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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ENTAME L'EXAMEN DU CINQUIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE L'UKRAINE

15 Octobre 2001



Comité des droits de l'homme
73ème session
15 octobre 2001
Après-midi




La délégation indique que la peine de mort à été abolie



Le Comité des droits de l'homme a entamé, cet après-midi, l'examen du cinquième rapport périodique de l'Ukraine sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Présentant ce rapport, M. Olexander Paseniuk, Secrétaire d'État adjoint au Ministère de la justice de l'Ukraine, a notamment souligné que le 28 juin 1996, son pays s'est doté d'une nouvelle Constitution entièrement conforme aux dispositions du Pacte. La délégation ukrainienne a en outre indiqué que la peine capitale a été abolie en Ukraine et ne figure plus dans le Code pénal adopté en avril dernier. Le pays compte actuellement un total de 578 personnes condamnées à la prison à vie, a-t-il été précisé.

La délégation ukrainienne est également composée de M. Mykhailo Skuratovskyi, Représentant permanent de l'Ukraine auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants du Ministère de la justice, du Bureau du Procureur général, du Conseil supérieur des droits de l'homme de l'Ukraine (Verkhovna Rada) et de la Mission permanente de l'Ukraine auprès des Nations Unies à Genève.

La délégation a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant notamment du cadre général de mise en œuvre du Pacte; du statut du Pacte dans l'ordre juridique interne de l'Ukraine; du fonctionnement du bureau de l'ombudsman; de l'état d'urgence; du respect du principe de non-discrimination; de la situation des femmes; du trafic de personnes; des conditions de détention.

Une loi sur la prévention de la violence au sein de la famille est actuellement à l'étude devant le Parlement ukrainien, a notamment indiqué la délégation. Si, après la chute du mur de Berlin, l'Ukraine est effectivement devenue un pays de transit pour la traite de personnes, le pays se trouve aussi au premier rang de ceux qui ont adopté une législation pour combattre ce phénomène, a-t-elle en outre souligné.

Le Comité achèvera demain matin, à 10 heures, l'examen du rapport de l'Ukraine.



Présentation du rapport de l'Ukraine

Présentant le rapport de son pays, M. OLEXANDER PASENIUK, Secrétaire d'État adjoint au Ministère de la justice de l'Ukraine, a souligné que le 28 juin 1996, l'Ukraine s'est dotée d'une nouvelle Constitution entièrement conforme aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L'article 21 de cette loi suprême affirme que les droits et libertés de l'homme sont inaliénables, a-t-il précisé. Par conséquent, l'Ukraine prend des mesures afin de parfaire l'action de l'État en matière de promotion des droits de l'homme. Le pays a ainsi mis en place un ombudsman ainsi qu'un tribunal constitutionnel. Une série de lois a également été adoptée qui vise à garantir les droits civils et politiques. Le pays poursuit en outre la réforme de son système judiciaire, a indiqué M. Paseniuk. En avril dernier, un nouveau Code pénal a ainsi été adopté alors que des modifications ont été apportées au Code de procédure pénale, a-t-il précisé. Un système de tribunaux d'appel a également été mis en place dans le cadre de cette réforme. On le voit, l'Ukraine entend mettre en place les garanties indispensables à la promotion et à la protection des droits de l'homme de chacun, a fait valoir le Secrétaire d'État adjoint.

M. Paseniuk a par ailleurs assuré que son pays accorde une grande importance à la lutte contre les violations des droits de l'homme dont pourraient être victimes ses citoyens. Si d'importants progrès ont indéniablement été réalisés dans ce domaine, il reste certes beaucoup à faire pour porter toute la législation nationale au niveau des normes internationales, a reconnu le Secrétaire d'État adjoint.

Le cinquième rapport périodique de l'Ukraine (CCPR/C/UKR/99/5) indique notamment que chacun a droit de s'adresser au Commissaire aux droits de l'homme du Conseil suprême pour la protection de ses droits. Depuis qu'est garanti dans la Constitution le droit des individus à faire appel des décisions, actes ou omissions des organes du pouvoir de l'État et de l'administration locale autonome ainsi que de leurs fonctionnaires, le nombre de recours formés par des citoyens pour défendre leurs droits et libertés a nettement augmenté. Cela montre qu'un changement est en train de se produire dans le rôle des tribunaux qui, d'organes chargés de l'administration des peines, sont devenus des organes chargés de l'administration de la justice capables d'assurer la protection voulue aux citoyens dont les droits ou les libertés ont été bafoués. Il n'a pas été établi en Ukraine de tribunal administratif, précise le rapport; toutes les affaires découlant de rapports juridiques administratifs sont donc jugées par des tribunaux de droit commun. En 1998, les tribunaux se sont prononcés sur 12 367 recours formés par des citoyens contre des actes illégaux commis par des organes du pouvoir d'État ou par des membres de ces organes; 9 685 plaignants, soit 56% ont obtenu gain de cause. Le nombre des plaintes examinées était de 3 160 en 1994, de 3 750 en 1995, de 6 277 en 1996 et de 8 666 en 1997.

