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Communiqués de presse

CONFERENCE DE DURBAN CONTRE LE RACISME : LES ETATS EXPRIMENT LEUR POSITION SUR LA QUESTION DE REPARATION

04 Septembre 2001



DR/D/933
4 septembre 2001


Durban (Afrique du Sud), le 2 septembre -- La Conférence de Durban contre le racisme et les autres formes d’intolérance a suivi, au cours de ses réunions de cet après-midi et du soir, les interventions d’une trentaine de délégations qui ont porté, entre autres, sur les thèmes de l’esclavage et de la réparation, de la situation des Palestiniens ainsi que sur ceux des droits des enfants et des travailleurs migrants, des minorités et des peuples autochtones.
 
      Sur l’esclavage et la réparation, conséquente, aux yeux des Africains du continent et de la diaspora, il a été souligné que la démarche à suivre comporterait deux volets : une reconnaissance officielle que l’esclavage constitue un crime contre l’humanité et en tant que telle, les victimes de cette période sombre de l’histoire de l’humanité devraient être redressées dans leurs droits en créant en leur faveur soit un fonds de compensation soit un plan de redressement économique des pays dont elles sont ressortissantes, soit les deux mesures à la fois.  C’est la position des Etats africains que la Zambie, qui s’adressait à la Conférence en qualité de Président de l’Union africaine (UA), a exprimée et qui est également celle de la Jamaïque qui semble concevoir l’idée de réparation et de redressement économique découlant de l’esclavage sous l’angle de la perception des Africains de la diaspora.
 
      Si des délégations, en particulier celles des pays du Nord, ne se sont jusqu’à présent pas prononcées sur le fond et la forme  de la question de réparation, sauf pour admettre que leurs pays aideraient au développement des pays touchés par l’esclavage,  elles ont toutefois éludé l’idée de reconnaître l’esclavage comme un crime contre l’humanité.  Le Royaume-Uni et les Pays-Bas, notamment, abordent toutefois la question en reconnaissant que l’esclavage a été une abomination et que leurs pays «regrettent» cette période de leur histoire pour laquelle ils seraient disposés à présenter des «excuses».  Toutefois dans une récente législation  que son Parlement a votée à l’unanimité, la France a reconnu que l’esclavage constitue un crime contre l’humanité.
 
      S’agissant de la situation des Palestiniens, les délégations ont souligné la nécessité de reprendre la négociation tandis que d’autres, à l’instar de la Syrie et de l’Arabie saoudite, ont stigmatisé les pratiques israéliennes qu’elles ont qualifiées de racistes.
 
  
      Au sujet des peuples autochtones et autres,  il a été suggéré que les Etats dont ils sont ressortissants prennent les mesures socioéconomiques et législatives favorisant leur promotion.  Le Mexique a indiqué notamment que cette Conférence offre une occasion unique pour renforcer la reconnaissance des droits des peuples autochtones conformément aux principes de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des Etats.  Toutefois dans le cas des Dalit (intouchables) l’Inde a souligné qu’il n’était pas de la compétence de la Conférence d’examiner une telle question.
 
      Sur les droits des travailleurs migrants, les intervenants ont déploré les conditions qui leur sont faites dans les pays d’accueil et invité les Etats à adhérer sans plus tarder à la Convention relative à la protection des travailleurs migrants.  S’agissant des droits des enfants, la Côte d’Ivoire a indiqué que des mesures sont en cours, au plan national, qui interdiraient leur exploitation dans les champs de café et de cacao.
 
      Outre les pays déjà cités, les représentants des Etats suivants sont intervenus : Swaziland, Luxembourg, République-Unie de Tanzanie, Kenya, Lesotho, République de Corée, Chypre, Soudan, Venezuela, Malawi, Angola, Erythrée, Namibie, Afghanistan, République démocratique du Congo, Burkina Faso, Chine, Japon, Hongrie et Fédération de Russie.
 
      L’Organisation internationale du Travail et la Commission européenne sont également intervenues.
 
      La Turquie, l’Azerbaïdjan et l’Arménie ont exercé leur droit de réponse.
 
      La Conférence de Durban contre le racisme poursuivra  ses travaux demain matin, tant en plénière qu’au sein de ses différents groupes de travail qui  s’efforcent d’harmoniser leurs positions sur les projets de déclaration et du programme d’action qui lui seront soumis plus tard au cours de cette semaine.. 
 
 
 
CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME, LA DISCRIMINATION RACIALE, LA XÉNOPHOBIE ET L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE
 
Déclarations
 
      M. JUAN SOMAVIA, Directeur général de l’Organisation international du Travail (OIT) : Nous avons changé les constitutions, nous avons modifié les lois, nous avons révisé les politiques, nous avons même vaincu l’apartheid et pourtant, le racisme persiste à travers le monde.  Qu’elle prenne la forme du trafic ou du tourisme sexuels, du travail forcé, du travail des enfants, ou encore du déni des droits des migrants, des minorités, des populations autochtones et tribales et d’autres catégories de travailleurs, la discrimination persiste toujours à travers le monde.  Cette Conférence a précisément pour objet de changer cet état de chose.  Il s’agit ici de s’engager à élever, du point de vue qualitatif, le niveau moral de nos sociétés.  L’objectif final est de pouvoir être fier des sociétés multiculturelles, multiraciales et plurireligieuses dans lesquelles la dignité de tous les êtres humains sera respectée et protégée.  Là où le racisme et la discrimination raciale persistent, les travailleurs y sont confrontés en permanence, jour après jour, alors qu’ils essaient de gagner leur vie.  Si vous êtes sans emploi, vous rencontrez d’énormes obstacles pour en trouver un.
 
