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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE DES RAPPORTS SUR LES EXÉCUTIONS EXTRAJUDICIAIRES ET SUR LES VIOLENCES CONTRE LES FEMMES

03 Juin 2009

Conseil des droits de l'homme
APRES-MIDI 2 juin 2009

Le Conseil des droits de l'homme a examiné, cet après-midi, des rapports présentés par le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, M. Philip Alston, et par la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, Mme Yakin Ertürk. Il a ensuite engagé un débat interactif avec les deux Rapporteurs spéciaux.

Présentant son rapport, M. Alston a attiré l'attention sur trois thèmes abordés dans son rapport annuel, notamment les représailles contre les personnes qui coopèrent avec les procédures spéciales, l'exécution de délinquants juvéniles, comme il se pratique de manière régulière en République islamique d'Iran, et l'exécution de prétendues sorcières. Le Rapporteur spécial a évoqué aussi sa visite aux États-Unis, où le problème réside dans l'application de la peine de mort dans des conditions ne respectant pas les procédures pénales. Au Kenya, les difficultés tiennent notamment aux exécutions extrajudiciaires commises avec la complicité de certains responsables; l'impunité des auteurs de ces exécutions continuera si les enquêtes sur les violences commises par la police ne sont pas confiées à des intervenants extérieurs. L'Afghanistan, le Brésil, le Kenya et les États-Unis ont fait des déclarations à titre de pays concernés par le rapport de M. Alston.

Dans le cadre du débat interactif, certaines délégations ont déclaré partager la préoccupation du Rapporteur spécial concernant les exécutions de délinquants mineurs en Iran et se sont interrogées sur les moyens à mettre en œuvre face à cette situation. D'autres délégations ont souligné que si les États doivent aider les procédures spéciales dans l'exercice de leur mandat, il convient également d'accorder toute l'attention requise à la véracité des informations, étant donné qu'elle se répercute sur la crédibilité même des titulaires de mandats.

Mme Ertürk a, pour sa part, souligné que les droits économiques et sociaux sont essentiels s'agissant de la capacité des femmes à jouir de la totalité de leurs droits fondamentaux, ajoutant que cette approche est d'autant plus pertinente dans le contexte de la crise financière et économique que traverse actuellement le monde. Aussi a-t-elle lancé un appel en faveur de l'adoption d'une perspective intégrée combinant les obligations énoncées dans chacun des deux pactes internationaux relatifs, l'un, aux droits civils et politiques et, l'autre, aux droits économiques, sociaux et culturels. La violence contre les femmes est devenue plus visible dans le monde, a également observé Mme Ertürk. Elle a ajouté que la proposition visant la création d'un poste de Secrétaire général adjoint chargé de surveiller les initiatives en faveur de l'égalité entre les sexes à l'échelle du système a pris un caractère d'urgence accrue. L'Afghanistan, le Brésil, les États-Unis, la République de Moldova, l'Arabie saoudite et le Tadjikistan ont fait des déclarations à titre de pays concernés.

D'autres délégations ont estimé que pour lutter contre la violence à l'égard des femmes, il convenait d'agir sur deux fronts, d'une part dans la lutte contre la violence elle-même, d'autre part en favorisant l'autonomisation, l'égalité des sexes et l'avancement de la femme en général, notamment par la réalisation de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Des délégations ont rappelé l'importance de la résolution 1325 du Conseil de sécurité, sur le thème «Femmes, paix et sécurité»; renforcer la situation des femmes dans les situations post-conflit est en effet essentiel pour la reconstruction de sociétés qui ont subi une crise humanitaire, a-t-il été souligné. S'agissant du bilan tiré par la Rapporteuse spéciale, dont le mandat s'achève à la présente session, une délégation a exprimé son opposition avec ce qui apparaît comme un appel à une intervention internationale dans les affaires intérieures des États sur des sujets tels que l'orientation sexuelle ou l'avortement.

De nombreux États ont participé au débat interactif avec les Rapporteurs spéciaux: République tchèque (au nom de l'Union européenne), Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Slovénie, Djibouti, Burkina Faso, Autriche, Australie, Suède, Islande, République de Corée, Thaïlande, Finlande, Émirats arabes unis (au nom du groupe arabe), Sri Lanka, Indonésie, Canada, Nouvelle-Zélande, Norvège, Italie, Belgique, États-Unis, Turquie, Danemark, Cuba, Fédération de Russie, Égypte, Inde, Brésil, Pays-Bas, Philippines, Suisse, Japon, Algérie, Sénégal, République islamique d'Iran, Nigéria, Palestine, Saint-Siège, Royaume-Uni, Maldives et Colombie.

Les Commissions nationales des droits de l'homme du Kenya, des Philippines et d'Afghanistan ont également participé au débat, ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes: Conectas Direitos Humanos; Centro de Derechos Humanos Miguel Agustín Pro Juárez (au nom également de l'Organisation mondiale contre la torture - OMCT; et Asia Pacific Forum on Women - Law and Development); Société pour les peuples en danger; Commonwealth Human Rights Initiative; Union des juristes arabes; Fédération générale des femmes iraquiennes; Commission arabe des droits de l'homme; Asian Legal Resource Centre; International Human Rights Association of American Minorities (au nom également du Congrès du monde islamique); et Amnesty International.


Le Conseil des droits de l'homme poursuiva ses travaux demain, à partir de 9 heures, pour sa journée annuelle de débat consacré aux droits des femmes, après avoir entendu la conclusion de Mme Yakin Ertürk, qu présentait cet après-midi son rapport. En fin de journée, le Conseil sera saisi d'une mise à jour des activités du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme par Mme Navi Pillay, Haut Commissaire, avec laquelle il tiendra un dialogue. Le Ministre de la justice du Kenya s'exprimera devant le Conseil à la reprise de séance.


Examen des rapports sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires et la violence contre les femmes

Présentation des rapports

Les Rapporteurs spéciaux sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences ont présenté leurs rapports au Conseil des droits de l'homme.

M. PHILIP ALSTON, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a attiré l'attention sur trois thèmes abordés dans son rapport annuel, notamment les représailles contre les personnes qui coopèrent avec les procédures spéciales, l'exécution de délinquants juvéniles, qui se pratique notamment régulièrement en République islamique d'Iran, et les cas d'exécutions de sorcières.

Concernant la visite qu'il a effectuée aux États-Unis, le Rapporteur spécial a indiqué que le problème réside dans l'application de la peine de mort dans des conditions ne respectant pas les procédures pénales. Le Congrès de ce pays devrait adopter une loi autorisant l'examen de tous les cas en suspens au regard des principes de l'habeas corpus. Le système de justice militaire devrait pour sa part fournir davantage d'informations sur ses procédures. Par ailleurs, le Gouvernement des États-Unis devrait indiquer sur quelles bases juridiques il engage des opérations militaires à l'étranger occasionnant des morts ciblées et exposer les précautions prises pour réduire les pertes civiles collatérales. Ce Gouvernement n'a pas puni comme il aurait dû les responsables de ces morts, et a notamment omis de sanctionner les officiers responsables.

Au Kenya, le Rapporteur spécial a constaté que la mise en place de la Commission Waki d'enquête sur les violences postélectorales a donné de bons résultats. Reste que plus de mille personnes ont trouvé la mort dans ces violences, qui n'ont entraîné aucune sanction à ce jour, plus de 18 mois après les événements. D'autres problèmes au Kenya tiennent aux exécutions extrajudiciaires commises par une unité de la police, avec la complicité du Commissaire général. En outre, plus de 200 personnes sont mortes ou disparues du fait d'activités policières illégales dans la région du Mont Elgon. Par ailleurs, de nombreux militants des droits de l'homme ont été victimes de violences. Le Kenya connaît donc d'importants problèmes d'exécutions extrajudiciaires, une situation bien connue dans le pays même et imputée à l'attitude de la police, dont le chef s'en est personnellement pris au Rapporteur spécial et à son rapport, sans toutefois apporter de réponses aux interrogations contenues dans ce document. L'impunité des auteurs de ces exécutions continuera si les enquêtes sur les violences commises par la police ne sont pas confiées à des intervenants extérieurs. Le Rapporteur spécial recommande à cet égard dans son rapport que le directeur de la police kényane présente sa démission. Le Rapporteur spécial a observé que plusieurs membres du Gouvernement kenyan se sont dits d'accord avec les observations du rapport. La police du Kenya doit enfin se doter d'une véritable stratégie de lutte contre les activités de bandes armées criminelles, et ne plus avoir recours à des exécutions extrajudiciaires.

En ce qui concerne l'Afghanistan, le Rapporteur spécial a indiqué avoir tiré deux leçons de sa visite dans ce pays: des enquêtes indépendantes et crédibles doivent être menées sur toutes les morts évitables de civils et il convient d'user d'une prudence extrême dans la planification des bombardements de villages, afin d'éviter les morts de civils. M. Alston a enfin fait valoir que son mandat n'est pas l'un des plus simples du Conseil des droits de l'homme. Il passe par l'établissement d'un dialogue constructif avec les gouvernements. Le Rapporteur spécial présente également des rapports sur les missions qu'i la effectuées au Brésil et en République centrafricaine.

Le rapport sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires (A/HRC/11/2, à paraître en français) examine en détail quatre points d'importance particulière: les représailles à l'encontre des personnes aidant le Rapporteur spécial dans son travail; le respect de l'interdiction de l'exécution de mineurs délinquants; le meurtre de «sorcières»; et l'utilisation de la force mortelle dans le cadre du maintien de l'ordre public. Concernant le premier point, le Rapporteur spécial remarque que l'intimidation des témoins demeure l'un des moyens les plus efficaces, pour les auteurs d'exécutions extrajudiciaires et ceux qui tolèrent de telles pratiques, d'éviter d'être tenus pour responsables. Dans le contexte national, le premier devoir des enquêteurs est de prendre des mesures pour éviter de compromettre la sécurité des témoins. Dans la préparation des visites de pays, un effort considérable est fait pour évaluer la menace potentielle pour d'éventuels témoins. Cet effort implique le Rapporteur spécial, les fonctionnaires du Haut-Commissariat, les institutions nationales des droits de l'homme et les organisations de la société civile en contact avec des témoins potentiels. Selon le niveau de menace, les mesures de précaution concernant les lieux et les circonstances dans lesquelles le Rapporteur spécial rencontre les témoins sont décidées. La mise en œuvre effective de ces mesures (par exemple, la sélection des lieux de réunion, les modalités de voyage des témoins) est essentiellement de la responsabilité de l'Organisation des Nations Unies. Le Rapporteur spécial a, toutefois, la responsabilité morale de ne pas soumettre des témoins à des risques injustifiés. Mais, au bout du compte, il y aura toujours des situations dans lesquelles les gouvernements ne répondent pas de façon appropriée et où les représailles continuent. Dans de telles situations, il est essentiel que le Conseil des droits de l'homme lui-même dispose d'un mécanisme lui permettant d'obtenir des explications de la part des gouvernements concernés et, le cas échéant, d'alerter l'opinion publique si la réponse est insuffisante. Alors que le Secrétaire général et d'autres acteurs ont un rôle important à cet égard, il est finalement de la responsabilité du Conseil d'agir par le biais de ses procédures spéciales, qui sont «ses yeux et ses oreilles», dit-on souvent.

