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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE L'AUTRICHE

01 Mars 1999




APRÈS-MIDI

HR/CERD/99/3
1er mars 1999



Plusieurs experts soulignent la difficulté d'adopter une politique
d'immigration restrictive sans introduire le moindre élément de racisme


Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a entamé, cet après-midi, l'examen du rapport périodique de l'Autriche.

Présentant le rapport, M. Harald Dossi, Directeur général adjoint des services de la Constitution à la Chancellerie fédérale, a notamment souligné que la loi sur les étrangers adoptée par le Parlement autrichien en 1997 accorde une priorité très nette au regroupement familial pour ce qui est des possibilités d'immigration en Autriche. Il a ajouté que la nouvelle loi sur le droit d'asile devrait permettre d'améliorer cette procédure. La délégation autrichienne est également composée du Représentant permanent de l'Autriche auprès des NationsUnies à Genève, M. Harald Kreid, ainsi que de représentants des ministères de l'intérieur, de la justice et des affaires étrangères.

Le Rapporteur du Comité pour l'examen des rapports de l'Autriche, M.Peter Nobel, s'est fait l'écho de certains rapports des médias faisant état, à travers le pays, d'attaques criminelles contre les minorités et de comportements abusifs de la part des forces de police, en particulier à l'encontre de Chinois, d'autres personnes d'origine asiatique, ainsi qu'à l'encontre de Noirs et de Roms.

Les experts suivants sont également intervenus : M. Theodoor van Boven, M. Luis Valencia Rodriguez, M. Ivan Garvalov, M. Michael Parker Banton, M.Régis de Gouttes, M. Ion Diaconu, M. Yuri A. Rechetov et M. Mahmoud Aboul-Nasr.

Le Comité achèvera demain matin, à 10 heures, l'examen du rapport autrichien.

Présentation du rapport de l'Autriche

Présentant les onzième, douzième et treizième rapports périodiques de l'Autriche (réunis en un seul document portant la cote CERD/C/319/Add.5), M.HARALD DOSSI, Directeur général adjoint des services de la Constitution à la Chancellerie fédérale, a indiqué que la présentation du prochain rapport de son pays ne devrait vraisemblablement pas souffrir de retard. Il a notamment souligné que la loi sur les étrangers adoptée par le Parlement autrichien en 1997 entend accorder une priorité très nette au regroupement familial en ce qui concerne les possibilités d'immigration en Autriche. La nouvelle loi permet en outre d'accélérer certaines procédures applicables aux étrangers résidant en Autriche. Pour sa part, la nouvelle loi sur le droit d'asile s'est traduite par la mise en place d'un tribunal indépendant chargé des questions d'asile, lesquelles relevaient auparavant, en dernier recours, du ministère de l'intérieur. Ce nouvel organe indépendant devrait permettre une amélioration de la procédure d'asile, a aff
irmé M. Dossi.

Il n'y a pas de discrimination raciale ni ethnique en Autriche, a assuré M. Dossi. Beaucoup d'efforts ont été déployés pour prévenir la discrimination grâce à des mesures d'éducation dans les écoles et de formation des juges, a-t-il souligné. Chaque ministère a été appelé à désigner un coordonnateur pour les questions relatives aux droits de l'homme. Ces coordonnateurs se réunissent régulièrement, a précisé M. Dossi.

Le rapport de l'Autriche rappelle qu'en ratifiant la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, l'Autriche a adopté la loi constitutionnelle fédérale du 3 juillet 1973 qui stipule que toute forme de discrimination pour des motifs fondés sur la race est interdite et précise que «les organes législatifs et administratifs doivent s'abstenir de toute distinction fondée uniquement sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique». Le rapport souligne par ailleurs que l'Autriche est toujours prête à accorder l'asile politique aux étrangers victimes de persécutions politiques. «En ce qui concerne les autres, la politique autrichienne met l'accent sur l'intégration de ceux qui sont déjà dans le pays, à laquelle elle donne la priorité sur l'admission des nouveaux arrivants», précise le rapport. Il ajoute que la mise en oeuvre de la politique d'intégration sera de préférence assurée par des organismes privés, humanitaires et religieux, ainsi q
ue par des organismes de protection sociale et des collectivités locales. Pour aider le ministère fédéral de l'intérieur, qui est chargé des questions d'aide à l'intégration, un comité consultatif de l'intégration a été chargé de faire des recommandations sur des questions concrètes d'intégration.

En Autriche, poursuit le rapport, il y a six groupes ethniques : les Croates, les Slovènes, les Hongrois, les Tchèques, les Slovaques et les Roms. Le statut juridique des groupes ethniques en Autriche est régi par la loi de 1976 qui les définit comme étant des groupes de citoyens autrichiens qui ont pour langue maternelle une langue autre que l'allemand et un patrimoine autonome et qui ont leur résidence et leur domicile sur le territoire fédéral autrichien. L'article 7 du Traité d'État signé à Vienne le 15 mai 1955 reconnaît des droits particuliers aux minorités slovène et croate. Les ressortissants autrichiens appartenant à ces deux minorités en Carinthie, au Burgenland et en Styrie ont notamment droit à l'enseignement primaire en langue slovène ou croate et à un nombre proportionnel d'établissements propres d'enseignement secondaire. Dans les circonscriptions administratives et judiciaires de ces régions où réside une population slovène ou croate, ou une population mixte, le slovène ou le croate est a
dmis comme langue officielle en plus de l'allemand.


