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Communiqués de presse

LA CONFÉRENCE D'EXAMEN DE DURBAN ENTAME SON DIALOGUE DE HAUT NIVEAU EN ENTENDANT LE PRÉSIDENT IRANIEN

20 Avril 2009



Conférence d'examen de Durban
APRES-MIDI

20 avril 2009


Les participants déplorent l'absence de certains États et insistent sur la nécessité d'accélérer la mise en œuvre des objectifs définis en 2001


La Conférence d'examen de Durban a entamé, cet après-midi, son débat de haut niveau en entendant le Président de la République islamique d'Iran ainsi que des ministres et hauts dignitaires de treize autres pays et le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique. Tout en déplorant l'absence de plusieurs États, les participants ont lancé un appel pour une mobilisation mondiale et solidaire dans la mise en œuvre des objectifs définis en 2001.

Ouvrant ce débat de haut niveau, le Président de la République islamique d'Iran, M. Mahmoud Ahmadinejad, a déclaré que le racisme est le signe d'une ignorance qui met aujourd'hui en danger la paix internationale et la coexistence entre les pays. Pour lutter contre les manifestations de racisme, il faut en revenir aux valeurs morales, aux valeurs spirituelles et à la dévotion à Dieu. Après la deuxième guerre mondiale, a également déclaré M. Ahmadinejad, «sous prétexte des souffrances des juifs et de l'holocauste», un groupe de pays puissants a eu recours à l'agression militaire pour faire d'une nation entière une population sans abri; ils ont envoyé des migrants d'Europe, des États-Unis et d'ailleurs pour établir un «gouvernement totalement raciste» en Palestine occupée. Le Président iranien a dénoncé «la conspiration de certaines puissances et des cercles sionistes contre les buts et objectifs de cette Conférence d'examen». Il devrait être reconnu que le fait de boycotter une telle session indique clairement le soutien à un exemple flagrant du racisme. «La gestion injuste et inéquitable du monde se trouve maintenant en fin de course», a par ailleurs assuré le Président iranien, plaidant notamment pour une réforme rapide de la structure du Conseil de sécurité.

Plusieurs délégations ont quitté la salle au cours de l'intervention du Président Ahmadinejad. Le Président de la Conférence a pour sa part appelé à une atmosphère de calme et de sérénité et exhorté les participants à se respecter mutuellement.

Des intervenants ont estimé que les propos du Président iranien allaient à l'encontre de l'esprit de la Conférence et ont invité les participants à ne pas permettre que la Conférence soit prise en otage. Au cours du débat, la majorité des intervenants a estimé regrettable que certains États membres aient choisi de ne pas participer à la Conférence. Faisant valoir que le document négocié de la Conférence - qui ne place aucun pays sous le feu des critiques, ne cite aucune crise régionale spécifique, traite les tragédies passées de manière équilibrée et condamne les formes contemporaines de racisme et de discrimination - incarne un excellent compromis, certains ont qualifié l'absence de ces États d'inexplicable et d'inacceptable. Ils ont néanmoins souhaité que ces pays s'engagent tout de même à mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d'action de Durban qui, ont-ils rappelé, ont fait l'objet d'un consensus et doivent aujourd'hui être réaffirmés.

Lutter contre le racisme n'est pas une option, mais une obligation morale et éthique, a-t-il en effet été souligné. Forts de cette conviction, les participants au dialogue de haut niveau ont formulé espoirs et attentes pour cette «conférence historique». Les participants ont ainsi été invités à se souvenir des objectifs établis il y a huit ans, alors que les gouvernements, les organisations non gouvernementales, les pays et les peuples convenaient de l'importance de créer un monde exempt de racisme, de discrimination et d'intolérance. Outre offrir l'occasion de faire le bilan de la mise en œuvre des objectifs fixés en 2001, la Conférence permet d'imprimer une nouvelle dynamique à la mobilisation internationale, a-t-il été observé. La Conférence d'examen de Durban doit incarner un tournant historique et décisif, où le dialogue triomphe de la discorde.

Outre le Président de la République islamique d'Iran, seul Chef d'État à prendre la parole aujourd'hui, la Conférence a entendu les déclarations des Ministres des affaires étrangères de la Norvège, de l'Afrique du Sud, du Cameroun et de la Tanzanie; les Ministres de la justice du Botswana, du Mozambique, du Sénégal, de la Tunisie et du Maroc; la Ministre de la coopération internationale de l'Égypte; le Ministre des services sociaux et du bien-être social de Sri Lanka; le Ministre principal du Secrétariat spécial pour les politiques de promotion de l'égalité raciale du Brésil; et la Présidente du Conseil national pour la prévention de la discrimination du Mexique. Le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique a également participé au débat.

La Conférence d'examen poursuivra son débat de haut niveau demain dès 10 heures.


Débat de haut niveau

M. MAHMOUD AHMADINEJAD, Président de la République islamique d'Iran, a déclaré que si les leçons avaient été tirées de l'oppression, des horreurs et des crimes des deux guerres mondiales, des rayons d'espoir auraient pu filtrer pour confronter l'avenir. Mais les puissances victorieuses se sont autoproclamées les conquérantes du monde en imposant des lois et arrangements oppressifs. Il suffit pour s'en convaincre de se pencher sur le Conseil de sécurité, qui est un legs des deux guerres mondiales, a-t-il expliqué. Quelle est la logique dont s'inspire l'octroi, par ces puissances, d'un droit de veto, a-t-il demandé? Se pourrait-il que cela soit conforme avec les principes reconnus de justice, d'égalité devant la loi, d'amour et de dignité humaine ou est-ce plutôt conforme à la discrimination, à l'injustice, voire à l'humiliation de la majorité des pays? Le Conseil de sécurité est l'organe suprême de prise de décision en matière de préservation de l'ordre et de la sécurité internationaux; comment s'attendre à ce que soient réalisées la justice et la paix lorsque la discrimination est légalisée et lorsque l'origine de la loi est dominée par la coercition et la force plutôt que par la justice et le droit?