Le rapport sur la mission au Brésil (A/HRC/11/2/Add.2, en anglais) effectuée en novembre 2007 par le Rapporteur spécial, rappelle que ce pays a l'un des taux d'homicide les plus élevés au monde, avec plus de 48 000 morts chaque année. Une grande partie de la population, effrayée par le taux de criminalité élevé et convaincue que le système de justice pénale est trop lent pour poursuivre les criminels, est favorable aux exécutions extrajudiciaires et à la justice privée, souligne le rapport. Il rappelle que les États ont l'obligation de protéger leurs citoyens en prévenant et en réprimant la criminalité, tout en étant tenus de respecter le droit à la vie de tous les citoyens, y compris de ceux qui sont soupçonnés d'actes criminels. Le Rapporteur spécial préconise ainsi une nouvelle approche et recommande l'adoption de réformes visant la police civile, la police militaire, le département des affaires internes de la police, les services médico-légaux, les médiateurs, le parquet, l'appareil judiciaire et l'administration pénitentiaire. Les réformes à entreprendre sont titanesques, souligne-t-il. Entre autres recommandations, le Rapporteur spécial souligne que les gouverneurs, les secrétaires de la sécurité publique et les chefs de la police devraient prendre l'initiative de clarifier qu'il y aura une tolérance zéro pour l'usage excessif de la force et l'exécution des criminels suspectés par la police. En outre, les policiers qui ne sont pas en service ne devraient en aucun cas être autorisés à travailler pour des entreprises de sécurité privée. Le Rapporteur spécial souligne également que la pratique actuelle consistant à qualifier les meurtres par des officiers de police d'«actes de résistance» fournit une carte blanche pour de tels meurtres et doit être supprimée. D'autre part, les policiers qui font l'objet d'une enquête pour des crimes constituant des exécutions extrajudiciaires devraient être retirés du service. Enfin, afin de protéger les prisonniers, le Rapporteur spécial recommande de prendre des mesures pour mettre un terme à la prise de contrôle des prisons par les gangs.

Le rapport de M. Alston concernant sa mission de février 2008 en République centrafricaine (A/HRC/11/2/Add.3) indique notamment que la lutte entre le Gouvernement et les rebelles s'affaiblissant, le banditisme est devenu la première menace pesant sur les civils de ce pays. Les forces de sécurité sont souvent peu disposées à protéger la population ou incapables de le faire. En outre, certains de leurs membres se sont rendus coupables de l'exécution de criminels présumés et ont commis des meurtres pour des motifs personnels ou liés à la corruption. Le meurtre de personnes détenues par la police ou placées dans des centres de détention est fréquent tout comme l'exécution de personnes pour «sorcellerie», qui est souvent perpétrée avec la participation directe des forces de sécurité. Des enquêtes et des poursuites pour meurtre sont rarement ouvertes en raison notamment d'une réticence à porter devant la justice les exactions commises par des agents de l'État. De l'avis du Rapporteur spécial, il ne devrait être accordé aucune impunité pour les violations qui ont été commises récemment dans le nord du pays. Le Gouvernement devrait enquêter de manière efficace sur les allégations d'atteintes aux droits de l'homme qui ont été formulées à l'égard de ses forces de sécurité et répondre de manière publique et détaillée à ces allégations en reconnaissant l'existence de ces atteintes et en faisant état des erreurs commises. Tous les membres des forces de sécurité impliqués dans des violations devraient être relevés de leurs fonctions et faire l'objet d'une enquête et de poursuites. Le Gouvernement centrafricain et la communauté internationale devraient continuer à soutenir les travaux importants de la Cour pénale internationale en République centrafricaine. Si le Gouvernement ne prend pas les mesures susmentionnées, le Procureur de la Cour pénale internationale devrait élargir le champ d'investigation de l'enquête en cours aux crimes présumés qui relèvent de la compétence de la Cour. Si la volonté d'engager des réformes exprimée par le Gouvernement donne lieu à un soutien ciblé de la communauté internationale visant à renforcer la capacité de la RCA de mettre en œuvre ces réformes, alors le pays pourra entreprendre de rompre la chaîne de violence et d'impunité qui se répète depuis des décennies.

Le rapport du Rapporteur spécial sur sa mission en Afghanistan (A/HRC/11/2/Add.4) relève qu'en 2008, quelque 2 118 civils ont été tués dans les combats, soit environ 40 % de plus que le nombre enregistré en 2007. Une grande partie de ces décès étaient évitables. Chacun des acteurs militaires du conflit rejette sur l'autre la responsabilité des pertes civiles. Mais en réalité la responsabilité de ces meurtres peut être attribuée autant aux Talibans qu'aux forces afghanes et aux forces militaires internationales et il incombe à chacune des parties de s'efforcer de réduire le nombre de civils victimes du conflit. S'agissant des innombrables meurtres perpétrés par les Talibans, il importe que leurs chefs donnent des instructions claires à tous les combattants, leur demandant de respecter les droits de l'homme et le droit humanitaire, notamment de mettre fin à l'usage de boucliers humains, aux assassinats de civils et au recours aux attentats-suicide, qui touchent de façon disproportionnée la population civile. Les défenseurs des droits de l'homme devraient instaurer un dialogue avec les chefs des combattants pour promouvoir ces objectifs. Cette procédure est couramment utilisée dans les conflits internes et les insurrections armées dans tous les pays du monde et l'Afghanistan ne devrait pas faire exception à la règle. En ce qui concerne les meurtres imputés aux forces afghanes et internationales, il est essentiel que ces dernières procèdent à une révision de leurs procédures en matière d'attaques aériennes afin d'améliorer la précision de leurs frappes et de veiller à ce que les pertes civiles occasionnées par leurs méthodes de combat ne soient pas disproportionnées par rapport aux résultats obtenus sur le plan militaire. Les forces internationales devraient aussi se soucier davantage d'améliorer la transparence et la rigueur de leurs opérations et de leurs enquêtes. Les estimations relatives aux pertes civiles imputables au conflit devraient être rendues publiques. En outre, les forces internationales devraient s'assurer que la population afghane puisse avoir aisément accès aux informations sur l'état d'avancement des enquêtes et des procédures pénales auxquelles ces meurtres ont donné lieu. Les opérations militaires conduites par des membres des services secrets étrangers, qui échappent à tout contrôle, ne devraient pas être autorisées.

Le rapport concernant la mission aux États-Unis (A/HRC/11/2/Add.5, à paraître en français) du Rapporteur spécial pointe trois domaines dans lesquels des améliorations sont nécessaires si le gouvernement des États-Unis entend accorder ses actes à son engagement pour les droits humains et la primauté du droit. Tout d'abord, le gouvernement doit veiller à ce que l'imposition de la peine de mort soit conforme aux exigences fondamentales d'une procédure régulière: les systèmes actuels risquent d'augmenter le risque que des innocents seront exécutés. Deuxièmement, le gouvernement doit être plus transparent dans l'application de la loi, et dans l'exécution des opérations militaires et de renseignement qui risquent d'entraîner des décès illégaux. Troisièmement, le Gouvernement doit surmonter l'actuelle absence de volonté politique et assumer la responsabilité politique des décès potentiellement illégaux survenus dans le cadre de ses opérations internationales. L'opportunité politique ne justifie pas qu'un État s'écarte de son obligation d'enquêter et de sanctionner les violations du droit à la vie.

Des nombreuses consultations qu'il a eues lors de sa mission au Kenya du 16 au 25 février 2009 (A/HRC/11/2/Add.6), le Rapporteur spécial conclut que la police kényane procède régulièrement à des exécutions sommaires et qu'un climat d'impunité prévaut à cet égard. Également troublante est l'existence, au sein de la police, d'«escadrons de la mort» accusés de l'élimination de dirigeants et de membres d'organisations criminelles. D'autre part, la commission d'enquête présidée par le juge Waki décrit en détail les circonstances et les causes de 1113 assassinats commis au cours de la période postélectorale. Il faut saluer la décision du Gouvernement d'avoir diligenté cette enquête indépendante. Cependant, les recommandations de la Commission Waki doivent encore être mise en œuvre. Les responsables des violences postélectorales, notamment les services de police responsables d'exécutions extrajudiciaires, sont toujours à l'abri des poursuites, près de 18 mois après les faits. S'il le souhaite, le Kenya peut réduire de façon significative la prévalence des homicides extrajudiciaires. Une grande partie des structures institutionnelles et juridiques nécessaires à l'exécution du processus de réforme est en place. La communauté internationale est désireuse de soutenir un véritable programme de réforme. Les citoyens du Kenya sont engagés politiquement et la société civile, professionnelle et sérieuse, contribue substantiellement à la protection des droits de l'homme par la surveillance des violations et la formulation de propositions de réformes. Les causes de nombreux meurtres sont connues et des mesures relativement simples pourraient être prises pour améliorer la situation. Le Gouvernement kenyan peut choisir de nier l'existence des problèmes, alors que les massacres et l'impunité se poursuivent: ce chemin mènera inexorablement au chaos et à la violence à grande échelle. Ou il peut choisir de reconnaître l'ampleur du problème et mettre en œuvre un programme de réforme visant à mettre fin aux exécutions extrajudiciaires, et faire passer ainsi le message que l'impunité ne sera plus tolérée.

Deux autres additifs concernent le suivi de mission effectuées au Guatemala (A/HRC/11/2/Add.7) et aux Philippines (A/HRC/11/2/Add.8)

MME YAKIN ERTÜRK, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, s'est dite particulièrement honorée de présenter ici au Conseil ses rapports finaux en tant que Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes. Elle a rappelé qu'elle exerce ce mandat depuis six ans et qu'au cours de ces six années, elle a effectué dix-sept visites dans des pays et préparé six rapports thématiques.