      Je suis ici pour rappeler que l’ordre du jour de l’OIT en faveur de la promotion du travail décent est un outil de qualité dont vous disposez pour mettre en oeuvre les conclusions auxquelles parviendra cette Conférence.  Pour que nous puissions y contribuer, vos conclusions devront absolument reconnaître explicitement la nécessité de combattre la discrimination dans le domaine du travail.  La déclaration de 1998 sur les principes et droits fondamentaux au travail témoigne de l’engagement des États membres de l’OIT en faveur du respect des droits à ne pas être victime de discrimination, à ne pas être victimes du travail forcé ou du travail des enfants et à jouir de la liberté d’association.  Nombre d’objectifs que vous poursuivez peuvent être promus à travers les conventions de l’OIT sur la discrimination en matière d’emploi, sur les travailleurs migrants et sur les peuples autochtones et tribaux.  La promotion d’opportunités de travail décentes pour tous est essentielle si l’on veut que disparaisse l’exclusion fondée sur la race et si l’on veut répondre aux besoins de sécurité des individus et de leurs familles ainsi qu’aux besoins de stabilité de nos sociétés.  C’est parce qu’il n’existe pas réellement d’égalité de chances que le modèle actuel de mondialisation perd chaque jour un peu plus de sa crédibilité.
 
M. ENOCH P. KAVINDELE, Vice-Président de la république de Zambie : Nous avons assisté cette année à l’historique transformation de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en Union africaine (UA) que la Zambie a le privilège de présider.  On attend de l’UA qu’elle gère efficacement les questions africaines.  En tant que président en exercice de l’UA, la Zambie s’engage à se consacrer complètement au peuple africain.  Je sais que les problèmes de discrimination raciale, tribale et ethnique sur notre continent sont un des principaux freins au développement du capital humain et à l’amélioration générale du sort de notre peuple. 
 
Nous sommes venus à Durban pour nous libérer des injustices historiques commises contre l’humanité et qui ont revêtu la forme de l’esclavage et de la servitude et pour souligner qu’il ne fallait pas se souvenir de l’esclavage seulement comme d’une terrible tragédie mais aussi comme un mal qui a privé pendant des siècles l’Afrique de ses ressources humaines et naturelles. 
 
Nous devons accepter le fait que ces ressources pillées pendant des siècles ont entravé jusqu’à ce jour son développement.  La Conférence de Berlin de 1866 qui a décidé de la partition de l’Afrique, a tiré son autorité morale du fait que les populations vivant en Afrique étaient trop inférieures pour être consultées au moment où des décisions étaient prises sur le tracé de frontières arbitraires et l’attribution de leur terre natale. 
 
L’Afrique demande qu’on l’écoute afin que le monde honore la mémoire du crime de l’esclavage et du colonialisme dans son histoire récente et en assume la responsabilité.  Faute de cela, le peuple noir continuera d’être perçu comme un bien dont la valeur fluctue au gré de la loi de l’offre et de la demande.  Nos systèmes démocratiques modernes ne peuvent laisser faire cela.  Il faut réparer le développement de l’Afrique interrompu dans sa course et lui permettre de reprendre son cours.  L’Afrique est d’accord avec le reste du monde pour dire que beaucoup de peuples et de races dans le monde sont victimes du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y sont associée.  L’Afrique se plaint toutefois de ce que toutes les violations des droits de l’homme, survenues dans un passé proche ou tout récemment, ont été corrigées alors que l’Afrique souffre et saigne toujours en raison de leurs effets.
 
C’est avec cela en font que la Zambie en tant que partie à la déclaration africaine et en tant que président de l’Union africaine, demande que soit mis en place un mécanisme international de compensation pour les victimes du commerce d’esclaves et un Fonds de réparation pour le développement de façon à fournir des ressources supplémentaires destinées au développement des pays affectés par le colonialisme. 
 
La Zambie engage vivement la communauté internationale à se prémunir contre toutes les tendances à l’exclusion.  Elle lance un appel aux Africains pour qu’ils n’exercent pas de discrimination à l’égard de quiconque et aux autres races pour qu’elles n’exercent pas de discrimination à l’égard des Africains.  La race humaine tout entière a le devoir de vivre ensemble harmonieusement sur cette planète.
 