Après la deuxième guerre mondiale, «sous prétexte des souffrances des juifs et de l'holocauste», un groupe de pays puissants a eu recours à l'agression militaire pour faire d'une nation entière une population sans abri, a poursuivi le Président iranien (plusieurs délégations ont alors quitté la salle). Ces pays ont envoyé des migrants d'Europe, des États-Unis et d'ailleurs pour établir un «gouvernement totalement raciste» en Palestine occupée et, pour compenser les «sinistres conséquences du racisme en Europe», ont aidé à porter au pouvoir les racistes les plus cruels et les plus durs en Palestine. Le Conseil de sécurité a aidé à stabiliser le régime sioniste et a soutenu les sionistes durant ces six dernières décennies, leur laissant main libre pour continuer leurs crimes, a insisté le Président iranien. Il est tout à fait regrettable qu'un certain nombre de gouvernements occidentaux ainsi que les États-Unis aient entrepris de défendre ces racistes auteurs de génocide; ils ont toujours soutenu les actes odieux du régime sioniste ou sont restés silencieux face à ces actes, a déclaré M. Ahmadinejad. Ce qui est le plus regrettable, a-t-il poursuivi, c'est que la raison de ce soutien réside dans le fait que le sionisme égoïste et non civilisé est parvenu à pénétrer leurs structures politiques et économiques. Aussi longtemps que continuera la domination sioniste, de nombreux pays ne seront pas en mesure de jouir de la liberté, de l'indépendance et de la sécurité. Le moment est venu de briser l'idéal du sionisme, qui est le modèle du racisme, a déclaré le Président iranien.

M. Ahmadinejad a ensuite appelé chacun à s'interroger sur les causes profondes des attaques des États-Unis contre l'Iraq ou encore de l'invasion de l'Afghanistan. L'invasion de l'Afghanistan a-t-elle restauré la paix, la sécurité et le bien-être économique à ce pays, a-t-il demandé? Les États-Unis et leurs alliés ne sont même pas parvenus à contenir la production de stupéfiants dans ce pays; au contraire, cette production n'a cessé d'augmenter, a souligné le Président iranien.

Qui sont les responsables de la crise économique globale que connaît le monde, a par ailleurs interrogé M. Ahmadinejad? Pendant longtemps, les lois et règlements inéquitables en matière économique ont été imposés par les États-Unis et l'Europe grâce à leur pouvoir politique sur l'économie mondiale. Un système économique et financier a été imposé sans qu'il n'y ait de mécanisme de contrôle au niveau international. Ces pays n'ont même pas permis à leurs populations d'avoir un droit de regard sur leurs pratiques et politiques. Ils ont mis en place des lois et règlements contraires aux valeurs morales pour protéger les intérêts des détenteurs de richesse et de pouvoir. Ils ont transféré à d'autres leurs problèmes et aujourd'hui injectent des milliards de la poche de leurs propres populations vers les banques et entreprises en faillite.

La racine du racisme réside dans le manque de compréhension quant à la réalité de l'existence humaine en tant que créature sélectionnée par Dieu, a poursuivi le Président iranien. Le racisme est le signe d'une ignorance qui, aujourd'hui, met en danger la paix internationale et met en péril la coexistence entre les nations. Le racisme est le signe d'une frustration dans la sphère du développement de la société humaine. Pour lutter contre ces manifestations, il faut enseigner toute la philosophie associée à la vie de l'homme; il faut en revenir aux valeurs morales, aux valeurs spirituelles et en fin de compte, à la dévotion à Dieu, a déclaré M. Ahmadinejad.

Aujourd'hui, la communauté humaine est confrontée à une sorte de racisme qui a terni l'image de l'humanité à l'aube du troisième millénaire, a poursuivi le Président iranien. «Le sionisme mondial personnifie le racisme» qui recourt à la religion et à l'abus des sentiments religieux pour cacher sa haine et son visage hideux, a-t-il déclaré. Il est important de mettre à jour les objectifs politiques de certaines des puissances mondiales et de ceux qui contrôlent d'énormes intérêts économiques et richesses dans le monde. Ils mobilisent toutes leurs ressources, y compris leur influence économique et politique et les médias du monde pour soutenir le régime sioniste et insidieusement chercher à minimiser l'indignité et la disgrâce de ce régime. Des efforts doivent être déployés pour mettre un terme aux abus des sionistes et de leurs soutiens; les gouvernements doivent être encouragés et soutenus dans leurs efforts visant à éradiquer ce racisme barbare.

«Il ne fait aucun doute que vous êtes tous conscients de la conspiration de certaines puissances et des cercles sionistes contre les buts et objectifs de cette Conférence d'examen», a déclaré M. Ahmadinejad. Il devrait être reconnu que le fait de boycotter une telle session indique clairement le soutien à l'exemple flagrant du racisme. Il est nécessaire de restructurer les organisations internationales existantes et leurs arrangements respectifs. Aussi, cette Conférence constitue-t-elle un terrain d'essai. Le monde connaît des changements fondamentaux; le craquement des piliers de l'oppression mondiale peut maintenant être entendu et les principales structures politiques et économiques sont sur le point de s'effondrer. Les crises politiques et sécuritaires augmentent. La crise de l'économie mondiale, qui s'aggrave et pour laquelle aucune perspective d'éclaircissement n'est en vue, témoigne amplement de la marée montante des changements globaux de grande ampleur qui sont en train d'intervenir. «La gestion injuste et inéquitable du monde se trouve maintenant en fin de route», a assuré le Président iranien. Cette impasse était inévitable étant donné que la logique de cette gestion imposée était oppressive, a-t-il ajouté.

La victoire du bien sur le mal et l'instauration d'un système mondial juste ont été promis par Dieu et ses Messagers et ont constitué un objectif commun de différentes sociétés et générations au cours de l'histoire, a poursuivi le Président iranien, qui a par ailleurs affirmé que le libéralisme occidental, comme le communisme, touche à sa fin car il n'est pas parvenu à percevoir la vérité profonde du monde et de l'être humain. Il est absolument possible d'améliorer la situation actuelle dans le monde dans le contexte actuel, a assuré M. Ahmadinejad; mais cela ne pourra se faire que par le biais de la coopération de tous les pays.