S'agissant de son rapport thématique sur l'économie politique des droits humains des femmes, Mme Ertürk a indiqué que ce rapport se fondait en partie sur le rapport qu'elle avait présenté en 2007 concernant les liens entre culture et violence contre les femmes et qui soulignait alors qu'une stratégie viable pour traiter de cette question devait inclure une perspective d'économie politique afin de bien saisir les bases matérielles de certaines normes culturelles et de déterminer la distribution des ressources productives, des biens et des services qui, en dernier lieu, ont un impact, notamment, sur l'accès des femmes à la justice. Mme Ertürk a souligné que les droits économiques et sociaux sont essentiels pour la capacité des femmes à jouir de la totalité de leurs droits de l'homme et que ce rapport est particulièrement pertinent dans le contexte de la crise financière et économique que traverse actuellement le monde. L'ordre néo-libéral actuel affecte profondément la prévalence de la violence contre les femmes ainsi que nos efforts pour la combattre, a fait observer la Rapporteuse spéciale. Il est désormais bien établi que si les femmes ne parviennent pas à développer leurs capacités et à devenir économiquement indépendantes, les droits de l'homme qui leur sont promis resteront des concepts abstraits. Aussi, Mme Ertürk a-t-elle lancé un appel en faveur de l'adoption d'une perspective intégrée combinant les obligations énoncées dans chacun des deux pactes internationaux relatifs, l'un, aux droits civils et politiques et, l'autre, aux droits économiques, sociaux et culturels. La sécurité économique et sociale est cruciale pour favoriser la création de capacités chez les femmes et prévenir la violence à leur encontre, a insisté la Rapporteuse spéciale.

En ce qui concerne le bilan critique de l'expérience sur quinze ans du mandat de Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes (1994-2009), Mme Ertürk a notamment fait valoir que ce mandat constitue un forum important qui peut rendre visibles des violations cachées, apporter un soutien et donner une voix aux femmes les plus vulnérables et faire office de canal supplémentaire pour l'accès à la justice et pour l'obligation redditionnelle.

Pour ce qui est des visites par pays qu'elle a effectuées en 2008, Mme Ertürk a souligné que chacune des trois missions qu'elle a menées, en Arabie saoudite, au Tadjikistan et en Moldova, a suscité un dialogue positif; elle a en outre remercié les gouvernements de ces pays pour leur coopération et leur hospitalité durant ces visites. S'agissant de l'Arabie saoudite, où elle a effectué une mission en février 2008, Mme Ertürk a notamment fait observer que la pratique de la tutelle masculine continue de faire obstacle à l'autonomie des femmes et à leur capacité de participer à l'ensemble des activités sociales et professionnelles. Il n'en demeure pas moins que le pays continue de connaître des évolutions positives concernant la condition de la femme, notamment du point de vue de la hausse des taux de scolarisation et d'alphabétisation des femmes. Néanmoins, ces progrès ne s'accompagnent pas d'une augmentation comparable de la participation des femmes au marché de l'emploi, par exemple. En outre, les pratiques judiciaires en cours relatives au divorce et à la garde des enfants, ainsi que le manque d'autonomie et d'indépendance économique des femmes limitent leur capacité à l'extraire de mariages abusifs. Par ailleurs, la violence contre les femmes travailleuses domestiques n'est pas suffisamment traitée.

En ce qui concerne le Tadjikistan, où elle a effectué une visite en mai 2008, Mme Ertürk a déclaré que le pays semble avoir réalisé sa stabilité politique et s'être engagé dans une phase de croissance économique; mais la situation y reste précaire compte tenu du fait que le pays continue d'être confronté à des défis liés à l'érosion des revenus et des services sociaux et à une pauvreté massive. Les femmes au Tadjikistan ont été particulièrement frappées par les conséquences de la transition, a poursuivi la Rapporteuse spéciale. Bien que l'égalité formelle soit garantie aux femmes par la loi, les bénéfices qu'elles avaient acquis durant l'ère soviétique en matière d'éducation, de santé et d'emploi ont été largement entamés. Les discours et pratiques patriarcaux perpétuent la position subordonnée de la femme au sein de la famille et de la société et la violence contre les femmes et les fillettes est répandue et acceptée, tant par les hommes que par les femmes. Les femmes sont également victimes de trafic au Tadjikistan même et en dehors du pays, a ajouté Mme Ertürk.

S'agissant enfin de la République de Moldova, où elle a effectué une mission en juillet 2008, Mme Ertürk a indiqué que ce pays a beaucoup progressé dans sa mise en place d'institutions de protection et de promotion des droits de l'homme depuis son indépendance. Mais des déséquilibres structurels et la faiblesse des institutions continuent de poser des défis, a souligné la Rapporteuse spéciale. La majorité des femmes vivent dans une condition subordonnée exacerbée par des taux élevés de chômage et des emplois faiblement rémunérés. En outre, des attitudes patriarcales et discriminatoires accroissent la vulnérabilité des femmes à la violence et aux abus. Dans ce contexte, la violence domestique est particulièrement répandue en Moldova, a souligné Mme Ertürk. Dans le contexte, en particulier, des migrations irrégulières/illégales, de nombreuses femmes se retrouvent victimes de conditions de travail proches de l'esclavage et/ou de réseaux de trafic, subissant alors des situations équivalentes à la torture, en particulier dans les lieux de destination. L'entrée en vigueur de la loi sur la prévention de la violence familiale et la lutte contre ce type de violence est très prometteuse, a ajouté la Rapporteuse spéciale.

Mme Ertürk a ensuite indiqué avoir reçu une invitation de visite du Gouvernement du Kirghizistan. Elle a ajouté avoir présenté des demandes officielles de visites aux gouvernements du Zimbabwe, de la Jordanie, du Turkménistan et de l'Ouzbékistan.

Dans le contexte du suivi des résolutions 7/20 et S-8/1 du Conseil, Mme Ertürk a indiqué que la violence reste répandue à travers toute la République démocratique du Congo, tout comme sont répandus le manque de soins et les conditions d'extrême pauvreté qu'endurent les survivants de la violence.

La violence contre les femmes est devenue plus visible dans le monde, a conclu Mme Ertürk. Elle a ajouté que la proposition visant la création d'un poste de Secrétaire général adjoint chargé de surveiller les initiatives en faveur de l'égalité entre les sexes à l'échelle du système a pris un caractère d'urgence accrue.

Le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences (A/HRC/11/6, à paraître en français) examine plus particulièrement l'impact de la mondialisation sur les femmes, ainsi que les effets de la récente crise économique et financière. Tout en reconnaissant que la situation de certaines catégories de femmes a tiré bénéfice de la mondialisation, pour d'autres en revanche la situation de précarité a empiré. Il souligne que la crise actuelle peut constituer une opportunité pour les États de reprendre la main, les marchés non régulés ayant démontré leur instabilité intrinsèque. Le retour de l'État doit lui permettre d'investir dans les services publics et les infrastructures, créant ainsi des emplois, améliorant la productivité et relançant la demande. Les femmes ont tout à gagner de telles politiques privilégiant le service public, souligne-t-il.

S'agissant de sa mission au Tadjikistan (A/HRC/11/6/Add.2, à paraître en français), Mme Ertürk constate que la violence contre les femmes et les filles est acceptée tant par les hommes que par les femmes dans ce pays qui considèrent qu'elle est dans l'ordre des choses. Le fait que les femmes connaissent mal leurs droits accroît encore leur vulnérabilité. Bien que certaines mesures encourageantes aient été adoptées, les initiatives prises par les organismes publics pour protéger et soutenir les victimes de violences et poursuivre les auteurs de ces actes sont insuffisantes. En conséquence, certaines femmes ne voient pas d'autre issue que le suicide ou le meurtre du coupable. Elle appelle le Tadjikistan à prendre des mesures dans les domaines qu'elle considère prioritaires l'autonomisation des femmes et l'égalité des sexes, l'élimination de la violence contre les femmes et les filles, la collecte de statistiques et de données; pratiques en matière de mariage, enregistrement du lieu de résidence et logement.

En ce qui concerne sa mission en Arabie saoudite (A/HRC/11/6/Add.3, à paraître en français) la Rapporteuse spéciale souligne que le royaume est aux prises avec des problèmes sans précédent. Les pressions en faveur du changement, intervenues notamment au cours des deux dernières décennies, ont débouché sur de modestes réformes qui ont toutefois eu des répercussions notables sur les droits des femmes. Divers progrès ont bénéficié aux femmes, en particulier l'accès à l'éducation, qui a permis d'améliorer sensiblement leur taux d'alphabétisation. Ces progrès ne se sont cependant pas accompagnés d'une augmentation analogue de la participation des femmes à la main-d'œuvre, celles-ci étant largement exclues des processus de prise de décisions. La ségrégation sexuelle et la pratique de la tutelle masculine entravent considérablement l'autonomie des femmes, leur capacité juridique en tant qu'adultes et leur capacité à participer à toute la palette d'activités disponibles dans la société et sur le lieu de travail. Ces dernières années, la violence contre les femmes a été reconnue comme un problème de politique publique.

Pour ce qui est de sa Mission en République de Moldova (A/HRC/11/6/Add.4, à paraître en français) la Rapporteuse spéciale souligne que la mutation de cette ancienne république soviétique a engendré des difficultés économiques et sociales, infligeant de ce fait un lourd fardeau aux femmes. L'égalité des sexes est garantie par la loi; cependant, en pratique, la subordination des femmes est aggravée par des niveaux de chômage élevés et/ou des emplois mal rémunérés. Parallèlement, les comportements paternalistes et discriminatoires augmentent la vulnérabilité des femmes à la violence et aux mauvais traitements. Dans ce contexte, la violence familiale est particulièrement répandue et largement tolérée par la société tout en n'étant pas dûment reconnue par les instances officielles et les femmes elles-mêmes, de sorte que les infrastructures visant à protéger les victimes de violence sont insuffisantes. La nécessité d'échapper à un environnement propice aux sévices, y compris la violence familiale, les préjugés et la privation économique croissante sont autant de facteurs qui incitent les femmes à chercher un emploi à l'étranger. En conséquence, notamment dans le contexte des migrations illégales, de nombreuses femmes sont victimes de conditions de travail esclavagistes et/ou de réseaux de trafiquants et font l'expérience de situations de torture et de mauvais traitements. La République de Moldova a fait toutefois de grands progrès en ce qui concerne l'édification d'institutions et la protection des droits de l'homme depuis l'indépendance, ce qui atteste son engagement à cet égard.

Mme Ertürk a par ailleurs dressé un «bilan critique» de l'expérience sur quinze ans du mandat de Rapporteur spécial de 1994 à 2009 (A/HRC/11/6/Add.5, à paraître en français). Elle constate que malgré les progrès accomplis, «le défi demeure immense» face au phénomène de la violence contre les femmes qui est lié «inextricablement» à la subordination, aux disparités et à la discrimination.

Dans un additif à son rapport sur l'économie politique des droits de la femme (A/HRC/11/6/Add.6, à paraître en français), la Rapporteuse spéciale se penche sur l'ordre politico-économique qui est souvent négligé lorsque l'on aborde la question des droits des femmes et la violence à leur encontre. Pourtant, souligne-t-elle, cet ordre affecte profondément à la fois la survenue de la violence et les efforts en vue de l'éliminer.

