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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHÈVE SA DISCUSSION SUR LE DEUXIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DU GABON

27 Octobre 2000



Comité des droits de l'homme
70ème session
27 octobre 2000
Après-midi





La Présidente du Comité présente des observations préliminaires



Le Comité des droits de l'homme a achevé, ce matin, sa discussion sur le deuxième rapport périodique du Gabon, en entendant les observations préliminaires de la Présidente, Mme Cecilia Medina Quiroga. Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport gabonais avant de les rendre publiques à la fin de la session, le vendredi 3 novembre 2000.

La Présidente a jugé que les réponses apportées par la délégation gabonaise sont insuffisantes et a souligné que des interrogations subsistent en ce qui concerne, notamment, les critères en vertu desquels une personne peut être détenue. En dépit des préoccupations déjà exprimées par le Comité il y a quatre ans, certains problèmes persistent, en particulier le maintien de la possibilité d'emprisonnement pour dette. De plus, le Conseil national de la communication dispose de pouvoirs de contrôle sur les médias qui laissent à penser que la liberté de la presse et la liberté d'expression ne sont pas pleinement garanties. Il ne saurait être question, comme le fait la délégation, de mettre en avant le souhait des citoyens de respecter la coutume pour justifier le non-respect de certaines dispositions du Pacte, a par ailleurs estimé la Présidente; le Gabon devrait abolir la polygamie.

Cet après-midi, la délégation gabonaise, dirigée par M. Pascal Désiré Missongo, Ministre de la justice, a apporté aux experts des compléments d'information s'agisssant notamment du travail des enfants; de la situation des réfugiés; de l'administration de la justice; des conditions de détentions; de la situation des femmes.


Le Comité tiendra une séance publique lundi après-midi, de 15 heures à 21 heures, consacrée à une discussion avec les États parties au Pacte.


Fin de l'examen du rapport du Gabon

Plusieurs experts s'étant inquiétés ce matin d'information faisant état de l'exploitation du travail des enfants au Gabon, la délégation gabonaise, dirigée par le Ministre de la justice, M. Pascal Désiré Missongo, a déclaré qu'il s'agit là d'un phénomène nouveau dans le pays, pratiqué par les communautés étrangères ouest-africaines présentes dans le pays qui font venir des enfants chez elles et les emploient. Lorsque la police se présente au domicile de ces familles, elles prétendent qu'il s'agit de leurs propres enfants. Ce phénomène choque les Gabonais, a insisté la délégation avant de préciser que des mesures seront prises pour sanctionner ce type de pratiques.

En ce qui concerne la situation des réfugiés dans le pays, la délégation a précisé que le Gabon travaille avec le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) qui vient d'ouvrir un bureau à Libreville. On ne saurait prétendre que les réfugiés sont victimes de discrimination au Gabon, a déclaré la délégation. En effet, les réfugiés au Gabon jouissent du même type d'accès aux services de santé, d'éducation et de travail que les citoyens gabonais eux-mêmes. Même les réfugiés économiques, qui ne sont pas reconnus en tant que tels, bénéficient des services de santé, a souligné la délégation.

S'agissant de l'administration de la justice, la délégation a rappelé que la constitution proclame l'indépendance du pouvoir judiciaire à l'égard des autres pouvoirs ainsi que l'indépendance du juge dans le cadre de ses fonctions. Ainsi, le juge n'obéit qu'à la loi, à l'exclusion de toute autre considération. En outre, le juge est dans l'obligation de motiver sa décision et cette décision peut faire l'objet d'un contrôle de la part des juridictions supérieures (cour d'appel puis cour de cassation pour ce qui est des décisions de la cour d'appel). Une des parties au procès peut demander qu'un juge soit dessaisi de l'affaire si elle estime que son indépendance est en cause. Par ailleurs, un juge ayant failli à ses obligations de moralité et de probité peut être mis en cause devant un conseil de discipline de la magistrature qui, dans ce cas, n'est pas présidé par le Président de la République, a ajouté la délégation.

Toute personne inculpée doit se voir notifier les charges pesant à son encontre, a poursuivi la délégation. À partir de cette notification, l'inculpé dispose d'un délai pour trouver un avocat. À tout moment de la procédure, l'inculpé peut invoquer le respect des droits de la défense, la violation de ces droits constituant un motif de cassation. C'est au Procureur de la République qu'il incombe de veiller au respect des garanties en matière de garde à vue, a par ailleurs précisé la délégation.

En ce qui concerne les conditions de détention, la délégation a rappelé que le Gabon compte une prison dans chacune des neuf provinces du pays. Certaines de ces prisons datent de l'époque coloniale alors que d'autres sont de construction plus récente. La prison de Libreville a été rénovée et agrandie, a indiqué la délégation. Les prisons sont construites de façon à ce que les détenus puissent être regroupés en fonction de leur sexe, du degré de l'infraction qu'ils ont commise et de leur âge.