Par ailleurs, a poursuivi le Président iranien, eu égard à l'inefficacité des systèmes politiques, économiques et sécuritaires actuels, il convient, en particulier, de réformer rapidement la structure du Conseil de sécurité et notamment d'éliminer le droit de veto discriminatoire qui y prévaut, ainsi que de modifier le système financier et monétaire mondial. Il est évident que ne pas comprendre l'urgence des changements équivaut à devoir assumer les coûts beaucoup plus élevés de remettre à plus tard ces changements.

M. JONAS GAHR STORE, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, a rappelé que la liberté d'expression était cruciale pour les droits de l'homme. Si le Président iranien en a fait usage, il l'a fait en menaçant cette liberté, a-t-il constaté. Le ministre norvégien a estimé que M. Mahmoud Ahmadinejad s'était exprimé en mettant en avant un message d'intolérance allant dans le sens inverse du projet de déclaration finale de la Conférence négocié la semaine dernière. Il a déploré l'énumération des conflits en cours à travers les monde, rappelant que l'objet de la Conférence visait plutôt à les éliminer. Le chef de l'État iranien fait de son pays un outsider et nous n'acceptons pas que celui qui choisit d'être hors jeu détourne le sens de la Conférence, a dit le Ministre. Évoquant le précédent de Durban en 2001, il a rappelé que cette première conférence avait débouché sur le chaos. On se souvient davantage de Durban pour ses excès que pour ses conclusions et son programme de lutte contre le racisme, a-t-il constaté. Or, ce Programme d'action a fait l'objet d'un consensus et a inspiré, par exemple, la politique de la Norvège en matière de lutte contre le racisme.

Par ailleurs, M. Gahr Store a rappelé que le projet de texte sur la diffamation des religions avait été rejeté car l'objectif dans le domaine des droits de l'homme consiste à défendre les individus et non les religions en tant que telles. Le chef de la diplomatie norvégienne a regretté par ailleurs que certains essayent de déprécier la question de l'Holocauste. La Norvège considère que l'ONU doit permettre à toutes les nations du monde, au-delà de leurs divergences, de s'asseoir à la même table pour trouver des points d'accord. Les exagérations, les détournements, les propos extrêmes ne sauraient changer le texte équilibré qui doit conclure la Conférence de Genève, a-t-il ajouté. Les Nations Unies nous permettent de déployer de tels efforts, et la voie du dialogue doit être privilégiée sur celle du monologue qui, par définition, ne débouche sur rien. Le Ministre norvégien a par ailleurs regretté que certains États aient décidé de se retirer à la dernière minute.

Le Ministre norvégien des affaires étrangères a réitéré son profond désaccord avec l'orateur l'ayant précédé, ajoutant qu'il convenait de «ne pas abandonner la tribune des Nations Unies aux seuls extrémistes». Si une conférence ne suffira pas à éliminer le racisme, Durban II peut permettre de progresser dans ce sens, a-t-il conclu.

MME NKOSAZANA DLAMINI ZUMA, Ministre des affaires étrangères d'Afrique du Sud, s'exprimant au nom du Groupe africain, a fait remarquer que le peuple africain connaît bien l'impact pernicieux de l'esclavage, du colonialisme, de l'apartheid et du génocide. Il est significatif, a-t-elle poursuivi, que la Déclaration et le Programme d'action de Durban aient été adoptés dans un pays qui a été aux prises avec les effets directs de la discrimination et de l'oppression pour motifs de race et de couleur. Elle a estimé que la Déclaration et le Programme d'action de Durban ont été une inspiration pour que le XXIe siècle soit celui qui redonne leur dignité humaine à tous les êtres humains. En effet, ces instruments offrent une base solide et concrète pour que chaque pays puisse développer ses propres mesures de lutte contre le racisme, la xénophobie et l'intolérance.

Dans ce contexte, la Ministre sud-africaine s'est félicitée des initiatives prises pour rendre leur dignité aux victimes et mettre en œuvre un processus de réconciliation. Elle s'est tout particulièrement réjouie de la décision de la communauté des Caraïbes de construire au Siège des Nations Unies un mémorial pour la reconnaissance de la tragédie de l'esclavage et du commerce transatlantique d'esclaves. Mme Zuma a toutefois fait remarquer que le racisme persiste et qu'il importe d'être vigilant. De nombreux engagements doivent être honorés, a-t-elle souligné. Alors que la pauvreté, le sous-développement et la marginalisation persistent et sont aujourd'hui aggravés par la crise financière, les engagements pris à Durban doivent être réalisés de toute urgence. Mme Zuma a déploré que depuis 2001 et les attaques terroristes qui ont touché de nombreuses parties du monde, la lutte contre le terrorisme ait sapé les libertés civiles et conduit à une intensification du profilage racial. Elle s'est dite d'avis que la lutte contre le terrorisme peut se faire conjointement à la lutte contre le racisme. Elle a rappelé l'importance d'apprendre les leçons du passé et notamment des tragédies de l'holocauste et du génocide rwandais. Elle a précisé que son pays croit, «à l'inverse de l'orateur précédent», à la liberté d'expression mais pas à l'incitation à la haine, parce que «l'histoire a montré que l'incitation à la haine débouche sur des tragédies». Mme Zuma a également souligné que les manifestations de racisme et de discrimination raciale trouvent leur expression dans l'oppression qui perdure à l'égard des femmes et des fillettes.