Un autre additif au rapport, long de 160 pages, est consacré à la communication avec les gouvernements (A/HRC/11/6/Add.1, à paraître en français). La Rapporteuse spéciale y examine la situation de plaintes concernant des cas individuels dans 34 États membres et les réponses qu'elle a reçues de ceux-ci.

Interventions de pays concernés

M. NANGUYALAI TARZI (Afghanistan) a déclaré que son pays est parti aux grands traités internationaux, qu'il a accompli des progrès importants de promotion des droits de l'homme ces 7 dernières années, et qu'il coopère avec les mécanismes spéciaux du Conseil des droits de l'homme. Aujourd'hui encore, la population se heurte au terrorisme. Le Gouvernement condamne la mort de civils, qui servent souvent de boucliers humains dans les combats. Un accord a été signé avec le chef de la coalition des rebelles pour minimiser la perte de vies civiles. Faire régner la loi est un objectif fondamental pour le pays. En ce qui concerne la question de la peine capitale, le représentant a souligné qu'elle n'est prévue que pour des crimes haineux commis dans des conditions extrêmes. La décision d'exercer la peine de mort est prise à deux niveaux de la juridiction et passe par la Cour suprême. Des condamnations sont d'ailleurs souvent commuées en peines de prison. Le Gouvernement n'accepte d'autre part pas l'allégation de violations des droits de l'homme qui auraient été commis par la police et les forces de sécurité nationales. Quant aux conditions de vie des prisonniers, un conseil récemment été mis en place est chargé de se saisir des plaintes des prisonniers. Le Gouvernement afghan poursuivra le dialogue avec la communauté internationale dans le but de renforcer le respect de droits de l'homme dans le pays, a-t-il conclu.

M. ALEXANDRE GUIDO LOPES PAROLA (Brésil) a remercié le Rapporteur spécial, M. Alston de sa présentation. Le Brésil partage bon nombre des préoccupations du Rapporteur spécial, convaincu que les activités des forces de l'ordre doivent se dérouler dans le plein respect des droits de l'homme. Les recommandations de M. Alston ont été examinées attentivement par les autorités brésiliennes, qui ont déjà pris un ensemble de mesures à cet égard. Ainsi, les salaires des forces de l'ordre ont été révisés à la hausse tandis que le système carcéral est entièrement révisé. Des bourses de formation ont été attribuées à plus de trente mille policiers. Des directives nationales sur le recours à la force par la police sont en cours d'élaboration. Des activités de prévention du crime et de respect des droits de l'homme, de prévention de la délinquance sont aussi préparées. Le représentant a regretté que M. Alston stigmatise la situation dans les «favelas», compte tenu des efforts consentis par le Gouvernement pour y améliorer les infrastructures et les conditions de sécurité. Le représentant a par ailleurs indiqué que le nombre des assassinats pour des motifs liés à la propriété de la terre est en diminution. Le représentant a par ailleurs indiqué que le Brésil applique un programme de protection des témoins dans le cadre des procédures judiciaires, programme dont il compte étendre la portée. Enfin, le représentant a remercié le Rapporteur spécial du dialogue franc et sincère qui a eu lieu jusqu'ici, assurant que son gouvernement s'efforce de parvenir à des solutions concrètes, orientées sur les résultats.

M. GEORGE SAITOTI, Ministre de la sécurité intérieure du Kenya, a commenté le rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires en reconnaissant qu'il y a eu des cas d'exécutions illicites au sein des forces de police au sujet desquels 53 enquêtes ont été menées qui ont abouti au lancement de poursuites contre 81 policiers depuis 2000. Ces poursuites témoignent du sérieux avec lequel le Gouvernement considère cette question. Le Gouvernement ne tolère pas les exécutions extrajudiciaires, a insisté le Ministre. Il a ajouté que le Gouvernement du Kenya reconnaît qu'il y a des faiblesses dans les mécanismes de contrôle de la police et que la nécessité d'une commission indépendante de la police se fait sentir. Il a également rappelé que le Gouvernement de coalition a engagé des réformes du système judiciaire et du système de justice pénale. Une loi de protection des témoins a été adoptée, a-t-il précisé. Le Kenya tient la route malgré les difficultés traversées par le pays après les élections de 2007, a souligné le Ministre. Il a en outre condamné le meurtre de défenseurs des droits de l'homme de la Fondation Oscar et a assuré le Conseil qu'aucun défenseur des droits de l'homme ne serait harcelé ou intimidé. En conclusion, il a réitéré l'engagement de son pays en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme.

M. MARK CASSAYRE (États-Unis) a salué la visite effectuée dans son pays par M. Alston, qui a notamment pu rencontrer de nombreux représentants de la société civile. Concernant les domaines de préoccupation évoqués par le Rapporteur spécial, le représentant a regretté que M. Alston n'ait pas tenu compte de certaines informations importantes. Concernant la peine de mort, les États-Unis estiment qu'il ne s'agit pas d'une violation en tant que telle du droit international, a-t-il observé, rappelant que ce qui importait en l'espèce était la proportionnalité de la peine, la peine capitale devant s'appliquer uniquement aux cas les plus graves. La législation américaine prévoit des garanties solides, des recours étant prévus afin si le condamné estime que la gravité de la peine ne correspond pas au crime commis, a-t-il indiqué. En ce qui concerne les critiques générales de M. Alston, les États-Unis demeurent convaincus de la nécessité de lutter contre les déséquilibres judiciaires en matière raciale par exemple afin de s'assurer que la disparité raciale ne joue par un rôle dans la nature des condamnations. Toutefois, certains des constats de M. Alston ne se vérifient pas dans la réalité. Concernant les cas de garde à vue ayant abouti à des décès, un texte est en discussion au Congrès à ce sujet (Death in Custody Reporting Act de 2009), a-t-il précisé. Ce projet vise à ce que les agences fédérales et les organes chargés de l'application de la loi signalent tout décès en détention au Ministère de la justice. Concernant les opérations militaires dans lesquelles les États-Unis sont impliqués, la délégation américaine estime que ce sujet ne s'inscrit pas dans le mandat du Rapporteur spécial. Cela ne signifie pas que les États-Unis soient en désaccord avec tout ce que rapporte M. Alston. Le président Obama lui-même a reconnu que les commissions militaires établies en vertu du Military Commissions Act de 2006 étaient foncièrement malsaines; c'est la raison pour laquelle leur cadre légal est en cours de révision.

En réponse au manque de transparence sur les victimes civiles dans les conflits dans lesquels sont impliqués les États-Unis, il a assuré que son pays faisait toujours le maximum pour réunir toutes les informations à ce sujet. Toutefois, ces enquêtes se heurtent souvent à des entraves sur le terrain. En Iraq et en Afghanistan, de nombreux témoins refusent de collaborer avec les enquêteurs américains, a-t-il dit. En outre, les «scènes de drame» ne sont pas toujours sécurisées, lorsqu'elles ne sont pas carrément modifiés avant que les enquêteurs se rendent sur place, a-t-il encore expliqué. L'orateur a assuré par ailleurs que la poursuite des contractants privés auteurs de crimes était une des grandes priorités du Ministère de la justice.

MME CORINA C?LUG?RU (République de Moldova) s'est félicitée de pouvoir dialoguer avec Mme Yakin Ertürk, Rapporteuse spéciale sur la question de la violence contre les femmes, suite à sa visite dans le pays. Les autorités moldaves espèrent pouvoir poursuivre ce dialogue autour d'autres mesures qui pourraient être mises en place. La femme joue un rôle important en République de Moldova, un rôle qui a beaucoup évolué dans de nombreux domaines ces dernières années, a précisé la représentante. Des femmes se trouvent désormais à des postes clés dans la société. La politique migratoire est une priorité pour le Gouvernement moldove, conformément aux bonnes pratiques édictées par la communauté internationale et dans le cadre d'un partenariat avec l'Union européenne, a déclaré la représentante. Le Ministère de l'intérieur a par ailleurs réorganisé l'an dernier son unité de lutte contre la traite des personnes, avec des résultats positifs. Un plan d'action national 2009-2015 prévoit par ailleurs une série de mesures favorables à l'égalité entre les sexes à l'échelle du pays et dans tous les secteurs: le plan prévoit notamment la mise en œuvre des recommandations de Mme Ertürk, a fait valoir la représentante moldove.

M. ZAID AL-HUSSAIN (Arabie saoudite) a rendu hommage au travail réalisé par la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes. Néanmoins, l'Arabie saoudite ne peut être d'accord avec certains passages du rapport concernant le pays, notamment pour ce qui a trait au paragraphe 6 dudit rapport qui prétend que c'est l'interprétation wahhabite-hanbali de la loi islamique qui prévaut, de manière hégémonique, dans le pays. En effet, le Royaume d'Arabie saoudite a choisi une voie modérée basée sur une approche islamique médiane et équitable, a assuré le représentant saoudien. Après la publication du rapport de Mme Ertürk, a-t-il par ailleurs indiqué, le nombre de femmes conseillères du Conseil consultatif est passé de 6 à 12. Le représentant saoudien a en outre tenu à souligner que la Commission de promotion de la vertu et de prévention du vice est dotée de compétences très précises telles qu'énoncées dans le décret royal du 6 septembre 1980. Les membres de cette instance sont soumis au code de procédure pénale et au contrôle du parquet. D'autre part, il est faux de prétendre que la législation saoudienne n'incrimine pas le viol ou d'autres types de violence sexuelle, a poursuivi le représentant de l'Arabie saoudite. Les dispositions de la charia prévoient en pareil cas des sentences qui peuvent aller jusqu'à la peine capitale, a-t-il précisé. Par ailleurs, le travail forcé ou l'exploitation sexuelle, comme toute autre forme d'exploitation de la personne humaine, sont des actes incriminés par le droit saoudien, a ajouté le représentant. En conclusion, il a assuré que son gouvernement ne ménage aucun effort pour promouvoir et protéger les droits de l'homme.

M. JAMSHED KHAMIDOV (Tadjikistan) a rappelé que son pays avait ratifié de nouveaux instruments internationaux, dont la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes qui font partie intégrante du système juridique tadjik. L'égalité entre les sexes est garantie, a-t-il assuré. Une commission des affaires féminines a été créée en particulier. L'État a pris des initiatives en coopération étroite avec les organisations non gouvernementales afin de permettre l'avancée des droits de cette moitié de la population. De tels efforts constituent une contribution incontestable à la création d'un environnement favorable permettant de lutter contre la violence envers les femmes, a-t-il souligné. Il a enfin attiré l'attention sur le fait que le pays payait un lourd tribut à la suite de la guerre civile et d'une pauvreté endémique.