      M. ARTHUR R.V.KHOZA, Vice-Premier Ministre du Swaziland : En tant que pays voisin et frère de l’Afrique du Sud, le Swaziland, qui a longtemps été un havre de paix entre deux Etats en proie aux conflits et aux atrocités causées par l’apartheid et la discrimination raciale, le Mozambique et l’Afrique du Sud, tient à rendre un vibrant hommage à l’Afrique du Sud pour avoir su mener un processus de réconciliation nationale exemplaire.  Cette Conférence est l’occasion pour nous de nous remémorer les sombres heures du colonialisme, de la traite, de l’esclavage et de l’apartheid et de faire le constat des séquelles que ces pratiques ont laissé dans nos sociétés.  Nous devons aussi bâtir un monde dans lequel les individus aient le sentiment d’une appartenance commune, un monde plus égalitaire, un monde fraternel.  L’intolérance religieuse et ethnique continue de susciter des conflits dévastateurs dans de nombreuses régions du monde et il est temps pour nous de prendre des mesures de nature à prévenir les actes de génocide, les conflits ethniques, les guerres de religion et l’occupation étrangère.  Afin de bâtir un monde égalitaire, tolérant et pacifique, il nous faut aussi admettre que le monde dans lequel on vit est miné par les inégalités et les injustices.  Nous devons, dans les pays en développement, tirer davantage parti de la mondialisation et faire en sorte qu’elle ne soit pas une nouvelle source d’exclusion et de discrimination.  Nous devons prendre conscience que cette planète est suffisamment grande pour nous accueillir tous et qu’il est temps que les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les instances internationales oeuvrent de concert pour éradiquer le racisme et la discrimination.  Sans quoi, cette Conférence sera suivie d’autres rencontres sur le même thème.
 
Mme LYDIE POLFER, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Luxembourg : Au moment où la mondialisation nous confronte avec des problématiques inédites, notamment dans le domaine de la migration; au moment où le nombre des demandeurs d’asile ne cesse d’augmenter, il est particulièrement important de pouvoir parer au danger de réactions unilatérales en développant des approches communes.  Aussi, quand on reproche aujourd’hui à l’Europe de vouloir entraver le commerce international par des considérations sociales ou environnementales, on perd de vue que le consommateur européen, pour avoir longtemps servi de débouché au commerce colonial, refuse aujourd’hui la mondialisation dans les mêmes conditions d’ignorance et de compromission. 
A Durban, le combat contre le racisme a comme cadre de référence le monde contemporain. Cette Conférence ne pourra rendre justice aux victimes.  Mais elle place les Etats devant leurs responsabilités politiques.  Nous avons le devoir d’identifier dans notre passé les mécanismes producteurs de racisme et dans notre présent leurs prolongements.  Nous avons le devoir de clarifier les principes de la lutte contre l’intolérance, y compris sous ses formes les plus insidieuses, celles précisément que nous véhiculons sans y prendre garde.  Le devoir de mémoire, parce qu’il aide à la prise de conscience des horreurs et de la culpabilité qui nous hantent, est oeuvre de libération.  La solidarité envers ceux des pays qui ont été victimes de pratiques racistes de gouvernement demande à être affirmée comme telle.  Cette solidarité est universelle, elle est indépendante des relations bilatérales mais se justifie comme un des éléments du combat contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et les autres formes d’intolérance.  Que nous puissions aujourd’hui concevoir qu’un pays ait le droit de mobiliser la solidarité internationale pour s’approprier son passé, restituer la mémoire mutilée des victimes, travailler son identité - au même titre qu’il le fait dans le cadre de la lutte contre la pauvreté - me semble participer de l’état d’esprit qui a porté la communauté internationale à poser le développement comme un droit humain.
 
M. JAKAYA M. KIKWETE, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République-Unie de Tanzanie : La position adoptée à Dakar, au Sénégal, en janvier 2001 nous guide dans la bonne voie.  Nous appuyons la proposition selon laquelle  les Etats qui ont profité de l’esclavage, de la traite et du colonialisme devraient reconnaître leur responsabilité pour les injustices du passé, exprimer officiellement leurs remords et excuses et assumer leur pleine responsabilité par la voie de la réparation et de l’indemnisation des victimes.  Les réparations et l’indemnisation des victimes constituent logiquement le meilleur moyen pour ceux qui ont commis des injustices de payer leur dette.  Après tout, est-ce que ces mesures ne sont-elles pas appliquées partout ailleurs, alors pourquoi pas en Afrique?  Les Allemands ont versé des réparations à l’Europe pour les crimes commis au cours de la Deuxième Guerre mondiale.  Les Juifs sont actuellement indemnisés pour les crimes commis contre eux pendant l’holocauste.  Il existe de nombreux autres exemples.  C’est pourquoi, nous ne comprenons pas l’opposition ferme à l’idée de réparation et d’indemnisation en faveur de l’Afrique et des Africains.  Qu’est-ce qui est si blasphématoire?  Est-ce parce que l’Afrique ne le mérite pas?  Ou est-ce plutôt la difficulté de déterminer l’indemnisation?  Pour la Tanzanie, c’est une question de principe.  La forme que revêtira la réparation et l’indemnisation est une question que nous pouvons discuter. 
 
      De l’avis de la Tanzanie, une réparation et une indemnisation justes que l’Afrique mérite devrait prendre la forme de programmes de développement.  L’esclavage, la traite et le colonialisme ont eu un impact négatif sur le développement de l’Afrique.  Les Etats responsables de ces préjudices devraient restaurer les opportunités de développement que l’Afrique a perdues, en élaborant des programmes spécifiques ou s’engager à contribuer à la mise en oeuvre des récentes initiatives africaines intitulées du MAP/OMEGA. 
 