À l'occasion de l'ouverture de cette Conférence d'examen, la Ministre sud-africaine a appelé les États à réaffirmer leur volonté politique et à s'engager en faveur des objectifs définis dans la Déclaration et le Programme d'action de Durban. Il est de la responsabilité de tous de protéger les droits des êtres humains contre le racisme et la discrimination raciale, a-t-elle affirmé. Elle a estimé regrettable que certains États membres aient choisi de ne pas participer à cette Conférence, alors qu'aucun pays n'est exempt de manifestations racistes et discriminatoires. Par égard pour les victimes, elle a espéré que tous mettront en œuvre la Déclaration et le Programme d'action de Durban. Elle a souhaité que cette Conférence historique marque la ferme réaffirmation que tous les peuples constituent une seule et même famille, unie dans sa diversité.

M. HENRI EYEBE AYISSI, Ministre des relations extérieures du Cameroun, a évoqué les «instruments novateurs» définis lors de la Conférence de Durban en 2001. Quel est le sort qui a été réservé à ces textes fondateurs, a-t-il demandé? Pour le Cameroun, «la mise en œuvre souhaitée n'aura pas été à la hauteur des attentes». Les migrants, par exemple, sont perçus comme des concurrents, voire comme des menaces, ce qui entraîne la déplorable tentation de recourir au profilage racial, ethnique ou religieux ou à des politiques de migration de plus en plus restrictives, a-t-il constaté. De nombreux États éprouvent de plus en plus de difficultés à garantir le respect de la dignité des personnes ainsi que l'harmonie sociale, l'égalité des chances et la non-discrimination, a-t-il ajouté. Le chef de la diplomatie camerounaise a souligné en outre que des phénomènes tels que la crise alimentaire et financière, ainsi que le changement climatique avaient aggravé la situation. «Parvenir à tenir la présente Conférence n'aura pas été, loin s'en faut, un «long fleuve tranquille», comme en témoignent les différences d'approches enregistrées tout au long des négociations ayant précédé les assises ouvertes aujourd'hui», a-t-il constaté.

Concernant plus particulièrement le Cameroun, sa participation témoigne de son engagement dans la lutte contre ce fléau, a fait valoir M. Ayissi. La présente conférence se doit d'être un tournant historique et décisif, dans le sens de la promotion de la paix et du dialogue. C'est le moment d'évoluer dans ce sens, a-t-il dit: «Le dialogue peut et doit triompher de la discorde». L'orateur a par ailleurs rappelé l'attachement aux droits de la personne humaine du Président du Cameroun, ajoutant que le pays a ratifié la plupart des instruments internationaux garantissant égalité et non-discrimination. Un effort constant est fourni pour donner plus de visibilité aux textes réprimant la discrimination raciale, a-t-il assuré. Le présent rendez-vous est une occasion extraordinaire pour lutter de façon efficace contre le racisme et la xénophobie, a-t-il dit. Aucun pays dans le monde n'est exempt de racisme; nous avons tous «les mains sales», pour reprendre l'expression de Jean-Paul Sartre, a rappelé l'orateur. Il a enfin mis en garde contre le fait de retomber dans le piège de la première conférence de Durban, consistant à s'opposer les uns aux autres. En conclusion, il a appelé les États membres à demeurer unis dans la lutte contre le racisme et la discrimination.

M. BERNARD KAMILLIUS MEMBE, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la Tanzanie, a insisté sur l'urgence d'éliminer le fléau du racisme par des mesures tant nationales que régionales et internationales. À l'instar du Secrétaire général de l'ONU et de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, il a regretté que certains États clefs aient choisi de rester à l'écart de cette Conférence d'examen. Il a en outre souscrit à l'idée que l'Union européenne et d'autres ne devraient pas abandonner cette Conférence aux extrémistes et a exprimé l'espoir que leur départ ne soit pas permanent.

Le Ministre tanzanien des affaires étrangères a par ailleurs rappelé que son pays avait soumis ses rapports périodiques au Comité sur l'élimination de la discrimination raciale, le plus récemment en août 2005. Depuis lors, la Tanzanie a entrepris d'appliquer les observations finales de ce Comité. M. Membe a en outre fait part d'un certain nombre de lois adoptées par son pays telles que la loi contre le trafic de personnes ou la loi sur le VIH/sida, qui visent à intégrer au niveau interne les dispositions des instruments des Nations Unies en rapport avec le racisme, la discrimination raciale et l'intolérance. M. Membe a par ailleurs rappelé que son pays continue d'accueillir un certain nombre de réfugiés et a précisé à cet égard que le Gouvernement tanzanien à l'intention d'engager la tâche herculéenne consistant à naturaliser quelques 170 000 réfugiés burundais qui résident de longue date en Tanzanie. Le Ministre des affaires étrangères a en outre insisté sur la nécessité, pour tous les pays, d'œuvrer de concert pour surmonter les défis auxquels l'humanité est aujourd'hui confrontée. Nous devons vivre ensemble dans la paix et l'harmonie, tout en nous respectant les uns, les autres, a-t-il souligné. M. Membe a insisté sur la nécessité de présenter des excuses explicites et d'apporter des réparations et une compensation complète à toutes les victimes des injustices du passé, si l'on veut réellement construire un nouvel avenir exempt de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d'intolérance. Forger un avenir nouveau est presque impossible si l'on ne panse pas les blessures du passé, a-t-il déclaré.

M. DIKGAKGAMATSO N. SERETSE, Ministre de la défense, de la justice et de la sécurité du Botswana, a souligné que pour les pays d'Afrique australe qui ont été témoins et ont vécu l'expérience du racisme institutionnalisé, cette Conférence est une occasion de célébration. Cette Conférence, a-t-il poursuivi, ne vise pas à condamner certains pays ou civilisations et ne doit pas être utilisée comme plate-forme pour diaboliser certains États et diviser le monde. Les États se réunissent aujourd'hui comme éléments d'une humanité à la destinée commune, a-t-il souligné, appelant les participants à s'unir dans la recherche de solutions et à trouver des solutions qui les unissent.