Débat interactif

MME VERONIKA STROMŠÍKOVÁ (République tchèque au nom de l'Union européenne) a rappelé que l'Union européenne avait adopté, en 2008, de nouvelles directives concernant la lutte contre la violence à l'encontre des femmes et des fillettes. Le rapport de Mme Ertürk sur l'économie politique des droits fondamentaux des femmes a le mérite de souligner l'interdépendance de la violence contre les femmes et des autres violations des droits de l'homme. La représentante a demandé au Rapporteur spécial de préciser comment elle pourrait améliorer la reconstruction post-conflit tenant compte de la dimension sexospécifique. Le rapport évoque la responsabilité internationale collective en matière d'intégration d'initiatives visant à mettre un terme à la violence contre les femmes: quel rôle le Conseil des droits de l'homme pourra-t-il jouer dans ce contexte?

La représentante de l'Union européenne s'est aussi inquiétée des exécutions de délinquants mineurs pratiquées en Iran. Elle a demandé au Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, M. Alston, de préciser sa proposition de désignation d'un membre du bureau du Conseil des droits de l'homme chargé d'engager des consultations avec le Gouvernement iranien. Concernant la visite effectuée par M. Alston aux États-Unis, la représentante a observé qu'un certain nombre de ressortissants étrangers avaient été condamnés à mort et exécutés dans ce pays, sans possibilité d'avoir recours à l'assistance consulaire: comment les États-Unis peuvent-ils mettre en place un mécanisme destiné à garantir le recours à cette prérogative, a demandé la représentante.

M. MARGHOOB SALEEM BUTT (Pakistan au nom de l'Organisation de la Conférence islamique) a souligné que si les États doivent certes aider les procédures spéciales dans l'exercice de leur mandat, il convient également d'accorder toute l'attention requise à la véracité des informations, étant donné qu'elle se répercute sur la crédibilité même des titulaires de mandat. L'OIC condamne les meurtres extrajudiciaires liés à la pratique de la sorcellerie dans certaines parties du monde, a-t-il poursuivi. Il a en outre souligné que le fait pour un pays de répondre avec retard à une demande de visite du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires ne signifie pas nécessairement que l'on se trouve en présence de préoccupations graves concernant les exécutions extrajudiciaires dans ce pays.

S'agissant du rapport de Mme Ertürk sur la violence contre les femmes, le représentant pakistanais a souligné que si la mondialisation politico-économique a certainement créé de nouvelles opportunités pour les femmes, elle a aussi marginalisé nombre de groupes vulnérables, parmi lesquels celui des femmes. Aussi, le Pakistan partage-t-il l'idée selon laquelle les droits économiques et sociaux sont essentiels pour favoriser la création de capacités chez les femmes, de manière à ce qu'elles ne subissent pas de façon disproportionnée la crise économique et puissent effectivement éviter les risques de violence ou y résister.

M. ANDREJ LOGAR (Slovénie) a remercié Mme Yakin Ertürk de son rapport complet sur l'économie politique des droits fondamentaux des femmes. Le représentant a rappelé que l'une des causes des violences à l'encontre des femmes réside dans les lois et politiques discriminatoires. De nombreuses dispositions juridiques, concernant le mariage et les relations familiales, la vie publique et la politique, notamment, sont sources de discrimination à l'encontre des femmes et posent de graves problèmes en termes d'égalité entre les sexes et d'autonomisation des femmes. En dépit des nombreux engagements pris dans le cadre des mécanismes des droits de l'homme - forums, organes de traités, procédures spéciales - l'élimination des lois et pratiques discriminatoires à l'encontre des femmes n'est pas acquise. Le représentant a demandé à Mme Ertürk son opinion sur la proposition de création d'un mécanisme spécial sur l'égalité devant la loi et notamment dans quelle mesure il favoriserait l'engagement d'éliminer ces pratiques discriminatoires. Le représentant a également demandé au Rapporteur spécial comment lutter contre l'impunité dont jouissent les auteurs de discrimination à l'encontre des femmes dalits en Inde, et comment améliorer leur accès à la justice.

M. ABBAS DAHER DJAMA (Djibouti) a souligné qu'une plus grande place devait être accordée à la formation professionnelle des femmes dans son pays, particulièrement celles issues des milieux ruraux de façon à leur éviter l'exclusion et la pauvreté frappant le plus souvent les femmes sans formation. Il a ajouté qu'il était primordial que les femmes puissent avoir accès à des moyens financiers propres à travers des organismes de crédit qui favoriserait d'une part l'émergence d'un entreprenariat féminin et d'autre part l'acquisition de propriété afin de les prémunir des risques liés au manque de logement. Le représentant a indiqué en conclusion que le Gouvernement djiboutien avait pris différentes mesures pour promouvoir la vie socioéconomique des femmes, notamment par l'établissement en 2000 du programme de Fonds social de développement proposant l'octroi de microcrédits.

MME CLARISSE MERINDOL (Burkina Faso) a souligné que les impacts de la crise économique sur la garantie des droits de la femme, surtout dans les pays en développement, étaient «énormes et susceptibles d'engendrer d'autres formes de violences bien insidieuses». Après avoir rappelé l'engagement de son pays à lutter contre ces violences, l'oratrice a évoqué plus particulièrement le problème de l'excision. Elle a dressé un bilan «appréciable» de la lutte menée par son pays contre les mutilations génitales plus d'une décennie après le lancement de la lutte contre ce phénomène, «malgré les contraintes financières et les pesanteurs sociales et culturelles». Selon les estimations, alors que pratiquement toutes les femmes étaient excisées dans les années soixante, une jeune fille sur deux serait victime de cette pratique aujourd'hui: le pourcentage est passé de 75% en 2003, à 66% en 2005, ce taux étant de 49% aujourd'hui) et le Burkina Faso compte bien voir cette proportion continuer de diminuer dans les années à venir.

M. CHRISTIAN STROHAL (Autriche) a demandé au Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires comment il imagine que pourrait fonctionner un mécanisme chargé d'enquêter sur des cas où des personnes qui auraient témoigné auprès des procédures spéciales sont victimes de persécutions. Il a demandé à la Rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes d'étayer sa pensée sur l'idée de créer une base de données sur les aspects sexospécifiques qui servirait d'assiette à l'élaboration de politiques de promotion de la parité.

M. PHILIP KIMPTON (Australie) a dit la préoccupation de son pays devant les représailles dont sont victimes les personnes aidant les titulaires de mandats des procédures spéciales. Le représentant a aussi engagé le Gouvernement iranien à mettre un terme aux exécutions de mineurs. Il s'est en outre félicité du rapport sur la violence contre les femmes, félicitant Mme Ertürk de son appel à une approche intégrée des droits des femmes. L'Australie adopte pour sa part une démarche de «tolérance zéro» vis-à-vis des violences contre les femmes et les enfants. Le Gouvernement met en œuvre un plan national de protection de l'enfance et applique un plan national d'action contre la violence contre les femmes, doté d'un budget initial de 42 millions de dollars sur quatre ans.

M. CHRISTOFFER BERG (Suède) a noté la nécessaire collaboration des États dans les deux rapports présentés aujourd'hui. Il s'est dit choqué par les agressions, les intimidations, voire les exécutions, dont ont été victimes des témoins ayant collaboré avec l'ONU, notamment dans le cadre du mandat de M. Alston. De telles attaques constituent une menace flagrante contre le cœur même des principes de base en matière de droits de l'homme sur lesquels repose le mandat du Conseil des droits de l'homme, a-t-il observé. L'orateur s'est enfin dit particulièrement préoccupé par le sort des personnes déplacées à Sri Lanka et a demandé quel conseil le Rapporteur spécial pouvait donner au Gouvernement de ce pays sur cette question.

MME EVA BJARNADOTTIR (Islande) a reconnu les effets négatifs que la crise mondiale peut avoir sur les droits des femmes, mais elle pense, par ailleurs, que la crise peut également fournir une opportunité de restructuration des relations entre les hommes et les femmes de par le monde. L'Islande attribue une grande importance à la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur le thème «Femmes, paix et sécurité». Renforcer la situation des femmes dans les situations post-conflit est effet essentiel pour la reconstruction de sociétés qui ont subi une crise humanitaire. Elle a demandé comment la Rapporteuse imagine que cette résolution pourrait être mise en œuvre?

MME HYE RAN CHUN (République de Corée) a remercié Mme Yakin Ertürk de son travail de recherche des vraies cause des violences faites aux femmes. Son rapport final contient des recommandations importantes pour mettre un terme aux violences contre les femmes, un phénomène qui est malheureusement solidement ancré dans les pratiques. La République de Corée a pris pour sa part des mesures juridiques concrètes pour améliorer la situation des femmes dans tous les aspects de la vie professionnelle et privée. Les gouvernements locaux peuvent adopter des politiques sensibles aux questions sexospécifiques, tenant compte du pouvoir des femmes votantes. C'est le cas de la municipalité de Séoul, qui a adopté des mesures pratiques pour donner une plus grande place aux femmes dans la ville, notamment en matière de politique du logement. Il est enfin très important qu'un mécanisme de coopération transnationale soit mis sur pied afin de promouvoir les droits des femmes et de lutter contre les violences commises contre elles. C'est pourquoi le Ministère de l'égalité entre les sexes de la République de Corée organisera en juin prochain une réunion ministérielle consacrée «aux femmes face à la crise économique».

M. PITCHAYAPHANT CHARNBHUMIDOL (Thaïlande) a estimé qu'une approche plus globale et holistique était nécessaire pour lutter contre la violence à l'égard des femmes. Pour ce faire, il convient d'agir sur deux fronts, d'une part dans la lutte contre la violence elle-même, d'autre part en favorisant l'autonomisation, l'égalité des sexes et l'avancement de la femme en général. Le représentant a énuméré les initiatives de son pays, dont le plan pour le développement des femmes, qui s'inscrit dans le dixième programme de développement économique et social 2007-2011.

M. PEKKA METSO (Finlande) a demandé à Mme Ertürk comment l'on peut combler les lacunes des Pactes internationaux sur les droits économiques, sociaux et culturels, civils et politiques à reconnaître les inégalités entre les femmes et les hommes comme un facteur qui engendre la violence? Il a demandé comment les femmes peuvent acquérir davantage de droits dans les sociétés post-conflits et finalement si elle considère que la lutte contre le VIH/sida devrait prendre la forme de la lutte contre les violences à l'égard des femmes, étant donné que de nombreuses victimes d'actes de violence sont contaminées par le virus.

