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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LES RAPPORTS SUR LES DROITS DE L'HOMME ET LA LUTTE ANTITERRORISTE, LA TORTURE ET LES DISPARITIONS

10 Mars 2009

Conseil des droits de l'homme
APRES-MIDI 10 mars 2009


Le Conseil des droits de l'homme a procédé, cet après-midi, à l'examen des rapports sur la protection des droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme, sur la torture et sur les disparitions forcées ou involontaires, qui avaient été présentés ce matin par les titulaires de mandat respectifs.

Nombre d'intervenants se sont inquiétés des dérives de la lutte contre le terrorisme, comme le profilage racial, ethnique et religieux ou la détention arbitraire. Certains ont fait part de leurs préoccupations face aux prérogatives croissantes laissées aux agences de renseignements, qui se voient autorisées à interroger et maintenir des suspects en détention secrète. Plusieurs délégations ont insisté sur l'importance qu'il y a à soumettre ces agences à supervision et à les tenir pour responsables de leurs actes et, d'une manière générale, à faire en sorte que la lutte contre le terrorisme soit menée en conformité avec les idéaux, valeurs et normes relatifs droits de l'homme.

La question de la torture a également été associée par plusieurs délégations aux dérives de la lutte contre le terrorisme. Plusieurs intervenants ont par ailleurs estimé que le Rapporteur spécial sur la torture outrepassait son mandat en se penchant sur la question de la compatibilité entre la peine de mort et l'interdiction des traitements cruels, inhumains et dégradants. Les questions de la torture et de la peine capitale ne devraient pas être liées, ont-ils estimé, arguant que la peine de mort est une sanction que les États peuvent légitimement exercer. D'autres délégations se sont au contraire réjouies de l'interprétation dynamique du droit dont témoigne l'approche du Rapporteur spécial sur la torture concernant ces questions.

Pour ce qui est des disparitions forcées, il a notamment été souligné qu'en dépit de l'importance des progrès réalisés jusqu'ici, beaucoup reste à faire, car jusqu'à présent, seuls un petit nombre de cas ont été éclaircis, parmi toutes les victimes recensées de par le monde. Les États qui ne l'ont pas encore fait ont été encouragés à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Il importe de mettre sur pied des organes chargés non seulement d'enquêter sur les cas de disparitions forcées et de punir leurs auteurs, mais également d'assurer réparations aux victimes et à leurs familles, a-t-il également été souligné.

Les représentants de la Guinée équatoriale, de la République de Moldova et de l'Argentine sont intervenus en tant que pays concernés par les rapports étudiés cet après-midi, comme l'avait fait l'Espagne juste avant la fin de la séance de ce matin.

Au cours du dialogue interactif, les délégations des pays suivants ont pris la parole: Afrique du Sud, Brésil, Canada, Mexique, Égypte, Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Cuba, Arabie saoudite, République tchèque (au nom de l'Union européenne), Espagne, Nigéria, Chine, États-Unis, Fédération de Russie, France, Bangladesh, Uruguay, Suisse, Jamaïque, Luxembourg, Islande, Venezuela, Yémen (au nom du Groupe arabe, puis en son nom propre), Indonésie, Pérou, Maroc, Bolivie, Népal, Algérie, Tanzanie, Finlande, Royaume-Uni, Danemark, Iraq, Iran, Soudan, Botswana, Sri Lanka, Thaïlande et Singapour. En fin de séance, la République de Corée, l'Angola et l'Algérie ont exercé le droit de réponse.

La journée de demain, 11 mars, à partir de 10 heures, sera entièrement consacrée au débat annuel du Conseil consacré aux droits de l'enfant, alors que cette année marque le vingtième anniversaire de la Convention relative aux droits de l'enfant. Le Conseil poursuivra jeudi son dialogue interactif sur les trois rapports examinés cet après-midi.


Protection des droits de l'homme dans la lutte antiterroriste, torture, disparitions forcées

Déclarations de pays concernés par le rapport sur la torture

M. SALVADOR NGUEMA NCGHAMA (Guinée équatoriale) a rappelé que la Commission des droits de l'homme avait, en 2002, recommandé au Gouvernement équato-guinéen de poursuivre ses efforts pour protéger et améliorer la situation des droits de l'homme dans le pays. Elle avait aussi enjoint les organismes des Nations Unies et les pays donateurs à prêter assistance à ce pays dans cette entreprise. Ainsi, le Gouvernement a-t-il invité le Rapporteur spécial sur la torture à vérifier les progrès réalisés de ce point de vue, a précisé le représentant de la Guinée Équatoriale. Il a à cet égard rappelé que son Gouvernement avait créé une commission spéciale chargée de surveiller et, le cas échéant, de punir toute infraction à la loi de 2006 sur la prévention et la répression de la torture. Le représentant équato-guinéen a par ailleurs indiqué que son pays se réservait le droit de formuler des observations complémentaires lorsqu'il aura reçu le rapport officiel du Rapporteur spécial. La Guinée Équatoriale considère en effet ne pas être un pays concerné à ce stade de la session, a déclaré le représentant. Il a affirmé que la présente situation constitue une infraction au code de conduite applicable aux titulaires de mandat, dans la mesure où son pays n'a pas été en mesure d'évaluer le rapport préliminaire du Rapporteur spécial. Il a conclu son intervention en assurant de la volonté de son pays de collaborer avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme afin de réaliser les principes et idéaux consacrés par la Déclaration universelle des droits de l'homme.

MME CORINA C?LUG?RU (République de Moldova) a souligné que les autorités moldoves n'ont ménagé aucun effort pour apporter leur pleine coopération dans le cadre de la visite que M. Nowak a effectuée en Moldova, de manière à assurer le succès de cette visite. Il a ajouté que les autorités de son pays ont entrepris un examen approfondi des constatations et recommandations du Rapporteur spécial. Le Gouvernement moldove a eu un dialogue ouvert avec le Rapporteur spécial et lui a transmis un certain nombre de commentaires et explications sur le rapport initial, a-t-il insisté. S'agissant de la région de Transnistrie de la Moldova, le représentant a rappelé que selon un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Ilascu c. Moldova, la préoccupation au sujet de cas de torture qui se sont produits ou pourraient se produire ne devraient pas s'étendre à cette région; ce n'est en effet que lorsque l'on sera parvenu à un règlement du conflit concernant la Transnistrie - à travers la formule de négociation à «5+2» - dans le respect de l'intégrité territoriale de la Moldova et après réintégration du pays, qu'il sera possible de traiter directement des lacunes existantes dans ce domaine, a expliqué le représentant.