 
Les pays développés du nord devraient s’exprimer clairement pour faire face aux entraves du développement en Afrique, car il reste encore beaucoup à faire, notamment sur des questions des investissements directs étrangers, l’aide publique au développement et l’accès aux marchés.  Il est important et en effet encourageant de noter que la Conférence mondiale ne se limite pas au racisme et à la xénophobie.  Malheureusement, les manifestations de racisme et de discrimination raciale sont évidentes sous certaines formes et continuent d’exister.  Il est également regrettable que ces dernières années aient été marquées par de violents conflits raciaux et ethniques en Afrique, en Asie, en Europe et ailleurs causant de nombreuses victimes innocentes parmi les femmes et les enfants.  Il est inacceptable que les populations soient la cible de violences et de discriminations en raison de leurs couleur, race, sexe, langue, religion, origine nationale ou ethnique.  Les manifestations de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie, de l’intolérance qui y est associée, ainsi que toute violation à la dignité humaine constituent un affront à l’humanité et ne devraient pas trouver leur place dans nos sociétés. 
 
      Mon pays est particulièrement préoccupé par  la situation des femmes dans le monde qui, en dépit des efforts de la communauté internationale et de la volonté d’assurer l’égalité des droits et des libertés sur la base des principes fondamentaux énoncés par la Charte des Nations Unies et les instruments des droits de l’homme en vigueur, continuent de subir des préjudices et l’exploitation.  Aussi, la Conférence de Durban devrait-elle répondre de manière globale à la violence à l’encontre des femmes et envisager des mesures visant la discrimination, la xénophobie et l’intolérance fondées sur le sexe.  Il faut en outre garantir aux enfants leurs droits fondamentaux à un logement, à la sécurité, aux soins et à l’éducation. 
 
      M. CHRISTOPHER M. OBURE, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Kenya : La nation sud-africaine a mené une lutte héroïque contre l’apartheid, la forme la plus ignoble et institutionnalisée du racisme qui ait jamais existé dans le monde.  Cependant, malgré l’abolition de l’apartheid, il est regrettable que le racisme continue d’être une source de préoccupations dan le monde entier au point de nous réunir ici.  Le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie sont enracinés dans les sociétés et cette Conférence doit être l’occasion pour nous d’affirmer que le monde doit avancer et se libérer de ce fléau.  La lutte contre le racisme exige un engagement conjoint et déterminé de tous et une analyse profonde des causes du racisme et de la discrimination.  Parmi ces causes, nous devons avoir le courage de nous pencher sur les sources historiques d’injustices que sont l’esclavage, la traite et le colonialisme dont les séquelles continuent d’assombrir notre présent.  Cette Conférence est l’occasion de reconnaître que l’esclavage, la traite et la colonisation constituent un crime contre l’humanité et de reconnaître les dégâts causés par ces pratiques racistes.  Concernant la situation au Moyen-Orient, nous considérons que le peuple palestinien a le droit de vivre en paix et en harmonie et qu’il a les mêmes droits que le peuple israélien et que les autres peuples du monde.  Il est aujourd’hui clair que l’esclavage, la traite et la colonisation sont une des causes de l’état de pauvreté, de sous-développement et d’exclusion, d’instabilité et d’insécurité que connaît le continent africain.  Nous devons par conséquent mettre en place des mesures de nature à inverser ces tendances et également garantir l’égalité d’accès aux services publics de toutes nos populations.  Nous devons lutter contre l’extrémisme qui se manifeste par le biais des nouvelles technologies de l’information et par les médias.  Nous devons prendre à bras le corps les questions de discriminations basées sur le sexe et qui marginalisent les femmes et les jeunes filles dans nos pays.  Il est donc nécessaire, dans le cadre des mesures qui seront adoptée à cette Conférence, que les Etats adaptent leurs législations afin de reconnaître les droits des minorités et des populations vulnérables et de lutter contre le racisme en le prenant à ses racines. 
 
      M. MOTSOAHAE THOMAS THABANE, Ministre des affaires étrangères du Lesotho : Nous saluons le digne combat du peuple sud-africain qui se remet à peine de décennies de racisme institutionnalisé, l’apartheid.  Nous constatons avec tristesse que, si l’apartheid n’est plus, le racisme est toujours bien présent et nous conduit à nous réunir une nouvelle fois car les objectifs fixés au cours des deux précédentes décennies de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale n’ont pas été atteints.  Nous avons donc ici une lourde responsabilité et nous le devons à l’ensemble de l’humanité.  Aujourd’hui, de nouvelles formes de racisme et de discrimination raciale émergent, véhiculées par les technologies modernes de communication qui sont le lieu idéal pour diffuser des messages soutenant la supériorité raciale.  Les Etats Membres, en particulier ceux qui ont adhéré à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, doivent s’atteler à éradiquer le racisme sous toutes ses formes contemporaines en s’attaquant en priorités aux vecteurs que constituent les nouvelles technologies. 
 
      D’autres violations des droits de l’homme et d’autres formes de racisme et de discrimination telles que le trafic d’être humains, en particulier les femmes et les enfants, et qui affectent davantage les pays pauvres doivent être condamnées.  De même, les droits des migrants, des réfugiés, des populations indigènes, des minorités ethniques ou religieuses, doivent faire l’objet d’une attention particulière.  Dans le même temps, cette Conférence ne peut se détourner du passé et doit accorder une importance particulière à l’esclavage, la traite et le colonialisme dont les effets continuent encore de compromettre les efforts de développement des pays pauvres.  Au-delà des excuses que doivent présenter les responsables de ces pratiques aux descendants des victimes, il importe d’envisager des réparations matérielles et morales. 
 
