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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHÈVE SON DIALOGUE AVEC LA DÉLÉGATION DE L'UKRAINE

16 Octobre 2001



Comité des droits de l'homme
73ème session
16 octobre 2001
Après-midi




Le Président du Comité présente des observations préliminaires sur la mise en œuvre du Pacte relatif aux droits civils et politiques dans ce pays

Le pouvoir de suspendre le droit à la liberté d'expression et à la liberté de religion lors de la proclamation de l'état d'urgence en Ukraine est incompatible avec les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. C'est ce qu'a déclaré cet après-midi le Président du Comité des droits de l'homme, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, qui présentait des observations préliminaires à l'issue de l'examen du cinquième rapport périodique de l'Ukraine.

M. Bhagwati s'est par ailleurs félicité de la franchise avec laquelle la délégation ukrainienne a reconnu l'existence, dans le pays, d'un problème de torture infligée aux détenus par les représentants de l'ordre. Les manifestations d'antisémitisme en Ukraine doivent impérativement cesser, a par ailleurs affirmé le Président du Comité. Relevant que l'Ukraine a fait des progrès considérables depuis la présentation de son précédent rapport périodique, il a toutefois jugé regrettable que le Pacte n'ait toujours pas un statut plus élevé que la Constitution.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport ukrainien avant de les rendre publiques à la fin de la présente session, le vendredi 2 novembre 2001.

En début de séance, la délégation ukrainienne, dirigée par M. Olexander Paseniuk, Secrétaire d'État adjoint au Ministère de la justice de l'Ukraine, a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant du système de prise en charge des détenus; des décès en détention; de l'assistance judiciaire gratuite; de l'abolition de la peine de mort; de la protection des journalistes et de la liberté d'expression des médias; de la situation des femmes; de l'objection de conscience.

Le Comité entamera demain matin, à 10 heures, l'examen du rapport du cinquième rapport périodique du Royaume-Uni (CCPR/C/UK/99/5 et CCPR/C/UKOT/99/5 - territoires d'outre-mer).


Fin de l'examen du rapport de l'Ukraine

La délégation a souligné que le système de prise en charge des détenus en Ukraine - qui relevait jadis du Ministère de l'intérieur -, est désormais du ressort du Premier ministre. C'est pourquoi les suspects qui sont arrêtés ne sont pas pris en charge par des policiers mais par ce qui constitue en fait un organe correctionnel autonome.

La plupart des cas de décès en détention sont liés à la tuberculose, à laquelle ont succombé 65 personnes en 2000. Les suicides constituent une autre cause importante de décès en détention puisqu'on en dénombrait 45 en 1999. Néanmoins, leur nombre est en diminution ces dernières années, en partie parce qu'une assistance psychologique est désormais fournie aux détenus, a fait observer la délégation.

Environ 30% de la population ukrainienne vit officiellement en dessous du seuil de pauvreté, de sorte qu'un grand nombre d'Ukrainiens ne peuvent s'offrir les services d'un avocat, a expliqué la délégation. Aussi, une assistance judiciaire gratuite est-elle apportée par l'État chaque année dans le cadre de milliers d'affaires.

Un expert ayant demandé un complément d'information sur l'abolition de la peine capitale, la délégation a précisé que la peine de mort ne saurait désormais plus être prononcée ni appliquée en Ukraine, que ce soit en tant de paix ou en temps de guerre.

La délégation a reconnu que la question de la protection des journalistes est un problème grave en Ukraine. Les autorités ukrainiennes sont donc en train d'envisager toute une série de mesures en vue d'assurer la protection de ces professionnels, a indiqué la délégation.

En ce qui concerne la liberté d'expression, notamment pour les médias, la délégation a reconnu que la plupart des médias appartiennent à des systèmes oligarchiques de sorte qu'il est très difficile pour les petits médias de survivre. Les experts estiment que les problèmes que rencontre le pays dans ce domaine ne se posent pas du point de vue de la censure mais du point de vue de la déontologie.

S'agissant de la situation des femmes en Ukraine, la délégation a rappelé que le pays a ratifié dès 1977 la Convention internationale sur l'élimination de la discrimination contre les femmes. Cette démarche a entraîné une véritable révolution qui a permis de battre en brèche les stéréotypes à l'égard des femmes. En 1994, le Parlement comptait 4% de femmes contre 8% aujourd'hui, a fait valoir la délégation.

Interrogée sur les dispositions relatives à l'objection de conscience au service militaire, la délégation a expliqué que pour avoir accès au service alternatif, il faut remplir trois conditions: la personne doit appartenir à une organisation religieuse; avoir de véritables croyances religieuses; et sa croyance religieuse n'autorise pas l'utilisation d'une arme pendant le service militaire. La durée du service alternatif est alors de deux ans, a indiqué la délégation.


Observations préliminaires sur le rapport de l'Ukraine

Présentant des observations préliminaires sur le cinquième rapport périodique de l'Ukraine, le Président du Comité, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, a relevé que si le rapport est riche en détails pour ce qui est de la législation existante, il pâtit d'un manque d'informations sur ce qui se passe dans la réalité.

L'Ukraine a fait des progrès considérables depuis la présentation du précédent rapport, a estimé le Président. En effet, ces cinq dernières années ont vu l'adoption d'une nouvelle Constitution ainsi que la création d'un poste d'ombudsman (médiateur) doté de larges pouvoirs et d'une nouvelle Cour constitutionnelle. En outre, de nouvelles lois ont été adoptées afin d'améliorer la situation des droits de l'homme dans le pays. De plus, la peine de mort a été abolie, y compris en temps de guerre.

Il est toutefois regrettable que le Pacte n'ait pas reçu un statut plus élevé que la Constitution et il faudrait faire en sorte que les dispositions du Pacte prévalent sur celles de la loi interne, a déclaré M. Bhagwati. Il faudrait donc que l'Ukraine amende l'article 9 de sa Constitution afin d'assurer la primauté du Pacte sur le droit interne. Le Président du Comité a par ailleurs fait observer que la notion de minorité nationale semble avoir été mal définie en Ukraine; on ne comprend pas bien par exemple si les minorités nationales incluent les non-citoyens. D'autre part, la participation des femmes à la vie du pays est encore trop faible, comme en témoigne le nombre insuffisant de femmes députées en Ukraine.

Le pouvoir de suspendre le droit à la liberté d'expression et à la liberté de religion lors de la proclamation de l'état d'urgence est incompatible avec l'article 4 du Pacte, a par ailleurs souligné M. Bhagwati. Il s'est par ailleurs réjoui de la franchise avec laquelle la délégation a reconnu l'existence d'un problème de torture infligée aux détenus par les représentants de l'ordre. Il est en outre regrettable que les motifs permettant d'échapper au service militaire obligatoire se limitent à la prise en compte de considérations religieuses sans tenir compte de l'objection de conscience pure et simple. Les manifestations d'antisémitisme en Ukraine doivent impérativement cesser, a par ailleurs affirmé le Président du Comité.

La délégation ukrainienne a remercié les membres du Comité pour l'intérêt qu'ils ont manifesté à l'égard de ce cinquième rapport périodique de l'Ukraine. La délégation a assuré le Comité que toutes ses observations seront prises en compte lors de l'élaboration du prochain rapport périodique que le pays présentera en vertu du Pacte.




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