Déclaration de pays concerné par le rapport sur les disparitions forcées

M. SEBASTIÁN ROSALES (Argentine) a indiqué que son pays était fier d'avoir accueilli, à Buenos Aires, en août 2008, la quatre-vingt-cinquième session du Groupe de travail. Les travaux de ce Groupe sont précieux pour l'Argentine, a-t-il souligné, rappelant que la question des disparitions forcées intéressait tout particulièrement son pays en raison du passé douloureux de l'Argentine. Le droit à la vérité, les politiques de réparation, le caractère anticonstitutionnel de certains textes de loi comme la loi sur «l'obéissance» ou celle dite du «point final» font partie des priorités nationales, l'objectif étant de clore enfin définitivement le chapitre des disparitions forcées mais pas en tirant un trait sur le passé, a expliqué le représentant. Il a rappelé que l'association des grands-mères de la place de Mai avait réalisé un travail remarquable pour identifier les enfants des personnes disparues adoptés en cachette pendant la dictature. Le Gouvernement s'efforce d'assurer la protection des témoins, a par ailleurs souligné le représentant. L'Argentine a joué un rôle particulièrement actif dans la négociation du premier instrument international sur cette question, dans le cadre de l'ancienne Commission des droits de l'homme. L'Argentine a été le deuxième pays à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée en 2006. L'Argentine a pour souci de faire avancer le droit à la vérité et est toujours disposée à collaborer étroitement avec le Groupe de travail afin, au bout du compte, d'élucider le plus grand nombre d'affaires possibles, a insisté le représentant.

Dialogue interactif

MME GLAUDINE J. MTSHALI (Afrique du Sud) a estimé que le rapport du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste englobe des questions complexes et légitimes. Elle a reconnu, ainsi que le souligne M. Scheinin, que les services de renseignement jouent un rôle fondamental dans la lutte contre le terrorisme. Il convient, dès lors, de prendre en considération ces entités afin d'assurer que leurs activités sont conformes aux droits de l'homme, a-t-elle fait remarquer. Elle a par ailleurs relevé l'importance d'enquêter sur les pratiques de profilage racial, ethnique ou religieux dans la lutte contre le terrorisme. Elle a en outre suggéré d'élaborer des recommandations spécifiques sur d'éventuelles réparations pour les victimes. La représentante sud-africaine a estimé que les recommandations figurant dans le rapport sont très constructives, notamment celle relative à l'élaboration d'un instrument spécifique ou de directives, ainsi que celle préconisant la compilation des bonnes pratiques. Ces recommandations devraient faire l'objet d'une discussion au sein du Conseil, a-t-elle fait estimé. D'une manière générale, la déléguée a estimé que les mesures de protection actuelles sont insuffisantes.

M. MURILO VIEIRA KOMNISKI (Brésil) a réaffirmé sa conviction que les droits de l'homme doivent servir de cadre dans la lutte contre le terrorisme. Il a rappelé qu'un citoyen Brésilien a été tué dans un pays européen parce qu'on l'a pris par erreur pour un terroriste. Un forum a été créé sur cette question et il serait intéressant d'avoir l'opinion du Rapporteur spécial à ce sujet. M. Nowak évoque aussi les mauvais traitements subis dans le cadre de la lutte contre les narcotrafiquants et le Brésil à nouveau est d'avis que cette lutte doit se faire dans le respect des droits de l'homme. Il a demandé à M. Nowak de commenter les traitements survenus dans le cadre de la lutte contre la dépendance à la drogue, y compris les questions relatives aux tests de l'hépatite et du VIH/sida. Le Brésil a ratifié le Protocole facultatif à la Convention contre la torture en janvier 2007. Depuis, le Gouvernement a mis en place des mécanismes nationaux, dont un Comité national pour la prévention et le contrôle de la torture, a fait valoir le représentant brésilien.

M. DANIEL OLMER (Canada) a évoqué le rapport sur les disparitions forcées en soulignant qu'il appuyait les initiatives telles que les commissions de vérité et de réconciliation. Le Canada a toujours milité pour le droit à la vérité qu'il distingue toutefois de la nécessaire réconciliation, distinction que fait aussi le Groupe de travail, tout en estimant que la promotion de la réconciliation ne peut se substituer à la traduction en justice des responsables. Le représentant canadien a demandé au Groupe de travail de quelle manière les États pouvaient combiner justice et réconciliation. Il a aussi souhaité savoir comment le groupe de travail envisageait de s'assurer de la prise en compte des besoins des femmes et des enfants face à la question des disparitions forcées.

M. JOSÉ GUEVARA (Mexique) a assuré que son pays entend continuer de collaborer avec les procédures spéciales. Il a salué les travaux effectués par le Groupe de travail sur les disparitions forcées et s'est félicité de la décision du Groupe de mettre l'accent sur l'harmonisation des législations nationales pour promouvoir les mesures contre les disparitions forcées. Il a encouragé le Groupe de travail à poursuivre ses efforts dans ce domaine. Par ailleurs, le représentant mexicain a estimé que l'analyse du Rapporteur spécial sur la torture est extrêmement intéressante. Il a rappelé que son pays a totalement aboli la peine de mort. Son pays s'engage à poursuivre la discussion sur ce thème. Enfin, rappelant que plusieurs procédures spéciales ont abordé la question des droits des personnes privées de liberté, le délégué du Mexique a relevé l'importance de disposer de mécanismes efficaces pour protéger ces catégories de personnes. Il a souhaité avoir plus de détails sur la meilleure manière de protéger les personnes privées de liberté.

