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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ACHÈVE LES TRAVAUX DE SA TRENTE ET UNIÈME SESSION

24 Novembre 2003


Au cours de cette session, il a examiné les rapports
de la Colombie, du Maroc, de la Lettonie, du Yémen, de la Lituanie et du Cameroun


21 novembre 2003
Le Comité contre la torture a achevé, ce matin, les travaux de sa trente et unième session, qui se tenait au Palais des Nations, à Genève, depuis le 10 novembre dernier. Au cours de cette session, il a examiné les rapports de la Colombie, du Maroc, de la Lettonie, du Yémen de la Lituanie et du Cameroun, adoptant des conclusions et recommandations sur chacun de ces rapports.

Dans ses conclusions et recommandations sur le rapport de la Colombie, le Comité a pris note avec satisfaction que la Colombie a adopté plusieurs textes législatifs présentant de l'intérêt dans l'optique de la prévention et de la répression des actes de torture et des mauvais traitements. Il a toutefois réitéré sa préoccupation face au grand nombre d'actes de torture et de mauvais traitements qui seraient commis de manière généralisée et systématique par les forces et corps de sécurité de l'État en Colombie, tant dans le cadre d'opérations armées qu'en dehors, ainsi que par le climat d'impunité entourant les violations des droits de l'homme commises par les forces et corps de sécurité de l'État.

En ce qui concerne le Maroc, le Comité a pris note de l'intention du pouvoir exécutif, ainsi que du pouvoir législatif, d'appliquer la Convention, volonté politique qui s'est notamment exprimée par la libération de prisonniers politiques. Le Comité s'est toutefois dit préoccupé par l'accroissement du nombre d'arrestations pour des motifs politiques ainsi que du nombre d'allégations de torture et de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, impliquant la Direction de la surveillance du territoire (DST). Le Comité a recommandé au Maroc de prendre toutes mesures effectives nécessaires pour éliminer l'impunité des agents de l'État responsables de tortures et traitements cruels, inhumains ou dégradants.



Le Comité s'est félicité de l'établissement, par la Lettonie, de l'entrée en vigueur des nouvelles lois sur l'asile et l'immigration ainsi que des nouveaux codes pénal et de procédure pénale qui prévoient des peines alternatives et réduisent la durée de la garde à vue. Il a en outre salué le lancement d'un nouveau projet associant les organisations non gouvernementales à la surveillance des lieux de détention. Le Comité a toutefois exprimé sa préoccupation face aux allégations de nombreux mauvais traitements qui, dans certains cas, peuvent s'apparenter à de la torture, par des membres de la police ainsi que par le surpeuplement des prisons. Il a recommandé à la Lettonie, notamment, de prendre toutes les mesures appropriées pour prévenir tout mauvais traitement de la part de la police et s'assurer que les allégations de mauvais traitements font l'objet d'enquêtes rapides et impartiales.

Le Comité s'est félicité des efforts du Yémen pour réformer son système juridique et promouvoir les valeurs démocratiques. Il a toutefois exprimé sa préoccupation face, notamment, à l'absence de définition globale de la torture dans le droit interne et à la nature de certaines peines, en particulier la flagellation et l'amputation. Il a recommandé au Yémen de prendre toutes les mesures adéquates pour abolir de fait la détention au secret, de s'assurer que les mesures de lutte contre le terrorisme tiennent dûment compte de la Convention et de mettre en place un système de plainte indépendant afin d'enquêter sur les allégations de mauvais traitements ou de torture par la police et autres autorités publiques et en punir les auteurs.