Alors que la communauté internationale entame l'examen de la mise en œuvre des engagements pris à Durban en 2001, le Ministre botswanais a relevé l'importance de se souvenir des objectifs établis il y a huit ans. La Déclaration et le Programme d'action de Durban ont souligné que les gouvernements, les organisations non gouvernementales, les pays et les peuples devaient dédier leurs efforts à la création d'un monde exempt de racisme, de discrimination et d'intolérance, a-t-il rappelé. Il a relevé l'importance, dans cette entreprise, de promouvoir l'éducation. La lutte contre le racisme doit être un effort universel, a-t-il souligné. Fort de cette conviction, il a regretté les signes d'absence de volonté politique et d'engagement à traduire les idéaux et les recommandations concrètes de Déclaration et Programme d'action de Durban en résultats tangibles. Il faut que cette Conférence réaffirme l'unité de la communauté internationale face aux objectifs de la Déclaration et du Programme d'action de Durban et à la lutte contre le racisme.

S'intéressant plus particulièrement à son pays, M. Seretse a expliqué que le Botswana a veillé à établir une société démocratique stable et tolérante qui rejette tout racisme et toutes les formes de discrimination. En tant que partie aux instruments internationaux pertinents, le Botswana continue de coopérer avec le système des Nations Unies pour assurer un monde exempt d'exclusion et de discrimination raciale. Le Ministre s'est dit persuadé qu'un engagement politique est essentiel pour la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Il a attiré l'attention sur le rôle du droit à cet égard, relevant l'importance de traduire les principes de non-discrimination en normes contraignantes. Avant de conclure, le Ministre a déploré que certains États aient décidé de ne pas participer à cette Conférence. Il a estimé que ce fait démontre que des problèmes doivent encore être surmontés pour rassembler toutes les parties prenantes autour d'une vision commune.

M. EDSON SANTOS, Ministre principal du Secrétariat spécial pour les politiques de promotion de l'égalité raciale du Brésil, a annoncé que son pays a souhaité participer à la Conférence d'examen de Durban parce qu'il est pleinement engagé dans la lutte contre le racisme. Il a précisé que le Brésil s'est engagé dans le processus préparatoire de la Conférence sans perdre de vue sa responsabilité de réaffirmer l'importance de la lutte contre le racisme, la discrimination raciale et l'intolérance. Lutter contre le racisme n'est pas une option, mais une obligation morale et éthique, a-t-il souligné. Le Ministre a rappelé que la Déclaration et le Programme d'action de Durban ont reconnu l'absence de hiérarchie entre les êtres humains, l'humanité constituant une seule et même race: la race humaine. Il n'y a pas de différence entre tous, mais seulement une manipulation politique du concept de race à des fins de ségrégation, a-t-il affirmé.

M. Santos a souligné que le texte de la Conférence d'examen constitue un compromis entre des positions en apparence inconciliables. Aucun pays n'est placé sous le feu des critiques; aucune crise régionale n'est spécifiquement citée; les tragédies passées sont traitées de manière équilibrée; les formes contemporaines de racisme et de discrimination sont condamnées; et la montée de la persécution des pratiquants de certaines religions est déplorée. Ce texte, a-t-il précisé, n'est pas une simple traduction de positions nationales, mais bien l'essence même du système multilatéral. Il a en effet estimé que rien dans ce document ne nie les avancées de 2001 ou n'empêche d'aller de l'avant. Dans ce contexte, il a fait remarquer que quitter le processus de négociations revient à céder à la «tentation du non-dialogue» et à refuser tout changement. Il a souligné que le processus multilatéral ne devrait pas être l'otage de ce genre d'attitude. L'absence de certains pays est inexplicable et inacceptable, a-t-il estimé.

Le Ministre brésilien a ensuite répété que son pays ne cessera jamais de s'engager dans la lutte contre le racisme. Il a indiqué que la Conférence de 2001 a mobilisé la société brésilienne qui, a-t-il rappelé, est pour moitié constituée de descendants africains et comprend de nombreuses ethnies. Il a expliqué que le Secrétariat spécial pour les politiques de promotion de l'égalité raciale - dont il est le Ministre principal - a été créé en 2003 comme première étape décisive vers la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Le Secrétariat a pour mission de coordonner les actions du Gouvernement pour lutter contre le racisme, a-t-il précisé. Il a ajouté que par des initiatives de ce type visant à promouvoir la lutte contre le racisme, le Brésil a renforcé sa démocratie. Entre autres mesures, il a fait part de la création d'une politique nationale de santé pour la population noire, ainsi que la mise sur pied de mesures visant à améliorer l'accès à l'éducation supérieure. Relevant l'importance de renforcer la coopération internationale en matière de lutte contre le racisme, M. Santos a estimé que cette Conférence permet aussi le partage de bonnes pratiques. Enfin, il a suggéré la création d'un indice d'égalité raciale ou d'un système d'indicateurs permettant de comparer les inégalités.

MME FAYZA ABOULNAGA, Ministre de la coopération internationale de l'Égypte, a constaté que le fléau raciste continuait d'affecter l'humanité en dépit de tous les efforts déployés pour le combattre. L'histoire douloureuse a pourtant montré la relation directe entre le racisme et les violations des droits de l'homme, a-t-elle rappelé. Elle a affirmé que son pays maintenait une position cohérente attachant la plus haute priorité à la lutte contre le racisme. L'Égypte a joué un rôle actif dans l'élaboration des instruments internationaux visant à lutter contre la discrimination raciale. La Déclaration et le Programme d'action de Durban ont constitué un jalon à cet égard. L'Égypte exprime sa préoccupation quant aux manifestations racistes, tant aux niveaux régional qu'international, qui démontrent que la mise en œuvre des décisions prises à Durban n'ont pas été à la hauteur des engagements. Le dialogue et les négociations pour aboutir au document final ne sont guère possibles si l'on définit des «lignes rouges», a-t-elle souligné. Cela ne permet pas une approche constructive dans les efforts collectifs permettant d'assurer le succès du suivi du processus de Durban, particulièrement lorsque ces «zones rouges» touchent à des domaines s'inscrivant dans le document final de Durban en 2001. Par ailleurs, l'Égypte soutien toutes les initiatives de dialogue entre les civilisations, les cultures et les religions en vue de promouvoir la tolérance et combattre la haine.

