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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT D'EL SALVADOR

18 Mai 2004

Comité des droits de l'enfant
18 mai 2004

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le deuxième rapport périodique d'El Salvador sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

La question des enfants portés disparus suite au conflit armé et la loi antigang a particulièrement retenu l'attention des membres du Comité. Selon des chiffres cités par un expert, 6 660 adolescents auraient été arrêtés en vertu de cette loi, souvent sans être présentés à un juge. Un groupe de travail des Nations Unies a fait état de 2 598 enfants disparus, a-t-il été souligné.

Dans ses observations préliminaires sur le rapport salvadorien, M. Norberto Liwski, membre du Comité chargé de l'examen de ce rapport, a notamment insisté sur la nécessité de faire en sorte que le Code de l'enfance et de l'adolescence soit désormais approuvé; de mettre sur pied la commission de recherche sur les enfants disparus; et de mettre en place des mesures pratiques allégeant le système d'enregistrement des naissances.

Présentant le rapport de son pays, Mme Marisol Argueta de Barillas, Conseillère au Ministère des affaires étrangères d'El Salvador, a notamment assuré que la législation salvadorienne incorpore tous les principes généraux reconnus par la Convention. La représentante du Gouvernement salvadorien a déclaré que depuis 1999, le Salvador s'est efforcé de trouver des solutions aux cas d'enfants disparus suite au conflit armé interne. Un projet de loi visant la création d'une commission de recherche, présenté à l'organe législatif, fait actuellement l'objet d'une analyse technique en attendant son approbation, a-t-elle indiqué. Elle a précisé que 703 cas d'enfants disparus ont été signalés, dont 256 ont été élucidés à ce jour. Elle a par ailleurs fait valoir que la quasi-totalité des indicateurs de santé s'est améliorée et que l'analphabétisme a fortement chuté.

L'importante délégation salvadorienne était également composée du Procureur général de la République, M. Marcos Gregorio Sánchez Trejo; du Ministre de la santé, M. Herbert Betancourt; de la Vice-Ministre de l'éducation, Mme Matilde de Quintana; du Vice-Ministre du travail, M. Luis Fernando Avelar; du Directeur exécutif de l'Institut salvadorien pour le développement intégral de l'enfance et de l'adolescence, M. Ismael Rodríguez Batres; ainsi que de représentants de la Cour suprême, du Secrétariat national de la famille; du Ministère du Gouvernement; du Ministère des relations extérieures; et de la Mission permanente d'El Salvador auprès des Nations Unies à Genève.

La délégation a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, notamment, des enfants disparus; de la loi antigang; de l'âge de la responsabilité pénale; des adolescents privés de liberté; du travail des enfants; de l'enregistrement des naissances; des questions d'adoption; des questions d'éducation et de santé. Interrogée sur le retard pris dans l'adoption de l'avant-projet de Code de l'enfance et de l'adolescence, la délégation a indiqué qu'il a été présenté à l'Assemblée législative il y a deux ans et fait encore l'objet d'un vaste processus de consultations. Certains secteurs conservateurs et religieux sont fortement réticents à l'égard de certains droits qui pourraient être reconnus par ce code, comme le droit à l'information en matière de santé génésique, lequel constitue le principal écueil, a indiqué la délégation.


Le Comité examinera demain à partir de 10 heures, l'examen du deuxième rapport périodique du Panama (CRC/C/70/Add.20).


Présentation du rapport d'El Salvador

Mme marisol Argueta de Barillas, Conseillère au Ministère des affaires étrangères d'El Salvador, a déclaré que 12 ans après la signature des Accords de paix et leur mise en œuvre effective, qui a permis de mettre un terme au processus de vérification par les Nations Unies, le peuple et le Gouvernement d'El Salvador ont incontestablement progressé, en faisant preuve de clairvoyance, afin de reléguer au passé le conflit armé et de construire une société pacifique et un État moderne ayant pour pierres angulaires le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que la gouvernance démocratique et le respect de l'état de droit.