Dans ses conclusions sur le rapport initial de la Lituanie, le Comité s'est particulièrement félicité de l'adoption d'un nouveau code pénal et d'un nouveau code de procédure pénale interdisant l'usage de la violence, de l'intimidation, de traitements dégradants ou dangereux pour la santé, ainsi que d'une loi sur l'indemnisation des victimes d'actions illégales de la part des autorités publiques. Toutefois, le Comité a exprimé sa préoccupation face aux allégations de mauvais traitements en prison qui pourraient s'apparenter à de la torture, en particulier pendant les interrogatoires par la police. Le Comité a recommandé que la Lituanie prenne toutes les mesures nécessaires pour prévenir les actes de torture et les mauvais traitements et d'initier la mise en place d'un mécanisme de plainte entièrement indépendant afin d'enquêter sur les nombreuses allégations de torture, et poursuivre et punir les auteurs.

Dans ses conclusions et recommandations sur le Cameroun, le Comité a noté avec satisfaction l'effort accompli pour adopter des mesures législatives de mise en application de la Convention, le projet de construire des prisons supplémentaires pour remédier à la surpopulation carcérale, et la mesure de grâce collective accordée en novembre 2002. Il s'est toutefois déclaré très préoccupé par des informations relatives à l'usage systématique de la torture dans les commissariats de police et de gendarmerie ainsi que de cas de tortures, mauvais traitements et détentions arbitraires commis par certains chefs traditionnels. Le Comité a notamment recommandé la création d'un organe indépendant habilité à recevoir et instruire toutes les plaintes pour tortures ou autres mauvais traitements infligés par des agents de l'État.

Le Comité a également tenu, au cours de la présente session, plusieurs séances à huis clos pour examiner des plaintes individuelles (communications) qui lui étaient transmises en vertu de l'article 22 de la Convention.

Dans sa déclaration d'ouverture de session, prononcée le 10 novembre, la représentante du Secrétaire général, Mme Jane Connors a mis l'accent sur les actions préconisées dans le rapport du Secrétaire général pour la réforme, s'agissant en particulier du renforcement des actions en faveur des droits de l'homme au niveau national et du renforcement de l'efficacité des organes de traités. Elle a mis en avant les actions du Haut Commissariat pour soutenir ce processus, en particulier à travers le développement d'un plan d'action pour améliorer l'intégration des droits de l'homme dans les activités des agences des Nations Unies œuvrant dans les pays et pour aider les États à renforcer leurs systèmes nationaux de protection des droits de l'homme. Elle a également indiqué que le Haut Commissariat élabore des propositions afin d'améliorer le processus de rapports et d'aider les organes de traités à harmoniser leurs méthodes de travail. À cet égard, elle a rendu compte des résultats d'un séminaire de formation qui visait notamment à accroître la participation de la société civile dans les travaux des organes de traités, en particulier en ce qui concerne le suivi de leurs recommandations.

La prochaine session du Comité se tiendra du 3 au 21 mai 2004. Devraient alors être examinés les rapports de l'Allemagne, de la Bulgarie, du Chili, de la Croatie, de Monaco, de la Nouvelle-Zélande et de la République tchèque.


Conclusions et recommandations du Comité sur les rapports examinés au cours de la session

Au cours de la présente session, le Comité a examiné les rapports de la Colombie, du Maroc, de la Lettonie, du Yémen, de la Lituanie et du Cameroun, au sujet desquels il a ensuite adopté des conclusions et recommandations.

Dans ses conclusions et recommandations sur la Colombie, le Comité prend note avec satisfaction que la Colombie a adopté plusieurs textes législatifs présentant de l'intérêt dans l'optique de la prévention et de la répression des actes de torture et des mauvais traitements. Il accueille également avec satisfaction la déclaration de la représentante de l'État partie selon laquelle il n'y a pas eu et il n'y aura pas d'amnistie ou de pardon pour les délits de torture dans l'État partie. Par ailleurs, il prend note des explications fournies par la délégation au sujet des difficultés que la complexité de la situation régnant actuellement dans le pays suscite sur le plan du respect des droits de l'homme et du droit international humanitaire mais réaffirme néanmoins qu'aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, ne peut être invoquée pour justifier la torture.

