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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME TIENT UNE RÉUNION-DÉBAT CONSACRÉE À LA VIOLENCE À L'ÉGARD DES FEMMES ET À LA MORTALITÉ MATERNELLE

05 Juin 2008

5 juin 2008

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, deux réunions-débats consacrées l'une au problème de la violence à l'égard des femmes, l'autre à la mortalité maternelle. Mme Louise Arbour, Haut Commissaire aux droits de l'homme, a ouvert le débat. Plusieurs États et organisations non gouvernementales ont participé au débat avec les membres des deux panels d'experts réunis pour l'occasion, qui ont répondu aux questions et observations.

Mme Arbour a rappelé que, sous des formes particulièrement odieuses, la violence contre les femmes, y compris la violence sexuelle, perdure à une échelle et avec une brutalité qui dépassent l'entendement. Où qu'elles se produisent, les violences à l'encontre des femmes ont leurs causes dans des inégalités et une discrimination profondément ancrées. Elle a par ailleurs souligné que les lois et pratiques discriminatoires sont la cause de nombreux cas de mortalité maternelle; les mariages précoces, les mutilations génitales féminines et le mépris pour la santé reproductive des femmes occasionnent chaque année des millions de décès et d'infirmités, a constaté la Haut-Commissaire, qui a souligné que nombre de ces décès pourraient être évités grâce à l'amélioration prioritaire des conditions de vie des femmes et par la réalisation de leurs droits. Le Conseil peut jouer un rôle d'avant-garde en définissant la mortalité maternelle comme un problème de droits de l'homme.

Animé par M. Peteris Larlis Elfert, Coordinateur thématique sur l'égalité entre les sexes au Conseil de l'Europe, le premier débat a porté sur les priorités en matière de lutte contre la violence à l'égard des femmes. Le panel était composé des expertes suivantes: Mme Pauline Veloso, Ministre et Secrétaire générale de la présidence du Chili; Mme Kathleen Cravero, Administratrice adjointe au Programme des Nations Unies pour le développement; Mme Isabel Martínez-Lozano, Secrétaire générale des politiques d'égalité de l'Espagne; Mme Alejandra Sardá, membre du réseau des Comités d'Amérique latine et des Caraïbes pour la défense des droits des femmes, à titre de représentante de la société civile.

Au cours du débat, de nombreuses délégations ont fait part des mesures prises par leur gouvernement afin de combattre et prévenir la violence contre les femmes. Plusieurs orateurs ont plaidé en faveur du renforcement du rôle du Conseil en matière de lutte contre la violence faite aux femmes, un intervenant préconisant la création d'une procédure spéciale sur les discriminations à l'encontre les femmes. Plusieurs délégués ont fait remarquer que, quelles que soient les mesures prises pour éliminer la violence contre les femmes, ce phénomène est d'une telle ampleur qu'il ne pourra être résolu que par un effort collectif, le rôle de l'ONU étant primordial à cet égard.

Ont fait des interventions des représentants des États suivants: Maldives, Slovénie (au nom de l'Union européenne), Qatar (au nom du Groupe arabe), Argentine, France, Pays-Bas, Mexique, Canada (au nom aussi de la Nouvelle-Zélande), Norvège, Suisse, Inde, Pakistan, Brésil, Australie, Algérie, Roumanie, Suède (au nom aussi de l'Indonésie), Finlande, Égypte, Turquie, Afrique du Sud, République de Corée, Malaisie, Chine, Russie, Italie, Sri Lanka, Maroc, Colombie, Irlande et Tunisie. Un représentant de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) a également fait une déclaration ainsi que plusieurs organisations intergouvernementales et non gouvernementales: Fédération internationale des femmes diplômées des universités (au nom de plusieurs organisations non gouvernementales1); International Network for the Prevention of Elder Abuse; Human Rights Watch; Coalition contre le trafic des femmes (au nom également du Mouvement pour l'abolition de la prostitution et de la pornographie et de toutes formes de violences sexuelles et de discriminations sexistes); Organisation mondiale contre la torture; Conseil international de traités indiens; et Human Rights Watch (au nom également de Amnesty International).

Le second débat était consacré au problème de la mortalité maternelle envisagé dans la perspective des droits de l'homme. Il était modéré par M. Francisco Songane, Secrétaire du Partenariat pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l'enfant (OMS). Les experts présents étaient M. Paul Hunt, Rapporteur spécial sur le droit à la santé; M. Vincent Fauveau, Conseiller principal pour la mortalité maternelle au Fonds des Nations Unies pour la population, M. Monir Islam, Directeur du Département pour une grossesse à moindre risque à l'Organisation mondiale de la santé, et, pour la société civile, Mme Jashodhara Dasgupta, coordinatrice de l'organisation indienne SAHAYOG pour la santé des femmes et l'égalité entre les sexes.

Au-delà de la possibilité de parvenir à des résultats au niveau national, la plupart des intervenants au débat avec ces experts se sont interrogés sur les possibilités d'agir au niveau international. La question a été posée en particulier de déterminer comment le Conseil pourrait apporter une contribution s'agissant d'une question à laquelle travaillent déjà d'autres organismes des Nations Unies, et quelle serait donc la valeur ajoutée du Conseil. Il a été suggéré à plusieurs reprises que les États soumis à l'examen périodique universel fassent part des mesures qu'ils prennent pour lutter contre la mortalité maternelle. D'autre part, plusieurs orateurs ont souligné que la responsabilisation des femmes était essentielle pour réduire la mortalité maternelle et infantile. Il convient d'inclure l'avis des collectivités où prévalent des taux élevés de mortalité, tout en les sensibilisant aux moyens de lutte contre la mortalité maternelle, a-t-il également été souligné.

