments internationaux des droits de l'homme et ne cesse d'accorder une attention particulière au renforcement du pouvoir judiciaire, et ceci pour l'avènement d'une justice impartiale et exempte de corruption.

Le Premier ministre togolais a réitéré sa conviction que la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels impose la nécessité d'une économie forte. La pauvreté et l'analphabétisme sont des terrains fertiles aux violations des droits de l'homme, et il faudra trouver des véritables stratégies qui favorisent un réel développement humain durable, car il est difficile de parler de la jouissance effective des droits de l'homme à propos d'une population dont les conditions de vie se situent en dessus du seuil de pauvreté. Le gouvernement s'attache donc au renforcement de la trilogie développement-démocratie-droits de l'homme et sera attentif aux conclusions des délibérations de la Commission des droits de l'homme. En réaffirmant la nette condamnation du racisme et de la discrimination raciale le gouvernement togolais, a-t-il conclu, se prépare activement à apporter sa contribution à la Conférence mondiale sur le racisme et la xénophobie.

MME BENITA FERRERO-WALDNER, Ministre des affaires étrangères de l'Autriche, a regretté que l'esprit et la lettre des instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme ne soient pas respectés dans la réalité quotidienne. D'innombrables personnes continuent à voir leurs droits bafoués. Il faut que la communauté internationale reconnaisse l'impératif de traduire en pratique les normes des droits de l'homme. Il est essentiel d'assurer que les droits de l'homme sont respectés pendant et après les conflits et d'élaborer des stratégies qui encouragent la réconciliation nationale, l'établissement de l'état de droit et d'une bonne gouvernance. Il faut s'attaquer aux racines du cercle vicieux des conflits et des violations des droits de l'homme. Une approche tenant compte des droits de l'homme doit être adoptée dans le cadre de toutes les activités des organisations internationales.

La Ministre autrichienne des affaires étrangères a estimé qu'il fallait améliorer la coordination et l'efficacité des Nations Unies s'agissant de la question des personnes déplacées. Il faut mettre au point une approche qui englobe tous les problèmes liés à leur situation. L'Autriche salue l'important travail entrepris par le Représentant du Secrétaire général pour les personnes déplacées, M. Francis Deng, et se félicite de la création du réseau interinstitutions sur les personnes déplacées qui regroupe les institutions concernées des Nations Unies et de nombreuses organisations non gouvernementales.


Mme Ferrero-Waldner a estimé que la Conférence mondiale contre le racisme devrait fournir à la communauté internationale une occasion exceptionnelle de renouveler son engagement à combattre le racisme, la xénophobie et toutes les formes de discrimination. Garantir la non-discrimination est un élément fondamental de la politique menée par l'Autriche dans le domaine des droits de l'homme, tant au niveau national qu'international. La ministre a insisté sur la responsabilité à la fois des États et de la société civile pour promouvoir la tolérance et l'égalité. Pour maîtriser le futur, il faut faire face au passé. Les États devraient reconnaître les ombres de leur passé et accepter la responsabilité morale du mal qui a été commis. L'Autriche assume cette responsabilité morale et a pris des mesures pour répondre aux plaintes liées à l'ère nationale socialiste ou à la deuxième guerre mondiale. Les États doivent faire face aux injustices historiques et être prêts à un dialogue constructif qui conduira au respect mutuel et une vraie réconciliation.

Les minorités ethniques continuent à être les premières victimes du racisme et de la discrimination, a poursuivi Mme Ferrero-Waldner. Les tragédies qui se sont produites dans l'ex-Yougoslavie ou dans la région des Grands lacs prouvent que la négation des droits des minorités est à la base des conflits armés. Les gouvernements doivent prendre des mesures adéquates pour permettre l'intégration et le respect des droits des minorités. L'Autriche a, quant à elle, établi un cadre juridique destiné à protéger et à promouvoir les groupes ethniques. Elle se prépare à ratifier la Charte européenne pour les langues régionales ou les minorités. La question du trafic des personnes, en particulier des femmes et des enfants, demande une action internationale coordonnée. La protection des victimes potentielles, l'assistance et la réintégration des victimes doit être au centre des politiques nationales et internationales. L'Autriche organise le 9 avril prochain une réunion sur la question du trafic des personnes et espère que les représentants de la communauté internationale y participeront.