Depuis la présentation du rapport initial d'El Salvador, d'importantes mesures ont été prises en faveur de l'enfance, dans les domaines institutionnel et juridique, qui ont contribué à l'application des principes de la Convention relative aux droits de l'enfant, a poursuivi Mme Argueta de Barillas. Il est néanmoins indiscutable qu'en dépit des progrès réalisés, des défis restent à relever, a-t-elle ajouté. Sur une population estimée à 6 757 408 habitants, 42,35% sont des mineurs de moins de 18 ans, a souligné Mme Argueta de Barillas. Elle a précisé que, selon le Code de la famille entré en vigueur en 1994, est défini comme mineure toute personne n'ayant pas atteint l'âge de 18 ans. Elle a en outre assuré que la législation salvadorienne incorpore tous les principes généraux reconnus par la Convention. Depuis 2001, a poursuivi la Conseillère, le pays s'est doté d'une nouvelle politique nationale pour le développement intégral de l'enfance et de l'adolescence qui remplace la politique nationale d'attention aux mineurs qui était en vigueur depuis 1993.

Sur le plan législatif, il convient de souligner qu'El Salvador a ratifié ces dernières années plusieurs instruments internationaux en rapport avec les droits de l'enfant, au nombre desquels on peut citer la Convention n°182 de l'OIT sur l'élimination des pires formes de travail des enfants et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant qui porte sur l'implication des enfants dans les conflits armés. L'autre Protocole à la Convention, qui porte sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants, a récemment été ratifié par El Salvador, a indiqué Mme Argueta de Barillas. Au niveau interne, d'importantes réformes ont été engagées, au nombre desquelles il convient de souligner la réforme du Code pénal s'agissant du trafic et du commerce de personnes ainsi que des délits sexuels; la réforme du Code de la famille, afin notamment d'assurer le droit des enfants à une identité et de sanctionner le non-respect de l'obligation alimentaire; ainsi que la réforme de la loi contre la violence au sein de la famille, afin notamment d'améliorer les mesures de protection. Des mesures ont également été prises en matière d'adoption afin de mettre la législation nationale en conformité avec les dispositions de la Convention de La Haye et d'assurer la protection des enfants tant avant qu'après l'adoption. Il convient en outre d'attirer l'attention sur les efforts déployés par le Secrétariat national de la famille en vue de formuler un avant-projet de Code de l'enfance et de l'adolescence, actuellement à l'étude devant l'Assemblée législative. Au nombre des mesures administratives prises par son pays dans le domaine de l'enfance, Mme Argueta de Barillas a notamment souligné l'application du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant et son invocation dans toutes les décisions administratives et judiciaires; la création de l'organe judiciaire du bureau d'appui à la justice juvénile; ainsi que l'ouverture de bureaux régionaux ou départementaux pour la prestation de services.

Dans le domaine de l'environnement familial, Mme Argueta de Barillas a notamment attiré l'attention sur la réduction de la durée de la séparation d'un enfant de ses parents par décision judiciaire et administrative; sur la révision judiciaire périodique (tous les six mois) des mesures de protection prises en faveur de l'enfant; sur la procédure d'assignation obligeant à payer une pension alimentaire; sur la création de centres de médiation pour la résolution alternative de conflits portant sur les soins aux enfants et la protection des enfants; ainsi que sur la réduction du nombre d'enfants placés en institutions.

Depuis 1999, a poursuivi Mme Argueta de Barillas, El Salvador s'est efforcé de trouver des solutions aux cas d'enfants disparus suite au conflit armé interne. Actuellement, un projet de loi visant la création d'une commission de recherche, présenté à l'organe législatif, fait l'objet d'une analyse technique en attendant son approbation, a-t-elle indiqué. Elle a précisé que 703 cas d'enfants disparus ont été signalés, dont 256 ont été élucidés à ce jour. Pour les autres cas, on s'efforce de promouvoir une coordination interinstitutions afin de trouver une solution commune tenant compte de la complexité des choses et des exigences en matière de ressources financières, a expliqué Mme Argueta de Barillas.