Les représentants des États suivants sont intervenus: Slovénie (au nom de l'Union européenne), Chili, Pakistan, Nouvelle-Zélande (au nom également de la Norvège), Canada, Suisse, Singapour, Luxembourg, Saint-Siège, Irlande et Australie. Des organisations non gouvernementales ont également participé au débat: Comité d'Amérique latine pour la défense des droits de la femme (au nom également de Action Canada pour la population et le développement; et le Comité d'action internationale pour les droits de la femme); Amnesty International; Human Rights Watch; Society for the Protection of Unborn Children.


Le Conseil des droits de l'homme reprend ses travaux demain matin à 9 heures pour se pencher sur les mandats du Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation et du Rapporteur spécial sur les droits fondamentaux des victimes de la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants. Auparavant, il entendra le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, qui rendra compte du débat de haut niveau de la Conférence de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), qui se tient actuellement à Rome. Un débat sur le suivi de la session extraordinaire sur la crise alimentaire qui s'est tenue le 22 mai dernier sera organisé en septembre, en présence du Rapporteur spécial.


Introduction de la Haut-Commissaire aux débats-réunions sur les droits des femmes

MME LOUISE ARBOUR, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a introduit les deux débats de cet après-midi en rappelant que l'étude du Secrétaire général des Nations Unies publiée en 2006 prouvait sans équivoque possible que les femmes du monde entier sont victimes de multiples formes de violence. Le rapport parlait d'une «pandémie» de violence, l'un des «plus grands défis de notre temps». Mais ces mots alarmants ne jettent qu'une pâle lumière sur la situation désespérée que vivent de nombreuses femmes et fillettes, forcées de vivre dans des conditions inhumaines. Sous des formes particulièrement odieuses, la violence contre les femmes, y compris la violence sexuelle, perdure au milieu des conflits sur une échelle et avec une brutalité qui défient l'entendement. Les viols de femmes et de fillettes sont ainsi utilisés comme des armes de guerre dans de nombreux conflits, dans le but de détruire les familles et les sociétés. Ces actes restent trop souvent impunis. Traduire en justice les responsables des actes de violence à l'encontre des femmes doit être une priorité pour tous les gouvernements et acteurs susceptibles d'agir en ce sens, a estimé la Haut Commissaire, relevant que ce n'est que depuis peu que cette forme de violence est incriminable en tant que crime de guerre, crime contre l'humanité et même, dans certains cas, comme acte de génocide.

Où qu'elles se produisent, les violences à l'encontre des femmes trouvent leurs causes dans les inégalités et une discrimination profondément ancrées, a poursuivi Mme Arbour. Il faut certes reconnaître que depuis l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme, de grands progrès ont été réalisés pour l'élimination de la discrimination contre les femmes. Des obligations ont été définies dans la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et d'autres instruments internationaux de droits de l'homme. Malgré tout, dans les faits et dans la loi, cette discrimination persiste au point d'être la règle plutôt que l'exception. Une étude récente commandée par le Haut Commissariat souligne ainsi la persistance de lois et de coutumes faisant des femmes des citoyens de deuxième catégorie, exposées à une violence et à des inégalités qui s'exercent dans l'impunité. De manière concomitante, les femmes sont privées de droits fondamentaux tels l'accès aux services de base (logement, accès à l'eau potable), une situation qui les condamne à la pauvreté.

La Haut-Commissaire a souligné que les lois et pratiques discriminatoires sont la cause de nombreux cas de mortalité maternelle. Les mariages précoces, les mutilations génitales féminines et le mépris pour la santé reproductive des femmes occasionnent chaque année des millions de décès et d'infirmités. Mais la mortalité maternelle n'est en rien inévitable. Nombre de décès pourraient être évités grâce à l'amélioration prioritaire des conditions de vie des femmes et par la réalisation de leurs droits. Le Conseil des droits de l'homme, informé par le contenu des débats, peut jouer un rôle d'avant-garde en définissant la mortalité maternelle comme un problème de droits de l'homme et en affirmant l'indivisibilité et l'interdépendance des droits à cet égard. Une brève analyse des résultats du premier cycle de l'examen périodique universel montre que si la majorité des interventions relatives aux droits des femmes étaient d'un niveau encourageant, le problème de la mortalité maternelle est quasiment absent des rapports d'États et des observations. Le débat d'aujourd'hui doit conduire les prochains examens périodiques universels à accorder davantage d'attention à ce problème, a demandé Mme Arbour. La Haut Commissaire a en outre estimé que le Conseil a pour mission de mettre en évidence les législations qui favorisent la jouissance de leurs droits par les femmes. Mme Arbour s'est dite convaincue à cet égard du rôle que peuvent jouer les législations pour encourager - ou forcer - le changement et l'évolution des sociétés.


Réunion-débat sur le thème «Faire face à la violence contre les femmes: identifier des priorités»

Exposés d'introduction

M. PETERIS LARLIS ELFERTS, Ambassadeur de la Lettonie auprès du Conseil de l'Europe et modérateur du débat, a fait remarquer que la violence contre les femmes constitue un défi lancé aux organisations régionales et aux Nations Unies. Il a rappelé qu'il ne s'agit pas uniquement d'une question des droits des femmes, mais également des droits des petites filles, attirant à cet égard l'attention sur les pratiques de mutilations génitales et de mariages forcés. Il a à cet égard relevé l'importance d'assurer la protection des victimes, en soulignant au passage que les victimes ne sont pas seulement celles qui ont des blessures physiques, mais également celles qui ont des blessures psychologiques. Des suggestions concrètes doivent être faites au Conseil des droits de l'homme pour qu'il progresse dans le domaine, a-t-il souligné. Les deux tables rondes d'aujourd'hui permettront certainement de présenter des propositions.