Malgré des progrès en ce sens, il existe toujours des motifs de préoccupation face à la poursuite d'attitudes racistes sous diverses formes, ainsi que l'émergence de nouvelles formes de discrimination. Il est ainsi indéniable que la discrimination raciale et religieuse, particulièrement envers les Arabes et les musulmans, a atteint un niveau sans précédent ces dernières années, a-t-elle souligné. Il est donc incompréhensible que certains continuent de fermer les yeux sur cette réalité et à nier tout lien avec le racisme. Il est aussi difficile de comprendre pour quelles raisons certains refusent de remettre en cause leurs pratiques et législations nationales à la lumière des évolutions négatives récentes et alors que le droit international leur en fait obligation. Une telle obligation, contrairement à ce que certains prétendent, ne permet pas de considérer les discours de haine en général, ou l'incitation à la haine religieuse en particulier, comme s'inscrivant dans l'exercice de la liberté d'expression, a ajouté Mme Aboulnaga. Celle-ci a qualifié de «slogan creux» le fait de réduire ce débat entre partisans et adversaires de la liberté d'expression. L'Égypte considère que cette question est grave et qu'elle exige un dialogue ouvert et constructif de la part de toutes les parties prenantes dans le but de parvenir à un terrain d'entente basé sur l'objectivité et la raison.

La Ministre égyptienne a ensuite évoqué le sort du peuple palestinien sous occupation étrangère en appelant à l'exercice de son droit inaliénable à l'autodétermination, tout en regrettant qu'une issue ne soit pas proche. Elle a appelé à la mise en œuvre du Programme d'action de Durban en soulignant l'engagement de son pays non seulement sur cette question mais en faveur de l'établissement d'un dialogue au sens large dans la préparation de la Conférence d'examen.

M. DOUGLAS DEVANANDA, Ministre des services sociaux et du bien-être social de Sri Lanka, a d'emblée souligné son origine ethnique tamoule et insisté sur la grande diversité culturelle de son pays, rappelant notamment que quatre des principales religions du monde y sont présentes, ainsi que trois principales communautés distinctes: les Cinghalais, les Tamouls et les musulmans. Cette diversité dans un espace aussi compact produit à la fois la coexistence et le conflit; la coexistence a prévalu sur le long terme, bien que le conflit ait été intense ces trois dernières décennies, a-t-il dit. Les sources du conflit résident dans des facteurs et des forces qui concernent particulièrement la Conférence de Durban de 2001 et la présente Conférence d'examen, à savoir le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée. Ces démons sont liés, comme bien ailleurs, à l'impérialisme et au colonialisme, a expliqué M. Devananda. Si la Sri Lanka post-coloniale a adopté des lois, des règlements administratifs et des changements constitutionnels qui ont amené les Tamouls à se sentir traités de manière inégale et victimes de discrimination, la version de la majorité cinghalaise est que les Tamouls avaient bénéficié d'avantages disproportionnés durant le régime colonial; il semblait donc qu'il fallait redresser la situation mais les Tamouls eurent le sentiment que ces actions étaient bien trop discriminatoires et, bien entendu, un retour de l'équilibre a de nouveau commencé, les gouvernements successifs, ces vingt dernières années, ayant reconnu l'importance de répondre à leurs griefs.

Les Tamouls ont commencé à réagir aux dernières discriminations dont ils se sentaient victimes, demandant l'égalité dans tous les aspects de la vie, y compris un accord de partage du pouvoir dans les zones – le Nord et l'Est du pays – où ils vivaient en nombres substantiels. Ces agitations étaient démocratiques et non violentes dans les années 1950 et 1960. Mais la situation se bloqua par la suite du fait du fanatisme du LTTE, un groupe militant qui refusait l'accord de partage du pouvoir de 1987. Le LTTE engagea alors une guerre dont l'objectif ultime était la création d'un État séparé: l'Eelam tamoul. Le LTTE ne se contenta pas de mener une guerre contre l'État; il annihila, dans la foulée, toute force tamoule démocratique qui ne lui serait pas soumise, a poursuivi M. Devananda. Le Ministre sri-lankais a alors indiqué avoir échappé à plus d'une dizaine de tentatives d'assassinat de la minorité raciste des Tigres.

Depuis son entrée en fonction en décembre 2005, a poursuivi M. Devananda, le Président sri-lankais, M. Mahinda Rajapakse, a entrepris de faire cesser le terrorisme du LTTE, après que ses tentatives de négociations eurent échoué. Sous son commandement, les forces de sécurité sri-lankaises ont presque amené le LTTE au point de non retour; en dernier recours, le LTTE a utilisé des dizaines de milliers de civils innocents comme boucliers humains. Bien que plus de 70 000 de ceux qui étaient initialement «détenus» soient parvenus à s'échapper, un grand nombre reste en captivité. Il s'agit de mon peuple, a insisté M. Devananda. Si la communauté internationale parvient à faire pression sur le LTTE pour qu'il se rende ou au moins libère tous les civils qu'il utilise comme boucliers humains, alors, un grand chemin aura été parcouru sur la voie menant à la fin des souffrances de la minorité tamoule, a-t-il déclaré.

Le Ministre sri-lankais a rappelé que son pays était partie aux principaux instruments internationaux de droits de l'homme. Étant donné que les droits linguistiques figurent probablement parmi les principaux sujets de contentieux à Sri Lanka, des mesures ont été prises pour mettre en œuvre le bilinguisme dans les services administratifs; des mesures ont également été prises pour assurer le recrutement de personnes de langue tamoule dans les forces de défense. En conclusion, le Ministre sri-lankais a appelé tous les États Membres des Nations Unies à coopérer entre eux aux fins de la réalisation des objectifs de la Conférence mondiale sur le racisme de 2001. M. Devananda a indiqué avoir appris, par la lutte et le sacrifice, que ce sont le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui sont nos ennemis.