S'agissant des questions de santé, la représentante du Gouvernement salvadorien a notamment indiqué que les efforts de modernisation et le processus de réformes du système public de santé ont permis de réaliser une véritable décentralisation à travers des réseaux complémentaires de services à l'échelle nationale. La quasi-totalité des indicateurs de santé s'est améliorée. Quant à l'éducation, des progrès significatifs ont été réalisés dans ce domaine durant les années 1999-2003, s'agissant en particulier de l'élargissement des choix éducatifs et de l'amélioration de la qualité de l'éducation. Suite au tremblement de terre de 2001, 95% des infrastructures éducatives ont été rétablis. L'analphabétisme des personnes âgées de 15 à 60 ans est tombé de 23,7 à 13% entre 1992 et 2003, a fait valoir Mme Argueta de Barillas.

Le deuxième rapport périodique d'El Salvador (CRC/C/65/Add.25) souligne que si le pays présente le présent rapport avec retard, c'est essentiellement en raison des circonstances dans lesquelles il a vécu au cours de la décennie écoulée: vérification et mise en œuvre progressive jusqu'en 1997 des Accords de paix de janvier 1992 qui ont mis un terme au conflit armé; création, développement et renforcement de nouvelles institutions liées à la protection des droits de l'enfant et à l'adoption de divers instruments juridiques de protection de l'enfance; et incidence négative de catastrophes naturelles telles que l'ouragan Mitch et les séismes récents survenus en janvier et février 2001, qui ont perturbé le fonctionnement normal des institutions salvadoriennes et la coordination de leurs activités. El Salvador a dans une très large mesure donné suite aux observations que celui-ci avait formulées en octobre 1993 à l'occasion de la présentation de son rapport initial.

La Constitution stipule que «les enfants de moins de 14 ans ainsi que ceux qui ont atteint cet âge mais qui restent soumis à la scolarité obligatoire en vertu de la loi ne pourront être employés à un travail quel qu'il soit. Ces mineurs pourront toutefois être autorisés à travailler si l'on estime que c'est indispensable pour assurer leur propre subsistance ou celle de leur famille, à condition que cela ne les empêche pas de suivre leur scolarité obligatoire.» En ce qui concerne l'âge minimum d'admission à l'emploi, le Code du travail dispose que le travail des mineurs peut être autorisé à partir de l'âge de 12 ans à condition qu'il s'agisse de travaux légers qui ne nuisent pas à leur santé et à leur développement, à leur scolarité, à leur participation à des programmes d'orientation ou de formation professionnelle ou à l'assimilation de l'enseignement qu'ils reçoivent. La loi de 1994 sur les jeunes délinquants s'applique aux personnes âgées de 12 à 18 ans. La Constitution reconnaît l'égalité juridique de tous les enfants, qu'ils soient nés dans le mariage ou hors mariage. La société salvadorienne continue d'enregistrer des taux de violence élevés et les enfants ne sont pas épargnés, poursuit le rapport. Les statistiques pour 1998-1999 font apparaître une augmentation des affaires de violence traitées par l'ISPM (Institut salvadorien de protection des mineurs). On peut estimer qu'en 2000 il y a en El Salvador 358 573 personnes de moins de 18 ans atteintes d'un handicap, indique par ailleurs le rapport. Une campagne a été lancée en 1996 pour la prévention, le dépistage et le traitement précoce des handicaps, mais elle n'a pas pu prendre l'ampleur prévue faute de ressources financières suffisantes, précise-t-il.