MME PAULINA VELOSO, Ministre, Secrétaire générale de la Présidence du Chili, s'est réjouie de la tenue de cette réunion-débat consacrée à la violence contre les femmes, rappelant que cette violence constitue l'une des violations des droits de l'homme les plus graves qui existent dans tous les pays, cultures et classes sociales. La violence contre les femmes est une réalité ancienne, a-t-elle poursuivi. Les femmes ont souffert en tout temps et en tout lieu. Toutefois, la préoccupation de la communauté internationale face à ce problème est relativement récente, a-t-elle fait remarquer. Mme Veloso a ensuite expliqué qu'il s'agit d'un phénomène lié à la culture et qui a bénéficié d'une certaine permissivité et tolérance. De fait, l'ordre juridique établit fréquemment une hiérarchie au sein de la famille et accorde des statuts différents selon le sexe. La législation et les modèles culturels qui se transmettent par le biais de l'école, les moyens de communication, les religions et les familles ont renforcé, encore aujourd'hui et dans presque tous les pays, des rôles stéréotypés et des relations de pouvoir inégales, a-t-elle souligné.

La Ministre a ainsi fait valoir la complexité de ce problème et, partant, la difficulté de lutter contre ce fléau. Il n'est pas suffisant de ne pas violer directement les droits des femmes; il n'est pas suffisant de modifier quelques lois discriminatoires et d'instaurer des normes juridiques qui promeuvent l'égalité; il n'est pas suffisant de donner des moyens d'aide, de protection et de réparation aux victimes. Bien que ces mesures soient essentielles, elles s'avèrent insuffisantes tant que l'État n'adopte pas une politique active de changement des modèles socioculturels en faveur d'une égalité effective et d'un respect de la dignité de toutes les femmes, a précisé Mme Veloso. Elle a préconisé qu'au niveau international, la perspective sexospécifique soit incorporée dans toutes les instances et les résolutions. Elle a de surcroît suggéré que la communauté internationale œuvre à s'accorder sur un traité universel relatif à la violence contre les femmes.

MME KATHLEEN CRAVERO, Administratrice assistante au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a attiré l'attention sur les problèmes rencontrés par les femmes en situation de conflit. Souvent, les femmes sont utilisées comme armes de guerre et se retrouvent ensuite rejetées par leurs familles. Elles ont parfois des enfants de leurs ennemis – enfants qui ne trouveront alors aucune place dans une quelconque communauté après le conflit, a insisté Mme Cravero. Souvent, ces femmes sont en outre infectées par le VIH/sida. Les victimes n'ont aucun espoir de voir leurs violeurs être traduits en justice, a souligné la représentante du PNUD. Mme Cravero a fait part des propos qui lui ont été rapportés par un casque bleu selon lequel dans l'est de la République démocratique du Congo, il est bien plus dangereux d'être une femme qu'un soldat.

Selon le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, la violence sexuelle est un crime de guerre, un crime contre l'humanité et une torture, a rappelé Mme Cravero. Il faut tout faire pour prévenir la violence sexuelle en temps de guerre et lutter contre l'impunité dans ce domaine, a-t-elle ajouté. Il faut tout faire pour venir au secours des femmes victimes de violences sexuelles en temps de guerre, a insisté Mme Cravero. Il convient de renforcer les codes pénaux nationaux à cette fin, a-t-elle notamment préconisé.

MME ISABEL MARTÍNEZ-LOZANO, Secrétaire générale aux politiques en faveur de égalité de l'Espagne, s'est félicitée de la participation de nombreux membres de la société civile à ce débat. Mme Martínez-Lozano a indiqué que son gouvernement accorde une grande priorité à l'égalité entre les sexes. Le nouveau Gouvernement a ainsi renforcé son engagement en créant un tout premier Ministère de l'égalité, qui est notamment chargé de la lutte contre la violence à l'encontre des femmes. L'Espagne s'est aussi dotée de lois et règlements pour lutte contre l'impunité. La loi espagnole dispose ainsi de manière très innovante de la suite à donner aux violences domestiques, en prévoyant notamment une structure de soutien pour les victimes. Les femmes peuvent compter sur un système de soutien complet, y compris une unité de police de 1800 personnes et de nombreuses places en centres d'accueil. Plus de mille hommes ont été condamnés pour des violences contre des femmes. Enfin des mesures sont prises pour attaquer la violence à ses racines mêmes. Au total près de 50 millions d'euros sont affectés à la lutte contre la violence contre les femmes.

Par ailleurs, l'Espagne, premier contributeur au Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM), a décidé de jouer un rôle de chef de file aux Nations Unies en ce qui concerne le combat pour l'égalité entre les sexes. L'Espagne recommande au Conseil de donner une définition très précise des indicateurs qui sont mis au point par les services statistiques des Nations Unies en matière de violence contre les femmes, afin de garantir la cohérence des approches internationales. Mme Martínez-Lozano a souligné que la communauté internationale doit agir de manière ferme et coordonnée; le Conseil pourrait de son côté encourager les législations visant à lutter contre l'impunité des auteurs de violence contre les femmes.

MME ALEJANDRA SARDÁ, Membre du Réseau des Comités d'Amérique latine et des Caraïbes pour la défense des droits des femmes, a fait observer qu'il existe aujourd'hui tout un ensemble de normes consensuelles sur la prévention, l'enquête et la sanction pour les cas de violations des droits des femmes. Il faut maintenant passer à la mise en œuvre de tous ces outils, a-t-elle insisté. Elle a fait remarquer qu'il est par ailleurs essentiel que la femme soit considérée comme sujet de droit et non comme une personne vulnérable à protéger. Elle a préconisé que l'examen périodique universel adopte une perspective sexospécifique. L'examen devrait tenir compte de la manière dont le pays s'est acquitté de ses obligations pour mettre un terme à la violence contre les femmes; les bonnes pratiques devraient être soulignés. En outre, il est indispensable que les recommandations soient concrètes et orientées vers l'action. Après l'examen, une assistance technique devrait être fournie, a-t-elle ajouté.

