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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DU MEXIQUE

16 Juillet 1999


MATIN


HR/CT/99/13
16 juillet 1999





Les membres du Comité posent des questions sur le blocage des
négociations avec l'Armée zapatiste de libération




Le Comité des droits de l'homme a entamé, ce matin, l'examen du quatrième rapport périodique présenté par le Mexique sur l'application, par ce pays, des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

La délégation du Mexique est composée de M.Miguel Ángel González Félix, Chef de la délégation et conseiller juridique au Ministre des affaires étrangères; M.Alan Arias Marín, coordonnateur-adjoint pour les négociations et le dialogue au Chiapas; ainsi que de représentants des Ministères de l'intérieur et des affaires étrangères et de l'Institut national des affaires autochtones.

La délégation mexicaine a notamment attiré l'attention sur les progrès réalisés dans le domaine de la prévention de la torture. Elle a aussi fourni des renseignements sur la réforme constitutionnelle qui a notamment introduit des dispositions reconnaissant le caractère pluriculturel du Mexique et la prise en compte des spécificités culturelles et sociales inhérentes à la grande diversité des populations autochtones qui vivent au Mexique.

Le Comité poursuivra, cet après-midi à 15 heures, l'examen du quatrième rapport périodique du Mexique.

Présentation du rapport du Mexique

M.Miguel Ángel González Félix, chef de la délégation du Mexique, a indiqué que son pays a mis en oeuvre d'importantes réformes constitutionnelles visant, en particulier, à garantir l'indépendance de la justice. Il a annoncé la création d'un conseil fédéral de la magistrature et insisté sur toute une série de mesures visant à promouvoir la professionnalisation de la justice. Toujours dans le domaine de la justice, il a affirmé que la loi fédérale de défense publique, en instituant un système d'assistance judiciaire, a permis d'assurer 154492 cas de défense.

Par ailleurs, la lutte contre la torture, qui a fait l'objet d'une attention particulière de la part de la Commission nationale des droits de l'homme, a connu d'importants progrès, a affirmé le représentant mexicain. Il a précisé que le nombre de plaintes est en baisse constante depuis 1991. Il a également indiqué que 28 condamnations pour crime de torture ont été prononcées par la justice sur la base d'une loi fédérale. Tout en reconnaissant qu'il y a encore des cas de torture au Mexique, le gouvernement est déterminé à combattre sans relâche cette pratique.

Le représentant a ensuite affirmé que son gouvernement souhaite réformer la constitution afin, notamment, de conférer à la Commission nationale des droits de l'homme une pleine autonomie. Ce projet a été approuvé par le Congrès de l'Union, a-t-il précisé. Le travail de la Commission a d'ores et déjà été renforcé et élargi, ce qui a permis de renforcer sa crédibilité. En 1998, la Commission a examiné 8330 dossiers de plaintes et 7324 cas ont pu être résolus par le biais de la conciliation. La Commission contribue activement à la promotion d'une culture des droits de l'homme au Mexique en mettant en oeuvre un programme de formation des fonctionnaires du service public. Le représentant a d'autre part souligné la volonté de son Gouvernement de jeter les bases d'une démocratie solide au Mexique. Il a insisté sur la mise en oeuvre de mesures visant à renforcer le pluralisme et la transparence des procédures électorales. Le peuple mexicain peut désormais faire un choix parmi une vaste gamme d'idées politiques.

M.González Félix a par ailleurs souligné la mise en place de plus de 70instances spécialisées en matière de droits des populations autochtones. Il a précisé que l'Institut national autochtone met en oeuvre un programme destiné à favoriser l'accès des autochtones à la justice.

S'agissant de la situation particulière du Chiapas, le représentant mexicain a souligné que, ces quatre dernières années, une stratégie de développement économique, social et politique est mise en oeuvre par le Gouvernement fédéral. Un effort sans précédent est réalisé pour résoudre les problèmes de pauvreté dans cette région. Les autorités, tant fédérales que locales, se sont efforcées de sanctionner les auteurs de violations des droits de l'homme dans la région. Il a rappelé que les accords de San Andrés ont été suivis d'une réforme constitutionnelle prévoyant la reconnaissance des droits des populations autochtones.

Le chef de la délégation mexicaine a indiqué que le Gouvernement mexicain est résolu a poursuivre une politique de plein respect des droits de l'homme en mettant en oeuvre les instruments internationaux ratifiés en la matière.

Le quatrième rapport périodique du Mexique (CCPR/C/123/Add.1) daté du 30 juin 1997, indique que des commissions des droits de l'homme ont été mises en place dans tous les États de la République. Le rapport indique que, de 1992 à 1996, la Commission nationale des droits de l'homme s'est employée activement à faire connaître aux autorités les droits consacrés dans le Pacte et les moyens de les faire valoir.

En ce qui concerne l'égalité entre les hommes et les femmes, le rapport souligne que le congrès de l'État a approuvé une loi visant à ce que les partis politiques s'efforcent de présenter un nombre égal de candidats de chaque sexe. De nouvelles mesures ont été adoptées afin de protéger la santé des femmes au travail. En ce qui concerne la participation des femmes à la vie politique, le rapport reconnaît que six femmes seulement ont atteint le rang de Ministre d'État et qu'elles n'occupent que 13,3% des sièges à l'Assemblée. Le rapport précise par ailleurs que la Commission nationale des droits de l'homme a élaboré un projet de réforme de l'article 22 de la constitution afin d'interdire la peine de mort. Ce projet a été remis aux commissions des droits de l'homme de l'Assemblée.