M. JOSCHKA FISCHER, Ministre des affaires étrangères de l'Allemagne, s'est félicité des progrès réalisés cette année dans le domaine des droits de l'homme. Toutefois, il a déploré les revers observés notamment au Moyen-Orient. À cet égard, il a souligné l'importance de se persuader que les peuples de la région peuvent vivre en paix et retrouver la voie de la négociation sans conditions préalables. Soulignant que la situation des droits de l'homme dans le monde est loin d'être satisfaisante, M. Fischer a souligné que des gens sont torturés et victimes de violence dans plus des deux tiers de tous les États. Les droits fondamentaux des femmes sont violés et les enfants forcés de devenir soldats. M. Fischer a également souligné qu'il n'a toujours pas été possible de combler le fossé entre riches et pauvres dans un contexte où la mondialisation reste déséquilibrée. Si l'on ne réussit pas à rééquilibrer les forces du marché en imposant des valeurs orientées vers les besoins des gens, on court le risque de nouvelles divisions, a-t-il mis en garde. Rappelant que les droits de l'homme sont indispensables pour la paix et le développement, M. Fischer a insisté sur l'indivisibilité des droits socioéconomiques et des droits politico-civils, qui sont interdépendants et également importants.

M. Fischer a déploré qu'en dépit de l'adhésion de plus en plus grande des États aux normes juridiques et en particulier à la nécessité de lutter contre l'impunité en ce qui concerne les violations des droits de l'homme, ces normes ne soient pas appliquées. Dans cet optique, il a souhaité que la Cour pénale internationale puisse commencer ses travaux au plus tôt. Le ministre a par ailleurs appelé à l'abolition universelle de la peine de mort dont il a estimé que rien ne peut justifier sur le plan moral ou juridique.

Dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels, l'Allemagne présentera un projet de résolution sur le droit au logement. M. Fischer a en outre insisté sur la nécessité d'accorder une priorité particulière aux droits de femmes et des fillettes, en particulier en ce qui concerne le trafic dont elles sont victimes ainsi que les pratiques de mutilations génitales. À cet égard, il a dénoncé la situation des femmes et des fillettes en Afghanistan et demandé que la Commission des droits de l'homme condamne vigoureusement les violations des droits de l'homme dans ce pays. Il a par ailleurs dénoncé la destruction des statues de Bamyan, qui est la destruction symbolique de l'idée de tolérance et de coexistence harmonieuse, qui sont à la base des droits de l'homme et de la paix.

Le Ministre allemand des affaires étrangères a également exprimé sa préoccupation face à la situation des droits de l'homme en Chine, en particulier en ce qui concerne la persécution de dissidents politiques, de membres de communautés chrétiennes ou autres, des disciples du Falun Gong ou de minorités ethniques telles que les Tibétains et les Ouïgours. Il a demandé que la Chine mette un terme à ces persécutions, qu'elle accorde la liberté religieuses et cesse l'oppression de la culture et de la religion tibétaines. Il a demandé en outre à la Chine d'abolir la peine de mort et de ratifier la Convention sur les droits civil et politiques. M. Fischer a ensuite attiré l'attention sur les violations des droits de l'homme en Tchétchénie et demandé à la Russie de s'engager dans un dialogue politique sérieux et des négociations pour trouver une solution pacifique au conflit.

S'agissant de la lutte contre le racisme et la discrimination, qui revêt une importance particulière pour l'Allemagne, le Ministre des affaires étrangères a déclaré que l'expression «plus jamais ça» traduit l'essence de la façon dont les Allemands appréhendent l'histoire. L'État et la société allemands sont déterminés à lutter résolument contre toutes les formes de radicalisme, d'extrême droite, de racisme et d'anti-sémitisme. M. Fischer a insisté sur la nécessité de renforcer le consensus au sein des sociétés contre le racisme et la xénophobie. Soulignant l'importance de la mémoire des injustices du passé, il a souhaité que la Conférence mondiale contre le racisme s'attache davantage aux problèmes urgents du présent et du futur et adopte une Déclaration qui aura un impact et un Plan d'action réaliste.