Débat

Dans le cadre du débat qui a suivi ces exposés, de nombreux intervenants ont fait part des mesures prises par leur gouvernement afin de combattre et prévenir la violence contre les femmes. La Vice-Ministre des affaires étrangères des Maldives, Mme Dunya Maumoon, a ainsi indiqué, entre autres, que l'un des changements importants apportés par la nouvelle Constitution dont s'est doté le pays concerne la levée de l'interdiction qui était jusqu'ici faite aux femmes de postuler à la tête de l'État. La délégation algérienne a quant à elle fait part de la Stratégie nationale de lutte contre la violence faite aux femmes élaborée en Algérie pour les années 2007-2011 – Stratégie qui s'appuie notamment sur une Commission nationale de lutte contre la violence faite aux femmes créée à cet effet.

La délégation française a pour sa part indiqué que la France avait l'intention de proposer à ses partenaires européens l'adoption de nouvelles lignes directrices de l'Union européenne sur les violences faites aux femmes.

La lutte contre la violence faite aux femmes en temps de paix comme en temps de guerre doit faire l'objet d'une campagne de tolérance zéro concertée au niveau politique le plus élevé, a souligné un autre intervenant.

Une délégation a préconisé, dans le cadre de la lutte contre la violence faite aux femmes, d'accorder la priorité à la situation des femmes vivant dans l'extrême pauvreté, ainsi qu'à la situation des femmes migrantes, réfugiées, déplacées et vivant dans des situations de conflit ou d'occupation étrangère.

La violence contre les femmes est en augmentation dans toutes les parties du monde, ce qui souligne combien peuvent être erronées les analyses selon lesquelles ce phénomène découlerait de données culturelles, a-t-il été souligné. Ces violences atteignent au Kivu et au Soudan des proportions insoutenables, a souligné une délégation. La représentante d'une organisation non gouvernementale a lancé un appel en faveur de la protection des femmes et des petites filles du Zimbabwe, en particulier dans le cadre de la période électorale actuelle, affirmant que «nous assistons dans ce pays au génocide des pauvres et des sans pouvoir», dont la plupart sont des fillettes et des femmes. Un autre orateur a dénoncé la situation consternante des femmes autochtones au Canada, ajoutant qu'aux États-Unis, une étude a révélé que les femmes autochtones sont bien plus susceptibles d'être victimes de viol que les autres. Ce même intervenant a dénoncé les agressions sexuelles dont sont victimes aux États-Unis des femmes migrantes, souvent autochtones provenant du Mexique et du Guatemala, qui sont interpellées et maintenues en garde à vue au titre de la législation sur les migrations.

La violence contre les femmes provient souvent de normes sociales et culturelles qui prévalent souvent sur l'application du droit, ont fait observer certains intervenants.

Nombre d'orateurs ont plaidé en faveur du renforcement du rôle du Conseil en matière de lutte contre la violence faite aux femmes. Le Conseil doit se pencher davantage sur les situations et discriminations dont souffre la moitié de l'humanité, a-t-il été affirmé. Un intervenant a préconisé que le Conseil crée un mandat de procédure spéciale sur les discriminations à l'encontre les femmes. Une délégation a recommandé au Conseil d'élaborer un plan d'action visant à donner suite à l'étude du Secrétaire général sur la violence contre les femmes. Une autre délégation a suggéré que des procédures spéciales du Conseil présentent des recommandations sur les moyens d'assurer aux femmes, indépendamment de leur état civil, la jouissance de certains droits spécifiques, ayant trait par exemple à l'éducation, à la santé ou encore au logement.

Un intervenant s'est interrogé sur la manière dont pourraient être combattues les racines du phénomène de la violence contre les femmes.

Un orateur a rappelé que la conférence de suivi de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, qui s'est tenue à Beijing en 1995, avait recommandé que toutes les formes de violence contre les femmes fassent l'objet d'une sanction pénale.
Le viol collectif en période de conflit armé doit être condamné comme crime contre l'humanité, a-t-il été souligné. La violence contre les femmes est exacerbée par le déni de leurs droits, a-t-il également été rappelé.

Poursuivant ce débat sous un angle axé davantage sur les aspects juridiques de la protection des femmes contre la violence, plusieurs pays ont fait part des mesures qu'ils ont prises à cet égard. Ainsi, la représentante de la Malaisie a expliqué qu'une loi sur la violence domestique fournit le cadre légal pour assurer la protection des victimes de violence dans son pays. En outre, le code pénal comprend des dispositions pour poursuivre les auteurs de violence contre les femmes et les fillettes. La délégation de l'Italie a pour sa part indiqué que le Ministère pour l'égalité des chances a établi un forum permanent sur la violence contre les femmes. À Sri Lanka, une «Charte des femmes» prévoit des obligations spécifiques pour que l'État mette en œuvre les normes de promotion et de protection des droits des femmes, eu égard notamment à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. La délégation tunisienne a pour sa part fait valoir que le code du statut personnel et les réformes du code pénal de son pays aient constitué une avancée réelle sur la voie de la lutte contre la violence à l'égard des femmes, notamment en stipulant que chacun des époux doit traiter son conjoint avec bienveillance et en punissant la violence conjugale d'une peine de prison pouvant atteindre deux ans.

La représentante d'une organisation non gouvernementale a pour sa part fait observer qu'outre des lois complètes et un cadre juridique consistant, il importe d'établir un mécanisme de surveillance.

Seule la lutte contre l'impunité peut mettre fin aux violations des droits de l'homme que constituent les violences faites aux femmes, a souligné une délégation. Une mobilisation générale contre l'impunité passera par un travail législatif conséquent, ainsi qu'une sensibilisation des différents acteurs, comme l'administration, la police et la magistrature, a renchéri un intervenant.