M. AMR ROSHDY HASSAN (Égypte) a déclaré que le rapport sur la torture dépasse clairement son mandat en abordant la question de la peine capitale. Un tiers du rapport est consacré à cette question. La peine capitale est largement évoquée de même que la Convention européenne des droits de l'homme qui est citée pas moins de 19 fois. Ce texte ne peut par conséquent s'appliquer ailleurs qu'à l'Europe, car la portée de cette Convention se limite à l'Europe. Il y a trop de références d'éléments qui n'ont pas leur place dans ce rapport, tel que la lutte contre les stupéfiants ou des références aux sanctions corporelles assimilées à la torture. Il s'agit d'un raccourci inacceptable. Il s'agit d'un cas qui outrepasse le mandat du Rapporteur spécial qui ne contribue en rien au travail du Conseil, et ne fait que favoriser la division.

M. IMRAN AHMED SIDDIQUI (Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique - OCI) a évoqué la nécessaire lutte contre le terrorisme tout en soulignant que celle-ci devait se faire dans le respect des droits de l'homme. Un équilibre doit être trouvé entre les deux nécessités, a-t-il souligné. Le terrorisme étant une tactique et non pas une idéologie, c'est la raison pour laquelle il conviendrait de s'attaquer en premier lieu aux racines du terrorisme, a-t-il estimé. L'orateur a demandé par ailleurs au Rapporteur spécial si le partage des renseignements sur les personnes soupçonnées d'activités terroristes était compatible avec les droits de l'homme fondamentaux. En ce qui concerne la peine capitale, il s'agit d'une sanction légitime que les États peuvent exercer, estiment les pays de l'Organisation de la Conférence islamique, qui ne voient pas le lien qui est établi entre la torture et la peine capitale par le Rapporteur. La tentative de fondre dans le même moule des concepts juridiques et éthiques différents ne facilite pas notre combat commun contre la torture, a-t-il conclu.

MME MARÍA DEL CARMEN HERRERA (Cuba) a relevé l'importance du mandat du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, car il permet de mettre en évidence les graves violations des droits de l'homme commises en toute impunité dans la lutte contre le terrorisme. Elle a dit partager l'avis du Rapporteur spécial s'agissant du rôle joué par les services de renseignement. Elle s'est tout particulièrement inquiétée de la multiplication des attributions octroyées à ces organes qui, sous prétexte de lutte contre le terrorisme, se voient autorisés à incarcérer et interroger des suspects. Permettre à ces organes d'assassiner, faire disparaître et maintenir des suspects en détention secrète, ainsi que de pratiquer la torture lors des interrogatoires, constitue une grave violation des droits de l'homme, a souligné la représentante cubaine. À cet égard, elle a attiré l'attention sur le sort des cinq Cubains injustement détenus par les États-Unis et a demandé au Rapporteur spécial de s'intéresser aussi aux activités d'organisations terroristes anticubaines qui opèrent depuis Miami. Avant de conclure, elle a souhaité connaître l'opinion de M. Nowak, Rapporteur spécial sur la torture, sur les responsabilités croissantes octroyées aux organes de renseignement.

M. ABDULWAHAB ABDULSALAM ATTAR (Arabie saoudite) a déclaré que son pays figure parmi les premiers pays à avoir lancé la lutte antiterroriste, en menant une politique qui doit encourager les personnes à abandonner leur vision terroriste. Des conseils et des appuis sont donnés aux anciens extrémistes, a-t-il précisé. Dans 95% des cas, les gens arrivent à changer totalement leur comportement. Cette approche porte donc ses fruits. Un site web, en anglais et en arabe, ainsi qu'une ligne téléphonique d'urgence sont à la disposition des proches de personnes extrémistes. Un programme a également été mis en place à l'intention des imams. Le but de tous ces efforts est de maintenir l'unité nationale, tout en encourageant le dialogue, a indiqué le représentant saoudien. Il a par ailleurs indiqué que son pays avait, au sujet du rapport du Rapporteur spécial sur la torture, une réserve à émettre, qui porte sur la peine de mort. Le Rapporteur spécial s'est en effet fondé, s'agissant de cette question, sur des avis particuliers qui ne reflètent pas l'avis de la majorité des États. En outre, cette question outrepasse le mandat qui lui a été confié. L'Arabie saoudite confirme ainsi ce qui a été dit à ce sujet au nom de l'Organisation de la conférence islamique.

M. PETR PRECLIK (République tchèque au nom de l'Union européenne) a souligné l'importance, pour les services de renseignement, de respecter les droits de l'homme dans le cadre des échanges d'information auxquels ils procèdent entre eux au sujet des personnes suspectées de terrorisme. En général, dans les pays européens, les agences de renseignement sont sous la supervision des parlements nationaux, a-t-il rappelé. Concernant la torture, le représentant tchèque a jugé profondément regrettable que le Rapporteur spécial en charge de cette question, M. Manfred Nowak, ait été contraint de renouveler ses demandes de visite à pas moins de 21 pays. Tout État prenant au sérieux son engagement à respecter les droits de l'homme devrait répondre avec promptitude à de telles demandes ou, mieux, les anticiper en envoyant de lui-même une invitation aux mécanismes de procédures spéciales. Le représentant tchèque a souhaité savoir si M. Nowak avait constaté un progrès concernant la situation au regard des risques de voir les centres de détention secrets favoriser le recours à la torture. Il lui a aussi demandé son avis sur l'examen de la question de la lutte contre le trafic de drogues et le respect des droits de l'homme dans le cadre de son mandat.

MME SILVIA ESCOBAR (Espagne) a dit avoir écouté avec intérêt l'exposé de M. Nowak sur la peine de mort. Elle a indiqué que son pays soutient l'initiative visant un moratoire universel sur les exécutions ainsi que l'interdiction absolue de la peine de mort pour les délinquants mineurs et les personnes ayant un handicap mental. Elle a estimé pertinent de demander une étude juridique plus complète sur la compatibilité entre la peine de mort et le droit à ne pas être soumis à des traitements cruels, inhumains et dégradants, soulignant que l'Espagne est favorable à une telle interprétation dynamique des instruments de droits de l'homme.