M. OMAR ABDULLAH, Ministre d’Etat aux affaires étrangères de l’Inde : La fin de l’impérialisme et du colonialisme n’a pas éliminé les attitudes et les mentalités d’esprit de populations entières pendant de nombreuses générations. Mais nous sommes convaincus que notre civilisation mondiale est enrichie par la diversité.  Nous continuons d’être les témoins de l’exclusion fondée sur la haine et du recours à la violence dans des cas de nettoyage ethnique.  Malheureusement, les théories de supériorité raciale continuent d’être propagées et pratiquées bien que de récentes recherches biologiques soient parvenues à des conclusions contraires.  Les disparités économiques soutiennent et renforcent les attitudes racistes.  De même que les programmes politiques fondés sur la haine et la discrimination raciale qui considèrent les étrangers comme des rivaux, des concurrents et une menace à la prospérité, la culture et l’identité locales.  Il faut également être vigilant face à la vulnérabilité des nouvelles technologies de l’information.  L’Internet qui a transformé le monde en un village mondial est utilisé par certains pour diffuser des messages de haine.  C’est ici, à Durban que Mahatma Gandhi a lancé le mouvement Satyagraha - lutte fondée sur la vérité - contre le régime raciste en Afrique du Sud.  En 1946, l’Inde a été le premier pays à élever la voix contre l’apartheid aux Nations Unies.  Nous avons toujours considéré le racisme et la discrimination raciale comme l’antithèse de tout ce que l’humanité défend pour l’égalité, la justice, la paix et le progrès.  C’est une négation de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration universelle des droits de l’homme. 
 
      Dans notre contexte national, inspiré par Mahatma Gandhi et d’autres réformistes sociaux, le Gouvernement s’est engagé à combattre et à éliminer la discrimination sous toutes leurs formes.  La Constitution, le code pénal et d’autres mesures législatives en vigueur en Inde garantissent le respect des droits de l’homme de tous les citoyens indiens.  Notre citoyenneté est fondée sur les valeurs démocratiques et l’état de droit, le pluralisme, la tolérance et la diversité.  Nous sommes résolus à résister aux forces qui visent à détruire ces valeurs.  Toutefois, il reste encore beaucoup à faire car on ne peut faire changer les attitudes tout simplement par la promulgation de lois ni en un jour.
 
      Pour que la Conférence de Durban soit significative, constructive et en accord avec nos politiques nationales, le Premier Ministre Vajpayee a créé un Comité national sous la présidence du  Ministre des affaires étrangères, M. Jaswant Singh.  Ce Comité a recommandé qu’il était nécessaire de renforcer les structures et les institutions nationales pour assurer une mise en oeuvre effective des dispositions constitutionnelles et législatives, les programmes d’action affirmative et pour transformer les attitudes sociales dans notre société.  Les mesures prises dans ce cadre ont permis de réaliser des progrès considérables dans la lutte contre le racisme et la discrimination raciale.  Les institutions de notre politique démocratique, l’élimination progressive de la pauvreté et une alphabétisation accrue ont permis à des millions de personnes des groupes défavorisés de notre société de s’exprimer.  Nous sommes déterminés à poursuivre cette politique.  Nous sommes fermement convaincus que la question des castes n’est pas une question qui doit être discutée à cette Conférence.  Nous sommes ici pour veiller à ce qu’aucune discrimination institutionalisée ne soit dirigée contre un individu ou un groupe d’individus; de même, nous sommes ici pour s’assurer que les Etats n’encouragent pas des attitudes sociales régressives.  Il n’est ni légitime ni concevable que cette Conférence -ou les Nations Unies, de manière générale- de légiférer sur les comportements des individus dans nos sociétés. 
 
      Mme HAN MYEONG-SOOK, Ministre de l’égalité entre les sexes de la République de Corée : Depuis la convocation des deux précédentes conférences mondiales contre le racisme et la discrimination raciale, la communauté internationale a enregistré des progrès significatifs en matière de lutte contre ces phénomènes.  En témoigne la reconnaissance croissante du fait que l’éradication du racisme et de la discrimination raciale constitue un élément essentiel de la pleine et entière protection des droits de l'homme.  En dépit des efforts incessants déployés par la communauté internationale en vue d’éradiquer le racisme et la discrimination raciale, trop de gens continuent encore d’être victimes de diverses formes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie ou d’intolérance.
 
      Les mouvements transfrontaliers sont devenus l’une des caractéristiques communes du monde moderne en raison de la mise en marche des processus de mondialisation et d’intégration.  Aucune garantie n’a cependant été prévue pour protéger les droits des travailleurs migrants, y compris ceux des travailleurs migrants illégaux et empêcher que ces personnes ne fassent l’objet d’un traitement discriminatoire et injuste voire de violations des droits de l'homme.  Une attention particulière doit donc être accordée à la protection des droits de tels groupes vulnérables.
 
      En tant que personne me trouvant à la tête du Ministère de l’égalité entre les sexes établi au début de cette année, je pense qu’éliminer la violence contre les femmes est une première mesure à prendre pour promouvoir et protéger les droits humains des femmes.  Mettre un terme à la violence domestique, faire cesser la violence sexuelle et protéger les victimes constituent des priorités pour mon Ministère.  Je suis grandement préoccupée par la situation des femmes migrantes qui sont confrontées à une double discrimination basée sur le sexe et sur la race.  Il est donc essentiel d’intégrer une perspective sexospécifique dans toutes les politiques de lutte contre la discrimination raciale.  En ce qui les concerne, les femmes appartenant à des minorités ethniques ou raciales sont souvent des victimes ciblées dans le cadre des conflits armés et des situations d’occupation étrangère.  La violence à leur encontre atteint des niveaux alarmants.  Le monde a été choqué par des atrocités telles que les viols commis dans les Balkans.
 