M. OBAID SALEM SAEED AL ZAABI (Émirats arabes unis au nom du Groupe des pays arabes) a remercié Mme Yakin Ertürk de son rapport exhaustif, un rapport examiné avec grand intérêt par le Groupe arabe. Ce dernier félicite la Rapporteuse spéciale des nombreux entretiens et consultations qu'elle a sollicités pour la rédaction de ce document. Le rapport souligne qu'il est rare que les gouvernements intègrent les facteurs sociaux dans leurs décisions. Le Groupe arabe est d'accord avec la Rapporteuse s'agissant du lien qui y est établi entre lutte pour les droits des femmes et réalisation des droits économiques, sociaux et culturels des femmes. Le représentant a aussi demandé à la Rapporteuse spéciale pourquoi elle n'avait pas évoqué, dans son rapport, les violations des droits des femmes commises dans les territoires arabes et palestiniens, y compris le Golan.

M. RAJIVA WIJESINHA (Sri Lanka) s'est félicité que Mme Ertürk ne se soit pas jointe à la «chasse aux sorcières» lancées par certaines de ses collègues en février. Il a exprimé l'espoir que les généralisations abusives faites la semaine dernière au nom des Rapporteurs spéciaux n'aient pas paru tomber, de l'avis de Mme Ertürk, dans le cadre de son mandat. S'agissant du rapport sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, il s'est dit heureux que sa délégation ait enfin pu entrer en relation avec M. Alston, hier, après s'être heurtée à une fin de non-recevoir il y a deux ans et trois ans pleines après que le Rapporteur spécial eut formulé ses recommandations initiales. Ce qui aurait pu constituer une relation fructueuse avec M. Alston dès le départ - des échanges avec lui étant toujours enrichissants en dépit de ses manières abruptes - a pâti par les fuites concernant son rapport initial il y a trois ans, a-t-il ajouté. Concernant le dernier rapport, il a souligné que son pays souhaitait recevoir un soutien plus substantiel. Avec l'élimination de la menace terroriste, Sri Lanka estime qu'elle va désormais pouvoir se concentrer plus pleinement sur la promotion des droits de l'homme. L'orateur a émis l'espoir que M. Alston, de par son souci profond de la situation des sorcières, réussira à restreindre ses collègues afin qu'ils cessent de lever un doigt accusateur et adoptent une attitude plus constructive.

MME INDAH NURIA SAVITRI (Indonésie) a déclaré que le rapport sur la violence à l'égard des femmes constitue un bon bilan de la situation de femmes dans le monde. La Rapporteuse spéciale suggère de mettre l'accent sur l'éducation et la formation pour rendre les femmes moins dépendantes et moins facilement marginalisées. Le sort des femmes migrantes est particulièrement préoccupant; elles sont particulièrement exposées aux abus et à l'exploitation. La représentante indonésienne a émis le vœu que le défi que représente la crise économique soit transformé en opportunité pour renforcer les capacités professionnelles des femmes.

M. JEFFREY HEATON (Canada) a remercié le Rapporteur spécial sur les exécutions sommaires et s'est inquiété des représailles commises contre les personnes aidant les titulaires mandats des procédures spéciales du Conseil. Le représentant a demandé à M. Alston quelles sont ses recommandations à cet égard au Conseil des droits de l'homme en ce qui concerne le contrôle et la réaction aux allégations d'intimidation, ou de représailles, contre ces personnes. À Mme Ertürk, le représentant canadien a demandé son avis sur les modalités du passage de la victimisation à l'autonomisation des femmes. Il a également voulu savoir, compte tenu du fait que le Rapporteur spécial achève son mandat au terme de la présente session du Conseil des droits de l'homme, quelles sont les tendances qu'elle a perçues ces dix dernières années et dont le Conseil et les États devront tenir compte dans leur action de prévention et de sanction des violences commises contre les femmes.

MME AMY LAURENSON (Nouvelle-Zélande) a estimé que Mme Ertürk avait effectué un bon bilan des quinze dernières années du mandat sur la violence à l'égard des femmes. Il s'agit d'une analyse précieuse, utile pour l'orientation stratégique du Conseil. Que pourrait-on faire, a-t-elle demandé, pour que le Conseil accentue sa lutte contre la violence faite aux femmes? Quelles initiatives concrètes pourrait-il inclure dans ses résolutions, a-t-elle aussi demandé. La délégation néo-zélandaise est intéressée d'avoir le point de vue de la Rapporteuse sur la relance des efforts visant à réintégrer la question de la violence dans le combat plus large pour l'égalité économique et sociale.

MME BEATE STIRØ (Norvège) a souscrit à l'affirmation de la Rapporteuse spéciale que la violence n'est pas un phénomène isolé mais un symptôme du fonctionnement de la société patriarcale, basée sur un ensemble d'inégalités s'agissant de l'accès à la propriété et de la prise de décision, et sur la soumission sexuelle des femmes. Force est de constater qu'aucun pays n'a réussi à éradiquer la violence contre les femmes, quel que soit le niveau de vie qui y règne ou son produit intérieur brut. Par ailleurs, il est préoccupant que l'influence d'acteurs non étatiques semble amorcer un retour en arrière dans certaines sociétés. Que faire pour empêcher que les forces réactionnaires mettent en péril des droits nouvellement acquis par les femmes, a-t-elle demandé? Elle a partagé l'inquiétude du Rapporteur spécial sur les exécutions s'agissant de la sécurité des personnes qui coopèrent avec les mécanismes spéciaux, notamment à la lumière des récents évènements au Kenya. Il est urgent de mettre en place un mécanisme afin de mette fin au climat de l'impunité.

M. ROBERTO NOCELLA (Italie) a remercié les Rapporteurs spéciaux, observant que la mention de l'Italie dans le rapport de Mme Ertürk appelle commentaire. En effet, l'Italie est traditionnellement en faveur d'une politique active dans le domaine de l'égalité entre les sexes. Elle est pleinement engagée à mettre en œuvre la Convention pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes et s'est engagée à financer des activités d'application de la résolution 1325 du Conseil de sécurité intitulée «Femme, paix et sécurité». La violence à l'égard des femmes est hélas un problème d'échelle planétaire. C'est pourquoi l'Italie convoquera, en septembre prochain à Rome, une conférence internationale sur ce thème, dans le cadre de sa présidence du G8.

M. NICOLAS NIHON (Belgique) a noté au sujet de la Moldavie et du Tadjikistan que «malgré les efforts des gouvernements et certains progrès tangibles engrangés durant des décennies, les tendances patriarcales dans ces sociétés restaient forte, que les vieux réflexes se ranimaient pour faire ou refaire de la femme un citoyen de seconde catégorie aux droits limités et souvent bafoués». L'orateur a aussi évoqué le rapport concernant l'Arabie saoudite, estimant qu' «il ne s'agit rien d'autre que de reconnaître que la femme, à l'instar des hommes, a le droit de disposer d'elle-même». En conclusion, le représentant belge a demandé à Mme Ertürk: «Que peut-on faire pour que les femmes disposent de toutes leurs libertés, notamment celle de pouvoir pleinement disposer de leur corps? Quelle est la responsabilité des États dans ce domaine? Comment s'attaquer aux attitudes discriminatoires et aux lois qui cherchent à subordonner les femmes en la matière?

MME MELANIE KHANNA (États-Unis) a estimé que le Conseil doit se consacrer davantage à la question de la violence sexuelle. Elle a précisé que des projets de résolutions ont été présentés par les États-Unis au Conseil de sécurité et é l'Assemblée générale des Nations Unies sur la question de la violence sexuelle lors des conflits armés. Elle se réjouit de la tenue d'un atelier sur l'accélération des efforts pour lutter contre la violence à l'égard des femmes. Cet atelier aura lieu en 2009 au Canada et est cofinancé par les États-Unis. Le rapport présenté par Mme Ertürk est complet et couvre des questions souvent laissées dans l'ombre, telles que la violence domestique sur laquelle il est difficile de trouver des informations, a-t-elle affirmé.

MME ASLIGÜL ÜÐDÜL (Turquie) a remercié Mme Ertürk de son rapport, qui fournit d'importantes orientations pour les travaux de ses successeurs. Le cycle de la pauvreté et de la violence s'enchaîne d'autant plus inexorablement que nous traversons une période de crise économique. Le titulaire de ce mandat pourrait poursuivre les travaux sur les stratégies de survie dans ce contexte, et sur les mesures à prendre pour qu'elles ne suscitent pas davantage de discrimination à l'encontre des femmes. L'engagement et le dynamisme de Mme Ertürk ont largement contribué au succès de son mandat, a estimé la représentante.

M. LARS VOLCK MADSEN (Danemark) a indiqué qu'à la suite du rapport de M. Alston sur le Kenya, il était essentiel que ce pays reconnaisse le problème posé par les exécutions extrajudiciaires et de montrer qu'il luttait contre le phénomène. Le Danemark a appelé le Kenya à permettre une enquête indépendante sur ce phénomène, l'assurant de l'appui du Danemark. Par ailleurs, il a assuré les deux rapporteurs que son pays veillerait au respect de leur indépendance.

MME YADIRA LIDESMA (Cuba) s'est félicitée du lien établi entre la situation sociale et économique d'un État et la situation de la femme dans la société, qui est un aspect souvent négligé. L'égalité professionnelle est importante; elle fournit des revenus à la femme et lui assure une intégration sociale. La représentante cubaine a saisi l'occasion pour attirer l'attention sur un cas de violences d'ordre psychologique de deux femmes cubaines à qui les autorités des États-Unis refusent depuis 10 ans d'établir des visas pour leur permettre de rendre visite à leurs époux, injustement accusés de terrorisme dans ce pays.

M. YEVGENY USTINOV (Fédération de Russie) a dit partager la préoccupation de M. Alston devant les décès de personnes lors de manifestations publiques du fait de l'action des forces de l'ordre. La Russie n'est cependant pas d'accord avec la nécessité de désigner de nouveaux mécanismes au sein du Conseil des droits de l'homme chargés de contrôler la sécurité des témoins aidant les titulaires de procédures spéciales. Le Conseil pourra faire un meilleur usage des moyens à sa disposition. Le représentant a par ailleurs tenu à préciser que la Fédération de Russie avait envoyé antérieurement des réponses à toutes les questions de M. Alston. Le représentant russe a par ailleurs salué le travail important réalisé par Mme Ertürk, regrettant quelque peu l'aspect parfois très théorique et le ton catégorique de certaines recommandations. Il a souligné que les États sont en droit d'adopter les méthodes qui leur paraissent le mieux à même de remédier aux problèmes des femmes. L'accent doit être mis sur les meilleures pratiques des États dans ce domaine. Le représentant a demandé à Mme Ertürk par quelle méthode elle avait formulé ses recommandations sur l'autonomisation économique des femmes. Il a enfin appelé le prochain titulaire de ce mandat à collaborer pleinement avec le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, afin d'éviter tout double emploi.