M. IFEANYI NWOSU (Nigéria) a souligné que son pays a pris des mesures pour lutter contre l'impunité, qui - comme le fait observer M. Nowak - est un terrain propice à la torture. La pratique de la torture n'est par tolérée par le Gouvernement nigérian; elle est contraire à la Constitution, a-t-il ajouté. Toute victime de torture peut chercher réparation devant les tribunaux, a-t-il également assuré. Les tribunaux nigérians se fondent beaucoup sur les aveux, mais les aveux arrachés sous la torture sont irrecevables, a-t-il en outre souligné. Des directives ont été données pour que les dispositions des conventions signées par le pays soient respectées sur le terrain, a par ailleurs fait valoir le représentant nigérian.

MME QIAO LI (Chine) a jugé nécessaire que la communauté internationale renforce sa collaboration contre le terrorisme, tout en respectant la souveraineté et l'intégrité territoriale de tous les États. Elle a relevé que le terrorisme était particulièrement actif en Asie orientale et qu'il s'appuyait souvent sur le trafic de stupéfiants. Concernant la torture, la représentante chinoise a assuré que son Gouvernement prend ses obligations très au sérieux. Le Gouvernement chinois rejette en revanche toute sélectivité ainsi que toute instrumentalisation de la Convention contre la torture, regrettant à cet égard le rapprochement que le Rapporteur spécial sur la torture fait avec la question de la peine de mort. La peine capitale ne relève pas de la torture, a déclaré la représentante de la Chine. Pour ce qui est du thème des disparitions forcées, la Chine a approuvé tous les instruments internationaux pertinents, a-t-elle ajouté.

M. MARK STORELLA (États-Unis) a attiré l'attention du Conseil sur les décrets relatifs au centre de détention de Guantánamo signés récemment par le Président Obama. Il a fait valoir que ces décrets répondent à des préoccupations formulées par le Rapporteur spécial sur la torture. Il a précisé que l'un d'eux stipule notamment la fermeture de Guantánamo et de tous les autres centres de détention de l'agence américaine de renseignement, la CIA. Ces décrets stipulent en outre que les agences américaines doivent mener des interrogatoires en utilisant des méthodes autorisées, a-t-il ajouté. Le représentant américain a souligné que son Président entend lutter contre le terrorisme d'une manière conforme aux valeurs et aux idéaux du pays.

M. ROMAN KASHAEV (Fédération de Russie) a indiqué avoir pris connaissance des rapports soumis au titre du présent débat interactif, mais a fait observer que le temps imparti pour ce dialogue ne permet pas d'y apporter des commentaires détaillés. Malheureusement, la lutte contre le terrorisme a donné lieu à de nombreux phénomènes de violations des droits de l'homme, souvent commises par ce qu'il est convenu d'appeler les vieilles démocraties. La création de compagnies de sécurité privées permet de contourner la plupart des conventions et autres grands principes des droits de l'homme, a-t-il fait observer. Il est intolérable que des États protègent des terroristes et les abritent sur leur sol; peut-on distinguer entre bons et mauvais terroristes? Le représentant russe a par ailleurs affirmé que la question de la peine de mort devrait faire l'objet d'un examen distinct de celui de la torture. Dans la lutte contre les narcotrafiquants, il faut certes respecter les droits de l'homme; mais il convient aussi de se souvenir du type de menace que ces personnes et leurs activités présentent pour les droits de l'homme de la société toute entière, a en outre déclaré le représentant russe.

M. EMMANUEL ROUSSEAU (France) a souligné que l'élucidation des disparitions forcées était particulièrement ardue, la lumière n'ayant été faite jusqu'à présent que sur un petit nombre de cas parmi toutes les victimes recensées de par le monde et alors même que de nombreux autres cas ne parviennent même pas à être recensés. Le représentant français a souligné que la poursuite du dialogue avec les gouvernements et la coopération de tous les États avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées sont d'une importance vitale pour permettre aux proches des disparus de connaître la vérité. La France va présenter un projet de résolution à cette session afin de répondre à plusieurs préoccupations du Groupe de travail, a indiqué le représentant. Nous souhaitons par là continuer à encourager tous les États à signer et à ratifier le plus tôt possible la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, a-t-il ajouté.

M. MUSTAFIZUR RAHMAN (Bangladesh) a fait remarquer que le Rapporteur spécial sur la torture a consenti des efforts considérables pour examiner la question de la peine de mort dans le contexte de son mandat. Laissant entendre que M. Nowak aurait été inspiré pour cela par une question soulevée par un membre de l'Union européenne, il s'est demandé si d'autres questions similaires l'auraient aussi incité à s'intéresser à des domaines aussi controversés que celui de la peine de mort et qui ne relèvent pas directement de son mandat. En effet, il faut strictement éviter cela, a affirmé le représentant du Bangladesh. Il a ajouté que son pays n'aurait eu aucune réserve à émettre sur cette étude si elle avait été menée dans le cadre d'une carrière universitaire. Mais en l'occurrence, des responsabilités claires et définies ont été attribuées au Rapporteur spécial comme à tous les titulaires de mandat, a-t-il rappelé. La tentative de considérer la peine de mort comme une peine cruelle et dégradante est peu avisée, a estimé le représentant. Les droits de l'homme sont, certes, en évolution et impliquent une interprétation dynamique; mais des questions comme celle qui est ici soulevée devraient toutefois être laissées à l'appréciation des personnes responsables dûment mandatées pour le faire, a-t-il insisté. M. Nowak a outrepassé son mandat, a conclu le représentant du Bangladesh.