      Je souhaite saisir cette occasion pour attirer l’attention sur l’un des plus graves exemples de crime de guerre de toute l’histoire moderne, à savoir la question des femmes de réconfort coréennes victimes du régime japonais.  Nous sommes grandement préoccupés de constater que le Japon, qui a causé des souffrances indicibles à ses voisins, ait récemment approuvé la diffusion d’un manuel scolaire rationalisant et glorifiant les erreurs du passé tout en déformant et en cachant les faits.  L’histoire ne se contente pas de traiter du passé; elle forge l’avenir.  Si des présentations erronées de l’histoire sont enseignées aux jeunes générations à travers des manuels scolaires biaisés, les erreurs du passé se reproduiront.  Je souhaite donc mettre l’accent sur l’impérieuse nécessité d’un repentir véritable, d’une représentation fidèle de l’histoire et d’une entière reconnaissance des faits historiques dans la manière dont l’histoire est enseignée.
 
M. NICOS KOSHIS, Ministre de la justice et de l’ordre public de Chypre : Le choix de l’Afrique du Sud pour accueillir la présente Conférence est particulièrement judicieux eu égard à l’histoire de ce pays et du continent auquel il appartient -continent dont les habitants ont été victimes des pires formes de racisme et de discrimination raciale, notamment du fait des pratiques de l’esclavage et du commerce des esclaves ainsi que de la colonisation.  Au cours de son histoire, Chypre a aussi parfois été victime de pratiques qui ne font pas l’honneur de l’humanité et parmi lesquelles on peut citer l’invasion militaire et le nettoyage ethnique.  Depuis 1974, les Nations Unies ont adopté des résolutions demandant qu’il soit mis fin à l’occupation de la partie septentrionale de l’île et exigeant que cessent les pratiques visant à modifier la composition démographique que subit l’île.
 
      M. ALI MOHAMED OSMAN YASIN, Ministre de la justice du Soudan : Mon pays attache une grande importance à cette Conférence en espérant qu’elle permettra de se libérer du racisme, de la discrimination et de la xénophobie.  Nous reconnaissons l’importance du rôle des organisations non gouvernementales et de toute la société civile dans la lutte contre le racisme et souhaitons que ces dernières soient associées à nos travaux.  Les nouvelles technologies de l’information devraient être utilisées pour lutter contre le racisme et renforcer la tolérance.  Nous désirons vivement que l’histoire retienne de cette troisième Conférence, contrairement au deux précédentes, qu’elle a permis d’avancer dans cette lutte mondiale.  Il faut tirer les leçons du passé et notamment de la traite des esclaves qui constituait une négation de la dignité humane et qui a permis au monde riche de se développer.  Aujourd’hui, ce phénomène se poursuit dans le phénomène de la mondialisation qui est injuste et inéquitable.  Nous considérons par ailleurs que les responsables de la traite, de l’esclavage et de la colonisation doivent assumer leurs responsabilités en payant des réparations. 
 
Nous considérons également que les pratiques racistes israéliennes doivent cesser face aux populations palestiniennes, notamment l’occupation et les exécutions.  Ma délégation a été troublée par la comparaison faite hier le Président de l’Ouganda qui a comparé la situation au Moyen-Orient à la situation au Soudan.  Dois-je rappeler ici que le conflit au Soudan n’est pas racial mais est un conflit politique dont le Président ougandais est un acteur.  Le Président ougandais aurait pu parler de la situation qu’il a créée dans le nord de son pays et du génocide dont il est responsable dans la région des Grands Lacs.  Il serait bon d’éviter de s’accuser mutuellement et préférable de se pencher sur les voies et moyens de réaliser la paix en Afrique.  Je rappelle également que notre Constitution établit le droit à l’égalité et bannit la discrimination sur la base du sexe, de la religion ou de la race.  Seule la solidarité et la coopération nous permettrons de lutter contre le racisme et de dépasser nos différences. 
 
      M. LUIS ALFONSO DAVILA GARCIA, Ministre des relations extérieures du Venezuela : Hier, le Président de l’Ouganda a rappelé que tous les êtres humains sont d’origine africaine et qu’au fil des siècles, bon nombre d’entre eux ont perdu leur couleur.  Je viens moi-même d’un pays de métissage et nous en sommes fiers.  Notre nouvelle Constitution adoptée en décembre 1999 stipule que l’Etat doit garantir sans aucune discrimination et de manière indivisible les droits de l’homme.  Tous les peuples autochtones se sont vus reconnaître leurs droits spécifiques et des mesures sont prises pour leur restituer les terres.  Ces populations sont désormais représentées au Parlement.  Toute doctrine de supériorité raciale est totalement fausse et elle politiquement dangereuse.  Il nous faut toutefois aller plus loin : il est nécessaire que les attitudes visant l’exclusion doivent être combattues.  Si l’on ne favorise pas une culture de tolérance et si l’on n’utilise pas les nouvelles technologies de l’information pour mieux sensibiliser à la tolérance, on encouragera le développement des formes rampantes de racisme et la xénophobie.  Le Venezuela espère que La Conférence de Durban adoptera un programme d’action et une déclaration qui défendront les droits de tous.  Le racisme est une guerre sournoise qui ronge nos sociétés. 
 