Les réfugiés mineurs qui se trouvent en El Salvador sont les enfants des réfugiés nicaraguayens arrivés dans le pays au cours des années 80, indique par ailleurs le rapport. Selon les estimations, 29 enfants, dont 48 % sont des filles, bénéficient du statut de réfugié reconnu par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Le HCR n'a pas connaissance de cas dans lesquels des mineurs réfugiés auraient fait l'objet d'une détention ou de mesures privatives de liberté en El Salvador. Il n'a pas non plus eu connaissance, au cours des six dernières années, de situations dans lesquelles la sécurité des mineurs réfugiés aurait été en péril. Conformément à la législation salvadorienne, les mineurs réfugiés ont le droit d'accéder à l'éducation et aux services de santé primaires. En ce qui concerne les enfants disparus dans le cadre du conflit armé, il est possible d'affirmer que certains enfants, dont on souhaitait protéger l'intégrité, ont été évacués des zones de conflit; toutefois, il n'existe aucune donnée précise quant à leur sort, et l'on ne sait pas s'ils ont été confiés à des organisations humanitaires, à des organismes publics ou à des organisations non gouvernementales. Jusqu'à présent, une centaine d'enfants ont pu être localisés dans huit pays différents, la majorité d'entre eux se trouvant toutefois en El Salvador. Une bonne partie des enfants qui ont été adoptés en Europe et aux États-Unis ont pu être retrouvés grâce aux dossiers d'adoption. Les affaires d'enfants capturés lors d'opérations militaires et ensuite victimes d'un trafic d'enfants font actuellement l'objet d'une enquête. Le fait même que les identités et les lieux d'origine ont été changés rend cette enquête particulièrement longue et complexe. Jusqu'en 1996, on a recensé 323 enfants disparus à cause du conflit armé; sur ce total, 29 ont pu être localisés et 22 d'entre eux ont pu être mis en contact avec leur famille. Le rapport indique d'autre part que la Commission CONCULTURA a créé en 1995 le Bureau des affaires autochtones. À l'heure actuelle, la Banque mondiale et le PNUD aident à la réalisation d'une enquête sur l'état actuel des populations autochtones à El Salvador et en Amérique centrale.


Examen du rapport d'El Salvador

M. NORBERTO LIWSKI, membre du Comité chargé de l'examen du rapport d'El Salvador, a notamment rappelé qu'El Salvador fut la première République d'Amérique centrale à se doter d'une Constitution et peut s'enorgueillir d'avoir fourni au monde des hommes tels que Monseigneur Romero. Il a également rappelé que la population salvadorienne compte un certain nombre d'autochtones. En dépit du fait que les autorités affirment ne pas être en mesure de fournir de statistiques quant au nombre d'autochtones dans la population, des études permettent d'affirmer que ceux-ci représentent quelque 10% de la population totale, a déclaré M. Liwski.

Le taux moyen de scolarisation est environ deux fois plus élevé en zone urbaine qu'en zone rurale, a poursuivi l'expert; des écarts similaires entre ces deux types de zones se retrouvent aussi pour ce qui est des revenus moyens ou encore de la disponibilité de l'eau potable. Si le taux de mortalité est certes en chute libre depuis plusieurs années, des disparités subsistent ici encore entre zones urbaines et rurales. En zone urbaine, 2 enfants sur 5 sont pauvres et 3 sur 5 le sont dans les zones rurales, a ajouté M. Liwski.

Plus de 75 000 Salvadoriens ont, d'une manière ou d'une autre, été victimes du conflit armé, a poursuivi M. Liwski. La disparition d'enfants durant le conflit armé reste une question que l'État n'a pas encore résolue, a-t-il souligné.

La scolarité obligatoire dure neuf ans et va jusqu'à 14-15 ans. Or, seuls 40% des enfants qui terminent leur neuvième année de scolarité passent au niveau secondaire : on peut alors se demander quelles mesures prend l'État à l'égard de ces enfants qui souffrent d'exclusion et de pauvreté lorsqu'ils quittent ainsi l'école et se retrouvent sur le marché de l'emploi? Il est en outre contradictoire de voir que l'âge minimum d'accès à l'emploi est fixé à 12 ans. L'âge minimum de la responsabilité pénale est, lui aussi, trop faible, a ajouté l'expert.

M. Liwski a affirmé ne pas comprendre la nature de la loi antigang qui définit notamment les gangs comme des groupes de personnes qui, par leurs actes, portent atteinte à la cohésion sociale et aux bonnes mœurs. Il convient de relever que le système judiciaire salvadorien a réagi à cette loi antigang, la Cour constitutionnelle ayant jugé cette loi anticonstitutionnelle. Les adolescents sont victimes d'exclusion sociale et n'ont probablement pas accès à des possibilités d'intégration et à un projet de vie viable, a déclaré l'expert. Quelque 6 660 adolescents ont été arrêtés en vertu de la loi antigang depuis son entrée en vigueur et seuls 5% d'entre eux environ ont été présentés devant un juge, s'est inquiété M. Liwski.