S'agissant de l'article 27 du Pacte, relatif aux groupes minoritaires et autochtones vivant sur le territoire national, des propositions ont été faites par la Commission nationale des droits de l'homme sur le plan juridique et politique. Celles-ci envisagent la possibilité de reconnaître la capacité des autorités autochtones de régler par elle mêmes leurs conflits d'intérêts dans tous les domaines. En matière de représentation politique, le rapport note qu'il est incontestable que les populations autochtones devraient avoir accès aux conseils municipaux, aux congrès des États et au congrès de l'Union. Par ailleurs, le rapport note que des initiatives positives, quoiqu'encore modestes, ont été prises pour que les autochtones puissent exercer leurs droits notamment dans les procédures pénales. Le rapport précise que le gouvernement mexicain, en liaison avec la population civile, s'efforce de combler le retard accumulé par les populations autochtones.

Examen du rapport du Mexique

À propos de la mise en oeuvre des accords de San Andrés, la délégation mexicaine a affirmé que ces accords ne sont pas définitifs. Il s'agit d'accords partiels qui ont pour but de trancher les questions relatives au désarmement des groupes civils, aux droits et à la reconnaissance de la culture autochtone, à la participation démocratique, au bien-être de la population et à la condition de la femme. Les accords de San Andrés, qui ont été établis dans le cadre de la constitution mexicaine et dans le souci de préserver l'unité de la nation, ne sont donc pas un accord de paix final. La délégation a indiqué que la négociation avec l'Armée zapatiste de libération est actuellement suspendue et qu'il n'y a pas d'entente sur les prolongements constitutionnels de l'accord. Il a précisé que si les accords de San Andrés ont d'ores et déjà permis la reconnaissance du caractère pluriculturel de la nation mexicaine, il y a un point de désaccord qui porte principalement sur l'interprétation du droit à l'autodétermination.

En ce qui concerne la sécurité et la liberté de la personne, un membre de la délégation mexicaine a affirmé qu'au Chiapas, les principaux problèmes de violence constatés actuellement ne viennent pas de l'affrontement entre l'Armée zapatiste de libération et l'armée mexicaine, car la dynamique de l'affrontement a évolué vers la négociation. Ces problèmes de violence découlent d'affrontements de groupes civils armés et ont principalement une origine intra-communautaire. Elles proviennent ainsi de tensions entre membres de communautés. Le représentant a aussi indiqué que le gouvernement met en oeuvre des initiatives pour le désarmement, qui sont malheureusement ralenties par la suspension des négociations avec l'Armée zapatiste de libération.

Une déléguée mexicaine a indiqué qu'une loi récemment adoptée limite les pouvoirs de police en ce qui concerne les enquêtes. Pour ce qui est de la détention provisoire, un autre représentant a indiqué que les prisons mexicaines comprennent à l'heure actuelle une population de 139707 détenus, parmi laquelle on dénombre 49189 personnes en détention provisoire. La durée moyenne de séjour en préventive est de 14 mois, a précisé le représentant, ce qui correspond à la durée des procès. Un représentant de la délégation mexicaine a indiqué que le code civil mexicain permet à toute personne détenue ou condamnée par erreur de demander une indemnisation. Il a indiqué la Commission nationale des droits de l'homme peut enquêter, en cas de plainte, sur des cas de détention abusives. Finalement, il a été indiqué qu'en 1999, le gouvernement a prévu de consacrer un budget de 700 millions de pesos à l'amélioration des institutions pénitentiaires existantes

Les membres du Comité des droits de l'homme ont fait remarquer que le rapport présenté par le Mexique est davantage une compilation de textes juridiques qu'un compte rendu de la situation des droits de l'homme dans le pays. Ainsi, un membre du Comité a souligné que les problèmes essentiels du Mexique en matière de droits de l'homme ne relèvent pas, de façon générale, de la législation en vigueur, mais de son application.

Nombre d'experts ont évoqué les problèmes de la torture et des disparitions forcées. Tout en notant que la commission nationale des droits de l'homme intervient dans ces domaines, ils se sont inquiétés de la portée de son pouvoir de sanction. Les recommandations faites par la commission sont-elles véritablement appliquées par les autorités impliquées? Partant, un expert a souligné que c'est au pouvoir exécutif qu'il revient de prendre les mesures nécessaires pour que de telles pratiques fassent l'objet d'incriminations et de véritables sanctions.

Un autre membre du Comité a demandé si la question de la peine de mort ferait l'objet d'un débat public au Mexique. La ratification du Protocole facultatif se rapportant au Pacte et portant sur l'abolition de la peine de mort est-elle envisagée, a-t-il été demandé ?

Par ailleurs les membres ont souhaité obtenir de plus amples renseignements sur les blocages de la négociation avec l'Armée zapatiste de libération. Certains membres ont par ailleurs relevé qu'aux moments les plus forts de la crise du Chiapas, l'état d'urgence n'a pas été déclaré conformément au Pacte, privant par la même occasion le Comité d'exercer son contrôle. Enfin, la question de la garde à vue et de l'utilisation par un tribunal d'aveux extorqué sous la torture, a été soulevée.

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