M. ALEJANDRO ARTUCIO RODRÍGUEZ (Uruguay) a indiqué que sa délégation souscrivait à l'analyse sur la peine de mort contenue dans le rapport du Rapporteur spécial sur la torture. Il a rappelé que la peine de mort avait été abolie dans son pays en 1907 et que les châtiments corporels, qu'ils soient administrés dans les domaines publics, privés ou judiciaires, étaient interdits et passibles de poursuites. Concernant l'absence de réponse de l'Uruguay à la requête du Rapporteur spécial, nous sommes convenus hier avec lui qu'il se rendrait sous peu dans le pays, a précisé le représentant uruguayen. Il aura la possibilité de visiter les prisons et même les centres psychiatriques, qui internent parfois des responsables de crimes. En ce qui concerne les disparitions forcées, le représentant a rappelé que l'Uruguay avait collaboré activement à l'élaboration du projet ayant abouti à la Convention internationale sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Pour ce qui est des horreurs commises sous la dictature, le Gouvernement uruguayen applique une politique basée sur quatre piliers: Vérité, Justice, Réparation et «Nunca Más» (plus jamais ça), a en outre souligné le représentant.

M. NICOLAS CHAMOREL (Suisse) a remercié les rapporteurs spéciaux sur la torture et sur les droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme pour les présentations et leurs rapports respectifs. Le rapport sur la torture était instructif, particulièrement en ce qui concerne la peine de mort. La Suisse est intéressée à traiter de cette thématique en lien avec les droits de l'homme; son lien avec les traitements dégradants soulève de nombreuses questions. Quant au rapport sur le terrorisme, il est mentionné au paragraphe 41 que les États sous-traitent toujours plus la recherche de renseignements à des entreprises privés; cette tendance devra-t-elle se poursuivre? Ces entreprises sont-elles susceptibles de commettre des violations de droits de l'homme? En tant qu'État initiateur du Document de Montreux (sur les entreprises militaires et de sécurité privées), la Suisse est intéressée à savoir si cette thématique doit être traitée plus spécifiquement. Un sujet qui n'a pas été spécifiquement discuté est le listing des personnes, souvent basé sur les informations de services de renseignements. La question est de savoir comment peuvent être conciliés le besoin de protéger les sources d'information et le droit de chaque individu à être informé des raisons pour lesquelles il est listé.

MME ANDREA DUBIDAD-DIXON (Jamaïque) a informé le Rapporteur spécial que son gouvernement est favorable à une visite de sa part dans le pays. S'agissant du rapport présenté par le Rapporteur spécial, la représentante jamaïquaine a dit avoir du mal à comprendre la logique qui veut qu'il se concentre sur la peine de mort. Faisant remarquer qu'il répond à une question particulière posée dans le cadre des travaux de la Troisième Commission de l'Assemblée générale en octobre dernier, elle a fait remarquer que d'autres questions ont également été posées, comme par exemple s'agissant des abus commis par les acteurs privés ou encore sur l'amélioration des conditions de mise en isolement. Elle a dénoncé toute tentative visant à faire un lien entre la peine capitale et la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Et elle a déploré que les recommandations du Rapporteur spécial semblent aller dans le sens de ce lien. La représentante jamaïquaine a rappelé que la peine capitale est compatible avec le droit international, puisqu'elle relève du droit de chaque État de déterminer s'il veut ou non y recourir. Les Rapporteurs spéciaux devraient être moins sélectifs dans les questions qu'ils traitent, a-t-elle conclu.

MME CHRISTINE GOY (Luxembourg) a évoqué l'étude faite dans le rapport sur la compatibilité entre la peine de mort et l'interdiction des traitements inhumains, cruels ou dégradants. «Mon gouvernement concorde pleinement avec cette analyse d'une nécessaire interprétation dynamique et extensive du concept de la dignité humaine et de l'interdiction de torturer et de traitements dégradants, cruels ou inhumains», a-t-elle ajouté. «Aussi bien la jurisprudence internationale constante que la tendance universelle abolitionniste confirment cette analyse qui mérite d'être approfondie», a dit la représentante luxembourgeoise. Par ailleurs, le Luxembourg invite le Conseil à faire appliquer une tolérance zéro à l'égard d'une pratique totalement contraire à la dignité humaine. La représentante du Luxembourg a enfin demandé au Rapporteur spécial comment il expliquait l'absence de coopération d'un nombre si important d'États quand il s'agit de répondre à ses requêtes de visites.

MME INGIBJÖRG DAVISDOTTIR (Islande) a apporté son soutien aux travaux du Rapporteur spécial sur le terrorisme. Cette lutte doit s'inscrire dans le respect de droits de l'homme et l'Islande se félicite, à cet égard, de la décision des États-Unis d'interdire les méthodes d'interrogation qui enfreignent les droits de l'homme. On est souvent mis en garde contre les conséquences néfastes des mesures antiterroristes, et l'Islande aimerait quels conseils pourraient être adressés aux États dans ce contexte. L'Islande a lancé une invitation ouverte aux procédures spéciales et serait ravie de recevoir une mission du Rapporteur spécial, a déclaré la représentante islandaise en conclusion.

M. FELIX PEÑA (Venezuela) s'est réjoui que le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste ait abordé la question des responsabilités de l'État suite aux actes commis par des agences de renseignements. Il a fait remarquer que suite aux terribles événements du 11 septembre 2001, l'argument de la guerre contre le terrorisme a été brandi afin de commettre de graves violations des droits de l'homme. La CIA aurait violé les droits de l'homme de manière persistante, a-t-il souligné. Il a souhaité que le Rapporteur spécial travaille sur cette question en relation avec le Groupe de travail sur les mercenaires. Sur ce dernier point, il s'est dit préoccupé par la recommandation du Rapporteur spécial parlant du Document de Montreux comme étant un guide d'action en la matière. Ce document manque de légitimité, parce qu'il n'a pas été débattu par un large groupe de pays, a-t-il fait observer. S'intéressant au rapport de M. Nowak, le représentant du Venezuela a expliqué qu'il existe une loi dans son pays établissant un traitement obligatoire pour les toxicomanes, de sorte qu'ils retrouvent leur santé mentale et physique. Le fait de soumettre à un traitement sans le consentement du toxicomane est-elle une violation de son droit à l'intégrité physique, a-t-il demandé ?