Plusieurs intervenants ont fait remarquer que quelles que soient les mesures prises pour éliminer la violence contre les femmes, ce phénomène est d'une telle ampleur qu'il ne pourra être résolu que par un effort collectif, le rôle de l'ONU devenant ainsi primordial à cet égard. Une intervenante a ainsi plaidé pour une meilleure coordination entre les différentes identités des Nations Unies. L'idée d'un suivi par le Conseil de la mise en œuvre des normes relatives aux droits des femmes par le biais de l'examen périodique universel a en outre été proposée par plusieurs intervenants. La société civile peut également jouer un rôle important, a ajouté une délégation.

Réponses des panélistes

Réagissant aux différentes interventions des délégations, MME VELOSO a effectivement jugé nécessaire de mettre un terme à l'impunité dans la violence faite aux femmes en élaborant des législations efficaces. Pour MME SARDÁ, les lacunes juridiques – dont celles concernant la discrimination – font que certaines pratiques contraires aux intérêts des femmes sont légitimées. Le modérateur du débat, M. ELFERTS, a insisté sur l'importance que revêt la volonté politique en matière de lutte contre la violence faite aux femmes.

Pour MME MARTÍNEZ-LOZANO, ce n'est qu'avec une plus grande égalité que l'on pourra lutter contre cette violence sexiste. Par ailleurs, la traite des femmes est, selon elle, l'un des phénomènes les plus importants de la dernière décennie. Il reste dans ce domaine beaucoup à faire et il s'agit là d'un des problèmes les plus graves à l'heure actuelle, a-t-elle insisté.

MME CRAVERO a pour sa part souligné que le viol n'était plus un phénomène dit «opportuniste» mais qu'il était dernièrement devenu partie intégrante de la guerre, ce qui rend particulièrement difficile la lutte contre l'impunité, a-t-elle fait remarquer.

MME SARDÁ a estimé que l'apport des organisations non gouvernementales dans le cadre de l'examen périodique universel est essentiel en tant qu'éclairage sur les situations qui prévalent sur le terrain.

MME VELOSO a suggéré au Conseil d'élaborer des critères permettant de comparer les études sur la violence contre les femmes effectuées dans les différents pays. Elle a par ailleurs jugé opportun de confirmer le mandat du rapporteur spécial sur la violence contre les femmes. Elle a recommandé de recourir à tous les mécanismes du système onusien pour faire progresser la connaissance du sujet, condition sine qua non pour lutter efficacement contre ce fléau. Elle a souligné la nécessité d'assurer une bonne coordination avec la société civile, dont la connaissance des problèmes, issue du terrain, est indispensable si l'on veut enfin aborder l'étape des mesures concrètes.

MME MARTÍNEZ-LOZANO souligné la nécessité, pour les gouvernements, d'appréhender la question de la violence contre les femmes en lui conférant un rang de priorité étatique. La question de la prostitution dans les pays développés ne doit pas être ignorée, a-t-elle souligné, rappelant que cette question est étroitement liée à la traite des femmes.

MME SARDÁ a souligné que la proposition de mettre en place un «point focal» chargé de ces questions permettrait que les questions liées aux femmes demeurent présentes, en permanence, au sein du Conseil.

L'animateur de ce débat, M. ELFERTS, a souligné que la question de la violence contre les femmes ne relevait pas de la sphère privée et souscrit au point de vue de ceux qui ont mis l'accent sur l'importance capitale de l'implication de la société civile si l'on veut avancer dans le règlement du problème. Les 10 et 11 juin prochain, a-t-il rappelé, le Conseil de l'Europe sera appelé à rédiger une convention globale européenne sur la violence faite aux femmes.

MME CRAVERO a insisté sur l'importance qu'il y a à traiter les causes de la violence à l'égard des femmes en temps de guerre. Les conflits, et en particulier les guerres civiles, entraînent une décomposition du tissu social qui fragilise avant tout les femmes et les filles, privées de soutien des membres masculins de la communauté, souvent partis au combat, a-t-elle expliqué. Elles deviennent alors victimes des exactions commises par d'autres combattants, parfois des acteurs non étatiques. Dans ce contexte, le viol est une arme d'une efficacité redoutable pour déstructurer les familles et les collectivités, un fait que certains combattants n'ont que trop bien compris. Il faudrait que le Conseil de sécurité se saisisse de ce problème, a déclaré Mme Cravero.


Réunion-débat sur le thème «mortalité maternelle et droits des femmes»

Exposés d'introduction

M. FRANCISCO SONGANE, Représentant du Secrétariat pour le partenariat pour la santé des femmes, des nouveaux-nés et des enfants, ancien Ministre de la santé du Mozambique et modérateur des débats, a salué la décision du Conseil de tenir une réunion-débat sur ce thème particulier. Il a souligné la prévalence importante dans le monde des cas de grossesses et d'accouchements se terminant par le décès de la mère. La mort d'une mère aggrave grandement le risque de décès de son nouveau-né, a-t-il ajouté, soulignant que le taux de mortalité infantile dans le monde en développement est le même taux que connaissait l'Europe il y a deux siècles. La situation est encore plus critique en Afrique Sub-saharienne où une femme sur 16 est menacée, alors que ce chiffre se monte à une femme sur 3000 dans le monde industrialisé. M. Songane a toutefois fait remarquer que le problème de la mortalité maternelle affecte aussi le monde industrialisé. Les États-Unis, par exemple, présentent un taux de mortalité parmi les femmes noires de 3 à 4 fois plus élevé que chez les femmes des autres groupes. Au Royaume-Uni, il y a une différence de facteur cinq entre les femmes favorisées et les femmes défavorisées.

M. Songane a rappelé que pour chaque femme qui meurt, trente autres terminent leur grossesse ou leur accouchement avec des séquelles physiques. Les femmes porteuses de fistules sont souvent abandonnées par la société et leurs maris, a-t-il ajouté. Les droits des femmes sont violés sur une grande échelle, a-t-il insisté, avant de souligner que la communauté internationale a un rôle à jouer à cet égard. Il s'est ainsi réjoui des contributions utiles qui ressortiront des débats.