En ce qui concerne les personnes atteintes de VIH/sida, la délégation a indiqué qu'elles allaient désormais être intégralement prises en charge par l'État.

Répondant aux préoccupations exprimées ce matin par plusieurs membres du Comité s'agissant de la situation des femmes au Gabon, la délégation a rappelé que, traditionnellement, des femmes faisaient partie de ce que l'on appelle les Sages et prenaient largement part au processus de prise de décision. La Constitution gabonaise reconnaît l'égalité entre hommes et femmes, a souligné la délégation. Certes, il reste des progrès à faire en matière de promotion de la femme mais cela est aussi le cas dans la plupart des pays du monde, a fait observer la délégation. À diplôme égal, les salaires entre hommes et femmes sont égaux au Gabon, a fait valoir la délégation.

Pour ce qui est de la polygamie, la délégation gabonaise a indiqué qu'aujourd'hui, un homme peut épouser jusqu'à quatre femmes et non plus une trentaine comme cela pouvait arriver par le passé. Parfois, pour des raisons diverses, c'est l'homme qui souhaite la monogamie et la femme qui insiste pour maintenir la polygamie dans son foyer, a fait remarquer la délégation.

En ce qui concerne les droits de succession, la délégation a assuré que cette question fait l'objet d'un débat difficile, car lorsqu'est évoquée la question du veuvage, les pesanteurs culturelles se font très fortes. Il convient néanmoins de souligner que le Gabon est parti d'une situation où la veuve ne recevait rien en héritage pour arriver à la situation actuelle où elle reçoit le quart de l'héritage, a fait observer la délégation.

La délégation a par ailleurs souligné que le Gabon a mis sur pied une commission ministérielle qui est chargée de détecter toutes les formes de discrimination qui pourraient subsister dans le pays.

Aujourd'hui, la majorité des petits emplois au Gabon se trouvent aux mains des étrangers, a par ailleurs indiqué la délégation, qui a reconnu que le pays a besoin de la présence de ces étrangers.

Plusieurs experts ayant souhaité obtenir davantage d'informations sur le mandat de la Commission nationale des droits de l'homme dont les membres viennent d'être nommés, la délégation a précisé que cette Commission pourra se saisir de toute requête pour violation des droits de l'homme pourvu que cette requête ne concerne pas une violation qui a cessé ni une violation encore pendante en justice. En outre, l'auteur de la requête et son domicile doivent être clairement identifiés.


Observations préliminaires de la Présidente sur le rapport du Gabon

Présentant des observations préliminaires sur le deuxième rapport périodique du Gabon, la Présidente du Comité, Mme Cecilia Medina Quiroga, a regretté le caractère laconique de ce rapport ainsi que le peu de réponses apportées ce matin par la délégation aux questions soulevées par les experts. Les réponses apportées cet après-midi par la délégation ont cependant permis aux experts de se faire une meilleure idée de la situation dans le pays, a reconnu la Présidente. Toutefois des interrogations subsistent, notamment en ce qui concerne les critères en vertu desquels une personne peut être détenue.

La Présidente du Comité a par ailleurs souligné que certains problèmes persistent en dépit des préoccupations exprimées par le Comité à l'issue de la présentation du rapport initial du Gabon, il y a quatre ans, notamment en ce qui concerne l'emprisonnement pour dette. Quant à la liberté de la presse, l'article 95 de la constitution octroie au Conseil national de la communication de larges pouvoirs de contrôle sur les médias qui laissent à penser que la liberté de la presse et la liberté d'expression ne sont pas aussi bien garanties que ce que la délégation semble l'indiquer.

En ce qui concerne les Pygmées, le Gabon ne semble pas prendre en compte l'obligation de l'État de garantir les droits des minorités telle qu'elle est exprimée dans le Pacte, a déclaré Mme Medina Quiroga. Par ailleurs, il ne saurait être question, comme le fait la délégation, de mettre en avant le souhait des citoyens de respecter la coutume pour justifier le non-respect de certaines dispositions du Pacte, a déclaré la Présidente. Certes, comme partout dans le monde, les femmes gabonaises se battent pour faire valoir leurs droits, mais le Comité est chargé d'évaluer le comportement de l'État et non celui des femmes, a rappelé Mme Medina Quiroga. Quant à la polygamie, il est évident qu'elle est contraire au Pacte et que le Gabon devrait l'abolir, a-t-elle déclaré. Elle a également mis l'accent sur les préoccupations exprimées par les membres du Comité en ce qui concerne les lois relatives à l'héritage et au divorce.

La délégation gabonaise a assuré qu'elle déploierait tous ses efforts pour faire en sorte que, lors de la présentation du prochain rapport périodique du pays, les inégalités aient été considérablement réduites voire éliminées.



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