M. FELIPE PÉREZ ROQUE, Ministre des relations extérieures de Cuba, a déclaré que la Commission des droits de l'homme est aujourd'hui divisée plus que jamais, et qu'elle risque d'arriver à un point irréversible de discrédit: d'un côté les pays otages de la dette, victimes de l'injuste désordre de ce monde, toujours accusés par la Commission; de l'autre côté il y a les pays riches, les créanciers, qui jugent les pays en voie de développement. Les États-Unis devraient par exemple expliquer la raison de leur opposition de considérer la faim comme une violation des droits de l'homme. Pour changer la situation, a-t-il poursuivi, il faut que les pays développés reconnaissent les demandes des pays pauvres, et essayent de lutter pour une plus grande justice entre les pays et à l'intérieur des pays. À cet égard, il a lancé un appel pour qu'il soit mis fin au blocus économique injuste qui pèse sur son pays.

M. Pérez Roque a aussi tenu a réaffirmer qu'il n'y a pas de violation de droits de l'homme a Cuba et qu'une telle affirmation ressort de l'incapacité des États-Unis à accepter Cuba comme un pays indépendant qui ne lui appartient plus. Le ministre a ajouté que l'autorité du Gouvernement cubain se base sur l'élection démocratique et transparente sans argent ni corruption. Le gouvernement lutte pour une société de plus en plus tolérante et humaine, pour un peuple de plus en plus éduqué et instruit, ce qui veut dire plus libre. Le gouvernement n'accepte ni la violence ni la menace, a-t-il poursuivi, et la lutte pour le respect des droits des peuples du tiers monde est une lutte pour le droit au développement, le droit à la vie.

«Que Cuba veuille être libre et indépendant dérange les États-Unis. Et Cuba ne renoncera pas à être chaque fois plus libre et plus indépendant ! Que Cuba soit socialiste dérange les États-Unis. Et Cuba sera chaque fois plus socialiste ! Que le peuple gouverne à Cuba dérange les États-Unis. Et à Cuba, le peuple sera chaque fois plus maître de son destin ! Que Cuba coupe court aux aspirations impérialistes et hégémoniques dérange les États-Unis. Et Cuba sera chaque fois plus anti-impérialiste et solidaire avec les causes justes !», a déclaré le Ministre cubain des affaires étrangères. Il a ajouté que le gouvernement cubain n'accuse pas le peuple des États-Unis, capable de noblesse et d'idéalisme, mais un système hégémonique de domination ainsi qu'un ordre économique et politique égoïste.

M. Pérez Roque a noté que certains demandent à Cuba un geste pour faire plaisir aux États-Unis. «Le geste que je fais, au nom de mon peuple, est celui de lever le poing et de dire bien haut les mots qui durant quarante ans les Cubains ont répété face à chacun de leurs crimes et de leurs agressions contre Cuba : La Patrie ou la Mort ! Nous vaincrons !»

M. DIEGO GARCÍA-SAYÁN LARRABURE, Ministre de la justice du Pérou, a évoqué la crise qui a affecté son pays. Il a déclaré que l'État de droit a été affaibli et la vie démocratique détruite. Les droits de l'homme ont souffert du régime autoritaire. L'impunité s'est transformée en un drame quotidien. Heureusement, le Pérou a pu résoudre cette difficile crise. En cette phase de reconstruction démocratique, le Gouvernement péruvien a la responsabilité de redonner un nouvel élan à la reconstruction des institutions démocratiques. Les droits de l'homme internationalement reconnus ont une relation de symbiose avec la démocratie et l'État de droit. L'observation stricte de la loi et des droits fondamentaux permet de rejeter toute oppression et toute crainte de persécution. La sinistre machination d'un service secret omnipotent lui a permis de s'infiltrer au coeur du pouvoir. Le groupe mafieux a attaqué les droits de l'homme en corrompant les médias et en organisant des élections frauduleuses, des exécutions sommaires, et des disparitions forcées. La machination mise en place a permis à ses auteurs de s'approprier des milliers de dollars provenant du trafic d'armes et de la drogue. Le gouvernement autoritaire a décidé de retirer le Pérou de la Cour interaméricaine des droits de l'homme. La garantie des droits de l'homme par l'État a disparu et le régime autocrate a régné de façon absolue sur les péruviens.