Le Comité réitère sa préoccupation face au grand nombre d'actes de torture et de mauvais traitements qui seraient commis de manière généralisée et systématique par les forces et corps de sécurité de l'État en Colombie, ainsi que par le climat d'impunité entourant les violations des droits de l'homme commises par les forces et corps de sécurité de l'État. Le Comité recommande à la Colombie de prendre des mesures énergiques en vue de faire cesser l'impunité et en particulier de réexaminer la question de l'adoption du projet de loi sur l'alternative pénale. De même, il lui recommande de reconsidérer l'adoption des mesures tendant à accorder de manière générale à des organes militaires des pouvoirs de police judiciaire les habilitant à détenir des suspects pendant des périodes prolongées sans contrôle judiciaire; et de mener des enquêtes en vue de poursuivre et punir les responsables de viols et autres formes de violences sexuelles, y compris dans le cadre d'opérations contre des groupes armés illégaux.

En ce qui concerne le Maroc, le Comité prend note des faits nouveaux positifs, notamment de l'intention du pouvoir exécutif ainsi que du pouvoir législatif, d'appliquer la Convention, volonté politique qui s'est notamment exprimée par la libération de prisonniers politiques, dont un groupe de 56 qui ont été libérés en novembre 2002. Il prend note également de la réforme importante engagée par le Maroc, notamment du Code pénal et du Code de procédure pénale; des efforts remarquables de développement de la formation et de l'éducation en matière de droits de l'homme, et du versement d'indemnités suite aux recommandations de la Commission d'arbitrage indépendante pour l'indemnisation des préjudices matériel et moral subis par les victimes de disparition et de détention arbitraire.

Le Comité se dit toutefois préoccupé par l'extension considérable du délai de garde à vue, période pendant laquelle le risque de torture est le plus grand, ainsi que de l'accroissement du nombre d'arrestations pour des motifs politiques, du nombre de détenus et de prisonniers, et du nombre d'allégations de torture et de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, impliquant la Direction de la surveillance du territoire (DST). Le Comité recommande au Maroc de prendre toutes les mesures effectives nécessaires pour éliminer l'impunité des agents de l'État responsables de tortures et traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il lui recommande en outre de veiller à ce que toutes les allégations de torture ou traitement cruels, inhumains ou dégradants fassent l'objet sans délai d'enquêtes impartiales et approfondies et de veiller à ce que des sanctions appropriées soient infligées aux coupables et des réparations justes accordées aux victimes.

Aux termes de ses observations finales sur le rapport de la Lettonie, le Comité se félicite notamment de l'établissement d'une cour constitutionnelle et de l'inclusion dans la Constitution d'un chapitre dédié aux droits fondamentaux; de la création d'un Bureau national des droits de l'homme ; de l'entrée en vigueur des nouvelles lois sur l'asile et l'immigration ainsi que d'un nouveau code pénal qui établit des peines alternatives, d'un nouveau code de procédure pénale visant à simplifier les procédures et réduire la durée de la garde à vue. Il salue en outre le lancement d'un nouveau projet associant les organisations non gouvernementales à la surveillance des lieux de détention.

Le Comité exprime toutefois sa préoccupation face aux nombreuses allégations de mauvais traitements qui, dans certains cas, peuvent s'apparenter à de la torture, par des membres de la police ainsi que par le surpeuplement des prisons et le nombre de personnes ayant perdu leur statut légal de citoyens ou de «non citoyens» après avoir quitté temporairement le pays. Il recommande notamment à la Lettonie de prendre toutes les mesures appropriées pour prévenir tout mauvais traitement de la part de la police et s'assurer que les allégations de mauvais traitements font l'objet d'enquêtes rapides et impartiales; de garantir que les détenus dans les postes de police ont le droit de contacter leurs familles, d'avoir accès à un médecin de leur choix et à un conseil juridique.

Le Comité se félicite des efforts du Yémen pour réformer son système juridique et promouvoir les valeurs démocratiques, tout particulièrement par l'établissement d'un Ministère des droits de l'homme, par la ratification des principaux instruments internationaux de protection des droits de l'homme et leur incorporation dans l'ordre juridique interne et par les activités d'éducation et de formation aux droits de l'homme.