M. IBRAHIM SAIED MOHAMED AL-ADOOFI (Yémen au nom du Groupe arabe) a rappelé que de nombreux pays arabes avaient été frappés par le terrorisme mais que ce n'était que depuis le 11 septembre 2001 que la communauté internationale avait pris conscience du péril. Un plus grand appui doit être fourni aux États membres dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Le Groupe arabe appelle à une plus grande coopération entre nations dans cette lutte. Son représentant a ensuite évoqué la situation dans les territoires palestiniens occupés qui s'apparente au terrorisme d'État, selon lui. La communauté internationale doit agir pour y mettre un terme. Concernant le rapport de M. Nowak, le Groupe arabe regrette que plus des deux tiers du document soient consacrés à la peine de mort. Même si nous savons que les avis divergent sur cette question, nous estimons que le rapporteur a outrepassé son mandat, a-t-il dit. Nous souhaitons donc faire valoir notre objection, le système juridique de chaque pays devant être respecté, a-t-il souligné. Enfin, le Groupe arabe souhaite avoir l'avis du Groupe de travail sur les disparitions forcées s'agissant de la situation des détenus palestiniens.

M. WIDED PRASOJO (Indonésie) a déclaré qu'en tant que pays soumis à des attaques terroristes, il ne connaissant que de difficultés dans le domaine des droits de l'homme liées à la lutte antiterroriste. Le pays a fait de grandes avancées dans la lutte antiterroriste et la majorité des personnes impliquées dans les attaques de Bali ou de l'hôtel Marriott ont été arrêtés. Tous ont été traités avec humanité et traduits devant la justice et leurs droits ont été respectés. Les détentions arbitraires ne sont pas tolérées par l'Indonésie. La presse et la société civiles sont par ailleurs très actives et contribuent à veiller sur le respect de la démocratie et des droits de l'homme par les autorités. L'Indonésie a encouragé le Rapporteur spécial à entreprendre d'autres études afin d'aider les États dans la mise en œuvre de la Convention contre la torture.

M. INTI ZEVALLOS AGUILAR AJI (Pérou) a dit partager l'avis du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste lorsqu'il rappelle que le droit légitime de tout État de se protéger des menaces terroristes doit s'actualiser dans le respect des droits de l'homme. Il a précisé que son pays, qui a dû affronter des groupes terroristes sanguinaires, en est convaincu. Le représentant péruvien a souhaité répondre à une communication du Rapporteur spécial relative à la détention de Mme Melissa Patiño. Il a précisé que cette personne a été détenue avec d'autres personnes suite à une opération de police destinée à empêcher une attaque terroriste. Il a précisé que la détention de Mme Patiño s'est faite dans le respect des procédures, en présence du Procureur qui a pu évaluer les circonstances de sa détention.

M. OMAR HILALE (Maroc) a évoqué la nécessité d'éviter toute politisation des travaux du Groupe de travail sur les disparitions forcées. Les relations du Maroc avec le Groupe de travail sont marquées par le dialogue et une coopération étroite et sincère afin d'élucider les cas de disparition présumés, a-t-il assuré. Le représentant marocain a précisé que 782 cas ont pu être élucidés, soit 80% de ceux devant être éclaircis, et le Maroc a l'intention de poursuivre cette coopération afin d'élucider les derniers cas en suspens. Le Maroc estime que cette collaboration pourrait servir de modèle à d'autres pays.

M. MARTIN SCHEININ, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des liberté fondamentales dans la lutte antiterroriste, a déclaré avoir écouté avec grand intérêt les réactions des intervenants et se félicite du grand intérêt de la part des délégation pour protéger les droits de l'homme en toutes circonstances. Dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, il s'agit d'un véritable changement dans la manière dont cette question est abordée. Quant à l'Espagne, la question de l'Audiencia Nacional était au premier plan de ses préoccupations. Ce tribunal a juridiction sur tout le territoire sur les questions de terrorisme. Il n'a pas voulu dire qu'elle se rend coupable de violations de droits de l'homme mais il y a un risque de voir des délits mineurs tel que des désordres dans la rue traités par une juridiction centrale. Quant à l'extradition vers la Russie d'un Tchétchène, M. Karsayef, il a estimé que le cas révèle des manquements procéduraux qui sont inquiétants. Il vaudrait mieux, a estimé le Rapporteur spécial, revenir à des tribunaux régionaux en Espagne pour traiter les questions de terrorisme. Quant à l'Afrique du Sud, il s'est félicité d'avoir pu mener un dialogue au plus haut niveau lors de son passage dans le pays. Il a par ailleurs souligné que la supervision judiciaire ne peut être complète et suffire à elle seule et que le parlement a aussi un rôle de supervision à jouer. Quant à la coopération transfrontalière en matière d'échange de renseignements, il faut être vigilent. Les État ne partagent pas souvent les informations sur la manière dont les renseignements ont été obtenus, car il s'agit souvent de renseignements sensibles.

MME MAYSA UREÑA MENACHO (Bolivie) a évoqué la politique de son pays face à la question des disparitions. Les victimes de violence politique sont indemnisées pour les détentions illégales lorsque sous le pouvoir des régimes dictatoriaux. La Bolivie, qui a rompu avec ce passé, continue à procéder régulièrement à des exhumations à fins d'identification des victimes, a ajouté le représentant bolivien. Il est important que le Haut-Commissariat apporte toute son assistance à la Bolivie dans ce domaine, a-t-il conclu.

M. K. RUDRA (Népal) a souligné que son pays attache une grande importance au mandat du Groupe de travail sur les disparitions forcées. Il a précisé que suite à la visite du Groupe de travail en 2004, le Gouvernement a régulièrement fourni des informations sur les projets mis en place en vue de mettre en œuvre les recommandations du Groupe de travail. Le représentant a ajouté que 214 cas ont été réglés jusqu'à aujourd'hui. Un rapport complet sur le suivi des recommandations sera transmis au Rapporteur spécial, a-t-il ajouté. Le représentant népalais a assuré que son gouvernement travaille sérieusement avec le Groupe de travail et s'engage à régler la question des disparitions forcées. La promulgation, le mois dernier, d'une loi sur les disparitions en est la preuve, a-t-il fait observer, précisant que cette loi criminalise les disparitions et prévoit la mise sur pied d'une commission indépendante et impartiale pour enquêter, sanctionner les auteurs et offrir réparation aux victimes. Avant de conclure, il a indiqué que son gouvernement a mis en œuvre la plupart des recommandations formulées par le Rapporteur spécial sur la torture, suite à sa visite de 2005, et ce, en dépit des ressources limitées du Népal. Il a en outre souligné que son pays a déjà aboli la peine de mort.

