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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA JAMAHIRIYA ARABE LIBYENNE

05 Mai 1999


MATIN
HR/CAT/99/14
5 mai 1999



Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du troisième rapport périodique présenté par la Jamahiriya arabe libyenne conformément aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il présentera ses observations finales et ses recommandations concernant ce rapport le lundi 10 mai.

La délégation de la Jamahiriya arabe libyenne, dirigée par M.Najib Tleba, Chef du Département des droits de l'homme du Comité populaire général pour la justice, est également composée d'un membre de la Mission permanente de la Jamahiriya arabe libyenne auprès de l'Office des NationsUnies à Genève. M.Tleba a affirmé que la torture est interdite dans son pays et que les membres des forces de sécurité sont pleinement informés de leurs obligations à cet égard pendant leur formation. Les violations qui se produisent en dépit des mesures législatives et sociales prises par les autorités, sont contraires aux lois et coutumes libyennes de même qu'à la tradition islamique, a-t-il insisté.

M.Bent Sørensen, membre du Comité et rapporteur chargé de l'examen du rapport de la Jamahiriya arabe libyenne, prenant note des mesures d'interdiction de la torture sur un plan juridique, a demandé quelles mesures concrètes ont été prises afin de rendre cette interdiction effective. Il a souhaité que la délégation fournisse des données chiffrées sur les cas de torture enregistrés lors de la mise au secret. M.Yu Mengjia, corapporteur, a mis en évidence le fait que le Comité continue de recevoir des plaintes concernant des actes de torture et autres actes illicites en Libye.

D'autres experts du Comité ont voulu savoir si les peines corporelles telles que la flagellation et l'amputation sont encore appliquées et, le cas échéant, avec quelle fréquence. Ils ont souhaité connaître le nombre de peines de mort prononcées au cours des dernières années.

Le Comité contre la torture se réunira à nouveau cet après-midi, à 15heures, pour présenter ses observations finales et conclusions concernant le rapport de la Bulgarie. Il entendra également les réponses de la délégation du Luxembourg aux questions posées par les experts mardi 4 mai.


Présentation du rapport de la Jamahiriya arabe libyenne

Présentant le rapport de la Jamahiriya arabe libyenne, M.Najib Tleba, Chef du Département des droits de l'homme du Comité populaire général pour la justice, a attiré l'attention du Comité sur la participation du peuple libyen au fonctionnement de l'État, qu'il a jugée importante. «La population libyenne est maîtresse d'elle-même et n'estime pas nécessaire de s'exprimer par le biais de partis politiques», a-t-il dit.

M.Tleba a déclaré que le barreau est indépendant en Libye. Depuis 1952, des avocats exercent leur profession à titre privé. Le barreau libyen est, notamment, de la Fédération arabe des juristes et de la Fédération internationale des juristes.

M.Tleba a déclaré que la législation libyenne interdit la torture et considère que tout aveu obtenu de cette façon est irrecevable. Les détenus ont le droit, en toutes circonstances, d'être assisté de leur avocat. Les arrestations s'effectuent conformément aux dispositions de la Convention. Le personnel de sécurité est pleinement informé, au cours de sa formation, de ses obligations en matière de respect des droits de l'homme. Il n'y a pas de lieux secrets de détention en Libye. Les autorités publiques n'ont pas le droit de s'ingérer dans une procédure judiciaire ne relevant pas de leur compétence.

Le représentant a insisté sur le fait que les violations qui se produisent en dépit de ces mesures sont contraires aux lois et aux coutumes de son pays et à la tradition islamique.

Le troisième rapport périodique de la Jamahiriya arabe libyenne (CAT/C/44/Add.3) précise que lorsque les autorités compétentes ont ratifié un traité international, celui-ci acquiert force obligatoire et prime sur le droit interne. En cas d'incompatibilité ou de lacune du droit interne, les dispositions de la Convention l'emportent. Une personne a le droit d'invoquer devant les tribunaux les droits énoncés dans la Convention et de porter plainte directement si elle a été soumise à la torture ou à un traitement dégradant, ou même si elle a été menacée de l'être. Les tribunaux saisis d'une plainte pour torture sont tenus d'ouvrir immédiatement une enquête. Les requérants bénéficient de la gratuité de la procédure. Dans plusieurs cas de violences ou de tortures exercées par des policiers, les tribunaux ont prononcé des peines de prison ferme.

Par ailleurs, la législation libyenne proscrit l'expulsion, l'extradition et le refoulement s'il existe un risque que la personne concernée soit victime de violations de ses droits de l'homme. Cette législation interdit également tout acte de torture aux agents de l'administration publique et ne distingue pas entre le fait de commettre un tel acte à titre personnel et l'ordre de torturer donné à un subordonné. Les peines encourues vont d'une amende de 250 dinars à plusieurs années de prison ferme, selon le statut du responsable. Pour ce qui est des demandes d'extradition, le code pénal précise notamment qu'elles ne doivent pas concerner un citoyen libyen.