MME HEBA MOSTAFA RIZK (Égypte) a remercié le Rapporteur spécial pour son constat objectif sur les événements de Gaza. Concernant la situation dans son pays, le représentant égyptien a assuré qu'il effectuait des efforts considérables pour faire avancer les droits des Égyptiennes. Elle a indiqué en revanche qu'on ne pouvait qu'être en opposition catégorique avec ce qui apparaît comme un appel à une intervention internationale dans les affaires intérieures des États sur des sujets tels que l'orientation sexuelle ou l'avortement, sujets figurant dans le bilan des quinze dernières années brossé par Mme Ertürk.

M. ACHAMKULANGARE GOPINATHAN (Inde) a relevé que le Rapporteur sur les exécutions extrajudiciaires n'a pas rencontré les taliban ou autres groupes armés lors de sa visite en Afghanistan et a souhaité savoir quels étaient les «divers acteurs» mentionnés par le Rapporteur qui auraient émis des réserves quant aux implications politiques d'une rencontre avec les taliban. Il a en effet rappelé que le Rapporteur spécial avait pourtant rencontré des représentants des Tigres tamouls lors de sa visite à Sri Lanka en 2005. Il a conséquemment demandé au Rapporteur de clarifier sa position et expliquer pour quelle raison il a opté pour une approche différente en Afghanistan.

MME CLARA SOLON (Brésil) a rappelé le lien étroit entre la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels et la vulnérabilité des femmes à la violence. La loi brésilienne prévoit des mesures de lutte contre cette violence sous toutes ses formes, y compris l'usurpation patrimoniale en tant qu'atteinte aux droits des femmes. La représentante a demandé à Mme Ertürk de quelle manière les États peuvent coopérer, en particulier dans le cadre du Conseil des droits de l'homme, afin d'améliorer l'inclusion des femmes dans l'ordre économique actuel. La représentante a aussi observé que dans certains pays, comme le Brésil, les femmes sont déjà au bénéfice d'une meilleure éducation formelle que les hommes: quel genre de politique devraient adopter les gouvernements afin de les aider à atteindre des postes à responsabilités?

M. ROBERT-JAN SIEBEN (Pays-Bas) a demandé à M. Alston quelles possibilités il voyait de parvenir à une collaboration entre le Haut-Commissariat aux droits de l'homme et le Kenya sur la mise en œuvre des mesures que le gouvernement de ce pays a entrepris ou prévu d'entreprendre pour en finir avec le fléau des exécutions extrajudiciaires et des disparitions. Ces faits menacent l'efficacité même des procédures spéciales de l'ONU, a-t-il averti.

M. DENIS Y. LEPATAN (Philippines) a déclaré que son pays avait préparé des réponses détaillées en réponse au rapport sur la visite aux Philippines du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires. Il a cité plusieurs exemples d'articles parus sur des crimes haineux à l'encontre de dirigeants communistes et leurs proches. Ces articles sont parus sur internet et peuvent influer l'opinion dans un sens précis, mais en réalité de tels agissements ne sont pas pratiqués exclusivement à l'égard d'un seul parti. Au contraire, ceux qui se disent victimes de brutalités commettent eux-mêmes des enlèvements et des tueries et autres violations des droits de l'homme, a tenu à indiquer le représentant philippin.

MME MURIEL BERSET (Suisse) a estimé, avec Mme Ertürk, que les mesures focalisées de «gender mainstreaming» sont nécessaires sur le plan des politiques et des programmes économiques, sociaux et du marché du travail pour lutter contre la discrimination et donc la violence envers les femmes. Particulièrement importante paraît à la Suisse la recommandation visant à élaborer des indicateurs prenant en compte les facteurs économiques et politiques, et documentant plus systématiquement jusqu'à quel point les femmes ne peuvent pas suffisamment faire valoir leurs droits économiques et sociaux. La Suisse aimerait savoir si la Rapporteuse spéciale a connaissance de bonnes pratiques qui pourraient servir de modèles pour un «gender mainstreaming» réussi dans le domaine des domaines politiques publics. La représentante suisse a par ailleurs salué les efforts consentis par le Kenya dans le cadre de la promotion des droits humains et a appuyé la recommandation du Rapporteur spécial, M. Alston, visant à ce que le Gouvernement reconnaisse l'ampleur du problème des exécutions extrajudiciaires, et qu'il prenne toutes les mesures pour prévenir et punir de tels actes, et qu'il entame une réforme de ses services de sécurité.

M. OSAMU YAMANAKA (Japon) a noté que la réunion sur les droits des femmes qui s'est tenue lors de la session de mars du Conseil avait largement abordé la question du travail non rémunéré des femmes et les conséquences sur leurs conditions de vie. Le Japon, à cette occasion, avait réitéré son appel pour que l'ordre du jour des débats de l'ONU reflète la priorité absolue à donner à ces questions. Au Japon, il est un fait qu'en raison de la pression sociale, une femme ne peut vivre seule lorsqu'elle souhaite vivre sans époux ou compagnon. Le Japon est déterminé à agir afin de faire évoluer la société nippone sur ce plan.

MME SELMA MALIKA HENDEL (Algérie) a loué le travail de la Rapporteuse spéciale effectué tout au long de ses cinq années de mandat. La représentante algérienne a souligné l'élaboration en Algérie d'une Stratégie nationale de lutte contre la violence contre les femmes, qui mise sur l'indépendance économique afin de leur permettre d'échapper aux violences. Les étudiantes sont désormais majoritaires dans le pays. Elle a encouragé tous les pays à développer des plans semblables à celui qui a vu le jour en Algérie. Elle a d'autre part regretté qu'une conception contre nature de la famille, qui est loin d'être acceptée dans l'ensemble des sociétés, ait été exposée dans le rapport.

M. ABDOUL WAHAB HAIDARA (Sénégal) a indiqué que son pays met un accent particulier sur la lutte contre la pauvreté, l'assainissement du cadre macroéconomique et la promotion de la microfinance pour faciliter l'accès des femmes au crédit, autant de mesures destinées à susciter un environnement économique et social favorable à la jouissance de tous les droits de l'homme. Le représentant a demandé à Mme Ertürk si, selon elle, les solutions qui sont proposées pour juguler la crise économique et financière prennent suffisamment en compte la problématique de la violence contre les femmes.

M. ASADOLLAH ESHRAGH JAHROMI (Iran) a démenti, à l'adresse de M. Alston, que des exécutions de mineurs aient eu lieu dans son pays ces dernières années. L'orateur a toutefois expliqué que certains cas de mineurs délinquants ou criminels étaient confrontés aux exigences de rétribution de la famille victime, les autorités ne pouvant s'y opposer. Le Gouvernement de la République islamique d'Iran s'efforce, y compris par une contribution financière pour couvrir ce que l'on appelle «l'argent du sang», de parvenir à une conciliation entre les parties afin d'éviter d'éventuelles exécutions capitales.

M. IFEANYI NWOSU (Nigéria) a souligné l'approche parallèle qu'il fallait adopter en matière de stabilité économique de la société et de promotion des droits de la femme. Cette approche fournit un cadre utile pour le développement de plans d'action pour la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Il s'est associé à la Rapporteuse sur la violence contre les femmes pour dire que les connaissances ventilées par sexe négligent les droits économiques, sociaux et culturels par rapport aux droits civils et économiques.

M. IMAD ZUHAIRI (Palestine) a remercié Mme Ertürk de son excellent rapport, notamment pour ce qui a trait aux femmes palestiniennes. Le rapport recommande la mise en place de structures et mécanismes de lutte contre, notamment, la pratique du crime dit d'honneur, une pratique qui fait d'ores et déjà l'objet de mesures au plan judiciaire, a assuré le représentant. L'Autorité palestinienne a par ailleurs ratifié la Convention internationale contre la torture, a fait valoir son représentant. Il a ensuite relevé que le rapport recommande au Gouvernement israélien de respecter le droit à la santé des femmes palestiniennes, notamment les femmes enceintes. Les actualités récentes montrent que les actes des forces d'occupation violent les dispositions des pactes internationaux, a souligné le représentant.

M. HUBERTUS MATHEUS VAN MEGEN (Saint-Siège) a souligné que pendant longtemps, les femmes ont dû souffrir en silence des violences à leur encontre. Il s'est félicité du bilan des quinze dernières années établi par la Rapporteuse spéciale, tout en regrettant que le document n'ait été disponible qu'à partir de ce matin. La délégation du Saint-Siège est préoccupée par la référence à l'accès sûr et légal à l'avortement, par la question de l'orientation sexuelle considérée comme faisant partie intégrante de la santé sexuelle, ou encore par le traitement de la question des unions entre personnes du même sexe, sujets qui, de l'avis du Saint-Siège, outrepassent le mandat du Rapporteur spécial sur les violences contre les femmes.

M. PETER GOODERHAM (Royaume-Uni) a déclaré avoir lu avec un grand intérêt le rapport du Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, notamment s'agissant des quatre domaines de préoccupation. Il a pris note des suggestions sur la protection de témoins, ainsi que de l'information fournie sur l'exécution de délinquants mineurs et le meurtre de sorcières, de même que le recours excessif à la force par la police. Le rapport sur sa mission au Kenya rejoint plusieurs autres rapports émanant d'organes des Nations Unies et confirme la nécessité de combattre la culture de l'impunité qui règne dans le pays.

MME SHAZRA ABDUL SATTAR (Maldives) a notamment dit être d'accord avec l'affirmation selon laquelle la violence contre les femmes ne peut être dissociée du problème plus général de l'inégalité entre les sexes. Comme d'autres pays, les Maldives souffrent d'une prévalence de cette forme de violence, qui n'est souvent pas dénoncée. Il importe donc de réagir à ce phénomène en traitant aussi bien les violences que leurs causes sociales et les moteurs de la violence, autrement dit le cadre politico-économique décrit par la Rapporteuse spéciale. Aux Maldives, le cadre juridique de prévention de la violence contre les femmes ne contient pas encore de disposition spécifique concernant la violence domestique, une lacune que le Gouvernement entend bien combler, a assuré la représentante. Elle a demandé à la Rapporteuse spéciale des recommandations sur le moyen d'augmenter le nombre des représentantes féminines dans le pouvoir exécutif.

M. ALVARO AYALA (Colombie) a souligné que les disparitions forcées ou les exécutions extrajudiciaires sont non seulement interdits par la Constitution de son pays mais qu'elles étaient considérés comme des conduites assimilables à des actes de génocide. Il a fait valoir qu'un plan national de recherche des personnes disparues a été mis en place en Colombie; des mesures ont été prises pour que ces faits ne demeurent pas sous silence et pour que leurs auteurs soient poursuivis. Concernant le rapport de Mme Ertürk, la délégation colombienne apprécie la forme choisie par celle-ci pour traiter de la question. Le représentant colombien a assuré que le nouveau cadre légal en vigueur dans son pays vise à assurer à toutes les femmes l'exercice de leurs droits conformément au droit international et national dans la perspective de l'égalité sexuelle, de l'autonomie féminine et de la non-discrimination en aucune circonstance.