MME MARIA BENVINDA LEVI, Ministre de la justice du Mozambique, a souligné qu'à Durban, la communauté internationale a réussi à établir un agenda mondial pour guider les actions et les efforts vers l'élimination de toutes les manifestations de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d'intolérance. Ce cadre sans précédent, a-t-elle précisé, enjoint les États à prendre des mesures concrètes contre le racisme, notamment par le biais de la formulation de lois et de politiques. La Ministre a toutefois déploré que ce cadre n'ait pas encore été pleinement mis en œuvre à travers le monde. Elle a estimé que la Conférence d'examen de Durban revêt une importance particulière, au moment où la communauté internationale doit affronter cette tâche gigantesque. Il faut renouveler l'engagement international contre le racisme, a-t-elle insisté.

La Ministre mozambicaine a expliqué que son pays a signé nombre de conventions internationales et régionales, ainsi que d'autres initiatives visant à promouvoir l'égalité des droits et lutter contre la discrimination. Elle a précisé que ces initiatives se sont traduites par une réforme des lois portant sur la discrimination, dans la présentation par le Mozambique de rapports périodiques devant le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale et dans l'élaboration de politiques antidiscriminatoires. Elle a indiqué que la constitution de son pays garantit le principe d'égalité entre tous les citoyens et interdit la discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe et l'origine ethnique. Elle a également fait part de la législation adoptée dans le domaine du travail pour lutter contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, la race ou l'infection par le VIH/sida. Mme Levi a conclu son intervention en soulignant que la voie à suivre pour lutter contre le racisme dépendra du résultat de la Conférence d'examen. Le succès de cette Conférence contribuera à la lutte contre la discrimination et l'intolérance, mais également aux droits de l'homme en général, a-t-elle fait remarquer. Elle a également souligné que c'est dans l'unité que la communauté internationale pourra atteindre son objectif d'alléger le fléau des nombreuses victimes du racisme. Le thème de la Conférence «Unis contre le racisme: dignité et justice pour tous» rappelle cet impératif, a-t-elle fait observer.

M. MADICKE NIANG, Ministre de la justice du Sénégal, a rappelé qu'en 2001, «nous avions pris ensemble l'engagement de renforcer la lutte contre le racisme» et que des «mesures concrètes» avaient été identifiées. Mais, «près de huit ans après, la situation est loin de ce qu'on pouvait espérer». Le ministre a noté une augmentation du racisme et de l'intolérance à travers le monde, dont les migrants sont plus particulièrement les victimes. Ils ne sont pas les seuls: les femmes souffrent toujours de discriminations et les conditions des minorités ethniques et religieuses se dégradent, a-t-il souligné. Toutefois, «ce constat alarmant ne doit surtout pas nous faire oublier les efforts qui sont en train d'être faits par les États pour respecter les engagements pris en 2001». Il a souligné que son pays s'était employé à mettre en œuvre les dispositions de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Il a cité en particulier les dispositions du code pénal sénégalais sur la non-discrimination. «Le Sénégal, a-t-il assuré, continuera d'apporter sa contribution à la réalisation de cet idéal commun». Ainsi, la troisième édition du Festival mondial des arts nègres, prévu en décembre prochain, s'inscrit dans ce sens. Le président Abdoulaye Wade a souhaité, a-t-il dit, qu'elle soit «une vitrine d'excellence de la créativité du monde noir, et aussi, un champ de réarmement moral et de mobilisation de toutes les forces de proposition pour le développement de l'Afrique».

M. Niang a souligné que les victimes du racisme «attendaient beaucoup de la présente conférence» et qu'ils «nourrissaient l'espoir de voir leur situation s'améliorer: Il faudra pour ce faire que le document final lance un message de tolérance et d'ouverture au dialogue dans le respect mutuel et contienne des mesures susceptibles d'avoir un impact significatif sur le terrain». Rappelant les engagements de 2001, il a indiqué que son pays souhaitait «que nous puissions concilier la fidélité à l'esprit de nos décisions antérieures avec une flexibilité qui nous permette de faire face aux exigences d'aujourd'hui». Selon lui, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme a un rôle essentiel à jouer à cet égard.

M. BÉCHIR TEKARI, Ministre de la justice et des droits de l'homme de la Tunisie, a réaffirmé l'importance de ce qui a été adopté lors de la Conférence mondiale de Durban tenue en 2001. Des engagements ont été pris à l'issue de cette Conférence, a-t-il rappelé. Aussi, a-t-il attiré l'attention sur les importants changements que la Tunisie a apportés à son système d'enseignement, afin, plus particulièrement, de promouvoir une culture de la fraternité. Une loi a notamment été adoptée en 2004 qui interdit la prise en compte de toute donnée personnelle à caractère racial ou religieux, entre autres, a-t-il indiqué.

M. Tekari a ensuite attiré l'attention sur les répercussions négatives de la mondialisation, s'agissant notamment du creusement du fossé technologique entre pays riches et pays pauvres. Il ne fait aucun doute que la paix et la sécurité restent notre aspiration commune, a-t-il poursuivi; mais il faut d'abord surmonter les obstacles et en particulier se départir de toute idée de supériorité et de toute approche de deux poids, deux mesures, afin que les peuples ne se sentent pas victimes d'injustice et d'inégalité. Il faut que les populations qui se trouvent sous le joug colonial, et notamment le peuple palestinien, puissent connaître la paix et la justice, a ajouté le Ministre tunisien. Il a rappelé que les problèmes du passé viennent d'actes racistes qui n'ont pas été étouffés à temps.