M. MONIR ISLAM, Directeur du Département pour une grossesse à moindre risque de l'Organisation mondiale de la santé, a déclaré qu'à chaque minute, quelque part dans le monde, une femme perd la vie en la donnant, que ce soit durant la grossesse, l'accouchement ou dans les jours qui suivent. Il a rappelé que l'inégalité n'était pas seulement entre pays développés et en voie de développement mais aussi au sein même des pays ou des régions. Ainsi, trop souvent, les femmes des zones rurales et pauvres n'ont aucun accès aux services de prévention maternelle et infantile ou à de simples dispensaires pour bénéficier d'un suivi avant, pendant et après l'accouchement.

L'OMS a répertorié trois types de retards. Le premier est dans la prise de décision. Qui décide qu'une fille sera mariée avant l'âge du mariage légal, qui décide d'avoir un enfant, qui décide de l'opportunité des soins en cas de danger? La femme peut-elle décider? Ou bien la décision est-elle celle du père, de la mère, de la belle-mère, de proches ou du mari, a encore demandé M. Islam. Le second retard est de savoir qui prend la décision de chercher à obtenir des soins, ce qui peut dépendre aussi de la proximité ou pas d'un centre de santé. Enfin, le troisième retard se produit lorsque dans un hôpital, une clinique ou un dispensaire, la patiente n'obtient pas les soins dont elle a besoin ou dans les temps. Lorsqu'elle a effectivement accès aux soins, ceux-ci sont-ils à la hauteur, disposent-ils du matériel et des traitements nécessaires? Il s'agit là d'une grande injustice car nous savons que les moyens qui manquent sont en fait à notre portée, a souligné le Directeur. Trop nombreuses sont encore les femmes qui meurent dans le silence, par absence de soins, à la suite d'accouchements difficiles, alors que le reste de la famille se réjouit de la venue d'un nouveau-né, a-t-il lancé. Et parfois, c'est la vie de l'enfant qui est, elle aussi, trop souvent menacée par l'absence de soins, a rappelé M. Islam. Il faut qu'il y ait une justice dans l'égalité, a-t-il conclu.

M. VINCENT FAUVEAU, Conseiller principal pour la mortalité maternelle au Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a notamment indiqué que l'expérience et les études montrent que les décès maternels pourraient être sensiblement diminués si chaque femme avait accès à des services de soins fondamentaux. Nous savons aussi que l'inégalité entre les sexes et la violence contre les femmes sont des causes de décès maternels. L'absence d'autonomie des femmes en matière de choix de santé est un autre facteur d'aggravation. M. Fauveau a également relevé la fragilité particulière des jeunes filles et le manque de capacité de planification familiale. Le problème général est le manque de vision complète de la lutte contre la mortalité maternelle. L'expert a également observé que les questions de culture, de droits de l'homme, d'égalité entre les sexes et de santé reproductive sont interdépendantes. L'une des leçons apprises par le FNUAP est que les programmes de santé reproductive sont d'autant plus efficaces qu'ils sont développés en concertation avec les usagers, en tenant compte des connaissances et cultures traditionnelles.

Le FNUAP estime en outre que la réduction de la mortalité maternelle passe par le financement des systèmes de santé, notamment de santé reproductive. Cependant, pour que ces investissements soient efficaces, les interventions doivent être placées dans un cadre de droits de l'homme appliqué en pleine connaissance de la culture locale. Enfin, les femmes doivent être autonomisées grâce à l'éducation, la formation et l'accès aux investissements productifs et aux emplois rémunérateurs. Des femmes autonomes, plus conscientes de la réalité de leur état de santé, sont moins sujettes aux complications liées à la maternité et davantage susceptibles de recourir aux services de santé.

MME JASHODHARA DASGUPTA, Coordonnatrice de SAHAYOG, une organisation qui s'occupe de la santé maternelle et de l'égalité des sexes en Inde, s'est demandée comment justifier qu'un demi million de femmes meurent en raison de grossesses, d'accouchements et d'avortements risqués, alors que les connaissances existent, qu'il y a des médecins et des sages-femmes. Y a-t-il une volonté collective d'éviter cette catastrophe, a-t-elle demandé? Elle a fait remarquer que dans la lutte contre la mortalité maternelle, les services sont promis par les gouvernements mais qu'au final, les femmes pauvres n'y ont pas accès et ne peuvent revendiquer leurs droits. Les femmes ont besoin de solutions médicales, mais également d'éducation et d'information, a-t-elle fait observer.

Mme Dasgupta a dit attendre des engagements de la part du Conseil et notamment qu'il réaffirme la santé maternelle comme droit de l'homme et encourage la mise en place, par les États, de garanties institutionnelles pour assurer ces soins et éviter les décès. Il faut garantir des soins, un accès à ces soins et des procédures de recours pour les cas de déni de ces services, a-t-elle insisté. La représentante a plaidé en faveur d'une évaluation claire des raisons et causes de ces décès, au nombre desquelles figurent la pauvreté, l'absence d'information, la marginalisation et l'absence de services sociaux de base. Elle a enfin prié le Conseil de créer la volonté politique pour s'atteler à cette question de toute urgence. Il ne s'agit pas uniquement d'une responsabilité de l'État mais également d'une responsabilité de tous, a-t-elle conclu.

M. PAUL HUNT, Rapporteur spécial sur le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a souligné que chaque système de santé national doit disposer de plans pour la santé maternelle doté d'un budget suffisant et appuyant ses actions sur des données statistiques désagrégées permettant de cibler les efforts. Le système doit en outre être capable d'atteindre les groupes défavorisés. Enfin, le système doit être soumis à des mécanismes permettant d'établir les responsabilités.