M. LAZHAR SOUALEM (Algérie) s'est dit troublé que la question de la peine de mort soit abordée dans le rapport sur la torture. L'Algérie, pays initiateur des études sur les mesures de lutte contre le terrorisme, se pose de sérieuses questions sur la manière dont le Conseil aborde cette question. N'y a pas un conflit entre un mandat confié à un organe permanent du Conseil de sécurité et d'un instrument temporaire? Il a demandé l'avis du Rapporteur sur cette question. Il est finalement estimé regrettable que les réponses envoyées par l'Algérie au Groupe de travail sur les disparitions forcées aient été passées sous silence par le Groupe de travail.

M. BARAKA LUVANDA (Tanzanie) s'est félicité du travail effectué par le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste. Il a pris bonne note des préoccupations exprimées par ce titulaire de mandat face aux lacunes existantes en matière de supervision des agences de renseignement et a reconnu qu'il importe de faire en sorte que ces entités soient tenues responsables de leurs actions. Il relève également de la responsabilité des États de mettre en place un cadre juridique pour définir le mandat de ces agences et clarifier leurs prérogatives, a-t-il ajouté. Le représentant de la Tanzanie a fait référence à un article de presse publié en février 2002 qui mettait en garde contre le danger que d'autres attaques telles que celle perpétrée contre les États-Unis le 11 septembre 2001 ne mènent à l'adoption de mesures qui entraîneraient un cycle de destruction des libertés civiles. Il a expliqué que la Tanzanie, qui a subi une attaque terroriste en 1998, a répondu à cette agression avec prudence. Bien qu'elle ne soit pas partie aux conventions portant sur le terrorisme, la Tanzanie a adopté une législation sur la prévention du terrorisme qui tient compte de la plupart des questions soulevées par le Rapporteur spécial, a indiqué M. Luvanda.

M. PEKKA METSO (Finlande) a admis que tout titulaire de mandat fait face à un certain nombre de défis dans l'accomplissement de son mandat; il n'en demeure pas moins que la Finlande est tout à fait satisfaite du travail du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, M. Scheinin. La Finlande s'interroge, elle aussi, sur le problème posé par les services de renseignement, qui doivent pouvoir remplir leur rôle sans attenter au principe de non-discrimination. La Finlande souhaiterait donc que le Rapporteur spécial, qui évoque déjà largement ce problème dans son rapport, creuse plus avant la question.

M. JAMES EVANS (Royaume-Uni) a souhaité commenter un certain nombre d'allégations portées à l'encontre de son pays concernant des violations de droits de l'homme qui auraient été commises lors d'interrogatoires. Ces allégations ont attiré une grande attention au Royaume-Uni, a-t-il souligné. Le pays les prend très au sérieux et dispose de mécanismes pour traiter, y compris par des voies judiciaires, cette question. Le Royaume-Uni abhorre la torture; il ne participe pas à de tels actes et n'encourage pas d'autres États à le faire, non plus, a assuré le représentant britannique.

M. ARNOLD SHIBSTED (Danemark) a assuré les différents titulaires de mandat de la volonté de son Gouvernement de coopérer avec eux. Il a tout particulièrement remercié le Rapporteur spécial sur la torture, M. Nowak, qui a récemment effectué une visite au Danemark. Il lui a demandé de quelle manière il appréhendait le statut des «garanties diplomatiques», au regard du droit international. Le représentant danois s'est en outre enquis de la manière dont M. Nowak entendait s'y prendre pour mener à bien la tâche ambitieuse qu'il s'est fixée concernant l'élaboration d'un «atlas de la torture». Enfin, il s'est enquis des progrès réalisés en ce qui concerne la problématique des actes de torture qui pourraient être pratiqués dans les centres de détention secrets.

M. FARIS AL-ANTI (Iraq) a fait part de la volonté de son Gouvernement de résoudre tous les cas de disparitions forcées. Des milliers d'Iraquiens sont portés disparus sous l'ancien régime mais aussi depuis 2003, a-t-il rappelé. Toutefois, dans cette seconde période, ils ont été victimes de groupes terroristes infiltrés en Iraq, a-t-il affirmé. Le Ministère des droits de l'homme a pris des mesures pour assurer la protection des fosses communes repérées depuis 2003 et dont le nombre dépasse les 250, a-t-il poursuivi. Le Gouvernement actuel s'efforce de gommer les séquelles des victimes de l'ancien régime en mettant notamment en place des programmes d'aide psychologique, a-t-il indiqué. Il a fait savoir que son pays, l'Iraq, était disposé à faciliter la visite que le Rapporteur spécial sur la torture effectuera prochainement dans le pays.

M. MOHSEN ARAGHI (Iran) a déclaré que le rapport sur la torture contient des éléments inédits, qui préoccupent l'Iran, surtout en ce qui concerne le fait de considérer la peine capitale comme un traitement dégradant ou comme une forme de torture. Il s'agit d'une peine judiciaire et chaque pays a le droit de décider librement de sa justice pénale, a-t-il souligné. Aucune convention internationale ne prévoit l'abolition de la peine de mort, a-t-il insisté. Chaque État peut donc maintenir ou abolir la peine capitale. C'est la raison pour laquelle toutes les remarques du Rapporteur spécial sur la torture concernant la peine de mort sont rejetées par l'Iran.