Le Ministre péruvien de la justice a informé la Commission que le Gouvernement péruvien actuel a réalisé un important travail ces quatre derniers mois; le Conseil des ministres se compose de personnes qui ont pour objectif de mettre de l'ordre dans un pays qui est confronté à de graves problèmes économiques et sociaux. Les magistrats du Tribunal constitutionnel, qui avaient été chassés de façon illégale, ont retrouvé leurs fonctions. Les autorités électorales ont été épurées et transformées en organe technique indépendant. Le Gouvernement a adopté des mesures pour rétablir les garanties juridiques nécessaires au fonctionnement de l'État de droit. Un groupe de travail a été créé afin d'examiner les processus juridiques et administratifs qui permettront la création d'une Commission de vérité au Pérou qui sera chargée d'éclairer les cas de violence qui se sont produits entre 1980 et 2000. Les victimes auront toutes droit à la justice et à l'indemnisation. Le Gouvernement actuel s'engage à combattre la corruption et à poursuivre ceux qui ont commis des délits. Le Gouvernement péruvien a proposé d'importantes lois contre le crime organisé. L'application de ces lois a permis d'entamer des procédures pénales à l'encontre des principaux responsables de la corruption.

M. García-Sayán a déclaré que la réinsertion du Pérou dans la communauté internationale est une priorité pour le Gouvernement actuel. Le Pérou s'engage à remplir ses obligations internationales. Il a estimé qu'un pas important avait été fait avec la normalisation des relations du Pérou avec la Cour interaméricaine des droits de l'homme. Le régime antérieur voulait se soustraire à la justice. Le Gouvernement péruvien actuel a reconnu la responsabilité internationale de l'État Péruvien. La Cour interaméricaine a donné un élan important à la recherche de la vérité. Le Pérou recommence à être un pays qui reconnaît l'obligation du respect des droits de l'homme. Le ministre a par ailleurs indiqué que le Pérou a souscrit au Statut de la Cour pénale internationale, ainsi qu'à plusieurs instruments régionaux et internationaux des droits de l'homme. Le Gouvernement péruvien soutient le renforcement des structures du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. La reconstruction démocratique au Pérou, l'indépendance des pouvoirs, la liberté d'expression, permettra de mettre fin à la persécution politique et d'entamer une lutte contre l'impunité et la corruption. Le ministre péruvien a déclaré que son pays avait besoin de l'appui de la communauté internationale dans ses efforts.

M. GUSTAVO BELL LEMUS, Vice-Président de la Colombie, a déclaré que le Gouvernement colombien comme la société sont engagés dans le grand effort prioritaire de la recherche de la réconciliation. À cet égard, il s'est félicité de la création récente d'un groupe de pays amis du processus de paix en Colombie qui constitue une reconnaissance de la communauté internationale de la négociation politique engagée par le Gouvernement. La paix dans le pays relève de la responsabilité des colombiens, mais grâce à l'appui international, la réconciliation n'est plus une utopie lointaine. Dans cet optique, le Ministre a indiqué que la volonté indéfectible du Gouvernement et de la population en faveur du processus de négociation est le résultat de l'exercice de la souveraineté nationale et des libertés publiques et se base sur la conviction que la lutte pour créer les conditions du plein exercice des droits de l'homme passe par la réconciliation et de la paix.

Le Ministre a mis l'accent sur le fait que la problématique des droits de l'homme en Colombie s'inscrit dans le cadre du conflit armé. À cet égard, il a évoqué les efforts en matière de protection, promotion et défense des droits de l'homme entrepris parallèlement à la recherche de la réconciliation. En matière de lutte contre les groupes armés, principaux responsables des violations des droits de l'homme, le Ministre a mis l'accent sur la lutte déterminée du Gouvernement contre les groupes d'auto-défense et détaillé le plan d'action du Gouvernement dans ce sens. Il a en particulier évoqué la réforme légale engagée pour moderniser les forces militaires et punir ceux qui violent les droits de l'homme ou collaborent avec ces groupes. Il a rejeté les accusations quant à une quelconque responsabilité de l'État dans les activités de ces groupes. Il a en outre sollicité l'appui de la communauté internationale pour faire face aux demandes de protection qui augmentent du fait du niveau de violence élevé, en particulier pour les personnes déplacées. Il a en outre demandé que ne soit pas oubliée la responsabilité des guérrillas dans l'explosion de la violence qui non seulement violent le droit humanitaire international mais provoque une fracture dans la société civile et sa polarisation.