Le respect des droits de l'homme exige que ces les mécanismes soient transparents, accessibles, efficaces et indépendants. Or, les mécanismes existants actuellement au niveau national ou international sont trop faibles, a déploré M. Hunt. Au niveau national, il faut procéder à des contrôles et des enquêtes sur les décès maternels. Les commissions nationales de droits de l'homme doivent à ce stade demander des comptes de l'évolution des taux de mortalité et de morbidité maternelles à tous les intervenants concernés. Au niveau international, il faut que les États soumis à l'examen périodique universel s'expriment sur les mesures qu'ils prennent pour lutter contre la mortalité maternelle. Les Rapporteurs spéciaux dont les mandats touchent à ce problème doivent être encouragés à accorder leur attention à ce problème de santé publique. De même, les organes des traités institués par les Nations Unies doivent tenir compte de cet aspect de l'action des États dans leurs délibérations.

M. Hunt a suggéré que, pour s'assurer que les États respectent effectivement leurs responsabilités et obligations en matière de lutte contre la mortalité infantile, la communauté internationale doit instaurer un mécanisme de contrôle, tel un groupe interdisciplinaire de cinq experts en médecine et santé publique. Ces experts seraient chargés d'examiner la conduite des États et d'émettre des observations et recommandations. Enfin, le Rapporteur spécial a appelé le Conseil à relever ce défi en matière de santé publique en instaurant un tel mécanisme de contrôle international.

Débat

Le représentant du Chili a cité l'exemple de son pays où le pourcentage de mortalité maternelle est passé de près de 40 décès pour 1000 à 18,7 naissances en moins de 14 ans, soit une réduction d'un tiers. L'objectif est de réduire encore cette mortalité maternelle, ce qui est possible, a-t-il assuré.

Au-delà de la possibilité de parvenir à des résultats au niveau national, la plupart des intervenants se sont interrogés sur les possibilités d'agir au niveau international. La question a été posée en particulier sur la question de savoir dans quelle mesure le Conseil des droits de l'homme pouvait se saisir d'une question qu relève d'autres organismes onusiens. Quelle valeur ajoutée peut apporter le Conseil?

Plusieurs orateurs ont souligné que la responsabilisation des femmes était essentielle pour réduire la mortalité maternelle et infantile. Il convient d'inclure l'avis des collectivités où prévalent des taux élevés de mortalité tout en les sensibilisant dans le même temps aux moyens de lutte contre la mortalité maternelle, a également souligné une délégation.

Parmi les organisations non gouvernementales à s'être exprimées, une représentante d'Amnesty International a d'ailleurs souligné que les femmes, y compris les plus marginalisées, puissent participer à la conception des politiques de santé. Elle s'est demandée si le mécanisme de l'examen périodique universel pourrait contribuer à avancer sur cette question.

Dans d'autres questions et commentaires, une délégation a donné des exemples de bonnes pratiques grâce auxquelles la mortalité maternelle a pu être réduite de manière très importante. Il s'agit notamment d'introduire des plans de santé à long terme et des mesures ciblées touchant le recrutement de personnel soignant en obstétrique.

Une intervenante a estimé que d'ici au terme fixé pour la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, soit 2015, le Conseil des droits de l'homme peut et doit continuer d'organiser des réunions-débats sur le thème de la mortalité maternelle. Le Rapporteur spécial doit assurer le suivi de cette question et faire des propositions selon le mandat qui lui a été confié. D'autre part, le Conseil devrait renforcer sa coopération avec toutes les instances des Nations Unies, en particulier l'OMS.

Une délégation a observé que les membres du panel ont bien expliqué que la mortalité maternelle est un problème urgent touchant aux droits des femmes et de leurs enfants à naître. Dans ce contexte, l'avortement est parfois présenté comme une solution alternative. Cependant, l'avortement aggrave la détresse des futures mères, placées devant le dilemme faux et insoluble du choix entre leur vie et celle de leur enfant. En outre, l'avortement est une violation du droit à la vie de l'enfant à naître, a dit la délégation.

Il a été demandé aux experts comment le Conseil pourrait participer à la lutte contre la mortalité maternelle dans la région Asie-Pacifique. De même, une délégation a voulu savoir quels mécanismes le Conseil pourrait mettre en œuvre pour aider les États à remédier aux carences structurelles et systémiques qui entraînent des décès maternels évitables.

Réponses des panélistes

M. ISLAM a vanté les mérites des audits sur les cas de mortalité maternelle, arguant que chaque décès a des raisons, une histoire et un contexte et estimé que chaque pays devrait avoir un tel système. Au Royaume-Uni, en Malaisie et à Sri Lanka, cet outil a amélioré la situation et a permis d'évaluer les insuffisances, a-t-il précisé, avant d'insister sur le fait qu'il ne s'agit pas d'émettre des accusations, mais bien d'évaluer la situation. Pour illustrer son idée, il a expliqué que l'Organisation mondiale de la santé a ventilé les données de 60 pays et qu'une évaluation de ces données a montré que les femmes des zones rurales sont plus marginalisées que les autres. En analysant ainsi les données, on peut évaluer les causes et apporter des solutions en conséquence.

M. FAUVEAU a enchaîné sur la même idée en insistant sur l'obligation reditionnelle des gouvernements, à savoir l'obligation pour le gouvernement de transmettre l'information à la population. Cette obligation, a-t-il précisé, est intimement liée à la capacité de mesurer. Sans données, on ne peut évaluer. Les statistiques peuvent combler les lacunes. D'autre part, il a rappelé que des décès peuvent être évités et qu'il faut, pour ce faire, investir dans les ressources humaines au service de la santé.