En cas de proclamation de l'état d'urgence, les mesures ci-après peuvent être adoptées, indique par ailleurs le rapport: établissement de réglementations spéciales concernant l'entrée et la sortie et restriction du droit de libre circulation sur le territoire soumis à l'état d'urgence; restriction de la circulation des véhicules de transport et inspection de ces véhicules; protection renforcée de l'ordre social et des objets assurant l'activité vitale de la population et de l'économie nationale; interdiction des rassemblements, réunions, défilés et manifestations de rue ainsi que des manifestations sportives et autres rassemblements de masse; interdiction des grèves. Dans certains cas, des mesures supplémentaires peuvent être prises, parmi lesquelles: l'imposition d'un couvre-feu; la cessation, après dû avertissement, des activités des partis politiques, des organisations publiques, des mouvements de masse et des associations indépendantes si ces activités font obstacle à la normalisation de la situation; l'introduction de la censure.

Le rapport indique par ailleurs que la République autonome de Crimée possède sa propre constitution, un organe représentatif (Conseil suprême) et un gouvernement (Conseil des ministres). Le 4 septembre 1998, a été conclu entre les gouvernements ukrainien et ouzbek un accord qui simplifie la procédure de renoncement par les Tatars de Crimée à la citoyenneté ouzbèke. L'application des principales dispositions de cet accord permettra à la plupart des rapatriés (plus de 70% des déportés retournés dans la République autonome de Crimée venaient d'Ouzbékistan) d'acquérir rapidement la citoyenneté ukrainienne, explique le rapport. À l'instigation du Cabinet des ministres, un groupe d'experts des questions des peuples autochtones a été établi en vue de réglementer au plan législatif le statut des Tatars de Crimée en tant que peuple autochtone.


Examen du rapport de l'Ukraine

S'agissant du cadre général d'application de la Convention, la délégation a expliqué que la Cour de cassation est l'organe judiciaire suprême en Ukraine. Tout citoyen peut ester en justice, s'adresser directement à l'ombudsman (médiateur) et, après avoir épuisé tous les moyens de recours interne, s'adresser aux organes internationaux. Les accords internationaux auxquels est partie l'Ukraine font partie de la législation interne de sorte que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques a force de loi sur tout le territoire ukrainien, a précisé la délégation.

La délégation a indiqué que la peine capitale est abolie en Ukraine et ne figure plus dans le Code pénal adopté en avril dernier et entré en vigueur le 1er septembre dernier. La peine de mort a donc été remplacée par d'autres peines comme l'emprisonnement à perpétuité. Les quelque quatre cents personnes qui avaient précédemment été condamnées à mort ont donc vu leur peine commuée en emprisonnement à perpétuité. L'an dernier, 141 personnes ont été condamnées à perpétuité, a précisé la délégation. Ainsi, l'Ukraine compte-t-elle actuellement au total quelque 578 personnes condamnées à la prison à vie.

Interrogée sur le fonctionnement du bureau de l'ombudsman (médiateur), la délégation a rappelé que cette "institution de défense extrajudiciaire des droits et libertés de l'homme", habilitée par le Conseil supérieur des droits de l'homme, a été créée en 1997. L'ombudsman jouit d'un statut très élevé en vertu de la Constitution, a fait valoir la délégation. Il se caractérise par son indépendance vis-à-vis de toute autorité et c'est le Parlement qui l'élit, à bulletin secret, pour un mandat de cinq ans, a-t-elle précisé. Ainsi, l'ombudsman jouit-il d'une très large marge de manœuvre et d'une grande liberté pour toute action qu'il désire entreprendre. Au cours de ses trois années d'existence, le médiateur a reçu 186 000 plaintes, a indiqué la délégation avant de souligner que les plaintes qui peuvent lui être adressées sont aussi bien individuelles que collectives. À l'heure actuelle, le bureau du médiateur compte 67 collaborateurs, essentiellement des juristes, a précisé la délégation.