M. OMER DAHAB FADOL MOHAMED (Soudan) a demandé au Groupe de travail sur les disparitions forcées s'il était au courant des disparitions d'enfants en France et s'est enquis des mesures qu'il envisage pour localiser ces enfants. En ce qui concerne la peine de mort, le représentant soudanais a affirmé que l'appréciation de ce sujet est une question de différence culturelle. Insister sur l'un des points de vues existants s'agissant de cette question ne peut que contribuer à accroître les écarts au sein de la communauté internationale, a-t-il averti. Il a souligné que l'approche de la peine capitale dans un pays donné peut être très différente de ce qu'elle est dans d'autres. En effet, il peut y avoir toute une série de mesures de protection qui entourent et limitent la peine de mort, comme par exemple la grâce, a-t-il souligné. Il a précisé que le Soudan, qui pratique la peine de mort, dispose de toute une série de garanties qui vont au-delà des dispositions prévues par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

M. BOOMETSWE MOKGOTHU (Botswana) a noté que le Rapporteur spécial avait consacré au moins le tiers de son rapport à la question de la peine de mort, ce que comprend mal sa délégation, car cette approche détourne l'attention du Conseil. Cette approche est injustifiée car la question de la peine de mort ne fait pas l'objet d'un consensus universel. Le représentant botswanais a estimé que le Rapporteur spécial outrepasse son mandat. Il convient de rejeter cette approche et sa délégation souhaite mettre en garde contre toute tentative de remettre en cause la tolérance et la diversité. Ces pratiques se font au détriment du droit international en matière de droits de l'homme, a-t-il estimé. La peine capitale ne constitue pas une forme de torture: il s'agit d'une construction erronée échafaudée par le Rapporteur spécial qui présente les faits de manière déséquilibrée. Dans l'avenir, il devrait consacrer son temps aux questions couvertes par son mandat et rien que son mandat, en évitant de servir les intérêts restreints de certaines délégations, si l'on veut sauvegarder les idéaux qui fondent cette institution.

M. RAJIVA WIJESINHA (Sri Lanka) a exprimé sa sympathie pour le Royaume-Uni qui vient de perdre trois hommes dans un acte terroriste. Il s'est aussi dit attaché à la démarche fondée sur les droits qui est celle du Rapporteur spécial sur la torture. Il a été indiqué, par ailleurs, que le nombre de disparitions a diminué à Sri Lanka, mais en réalité, de nombreuses disparitions n'ont jamais été dénoncées, soit les cas de disparition qui sont le fait des tigres tamoul (LTTE). L'accent qui est mis sur les formations de la police est un élément important dans la lutte contre les disparitions forcées. Il a conclu en demandant aux États à faire l'attention sur l'emploi du terme d'impunité utilisé par certaines organisations non gouvernementales et qui a été reprise par la délégation tchèque et qui ne désigne certainement pas la réalité au Sri Lanka. Il a demandé aux États de s'abstenir à utiliser certains termes indûment.

M. SIHASAK PHUANGKETKEOW (Thaïlande) a estimé que s'il est impératif que les États prennent des mesures pour lutter contre le terrorisme, mais ils doivent le faire dans le respect des droits de l'homme. Il a dit partager les préoccupations du Rapporteur spécial sur les activités des agences de renseignements dans la lutte contre le terrorisme et reconnu qu'il importe de mettre en place un cadre juridique pour définir le mandat de ces agences et guider leurs pratiques. Rappelant que son pays est partie à la Convention contre la torture, M. Phuangketkeow a souligné que la Thaïlande est attachée à la protection des personnes contre la torture. En ce qui concerne le lien entre la peine de mort et la torture, il a fait valoir qu'il n'existe à l'heure actuelle aucun consensus international sur cette question qui, a-t-il souligné, devrait faire l'objet de davantage de consultations. S'agissant des disparitions forcées, le représentant thaïlandais a assuré que son gouvernement prend très aux sérieux les allégations de disparitions forcées ou involontaires et ne ménage aucun effort pour régler les cas qui lui ont été soumis. En outre, le Gouvernement considère la possibilité de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

M. TAN YORK (Singapour) a critiqué les arguments du Rapporteur spécial condamnant les châtiments corporels. Ceux-ci ne peuvent être justifiés, selon lui, a-t-il relevé. La grande majorité des affaires citées par le rapport ne relève pas de cas de traitements inhumains, selon l'orateur. Il faut mettre en œuvre par ailleurs une stratégie pour réinsérer les toxicomanes, une approche qui fonctionne bien à Singapour où la prévalence du problème est très limitée. En conclusion, le représentant de la délégation singapourienne rejette le rapport.


Exercice du droit de réponse

MME HYE RAN CHUN (République de Corée) a déclaré, s'agissant des démolitions de logements mentionnées par une organisation non gouvernementale, que cela ne s'était produit qu'après qu'eût été complétée la relocalisation et l'indemnisation des habitants. La plupart des manifestants auxquels il a été fait référence n'étaient pas des habitants des lieux et cet incident n'a donc rien à voir avec le droit à un logement convenable. La représentante a ajouté que les manifestants ont causé de nombreux dégâts. Un policier et cinq manifestants ont été blessés lors des affrontements. Le Gouvernement saisit l'occasion pour réaffirmer son attachement au droit à un logement adéquat.

M. JOSE CAPON (Angola) a souhaité réagir à la présentation d'Amnesty International concernant le droit à un logement convenable. Amnesty International a émis des accusations qui ont démontré son ignorance, a-t-il dit, ajoutant que cette organisation a fourni une version biaisée des faits. Il a souligné qu'Amnesty International ne semble pas savoir que l'Angola est en paix depuis sept ans seulement et que la guerre a affecté les programmes sociaux en place, les infrastructures et le logement. Le représentant a indiqué qu'un programme de grande envergure a été mis sur pied, financé par le Gouvernement.

M. LAZHAR SOUALEM (Algérie) a remercié InterFaith Inrternational pour avoir évoqué la situation des réfugiés sahraouis, dernier cas en Afrique de peuple privé de sa terre. L'orateur a souligné que ces populations en plein désert ont d'une aide qui est actuellement insuffisante. Il a suggéré à l'organisation non gouvernementale qui s'est exprimée sur ce problème à faire appel au Haut-Commissariat pour venir en aide aux réfugiés sahraouis.

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