Le Comité exprime toutefois sa préoccupation face, notamment, à l'absence de définition globale de la torture dans le droit interne, à la nature de certaines peines, en particulier la flagellation et l'amputation qui peuvent contrevenir à la Convention, ainsi qu'aux allégations selon lesquelles le maintien en détention au secret serait une pratique courante. Le Comité recommande au Yémen de prendre toutes les mesures adéquates pour abolir de fait la détention au secret, de s'assurer que les mesures de lutte contre le terrorisme tiennent dûment compte de la Convention et de mettre en place un système de plainte efficace, fiable et indépendant afin de mener des enquêtes rapides et impartiales concernant les allégations de mauvais traitements ou de torture par la police et autres autorités publiques, ainsi que pour punir leurs auteurs.

Dans ses conclusions sur le rapport initial de la Lituanie, le Comité prend note avec satisfaction des efforts que la Lituanie continue de déployer pour sauvegarder les droits fondamentaux, y compris le droit de ne pas être soumis à la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il se félicite en particulier de l'adoption d'un nouveau code pénal et d'un nouveau code de procédure pénale interdisant le recours à la violence, à l'intimidation, aux traitements dégradants ou dangereux pour la santé. Il se félicite également de l'adoption d'une loi sur l'indemnisation des victimes d'actions illégales de la part des autorités publiques.

Toutefois, le Comité exprime sa préoccupation face aux allégations de mauvais traitements en prison qui pourraient s'apparenter à de la torture, en particulier pendant les interrogatoires par la police. À cet égard, le Comité est préoccupé du fait que les enquêtes sur ces plaintes ne sont pas menées par un organe indépendant de la police. Le Comité recommande notamment que la Lituanie prenne toute les mesures nécessaires pour prévenir les actes de torture et les mauvais traitements et d'initier la mise en place d'un mécanisme de plainte entièrement indépendant afin d'enquêter sur les nombreuses allégations de torture et poursuivre et punir, si nécessaire, leurs auteurs.

Dans ses conclusions et recommandations sur le Cameroun, le Comité note avec satisfaction l'effort accompli par le pays pour adopter des mesures législatives de mise en application de la Convention, le projet de construire des prisons supplémentaires pour remédier à la surpopulation carcérale, et la mesure de grâce collective accordée en novembre 2002 permettant la libération immédiate de 1757 détenus ainsi que l'assurance donnée par la délégation selon laquelle la vérification de la situation individuelle des prévenus et des appelants devra à terme aboutir à l'élargissement des personnes en détention préventive, notamment les mineurs, les femmes, et les malades.

Le Comité se déclare très préoccupé par des informations relatives à l'usage systématique de la torture dans les commissariats de police et de gendarmerie après arrestation, et par la persistance d'une surpopulation extrême dans les prisons camerounaises, ainsi que par des informations faisant état de tortures, mauvais traitements et détentions arbitraires commis sous la responsabilité de certains chefs traditionnels. Le Comité exhorte le Cameroun à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à la pratique de la torture sur son territoire et de multiplier ses efforts pour mettre fin à l'impunité des auteurs d'actes de torture. À cette fin, le Comité recommande que soit créé un organe indépendant habilité à recevoir et instruire toutes les plaintes faisant état de tortures ou autres mauvais traitements infligés par des agents de l'État.



Composition du Comité

Le Comité est un organe de dix experts siégeant à titre personnel. Il est actuellement composé des experts suivants : M. Peter Thomas Burns (Canada), M. Guibril Camara (Sénégal), M. Sayed Kassem el Masry (Égypte), Mme Felice Gaer (États-Unis), M. Claudio Grossman (Chili), M. Fernándo Mariño Menéndez (Espagne), M. Andreas Mavrommatis (Chypre), M. Ole Vedel Rasmussen (Danemark), M. Alexander Yakovlev (Fédération de Russie), M. Yu Mengja (Chine).

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