      Tous les thèmes qui intéressent la communauté internationale doivent être examinés par la présente Conférence.  En ce qui concerne la question de la Palestine, le Venezuela opte pour une position qui facilite une solution qui, sans ignorer la réalité et la reconnaissance des souffrances et des frustrations causées par la situation particulière dans les territoires arabes occupés, encourage la reprise du processus de négociation par les parties directement impliquées et parvenir rapidement à un règlement juste et pacifique.  Concernant la question des réparations et la reconnaissance des préjudices commis dans le passé, le Venezuela estime que la Conférence mondiale s’inspire reconnaisse les souffrances subies par les populations autochtones afin que les erreurs commises ne puissent plus se reproduire.    Lors du récent Sommet des Amériques, tenu à Québec, le Président Chavez avait appelé à la réduction de 20% des dépenses militaires afin d’éradiquer la pauvreté.  Le Venezuela estime que la communauté internationale doit promouvoir des programmes qui permettront aux groupes et populations qui sont actuellement victimes des différentes formes modernes de l’intolérance d’accéder au développement.
 
Mme LILIAN E. PATEL, Ministre des affaires étrangères du Malawi : La Conférence contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée vient à point nommé au moment le monde transformé en village planétaire, se trouve à un carrefour socioéconomique et politique et où figurent sur notre agenda des choix difficiles qui vont décider de notre survie.  Il n’existe aucun fondement au racisme, à la discrimination raciale et à la xénophobie si ce n’est l’égoïsme et une quête de domination socioéconomique de la part des puissants. 
 
Il est nécessaire et urgent pour les nations de créer des mécanismes d’Etat qui protègent les victimes de la xénophobie qui existe désormais de façon latente dans notre continent et ailleurs.  Il est important de comprendre qu’une culture démocratique doit se caractériser pour une part par la liberté de mouvement des populations.  Il nous faut relever ce défi économique concret en adoptant des mesures efficaces visant à réduire la pauvreté par le développement d’opportunités économiques.
 
Le monde en développement, et notamment l’Afrique, a eu plus que sa part de problèmes dérivant du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et des autres formes d’intolérance.  L’Afrique a été à bien des égards marginalisée.  La situation est aggravée par le fléau du VIH/sida qui affecte tout particulièrement l’Afrique.  Ma délégation souhaite lancer un appel aux délégués de cette Conférence pour qu’ils fassent en sorte que les résultats de cette Conférence accordent à l’Afrique l’attention qu’elle mérite et soutiennent ses efforts de reconstruction.
 
      M. FAROUK AL SHARA, Ministre des affaires étrangères de la République arabe syrienne : Je tiens ici à rappeler au monde que la Syrie, les Arabes et les Musulmans se sont élevés contre le régime raciste de l’apartheid et ont boycotté l’Afrique du Sud, convaincus que le racisme est une doctrine obscurantiste et représente l’horreur du monde.  Forts aussi de nos racines qui sont historiquement opposées au racisme puisque nos peuples ont de tout temps résister à ces doctrines.  Notre pays est une terre d’accueil pour toutes les victimes de discrimination, notamment religieuse et raciale.  Or, la plus grande menace pour les peuples du Moyen-Orient réside dans les pratiques israéliennes qui sont racistes, ces derniers étant convaincus, depuis 1948, qu’ils peuvent éliminer les civils et les dirigeants palestiniens sans jamais devoir rendre de comptes.  Cependant, les Israéliens ont tort de penser qu’ils sont au-dessus des lois et de se comporter ainsi car les peuples arabes ne renoncent jamais et ne se plient pas à la subjugation et à l’humiliation.  Les circonstances ont changé et les peuples du monde se sont libérés du joug colonial tandis que le Zimbabwe, l’Afrique du Sud et la Namibie ont vaincu les régimes d’apartheid qui étaient proches des sionistes israéliens.  Le monde ne tolère plus l’occupation et, si Israël devait poursuivre ces pratiques racistes, il condamnerait définitivement toute perspective de paix avec les Arabes.  On ne peut prétendre obtenir la sécurité en continuant d’occuper les territoires palestiniens et les priver de leur Etat indépendant.  L’ironie de l’histoire réside dans le fait qu’Israël prétend que le retour des réfugiés palestiniens, conformément à la résolution 194, signifierait la fin d’Israël alors même que le retour des réfugiés palestiniens marquerait la fin du racisme en Israël.  Le fait que les Etats-Unis aient fait pression, au cours du processus préparatoire, pour que soient abandonnés dans les documents finaux de cette Conférence, la demande des Africains en faveur de réparation et la phrase qui assimilait le sionisme au racisme, prouve au monde entier de quel côté ils se situent et ont permis de mettre en lumière ces questions essentielles. 
 