M. ABDELWAHAD RADI, Ministre de la justice du Maroc, a estimé que la Conférence mondiale contre le racisme en 2001 a permis de jeter la base d'une coopération internationale pour lutter collectivement contre le racisme. En effet, le racisme sous toutes ses formes personnifie la violation extrême des droits humains et l'atteinte la plus grave à la dignité de l'homme, a-t-il fait remarquer, précisant que c'est pour cette raison que la Conférence de 2001 avait mobilisé la conscience universelle pour le combattre et l'éradiquer. Le Ministre a souligné que huit ans après Durban, la Conférence de Genève était une étape importante dans le combat universel contre le racisme. Outre offrir l'occasion de faire le bilan de la mise en œuvre des objectifs fixés en 2001, la Conférence permet d'imprimer une nouvelle dynamique à la mobilisation internationale, a-t-il fait observer. Attirant l'attention sur les événements tragiques qu'a connus la planète depuis Durban, il a souligné que la communauté internationale est aujourd'hui interpellée pour renforcer les arsenaux juridiques internationaux. M. Radi a notamment fait remarquer que dans cette période, les chances de paix au Moyen-Orient ont reculé face à la guerre, la violence et le terrorisme. Le Ministre a par ailleurs relevé avec grande préoccupation la récurrence d'actes et de manifestations d'intolérance religieuse. Dans ce contexte, il a salué la proposition hautement pertinente de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme en vue de l'organisation de séminaires régionaux sur la haine raciale et religieuse afin d'approfondir la réflexion sur cette question. Il a annoncé que, dans un geste de soutien à cette proposition, le Maroc est disposé à abriter un séminaire sur cette thématique pour la région de l'Afrique.

Le Ministre marocain a estimé que la préservation de l'intégrité et de l'égalité de tous les droits contre la discrimination, l'instrumentalisation ou la hiérarchisation est un devoir politique et moral, avant d'être une obligation juridique contraignante. Il a indiqué que depuis son accession à l'indépendance, le Maroc a opté pour l'économie de marché, le pluralisme politique et la décentralisation régionale comme cadre d'organisation favorisant l'expression de toutes les communautés, les régions et les sensibilités politiques, sociales et culturelles. Le Maroc a ainsi réalisé des avancées considérables dans la lutte contre le racisme, la discrimination raciale et l'intolérance religieuse, notamment à travers les processus de réformes institutionnelles et législatives. Rappelant que le racisme et la discrimination raciale transcendent les frontières et appellent une démarche globale et solidaire, il a souligné que les pays ont l'obligation de faire de la réunion de Genève un rendez-vous avec l'histoire.

M. EKMELEDDIN IHSANOGLU, Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique, a souligné que son organisation s'était engagée de manière constructive dans le processus d'organisation de la Conférence d'examen. Rappelant les divergences de point de vue auxquels celui-ci a donné lieu, l'Organisation de la Conférence islamique n'a pas ménagé ses efforts et a fait preuve de souplesse sur des questions telles que celles sur la liberté d'expression. L'OCI est toutefois déçue que certains pays aient opté pour l'absence. Son Secrétaire général a souligné que Durban avait constitué un «tournant» en 2001, mais les attentats du 11 septembre ont aussitôt provoqué une régression, les musulmans dans leur ensemble ayant dû faire face à la stigmatisation en raison d'actes commis par une petite minorité en leur sein. L'OCI est disposée à s'engager de manière constructive pour identifier les problèmes et dégager des solutions. Les lois nationales ne peuvent pas, à elles seules, endiguer la discrimination antimusulmane, a-t-il reconnu. Il a suggéré qu'un document universel unique traite de la question de la compatibilité des lois nationales avec les instruments internationaux afin de servir de schéma directeur dans chaque État membre.

L'Organisation de la Conférence islamique est là pour défendre et respecter la liberté d'expression, a assuré son Secrétaire général, considérant qu'il serait contre-productif d'opposer celle-ci à la liberté religieuse. Il est de mon devoir, a-t-il ajouté en tant que responsable de l'OCI et en tant qu'intellectuel, de rappeler que le respect d'autrui, quelles que soient ses croyances, sont l'un des fondements de l'islam. M. Ihsanoglu a indiqué qu'une commission des droits de l'homme de l'OCI était en gestation afin de fournir un mécanisme les garantissant dans tous les États membres de cette organisation. Par ailleurs, si le processus de Durban n'est lié en rien à l'antisémitisme, la situation d'occupation militaire entraîne des violations des droits de l'homme et des pratiques discriminatoires, a-t-il relevé. La diversité culturelle est essentielle pour l'humanité, à l'instar de la biodiversité pour la planète, a conclu le Secrétaire général de l'OCI, qui a appelé à une démarche consensuelle dans le cadre de la conférence de suivi et d'examen de Durban.

MME PERLA BUSTAMANTE, Présidente du Conseil national pour la prévention de la discrimination du Mexique, a rappelé que son pays, convaincu de la nécessité de lutter contre toutes les formes de discrimination, avait participé à la Conférence mondiale contre le racisme tenue en 2001 à Durban. Elle a déploré que certains pays aient choisi de ne pas participer à la présente Conférence d'examen, alors que l'on dispose aujourd'hui, grâce aux travaux du Comité préparatoire, d'un accord sur le texte d'un document final de cette Conférence.

Mme Bustamante a par ailleurs rappelé que le Mexique avait réformé sa Constitution politique pour interdire toute forme de discrimination; cette réforme reconnaît aux peuples et aux communautés autochtones le droit à l'autodétermination et à l'autonomie, a-t-elle précisé. Elle a par ailleurs fait part des quatre axes de la stratégie adoptée par le Mexique en faveur de l'éradication de la discrimination: promotion d'une culture de tolérance face à la diversité; élaboration de politiques publiques visant à prévenir et éliminer de manière structurelle les diverses formes de discrimination; proposition d'un cadre normatif et de mécanismes d'examen incorporant des procédures antidiscriminatoires; et prise en charge des victimes de discrimination par le biais de la mise en place de mécanismes destinés à recevoir leurs plaintes et autres requêtes. Le Mexique accorde une importance particulière aux droits des migrants sans papiers et tient à souligner, à cet égard, que les considérations sécuritaires ne doivent pas l'emporter sur le respect des droits de l'homme universels, a par ailleurs indiqué Mme Bustamante. Elle a souligné que c'est en identifiant les défis communs et les espaces de coopération mutuelle que l'on parviendra à construire des sociétés plus justes, inclusives et égalitaires.

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