Examen du rapport de la Jamahiriya arabe libyenne

M.Bent Sørensen, rapporteur chargé de l'examen du rapport de la Jamahiriya arabe libyenne, s'est félicité que le rapport libyen ait été présenté dans les temps impartis. Il a rappelé qu'en 1994, le Comité avait exprimé deux préoccupations concernant la procédure de mise au secret dans des conditions pouvant entraîner des violations de la Convention et concernant le traitement des organisations non gouvernementales. Le Comité avait alors recommandé, entre autres mesures, que tout détenu puisse avoir accès à un avocat. Il avait également suggéré que les autorités adoptent une attitude claire de condamnation de la torture afin que cette pratique soit non seulement prévenue mais fasse aussi l'objet de poursuites.

La mise au secret, en vertu de la loi libyenne, est possible pendant des durées allant jusqu'à 7 jours au cours desquelles le détenu est toujours autorisé à contacter un avocat, a noté M. Sørensen. Toutefois l'expert a observé que plusieurs témoignages semblent indiquer que ce règlement n'est pas fidèlement appliqué. Des personnes auraient été détenues pendant des périodes se comptant en mois voire en années. D'autres n'auraient pas eu accès à un avocat. D'autres encore auraient subi des actes de torture durant cette mise au secret. À ce propos, M. Sørensen a souhaité que la délégation fournisse au Comité des données chiffrées sur les cas de torture enregistrés lors de la mise au secret. L'expert a demandé quelles mesures concrètes ont été prises afin que cette interdiction soit effective.

L'expert a demandé si des ressortissants de pays voisins résidant en Libye sans être des réfugiés, peuvent être renvoyés dans leur pays d'origine lorsqu'ils courent le risque d'y être arrêtés et torturés. Concernant les peines de prison prévues pour sanctionner des actes de torture, l'expert estime q'elles devraient être renforcées. Au sujet du principe de juridiction universelle, il a demandé si les dispositions de la Convention seront effectivement invoquées concernant des ressortissants étrangers ayant commis des crimes hors du territoire libyen.

M.Yu Mengjia, corapporteur chargé de l'examen du rapport de la Jamahiriya arabe libyenne, s'est félicité que le rapport cette fois traite de la formation de manière plus approfondie. Il a estimé positif que la Jamahiriya arabe libyenne s'attache à promouvoir une culture de respect des droits de l'homme est un facteur positif. Chaque État partie ayant obligation d'exercer un contrôle systématique des méthodes d'interrogatoire afin de prévenir les cas de torture, l'expert a demandé si la Libye a pris des mesures dans ce sens. Il a souligné que le Comité continue de recevoir des plaintes concernant des actes de torture et autres actes illicites et a souhaité que la délégation libyenne fournisse des éclaircissements au sujet des ces plaintes. Il a demandé si des enquêtes avaient été menées et si leurs résultats avaient été publiés.

Notant que selon le rapport, la sanction vise «la réforme sur le plan social et la protection des valeurs humaines et des intérêts de la société», le corapporteur a demandé quels sont les résultats de cette méthode et quel est le taux de récidive dans les pénitenciers libyens.

Au cours du débat, un expert a observé que le rapport n'indique pas quelles mesures ont été prises pour faire suite aux recommandations formulées par le Comité. À propos de l'indépendance du système judiciaire, il a voulu savoir pour quelle raison le comité chargé de nommer les juges compte un ministre, représentant de l'exécutif, parmi ses membres. Il a également voulu savoir quel est le fondement juridique de l'extradition des ressortissants libyens dans le cadre de l'affaire de Lockerbie, étant donné que la loi libyenne interdit l'extradition de citoyens libyens. S'étonnant qu'une personne reconnue responsable d'actes de torture ait été condamnée seulement à une amende, l'expert a souligné qu'il faut assurer la proportionnalité entre les peines et les crimes.

Un autre expert a demandé des précisions sur la durée de la garde à vue et a voulu savoir à partir de quel stade de la procédure judiciaire la détention remplace la garde à vue. Certains experts ont voulu savoir combien de fois la peine capitale a été appliquée au cours des dernières années. Ils ont aussi demandé si la flagellation et l'amputation sont encore appliquées et avec quelle fréquence.

Un expert a demandé s'il est exact qu'il n'existe aucune organisation non gouvernementale indépendante en Libye. Il a, à cet égard, souhaité savoir si des mécanismes existent pour exercer un contrôle permettant de s'assurer du respect des instruments internationaux tels que la Convention contre la torture. Il a demandé la position du Gouvernement libyen sur les allégations selon lesquelles la torture est pratiquée et en particulier sur les cas spécifiques relevés par Amnesty International. Il a notamment relevé que des personnes seraient détenues pendant de longues périodes sans être inculpées et jugées.

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