Bien que la Convention puisse théoriquement être invoquée par un juge, il semble que tel n'ait encore jamais été le cas à ce jour, a ajouté un autre membre du Comité. Cet expert a lui aussi fait part de son inquiétude face à la loi antigang et face au fait que des enfants puissent être traités comme des adultes. Ce même expert a souligné que 43% de la population vivent encore en dessous du seuil de pauvreté. Le pays a connu de nombreux tremblements de terre et, à l'heure actuelle, l'insécurité dans les rues est considérable, a poursuivi l'expert, relevant par ailleurs qu'apparemment, la loi antigang est acceptée par une grande majorité de la population.

En cas de conflit entre une loi et une disposition de la Convention relative aux droits de l'enfant, c'est cette dernière qui prévaut, a indiqué la délégation.

Une experte s'est notamment inquiétée des menaces de mort proférées à l'encontre de l'Ombudsman salvadorien et a relevé qu'une culture de paix n'a toujours pas réussi à s'imposer en El Salvador.

Alors que la délégation parle d'environ 700 enfants portés disparus, un groupe de travail des Nations Unies est parvenu à un chiffre de 2 598 enfants disparus : l'écart entre ces deux chiffres est considérable, a relevé un membre du Comité.

S'agissant de cette question des enfants portés disparus, la délégation a notamment indiqué que l'association Pro-Busqueda, qui collaborait dans ce domaine avec le bureau du Procureur de la République, a choisi de se retirer du groupe du travail du Procureur de la République parce qu'elle n'était pas satisfaite des résultats de ce groupe. La délégation a rappelé qu'il a été jugé inopportun de traiter de cette question durant la période électorale, car elle risquait alors d'être politisée.

La délégation a souligné que c'est l'association Pro-Busqueda elle-même qui a cité le chiffre de 700 enfants portés disparus. Il existe au sein de l'État nombre d'institutions qui souhaitent coopérer pour régler cette question des enfants disparus, a assuré la délégation.

Le débat sur la création d'une commission de recherche existe depuis des années, quasiment depuis la fin du conflit, a souligné un membre du Comité. Il serait bon que la délégation assure le Comité du ferme engagement du Gouvernement salvadorien, lorsqu'il prendra ses fonctions le mois prochain, de prendre les choses en mains afin de régler le problème, a insisté cet expert. La délégation a rappelé que c'est l'association Pro-Busqueda qui a demandé la création d'une commission de recherche, la question étant désormais soumise à l'Assemblée législative.

En ce qui concerne l'âge minimum de la responsabilité pénale, la délégation a rappelé qu'il est fixé à 12 ans en El Salvador. Pour les personnes âgées de 12 à 18 ans, le régime juridique applicable est la loi sur les mineurs délinquants, le Code pénal ne s'appliquant qu'à partir de 18 ans.

S'agissant des allégations de mauvais traitements à l'égard d'adolescents privés de liberté, la délégation a rappelé qu'il existe en El Salvador des tribunaux chargés du contrôle de l'exécution des peines prononcées à l'encontre les mineurs. Les mesures de détention font donc l'objet d'un réexamen trimestriel, a précisé la délégation. Le juge a le pouvoir de sanctionner les fonctionnaires accusés de violation des droits d'adolescents privés de liberté et ce, quel que soit le niveau de responsabilité pénale en jeu. La délégation a indiqué n'avoir connaissance de l'existence que d'une seule affaire relevant de ce cas de figure, qui a fait l'objet d'une plainte devant l'Institut national des droits de l'homme et dont la véracité n'a pu être vérifiée.