La délégation a indiqué que l'état d'urgence peut être décrété en Ukraine lorsque le pays se trouve confronté, entre autres, à une tentative de prise de pouvoir, à une atteinte à l'intégrité territoriale du pays, à une menace pesant sur les frontières nationales, à une catastrophe naturelle, ainsi qu'à une situation de guerre ou de menace de guerre. La délégation a assuré que les législations relatives à l'état d'urgence et à l'état de guerre ont été mises en conformité avec le Pacte et les autres normes internationales. L'état d'urgence et l'état de guerre sont déclarés par décret et confirmés par le Parlement, a précisé la délégation. Ces deux types de situations impliquent qu'un petit nombre de droits et libertés sont restreints. Les droits et libertés susceptibles de restriction conformément à la Constitution ne concernent que huit articles du Pacte, a fait observer la délégation. Sont ainsi prévues, entre autres, des restrictions concernant les étrangers et apatrides, l'inviolabilité du domicile, le secret de la correspondance et des communications, le respect de la vie privée, la liberté de circulation, la liberté de pensée et de parole, la liberté de conscience et de religion, la liberté d'association, le droit de participer à des référendums, le droit de grève et le droit de se réunir pacifiquement et d'organiser des manifestations.

En ce qui concerne le respect du principe de non-discrimination, la délégation a notamment rappelé que plusieurs milliers de Roms vivent en Ukraine, la plupart d'entre eux dans la région qui se trouve au-delà des Carpates. Parmi les principaux problèmes identifiés s'agissant de cette communauté, figurent la nécessité de relever le niveau d'éducation de la jeunesse tzigane et de promouvoir la capacité des Tziganes à trouver un emploi, a fait observer la délégation. Aussi, l'Ukraine s'est-elle dotée d'écoles tziganes. Un musée de l'histoire des Roms en Ukraine a par ailleurs été créé. À également été institué un Forum des Tziganes en Ukraine dont l'objet est d'assurer la sauvegarde de la culture et de la langue roms tout en assurant la promotion et l'intégration des Roms en Ukraine. Cet organe coopère notamment avec l'OSCE, a précisé la délégation. Aucune discrimination raciale n'est appliquée à l'encontre de la population rom en Ukraine, a assuré la délégation.

S'agissant de la situation des femmes, la délégation a notamment indiqué que le Parlement ukrainien compte actuellement près d'une quarantaine de femmes parmi ses membres (soit 8% des parlementaires). Le Code du travail prévoit un certain nombre de dispositions spécifiques au bénéfice des femmes, en particulier pour les femmes enceintes et pour les femmes ayant des enfants de moins de 14 ans ou des enfants handicapés, a par ailleurs souligné la délégation. Il est vrai que les femmes ne sont pas encore assez nombreuses dans les postes de direction, a-t-elle reconnu. La délégation a ajouté qu'une loi sur la prévention de la violence au sein de la famille est actuellement à l'étude devant le Parlement ukrainien.

Interrogée sur les mesures prises par le pays pour lutter contre la traite des personnes, la délégation a fait valoir que si, après la chute du mur de Berlin, l'Ukraine est effectivement devenue un pays de transit pour la traite d'êtres humains, le pays se trouve aussi au premier rang de ceux qui ont adopté une législation pour combattre ce phénomène. La délégation a indiqué qu'un peu moins d'une centaine de poursuites judiciaires ont été intentées à l'encontre de personnes suspectées de s'être livrées à un tel trafic. Plusieurs dizaines de peines ont d'ores et déjà été prononcées, y compris à l'encontre de femmes qui se livraient à de telles activités criminelles. La délégation a précisé que l'Ukraine a signé en novembre dernier la Convention contre le crime transnational organisé. Le pays a également signé un certain nombre d'accords bilatéraux organisant la coopération avec d'autres pays aux fins de la lutte contre le trafic de personnes. Un Conseil national de coordination - comprenant des représentants d'Interpol - a en outre été créé afin de prévenir la traite de personnes.

Interrogée sur les conditions de détention dans le pays, la délégation a reconnu que la situation était effectivement assez grave eu égard aux problèmes liés à la réforme du système pénitentiaire. En dépit des problèmes qui existaient et qui continuent d'exister - s'agissant en particulier de la surpopulation carcérale - on constate néanmoins certaines améliorations, notamment en ce qui concerne l'accès à l'air et à la lumière, a assuré la délégation. Ont en effet été supprimées des grilles qui ne laissaient filtrer ni l'air ni la lumière. À l'heure actuelle, 220 000 personnes se trouvent dans des lieux de détention, a précisé la délégation qui a par ailleurs reconnu qu'un grand nombre de personnes faisant l'objet d'une inculpation pénale sont placées en détention provisoire.

D'énormes progrès ont été réalisés en Ukraine dans le domaine des droits de l'homme, a estimé un membre du Comité. À l'instar de cet expert, la plupart des membres du Comité se sont néanmoins enquis, entre autres, de la situation des minorités en Ukraine, en particulier en ce qui concerne les minorités linguistiques et religieuses autres que les minorités nationales.

Un membre du Comité a demandé le nombre et les causes de décès en cours de détention enregistrés en Ukraine. Il a par ailleurs estimé que les problèmes de torture dans le pays semblent être plus importants que ce que la délégation paraît disposée à reconnaître.




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