Déclaration sur l'organisation des travaux

M. JEAN-MARIE NOIRFALISSE (Belgique), s'exprimant au nom de l'Union européenne, a exprimé la profonde reconnaissance de l'Union européenne pour l'excellent travail de la Haut-Commissaire grâce à laquelle la promotion et la protection des droits de l'homme a eu une bien plus grande visibilité et le Haut-Commissariat une plus grande importance. Il a estimé que ses efforts ont contribué à mettre la question des droits de l'homme au centre des préoccupations de la communauté internationale et à intégrer cette dimension dans toutes les activités du système des Nations Unies. Il a rendu hommage à l'intégrité personnelle et professionnelle avec laquelle la Haut-Commissaire a rempli son difficile mandat. Il a mis l'accent sur le nombre de sessions spéciales qui se sont tenues durant son mandat, que ce soit à propos du Timor oriental, du Kosovo ou du Moyen-Orient et l'impartialité dont la Haut-Commissaire a fait preuve s'agissant de questions politiquement sensibles. Il a également noté que des progrès substantiels ont été réalisés sur l'ensemble des droits de l'homme durant son mandat et que les programmes du Haut-Commissariat pour l'assistance technique et les services de conseils ont grandement augmenté. Se félicitant du nombre croissant de réponses aux appels de fond, M. Noirfalisse a toutefois déploré que nombre d'activités du Haut-Commissariat ne sont toujours pas financées sur le budget ordinaire de l'ONU.


Déclarations au titre du racisme et de toutes les formes de discriminations

M. JOAQUIN MBOMIO (Nord-Sud 21) a souligné l'importance de la tenue de la Conférence mondiale contre le racisme. Pour cette conférence, il faudra écouter les africains, longtemps ignorés et victimes de l'asservissement colonial qui demandent réparation pour des siècles de traite. Le représentant a espéré que la traite, l'holocauste noir, soit enfin reconnu comme crime contre l'humanité par la communauté internationale. Est-il besoin de rappeler les souffrances d'autres minorités amérindiennes, tziganes, et des nombreuses populations autochtones. La Conférence mondiale contre le racisme doit être un moment solennel de vérité, un acte de reconnaissance du phénomène du racisme comme principal vecteur des fléaux de nos sociétés modernes. Il y a, certes, les différents aspects du racisme : discrimination raciale, religieuse, xénophobe, mais il y a aussi les formes contemporaines du racisme beaucoup plus pernicieuses que les formes traditionnelles. Elles sont essentiellement de nature économique, sociale et culturelle et transforment les citoyens en outil de consommation dont le seul critère de sélection est la demande solvable. La Conférence mondiale contre le racisme devrait être l'occasion d'aborder le problème historique du racisme en toute transparence, loin des pratiques sélectives qui caractérisent certaines grandes puissances. Le projet de Déclaration et de programme d'action présentés par le Secrétariat de la Conférence a marqué à cet égard un formidable recul par rapport aux propositions des différents groupes régionaux qui ont fait un travail de qualité avec notamment les déclarations de Santiago et de Dakar. Le combat contre le racisme est le seul chemin pour que l'humanité puisse se réconcilier avec elle-même.

M. J. J. KIRKYACHARIAN (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP) a proposé que l'un des thèmes majeurs de la Conférence soit consacré à un effort théorique visant à surmonter la difficulté liée au fait que le racisme contemporain présente une grande variété de phénomènes. Dans cet esprit, le MRAP a proposé de définir le racisme comme «l'effet global produit par l'intériorisation de l'inégalité structurelle». Une telle discussion est d'une grande portée pratique afin que l'antiracisme ne se cantonne pas à une lutte contre les effets. M. Kirkyacharian a estimé que la Conférence, pour réussir, doit aboutir à des décisions concrètes qui engagent réellement les États. De telles décisions doivent en particulier porter sur la répression pénale des actes racistes, la lutte contre la discrimination, la situation des travailleurs migrants ou l'inégalité du développement économique et social. Il faut également que les gouvernements mettent à disposition de la Conférence les ressources qui lui sont nécessaires, a-t-il conclu.