Institutions nationales des droits de l'homme et organisations non gouvernementales

M. HASSAN OMAR HASSAN (Commission nationale des droits de l'homme du Kenya) a déclaré que le rapport de M. Alston reflète bien la situation au Kenya. Il a ajouté qu'il ne suffisait pas de mettre en place des enquêtes, il faut passer aux actes. La Commission kényane n'est pas d'accord avec les attaques dont M. Alston fait l'objet,pour avoir dénoncé ceux qui sont coupables des violations les plus graves, à savoir les personnes au pouvoir. Les assassinats, exécutions sommaires et intimidations des défenseurs de droits de l'homme sont inacceptables. Cela se produit pourtant au Kenya et de nombreuses personnes se sont vues contraintes de fuir le pays.

MME LEILA DE LIMAS (Commission nationale pour les droits de l'homme des Philippines) a notamment déclaré que son institution avait lancé une série d'enquêtes au sujet des activités de l'escadron de la mort sévissant dans la ville de Davao. Des témoins et informateurs se sont présentés mais éprouvent toujours des inquiétudes à participer aux enquêtes, compte tenu du manque de confiance envers le système et par peur pour leur sécurité. La Commission philippine a obtenu des résultats mitigés dans ses tentatives de remédier à cette situation par le biais du dialogue avec les agents de police en uniforme. Au niveau législatif, elle a proposé des projets de loi sur les responsabilités hiérarchiques lors d'exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées, notamment. La Commission demande le soutien sans équivoque du Conseil des droits de l'homme pour l'aider à lutter les violations des droits de l'homme commises aux Philippines.

MME KATHARINA ROSE (Commission indépendante des droits de l'homme en Afghanistan) a souligné que ce pays connaissait à nouveau un conflit armé, les civils payant un lourd tribut pour cette nouvelle tragédie. L'émergence des activités des taliban est très préoccupante, surtout lorsque les civils sont utilisés comme boucliers humains, a-t-elle ajouté. La Commission a besoin d'un important soutien technique, a-t-elle indiqué. La Commission se félicite des recommandations du Rapporteur spécial à la suite de sa visite sur place. Elle émet l'espoir que l'État, en particulier, fera le maximum pour que les forces de l'ordre respectent les droits fondamentaux de la population et pour que les abus soient punis.

MME LUCIA NADER (Conectas Direitos Humanos) a félicité M. Alston pour le rapport sur sa visite au Brésil, dont les recommandation constitueront un instrument utile pour briser le cycle de violence et d'impunité. Les manquements des autorités publiques du Brésil ont érodé l'état de droit au Brésil. Des forces de sécurité corrompues, un système judiciaire biaisé et de fortes inégalités sociales ont fait du Brésil une des sociétés les plus violentes du monde. Dix pour cent de tous les meurtres dans le monde ont lieu au Brésil. Le crime organisé est le coupable le plus décrié mais il existe aussi une forme de violence institutionnalisée pratiquée par la police et qui vise les jeunes, les pauvres et les Noirs.

MME MADELEINE PENMAN (Centro de Derechos Humanos Miguel Agustín Pro Juárez, au nom également de l'Organisation mondiale contre la torture - OMCT; et Asia Pacific Forum on Women, Law and Development) a remercié la Rapporteuse spéciale, Mme Ertürk de ses travaux, et attiré l'attention sur le problème de la violence contre les femmes au Mexique. En mai 2006, plus de 2500 policiers ont agressé des manifestants et passants après l'échec d'une négociation avec des vendeuses de fleurs. Des policiers ont fait subir des mauvais traitements et violé plusieurs de ces femmes. À l'heure actuelle, aucune arrestation des responsables n'est encore intervenue. La représentante a demandé au Rapporteur spécial de réaliser une visite au Mexique afin d'enquêter, peut-être avec l'aide du Rapporteur spécial sur la torture, sur ces événements.

M. TENZIN KAYTA (Société pour les peuples en danger) a attiré l'attention sur l'attitude de la Chine qui dément qu'aucune tuerie n'ait eu lieu au Tibet lors de la répression par l'armée. Des exécutions extrajudiciaires ont lieu sur le plateau du Tibet, a-t-il affirmé, citant notamment le cas d'une jeune fille abattue par les forces de l'ordre. L'orateur a cité d'autres exemples d'exécutions sommaires, les corps étant brûlés par les forces de sécurité pour faire disparaître les cadavres. Il a donné le chiffre de 83 cas répertoriés par des témoins. Il a appelé le Rapporteur spécial à continuer de s'intéresser à la situation au Tibet.

M. SAMUEL MUHIRA MOHOCHI (Commonwealth Human Rights Initiative) a salué le travail effectué par le Rapporteur sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires. Il a un rôle ingrat, car de nombreuses délégations sont soucieuses de critiquer la qualité de son travail afin de rejeter ses conclusions, qui sont parfois embarrassantes pour elles. Cela était le cas du Kenya après l'assassinat de deux militants des droits de l'homme ou encore du Soudan. Le mandat de ce Rapporteur mérite d'être renforcé, afin de lui permettre d'offrir une protection digne de ce nom à des témoins menacés de représailles.

MME NADINE SAHOURI (Union des juristes arabes) a notamment demandé au Rapporteur spécial M. Alston de se pencher sur le sort des milliers d'Iraquiens victimes des actions des forces de sécurité, des milices affiliées aux autorités iraqiennes et des sociétés privées de sécurité. Le Rapporteur spécial devrait aussi enquêter sur l'augmentation du nombre des exécutions en Iraq et des menaces proférées contre des universitaires et professionnels iraqiens.

MME ENTESAR ARIABI (Fédération générale des femmes iraquiennes) a indiqué que plus de deux cents femmes étaient tuées chaque année dans son pays: il ne s'agit pas de crimes d'honneur, contrairement à ce qui est affirmé, mais d'une manière de masquer des viols, selon elle. Dénonçant de nombreux cas de torture et de disparitions, elle s'est insurgée contre le fait que certains suspects puissent trouver refuge sans difficulté à l'étranger. L'oratrice a cité le cas de son frère tué de manière atroce, appelant à ce que le cas de la situation en Iraq soit débattue dans cette enceinte: tous les cas de violation des droits de l'homme doivent pouvoir être évoqués, a-t-elle conclu.

M. ABDEL WAHAB HANI (Commission arabe des droits de l'homme) a demandé que le procureur de la Cour pénale internationale soit dûment informé des agissements de l'armée israélienne. Il a aussi souligné que le droit islamique est un droit positif, fruit d'une longue évolution, et qu'il s'agit d'un droit multiple. Il a aussi salué la collaboration exemplaire de la Rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes avec d'autres mécanismes, ce qui lui permet de souligner l'interdépendance des droits. Douze ans après la quatrième Conférence sur les femmes de Pékin, il serait pertinent de songer à dresser un bilan de l'évolution de la situation de femmes. La tenue d'une réunion «Pékin plus 20» serait ainsi la bienvenue.

M. MICHAEL ANTHONY (Asian Legal Resource Centre) a observé que l'Inde et la Pakistan, notamment, n'ont pas donné suite aux demandes de visites du Rapporteur spécial M. Alston. Le rapport sur la situation aux Philippines montre la gravité des assassinats qui s'y produisent, ce qui pose la question des moyens qui pourraient être mis en œuvre pour veiller à ce que le Gouvernement des Philippines collabore sérieusement à la lutte contre les violations des droits de l'homme. Le représentant s'est aussi inquiété des exécutions extrajudiciaires qui se commettent au Bangladesh.

M. MAJID TRAMBOO (International Human Rights Association of American Minorities, au nom également du Congrès du monde islamique) a déclaré que le Gouvernement indien n'avait pas répondu aux demandes répétées de visite de la part du Rapporteur spécial depuis une décennie. L'orateur a cité plusieurs cas de disparitions forcées et d'exécutions sommaires dans ce pays, et en particulier l'existence de fosses communes au Cachemire. Le Gouvernement indien doit faire mener une enquête indépendante sur ces faits, a-t-il ajouté, demandant au Rapporteur spécial de chercher à obtenir des réponses sur les cas non élucidés auprès du Gouvernement de l'Inde.

MME PATRIZIA SCANNELLA (Amnesty International)a regretté le refus du Gouvernement iranien à accepter une visite du Rapporteur sur les exécutions arbitraires. S'agissant du Brésil, Amnesty a reçu des rapports sur 8 cas d'exécution commis par la police, y compris celle d'un enfant de 8 ans qui mendiait du pain. Par ailleurs, Amnesty est d'avis que l'Afghanistan traverse la situation la plus difficile depuis 2001. Elle a déclaré attendre avec impatience les informations sur les mesures prises par les forces afghanes et internationales pour se conformer aux recommandations du Rapporteur à leur égard.

Réponses des Rapporteurs spéciaux

M. PHILIP ALSTON, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a répondu aux questions et observations des participants en soulignant nptamment qu'il était rassuré par l'appui de la coalition de la société civile kényane. Cette dernière a précisé que beaucoup de défenseurs des droits de l'homme kényans (dont des personnes ayant parlé au Rapporteur spécial) ont été condamnés à l'exil après avoir été menacés par la police ou les forces armées. Le Conseil des droits de l'homme pourrait envisager un mécanisme confié au Bureau chargé du suivi de la situation. En ce qui concerne l'Iran, le Rapporteur spécial s'est dit déçu par la réponse «sémantiquement efficace» du représentant de ce pays. La réalité est que douze délinquants qui étaient mineurs au moment des faits incriminés ont été exécutés, en violation flagrante d'une règle de base du droit international. La volonté de l'Iran de ne pas admettre la réalité de ce fait entraîne la nécessité pour le Conseil de rechercher un autre moyen de suivre la situation.

La réponse de la délégation des États-Unis est encourageante et devra être suivie d'effet, a déclaré M. Alston. Cependant, l'affirmation de la délégation selon laquelle les opérations militaires des États-Unis n'entrent pas dans le mandat est intenable: les opérations militaires en Iraq et en Afghanistan devraient alors être exclues du champ d'intérêt du Conseil des droits de l'homme, ce qui n'est pas imaginable.

Le Rapporteur spécial a enfin déploré l'affirmation de la délégation de Sri Lanka que l'action des procédures spéciales s'apparente à une chasse aux sorcières, espérant que le Gouvernement de ce pays saura nouer un dialogue avec d'autres titulaires de mandats du Conseil des droits de l'homme.


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