En réponse aux préoccupations exprimées par les experts s'agissant de la loi anti-gangs, la délégation a souligné qu'une enquête avait été réalisée au cours de laquelle 74% des Salvadoriens affirmaient avoir été victimes de gangs. Le Président de la République a alors décidé, en 2003, de mettre au point le plan «Mains de fer» afin de réprimer ce phénomène de gangs. La loi anti-gangs est une loi provisoire, a souligné la délégation. Alors que sa première version était prévue pour durer 180 jours, sa seconde version, actuellement en vigueur, est applicable pour 90 jours. Certaines dispositions de la première version de cette loi, jugées anticonstitutionnelles par la Cour constitutionnelle, ont disparu dans la seconde version.

La délégation a par ailleurs reconnu que le nombre de membres des corps privés de sécurité est supérieur au nombre des personnes qui intègrent la police nationale.

Ces dernières années, a par ailleurs indiqué la délégation, le nombre d'enfants placés en institutions est passé de 3 000 à 650 enfants à risque et 300 jeunes en contradiction avec la loi. L'argent ainsi dégagé a pu être utilisé pour des programmes axés sur la prévention des phénomènes qui étaient à l'origine du placement des enfants en institutions, a fait valoir la délégation.

En El Salvador, tous les tribunaux de la famille disposent d'un juge et d'une équipe pluridisciplinaire qui aide le juge à mieux cerner les conditions sociales et le milieu familial de l'enfant concerné

Interrogée sur le retard pris dans l'adoption de l'avant-projet de Code de l'enfance et de l'adolescence, la délégation a indiqué que cet avant-projet a été présenté à l'Assemblée législative il y a deux ans et fait encore l'objet d'un vaste processus de consultations. Certains secteurs conservateurs et religieux sont fortement réticents à l'égard de certains droits qui pourraient être reconnus par ce code, tels que les droits en matière de reproduction et plus particulièrement, le droit à l'information dans le domaine de la santé génésique. Le débat sur le droit à l'information dans ce domaine constitue le principal écueil, a insisté la délégation. Pourtant, il s'agit là d'une question qui revêt une importante capitale pour prévenir les grossesses précoces, l'exploitation sexuelle et la transmission de maladies sexuelles, a-t-elle ajouté. D'une manière générale, les secteurs conservateurs et religieux doivent comprendre que l'objectif du futur code n'est absolument pas de séparer l'enfant de sa famille, a déclaré la délégation.

En réponse à ceux qui relevaient une contradiction entre l'âge minimum d'accès à l'emploi et l'âge de scolarité obligatoire, la délégation a expliqué qu'en El Salvador, les mineurs de moins de 14 ans peuvent travailler si c'est indispensable à leur propre subsistance ou à celle de leur famille et à condition que cela ne les empêche pas de suivre leur scolarité obligatoire. Ainsi, les enfants de 12 à 14 ans peuvent-ils travailler conformément aux dispositions constitutionnelles en vigueur depuis fort longtemps.

S'agissant du travail des enfants, la délégation a rappelé qu'El Salvador a mis en place un programme d'élimination des pires formes du travail des enfants. Elle a en outre assuré qu'aucun enfant n'est employé dans le secteur textile en El Salvador.

Les mineurs qui n'ont pas pu terminer leurs études en suivant le cursus officiel bénéficient de programmes concrets, notamment auprès d'entreprises qui leur proposent un apprentissage pratique, a indiqué la délégation.

El Salvador compte environ 250 organisations non gouvernementales (ONG) qui travaillent plus particulièrement à des programmes et services en faveur de l'enfance. L'État a conclu des conventions de coopération avec nombre d'entre elles, a précisé la délégation.

Le nombre de naissances non enregistrées est considérable dans les zones rurales, s'est inquiété un expert, qui s'est enquis des mesures prises par l'État pour remédier à cette situation. La délégation a souligné qu'un programme de promotion de l'enregistrement des naissances a été mis en œuvre en El Salvador. On s'est aperçu que si les parents n'enregistraient parfois jamais leurs enfants, c'est en raison de l'imposition d'une amende aux parents qui n'enregistrent pas les nouveau-nés dans un certain délai. Les tarifs de ces amendes sont fixés au niveau des autorités locales, a précisé la délégation. Elle a souligné qu'El Salvador était disposée à bénéficier de toute coopération qui pourrait lui être apportée afin de réduire lnombre de naissances non enregistrées, qui se situe actuellement légèrement en dessous de 10%.