M. GEORGES CHIKOTI, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Angola :  Nous saluons les efforts déployés par le Président Thabo Mbeki pour bâtir une nouvelle Afrique du Sud libre et débarrassée de l’apartheid.  En venant ici à Durban, mon Gouvernement entend démontrer l’esprit de fraternité qui doit nous guider, d’autant que nous avons lutté ensemble contre le régime d’apartheid qui a fait du tort à toute notre région.  Je tiens à rappeler que l’Angola a été colonisé pendant 450 ans par les Portugais alors que dans le même temps, plus de 100 millions d’Africains étaient déportés vers les Amériques.  L’Angola a payé un lourd tribut à l’esclavage jusque dans les années 1950 alors qu’il avait été officiellement aboli en 1836.  L’esclavage a ensuite été remplacé par le travail forcé développé pendant la colonisation qui a été des plus sanglantes en Angola.  Après la domination portugaise, l’Angola a souffert des dommages infligés par le régime d’apartheid sud-africain dans le sud de l’Angola.  Et malgré les résolutions du Conseil de sécurité qui demandaient au régime d’apartheid de verser des réparations à hauteur de 10 milliards de dollars, aucun centime n’a été versé à ce jour.  Nous sommes convaincus que nous parviendrons à trouver une solution avec ce Gouvernement ami.  Nous ne devons pas oublier en effet que, entre Africains, nous avons une culture de tolérance et, malgré son histoire tumultueuse, l’Angola est parvenue à ériger une société fondée sur la tolérance et l’égalité des droits. 
 
Cette Conférence doit être l’occasion de réaffirmer que les Africains et les victimes du racisme et de la discrimination raciale sont prêts à pardonner mais sont inquiétés par le fait que certains de ces problèmes ne sont toujours pas résolus.  C’est pourquoi les peuples du monde doivent s’unir pour bâtir un avenir sur des bases solides et faire de cette Conférence l’occasion de reconnaître que l’esclavage, la traite et la colonisation sont des crimes contre l’humanité et de prendre les mesures nécessaires pour éviter que de tels désastres se reproduisent.  Le monde d’aujourd’hui doit être plus égalitaire, en particulier au moment où la mondialisation marginalise le monde en développement.

M. STAFFORD NEIL (Jamaïque) : L’héritage du passé est important non seulement pour expliquer la persistance de certains schémas du racisme et de la discrimination raciale mais aussi pour montrer l’échelle et les conséquences des dommages infligés.  L’exemple le plus frappant concerne l’Afrique et sa diaspora dans les Caraïbes et les Amériques.  Il s’agit de l’esclavage et du commerce d’esclaves transatlantique qui s’est poursuivie pendant trois siècles.  Il est établi que de nombreux individus et compagnies ont réalisé des fortunes importantes et des pays se sont enrichis et renforcés en exploitant la misère humaine.  Toutefois, ce qui est important maintenant, ce n’est pas d’établir le catalogue des abus ou d’insister sur les souffrances humaines au cours de cette période mais plutôt de dégager la voie de la réconciliation.  C’est dans ce but qu’ont été faites les propositions relatives aux réparations.  Ces propositions ne se veulent ni antagonistes ni hostiles; elles font partie du processus visant à soigner les blessures du passé.  Nous croyons que des réparations serviraient les intérêts des descendants des victimes comme ceux des descendants des oppresseurs.  C’est le moyen de se mesurer au passé sans culpabilité ni amertume.
 
Cela serait un résultat remarquable pour cette Conférence si l’idée de réparations au titre de l’esclavage et du commerce transatlantique d’esclaves était soutenue : la communauté internationale pourrait adopter deux formules.  Tout d’abord, il faudrait que soit reconnu que l’esclavage et le commerce transatlantique d’esclaves ont constitué un crime contre l’humanité.  Ce serait un geste acceptable lié à l’aspect historique et éthique de la question.  En deuxième lieu, des mesures économiques devraient être prises sous forme de politiques et programmes au niveau international; celles-ci chercheraient à remédier aux négatives conséquences d’une injustice historique : la déstabilisation et le sous-développement de l’Afrique et la dégradation et les dommages psychiques subis par le peuple de la diaspora.  Ce qui est important maintenant est que la communauté internationale accepte le principe de politiques de compensation qui peut être appliqué pour améliorer les perspectives de développement des pays affectés.  Un certain nombre d’initiatives pourrait être identifié dans ce cadre, que ce soit sous forme d’allègement de la dette, de prêts de réinstallation ou de programmes pour le développement des ressources humaines.  Cette Conférence devrait prendre ces mesures maintenant; elle se débarrasserait ainsi d’un problème majeur et, à long terme, jetterait les bases d’une meilleure compréhension, bonne volonté et coopération.
 
M. GILBERTO RINCON GALLARDO, Président de la Commission citoyenne d’études contre la discrimination du Mexique : Mon pays appuie les conclusions adoptées par la Conférence régionale d’Amérique latine qui a réaffirmé les principes d’égalité et de respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, sans discrimination à l’égard de la race, de la couleur, du sexe, de la langue, de la santé, de l’âge, de la religion et des autres principes énoncés par les instruments internationaux des droits de l’homme en vigueur.  Tenant compte du fait que les manifestations de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée sont exprimées sous différentes formes dans le monde, le Mexique estime que la protection contre de tels actes devrait constituer un droit dont se pourrait se prévaloir tout citoyen.  La Conférence mondiale établira un agenda contre la discrimination pour le 21ème siècle et devrait commencer par reconnaître que des actions comme la conquête, le colonialisme et l’esclavage sont des sources historiques de racisme et d’autres formes de discrimination.  Si aujourd’hui ces pratiques avaient lieu, elles seraient qualifiées de crimes internationaux contre l’humanité et feraient ainsi l’objet d’indemnisation et de restitution. 

 
 
(à suivre)

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