Examen du rapport

M. PETER NOBEL, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Autriche, a regretté qu'il ne soit nulle part question de services de médiation dans le rapport autrichien dont est aujourd'hui saisi le Comité. Il a également regretté que le rapport se borne à mentionner des textes législatifs existants et ne fassent pas référence à la situation réelle, notamment en ce qui concerne les cas portés devant les tribunaux.

M. Nobel s'est interrogé sur le concept de «justification véritable» qui apparaît dans plusieurs arrêts de la Cour constitutionnelle autrichienne dans le contexte de la non-discrimination. Un tel concept ne risque-t-il pas de laisser trop de latitude à la Cour constitutionnelle en ce qui concerne l’interprétation des dispositions de la Constitution ? M. Nobel a par ailleurs mis l'accent sur la difficulté de mettre en place une politique d'immigration restrictive sans introduire le moindre élément de racisme ou de xénophobie. L'Union européenne, qui accorde la liberté de mouvement pour les ressortissants des pays qui la composent alors qu'elle ferme ses portes aux étrangers provenant des autres continents, ne saurait faire l'économie d'une réflexion sur cette question.

M. Nobel a attiré l'attention sur le harcèlement dont ont été victimes nombre de Roms en raison de leur difficulté à produire les pièces justificatives que les fonctionnaires autrichiens leur demandent en vue d'attester de liens familiaux avec des personnes résidant en Autriche. Le Rapporteur du Comité a déploré qu'il soit fait peu de cas en Autriche des nouveaux groupes ethniques que l'on pourrait qualifier de «non traditionnels». Il s'est fait l'écho de certains rapports des médias faisant état, à travers le pays, d'attaques criminelles contre les minorités et de comportements abusifs de la part des forces de police, en particulier à l'encontre de Chinois, d'autres personnes d'origine asiatique, ainsi qu'à l'encontre de Noirs et de Roms. M. Nobel a souligné qu’il y a un danger lié à l’histoire de l'Autriche, de ne voir le racisme que sous le seul angle de l'antisémitisme.

Plusieurs autres membres du Comité ont jugé incomplet le présent rapport de l'Autriche, soulignant qu'il met uniquement l'accent sur les mesures prises au niveau législatif et ne traite pas de la réalité de la situation dans le pays. Certains experts ont donc souhaité obtenir davantage d'informations de la délégation autrichienne en ce qui concerne la mise en oeuvre concrète des dispositions de la Convention, notamment pour ce qui est du respect du principe d'égalité en matière de droit d'accès aux lieux et services publics. Certains se sont demandés si une personne qui s'estime victime de licenciement discriminatoire dispose de moyens de recours.

Un membre du Comité a demandé à la délégation autrichienne de lui préciser la définition du terme «étranger» à laquelle souscrit l'Autriche : le qualificatif d'«étranger» est-il réservé aux seuls ressortissants des pays non membres de l'Union européenne, s'est interrogé cet expert avant de rappeler que la loi fédérale autrichienne interdit au législateur de procéder à une distinction de fond entre étrangers ?

Il a été demandé à la délégation de préciser pourquoi l'Autriche ne semble pas considérer les Juifs comme un groupe ethnique. Certains ont souhaité obtenir davantage d'informations de la délégation en ce qui concerne la situation des Roms à travers le pays.

Un expert a également demandé à la délégation de lui apporter un complément d'information en ce qui concerne l'existence de groupes à caractère raciste et les poursuites qui auraient éventuellement pu être engagées contre les agissements de ces groupes. Relevant que, selon la législation autrichienne, pour faire l'objet de poursuites, l'hostilité raciale doit viser un groupe déterminé et doit être de nature à mettre en péril l'ordre public, un expert s'est demandé comment les juridictions pénales du pays interprètent ce texte. Comment ces juridictions réagissent-elles lorsque les actes à caractère raciste ne visent pas un groupe déterminé ou visent un individu qui n'appartient pas à un groupe déterminé. Cet expert a souligné l'importance de disposer de statistiques relatives aux poursuites engagées pour actes à caractère raciste. Il a estimé que le nombre de plaintes déposées pour de tels actes peut témoigner de la confiance que le public place dans la police. La sévérité des peines est aussi une indication de la priorité que les tribunaux accordent à la délinquance raciste, a fait valoir cet expert.


S'agissant des questions relatives à la politique d'immigration, la délégation autrichienne a souligné que la nouvelle loi sur les étrangers se concentre sur l'intégration des étrangers résidant déjà dans le pays. Au cours de la décennie écoulée, le nombre d'étrangers s'est sensiblement accru dans le pays, passant de 350 000 en 1989 à près de 700 000 aujourd'hui, de telle sorte que l'Autriche est désormais, après le Luxembourg, le second pays de l'Union européenne pour la population étrangère. En raison de la situation économique nouvelle qui prévaut dans le pays, le besoin d’ouvriers immigrants n'est plus le même que celui qu'il fut au cours des années 70 et 80 voire au début des années 90, a reconnu la délégation. Elle a précisé que l'Autriche a néanmoins intégré environ 60 000 Bosniaques qui travaillent désormais dans le pays.

Interrogée sur la formation dispensée aux membres de la police afin de les sensibiliser aux questions relatives à la discrimination raciale, la délégation a notamment souligné que le ministre de l'intérieur incite les policiers à adopter un comportement qui exclut toute manifestation à caractère discriminatoire.

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