L'attention de la délégation a également été attirée sur l'augmentation du nombre d'adoptions d'enfants salvadoriens à l'étranger (30 en 2000 et 117 en 2003). Les garanties de transparence et de contrôle de ces adoptions à l'étranger sont-elles suffisantes, a demandé un expert? La délégation a souligné que le tableau du rapport contenant les chiffres mentionnés par cet expert concerne les demandes d'adoption et non les adoptions elles-mêmes. En fait, le nombre d'adoptions internationales d'enfants salvadoriens a été de 40 en 2001, 36 en 2002 et 59 en 2003, de sorte que l'augmentation n'est pas aussi nette que cela. Dans les affaires d'adoption, on privilégie avant tout l'adoption au niveau national avant de proposer l'enfant à l'adoption internationale, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que la population autochtone représente 6 à 10% de la population totale d'El Salvador.

La moitié des foyers du pays sont dirigés par des mères qui élèvent seules leurs enfants; l'irresponsabilité paternelle est un phénomène très répandu, a souligné un membre du Comité.

La délégation a par ailleurs fait état d'une moyenne de dix à treize enfants abandonnés chaque mois sur la place publique. Elle a par ailleurs admis l'existence d'un phénomène d'enfants qui quittent le pays, à la recherche de leurs parents immigrés aux États-Unis, au Guatemala, au Mexique ou ailleurs, et qui sont alors particulièrement vulnérables à toutes sortes d'exploitations ou d'abus. Les autorités salvadoriennes s'efforcent donc de développer des campagnes préventives d'information et de prendre des mesures en faveur du rapatriement de ces enfants.

La responsabilité parentale à l'égard des enfants est de mieux en mieux assumée, a assuré la délégation.

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a notamment fait valoir que le budget du Ministère de l'éducation a progressivement augmenté pour atteindre 423 millions de dollars en 2004. À l'heure actuelle, le taux net de scolarisation est de 88%, a souligné la délégation.

En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a notamment déclaré que la prétendue privatisation des services de santé est un slogan de propagande électoraliste. Chaque antenne de santé du pays est assortie d'un conseil consultatif, a-t-elle poursuivi. Un membre du Comité a souligné que la notion de privatisation des services publics en El Salvador ne relève pas d'une propagande électoraliste mais provient d'un document se rapportant à la soixantième session de la Commission des droits de l'homme.

Pour ce qui est de la santé mentale, la délégation a affirmé avoir conscience qu'un pays qui sort d'un conflit armé de 12 ans souffre de traumatismes qui touchent pratiquement toutes les familles.

Interrogée sur le nombre d'orphelins du sida, la délégation a indiqué qu'il y en a 30 en El Salvador, qui ont été accueillis en institution. Elle a précisé que 73 autres enfants atteints du VIH/sida bénéficient d'un traitement tout en restant auprès de leurs parents.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires sur le rapport d'El Salvador, M. Norberto Liwski, membre du Comité chargé de l'examen du rapport salvadorien, a déclaré que certaines questions restent préoccupantes s'agissant d'El Salvador. Il convient désormais de faire en sorte que le Code de l'enfance et de l'adolescence soit approuvé, a-t-il affirmé. Il convient aussi de garantir l'utilisation optimale des ressources dont dispose l'État. Il est également nécessaire d'accentuer les politiques actives en faveur de l'adolescence, en particulier à l'attention des jeunes en marge du système éducatif et du monde du travail. Quant à la commission de recherche sur les enfants disparus, elle doit être mise sur pied, a déclaré M. Liwski. Il convient également de mettre en place des mesures pratiques allégeant le système d'enregistrement des naissances. Il faudrait en outre mieux reconnaître la réalité de la situation des enfants autochtones et prendre des mesures en leur faveur. À la veille du changement de gouvernement, il faut espérer que l'esprit du dialogue qui a prévalu au cours de cette journée de discussion sera transmis aux autorités salvadoriennes, a affirmé M. Liwski.



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