MME DASGUPTA a, pour sa part, souhaité que les mesures prises dans ce domaine contribuent également à faire en sorte que les femmes passent du statut de bénéficiaire passif de la santé à celui d'agent actif. Elle a estimé que le Conseil des droits de l'homme a un rôle à jouer à cet égard lorsqu'il identifie un groupe défavorisé. S'agissant de la question des audits, Mme Dasgupta a attiré l'attention sur l'importance de dépasser les facteurs biologiques et médicaux pour s'intéresser aussi aux réactions en chaîne, aux causes et aux facteurs régissant la santé. Le Conseil, qui a une vue globale sur le développement peut, ici aussi, jouer un rôle, a-t-elle précisé.

M. HUNT a reconnu que les experts techniques de l'Organisation mondiale de la santé et du Fonds des Nations Unies pour la population, entre autres, savent ce qu'il faut faire pour mettre un terme à ce phénomène scandaleux de la mortalité maternelle. Il a toutefois insisté sur les avantages qu'il y a à prendre du recul et à passer à un statut d'indépendant pour évaluer ce que les États et les experts eux-mêmes font. Ce sont les Nations Unies qui ont pris en main cette question en instituant des procédures indépendantes, a-t-il fait observer, et c'est maintenant le rôle historique du Conseil des droits de l'homme de poursuivre dans cette voie. C'est là l'avantage comparatif qu'offre le Conseil, a-t-il insisté, il a la possibilité de créer des mécanismes indépendants qui peuvent présenter des recommandations simples pour aider les États à assurer un meilleur niveau de santé.

M. SONGANE, concluant le tour de table, a prôné un meilleur partage des informations pour réussir à mettre en place un véritable partenariat. La question de la mortalité maternelle devrait être en permanence à l'ordre du jour du Conseil, a-t-il ajouté. Il faut contrôler les progrès accomplis en tenant compte du fait qu'il s'agit d'une violation des droits de l'homme importante.

M. ISLAM a souligné que la bataille technique pour résoudre le problème était connue et que désormais c'était l'investissement politique qui comptait. En résumé nous savons ce qu'il faut faire mais si certains États le font, d'autres pas, a renchéri M. HUNT. Il faudrait donc demander des comptes à ces États, a-t-il lancé. La volonté politique doit être là et ensuite la société civile doit jouer son rôle pour interpeller le gouvernement pour qu'il réponde aux exigences, a repris M. Islam. Selon lui, les organisations non gouvernementales peuvent jouer un rôle plus important à cet égard. Au niveau politique international, le Japon s'est engagé par exemple à ce que ce point soit à l'ordre du jour du G8.

Pour M. FAUVEAU, il existe un élan depuis une vingtaine d'années pour remédier à cette mortalité, la santé maternelle venant peu à peu au premier plan. Le Conseil des droits de l'homme doit donc se joindre à cet élan au cotés des organisations nombreuses engagées en ce sens, selon lui. Le Conseil pourrait articuler son action avec elles pour faire valoir la dimension droits de l'homme du problème.

MME DASGUPTA a toutefois constaté pour sa part qu'il y avait peu de mentions de ce problème dans les rapports sur l'examen périodique universel.

M. HUNT a rappelé que la mortalité maternelle était si élevée qu'elle dépassait ceux des disparitions forcées, ou des exécutions sommaires par exemple. Selon lui, il est temps que la priorité soit accordée à ce fléau silencieux. Il a aussi attiré l'attention sur le rôle des bailleurs de fonds et fait observer que la mortalité maternelle n'est pas un problème qui affecte uniquement les pays en développement. La mortalité maternelle touche également les pays à revenu intermédiaire et, dans une certaine mesure, les pays développés. Il a à cet égard déploré que la majeure partie de l'aide publique au développement passe par des projets et non par des appuis aux budgets. Les États bénéficiaires ont, en conséquence, beaucoup de mal à planifier une action sur le long terme et développer des programmes durables. Les États bénéficiaires ont certes leur responsabilité, mais les bailleurs de fonds ont aussi les leurs, a-t-il souligné. Il a en outre relevé l'importance, dans la lutte contre la mortalité maternelle, de prendre en compte l'ensemble de facettes du phénomène. À titre d'exemple, il a fait remarquer que cela ne sert à rien d'assurer un accès aux cliniques pour toutes les femmes, s'il n'y a aucun soin disponible. Le lien entre l'offre et la demande n'est pas toujours pris en compte, a-t-il regretté à ce sujet. La mortalité maternelle peut être prévenue dans la majeure partie des cas, a-t-il répété. Ce n'est pas un problème de développement, c'est un problème de droits de l'homme.

En fin de séance, le modérateur, M. SONGANE, résumant l'essentiel des débats de l'après-midi, a souligné que les contributions faites au cours de la séance ont montré que la mortalité maternelle est bien une question de droits de l'homme, et qu'il faut davantage de volonté politique pour la combattre. M. Songane a également relevé l'importance de se soumettre à l'obligation reditionnelle tant au niveau national qu'international, et ce, dans le but d'améliorer la situation des droits de l'homme. En outre, l'importance de disposer de données et de les analyser a été relevée par le modérateur. Il faut adopter une approche intégrée pour assurer que les interventions atteignent bien les personnes visées. Au niveau international, il a préconisé que l'examen périodique universel traite toujours de la question de la mortalité maternelle. Le modérateur a conclu son intervention en formulant quelques recommandations, parmi lesquelles faire figurer la santé maternelle à l'ordre du jour du Conseil et renforcer de toute urgence les systèmes de santé.

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1Déclaration conjointe: Fédération internationale des femmes diplômées des universités; Association des femmes du pacifique et de l'Asie du Sud-Est; Zonta International; Mouvement mondial des mères; Fédération internationale des femmes de carrières libérales et commerciales; Worldwide Organization for Women; International Network for the Prevention of Elder Abuse; Institut pour une synthèse planétaire; Association internationale de la cuisine solaire; et Fédération Internationale des femmes pour la paix mondiale.

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