MME LILY LI (Parti radical transnational) a déclaré avoir été obligée d'étudier au Royaume-Uni car les universités chinoises sont fermées pour les membres du Falun Gong. En outre, la police locale exerce de fortes pressions de toutes sortes sur ses proches.

Dans une motion d'ordre, le représentant de la Chine a déclaré que l'orateur abordait des questions qui ne s'inscrivaient pas dans le point à l'examen.

Le Président a rappelé à l'organisation que le débat d'aujourd'hui était consacré à la question du racisme, soulignant que le témoignage de l'orateur pourrait être entendu lors de l'examen du point de l'ordre du jour correspondant.

MME M. S. RAJAKUMARI (Pax Romana) a estimé que les États doivent s'engager à éliminer les pratiques discriminatoires et gérer les divisions si la pauvreté doit être réduite. Il faut aller au-delà de la tolérance. La question la plus difficile à laquelle l'humanité est confrontée n'a pas été résolue par la science, c'est celle de la solidarité et de la vie en commun. Pax Romana est particulièrement préoccupée par la situation des jeunes, en particulier ceux qui appartiennent à des groupes désavantagés. Les jeunes ne devraient pas être considérés comme de simples objets mais comme acteurs engagés dans toutes les activités pour la lutte contre le racisme. Pax Romana a en outre exprimé sa préoccupation face à la discrimination basée sur la caste qui prévaut en Asie et affecte quelques 200 millions de personnes et le fait que nombre d'États membres n'ont pas ratifié la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination. Elle a recommandé que les jeunes participent activement à tous les stades de préparation de la Conférence mondiale contre le racisme et que cela se reflète dans les différents textes qui seront adoptés.

M. M. A. HASSAN (Institut international de la paix) a dénoncé le «génocide» perpétré en 1971 par le régime pakistanais envers les bengalais considérés comme une race inférieure par le Pakistan. L'oppression sauvage et la brutalité sans précédent sur un peuple innocent a causé la mort et des dommages physiques et psychologiques irréparables, a-t-il ajouté. Il a souhaité que cette réunion jettera la lumière sur la menace du racisme et de la discrimination et fera preuve de volonté et de détermination pour juger les criminels de guerre pakistanais afin d'en faire un exemple de justice.

M. KEITH BENNET (Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques) a souligné que la discrimination entre groupes et individus, sur la base de la couleur de la peau, de la religion ou de la race faisait partie intégrante des politiques menées par plusieurs États. Les origines du fléau de la discrimination fondée sur la religion ou la race se trouvent dans les pays a prédominance blanche. Les croisades, la colonisation et l'esclavage sont les précurseurs des politiques de supériorité raciale des nazis et des néo-nazis, ainsi que des politiques migratoires discriminatoires des pays modernes, développés, à prédominance blanche. M. Bennet a estimé que la Conférence mondiale doit sonner l'alarme et avertir que, si l'apartheid a vécu, il reste des milliers d'autres combats à mener contre la discrimination. Le représentant a par ailleurs mis en évidence le fait que l'internet est utilisé pour inciter à la haine raciale.

M. BOJJA THARAKAM (Robert Kennedy Memorial) a évoqué la situation des castes ainsi que la question de «l'ascendance». La Conférence mondiale contre le racisme devrait aborder la question de la discrimination fondée sur l'ascendance ou l'appartenance à une caste. Les castes sont victimes de violations graves des droits de l´homme et la communauté internationale a le devoir de se pencher sur cette question. Le Robert Kennedy Memorial engage les Gouvernements à appuyer le Programme d'action qui sera adopté à l'issue de la Conférence mondiale contre le racisme, qui proposera notamment des mesures concrètes permettant de lutter contre la discrimination des castes.

MME DIANNE LUPING (Cairo Institute for Human Rights Studies) a affirmé que le peuple Palestinien souffre des pratiques discriminatoires poursuivies par les dirigeants militaires et politiques de l'État d'Israël. Tout d'abord, à l'intérieur d'Israël, pour maintenir une domination des Israéliens; ensuite, pour en assurer la domination sur les territoires occupés; enfin pour assurer la ségrégation à l'intérieur de l'État d'Israël et dans les territoires occupés. Ces politiques discriminatoires sont très proches de celles appliques par l'Afrique du Sud de l'apartheid, a estimé Mme Luping.


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