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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE CHILI RÉPOND AUX QUESTIONS DU COMITÉ CONTRE LA TORTURE

11 Mai 2004

Comité contre la torture
APRÈS-MIDI 11 mai 2004


Le Comité contre la torture a poursuivi, cet après-midi, l'examen du rapport du Chili commencé hier matin. La délégation chilienne a répondu aux questions des membres du Comité concernant la définition de la torture dans le droit interne, les systèmes de supervision des forces de police, l'irrecevabilité des déclarations obtenues sous la torture, ainsi que l'administration du système pénitentiaire.

La délégation chilienne a notamment réaffirmé avec force l'intention de son gouvernement de procéder le plus rapidement possible à la ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elle a par ailleurs indiqué qu'un projet de loi actuellement examiné par le Parlement pose le principe d'une stricte répartition des compétences entre les tribunaux militaires et les tribunaux civils ; il est clair, a précisé la délégation, que la juridiction militaire ne doit être saisie que d'affaires strictement militaires et ne doit empiéter en aucun cas sur la compétence des tribunaux civils.

La délégation a insisté sur la ferme volonté du Gouvernement chilien de continuer à panser les plaies résultant des graves violations des droits de l'homme qui se sont produites entre le 11 septembre 1973 et le 10 mars 1990. À cet égard, elle a rappelé que la politique des droits de l'homme mise en œuvre par le Gouvernement repose sur les trois piliers que sont la vérité, la justice et la réparation.

Les conclusions et recommandations du Comité sur le rapport du Chili seront rendues publiques mercredi 19 mai, à 10 heures.

Le Comité entendra demain après-midi, à 15 heures, les réponses de la délégation néo-zélandaise aux questions qui lui ont été adressées ce matin par les experts.


Réponses de la délégation chilienne

Répondant aux questions qui lui avaient été posées hier par des membres du Comité, la délégation chilienne a notamment expliqué que pour faire passer les carabiniers chiliens de la tutelle du Ministère de la défense à celle du Ministère de l'intérieur, il faut réformer la Constitution de 1980, ce qui requiert l'aval des deux tiers des députés et sénateurs réunis en Congrès. Aussi, a précisé la délégation, le Gouvernement chilien a-t-il engagé des pourparlers sur ce point avec les partis de l'opposition, afin de rassembler la majorité nécessaire.

S'agissant de la définition de la torture dans le droit interne chilien, la délégation a notamment indiqué que si elle fait l'objet de deux articles différents, c'est uniquement pour des raisons juridiques techniques. Cette définition est conforme aux dispositions de la Convention, a affirmé la délégation.

Les délits commis par les carabiniers chiliens dans l'exercice de leurs fonctions relèvent bien de la compétence des tribunaux militaires, a par ailleurs indiqué la délégation. Les carabiniers qui auraient recouru à l'usage de la force de manière disproportionnée encourent une peine maximale de 15 ans d'emprisonnement. Il est clair, a en outre affirmé la délégation, que la juridiction militaire ne doit être saisie que d'affaires strictement militaires et ne doit empiéter en aucun cas sur la compétence des tribunaux civils ; un projet de loi fixant ce principe a été soumis au Parlement.

S'agissant du décret-loi de 1978 relatif à l'amnistie, la délégation a souligné que l'évolution de la jurisprudence de la Cour suprême, à partir de 1997, en exclut désormais l'application à divers cas.

En ce qui concerne l'extradition, la délégation a déclaré qu'en cas de conflit entre deux normes concurrentes, c'est celle qui protège le mieux les droits du justiciable qui doit prévaloir. La délégation a affirmé n'avoir pas connaissance de cas de personne ayant invoqué le principe de non-refoulement prévu à l'article 3 de la Convention (en vertu duquel aucun État partie ne doit expulser ni refouler ou extrader une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu'elle risque d'être soumise à la torture).

La délégation a déclaré que les forces armées et la gendarmerie chiliennes se voient dispenser des programmes de formation qui prennent en compte les questions relatives aux droits de l'homme et au droit humanitaire international.

La délégation chilienne a en outre rappelé que la commission nationale sur l'emprisonnement politique et la torture a commencé ses travaux à la fin de l'année dernière et a reçu 22 000 plaintes. Conformément au décret qui l'a instituée, elle dispose de 6 mois pour mener à bien sa tâche et pourra bénéficier d'un délai supplémentaire de 3 mois pour déterminer les cas de personnes torturées et privées de liberté pour des raisons politiques. La délégation a précisé que la différence importante entre le nombre de plaintes qui étaient attendues par le gouvernement (70 000) et le nombre de plaintes portées devant la Commission s'explique sans doute par la difficulté des victimes à surmonter le traumatisme qu'elles ont subi pour aller porter plainte. Cette différence s'explique également par le fait que certaines personnes ne reconnaissent pas que ce qu'elles ont subi était bel et bien un acte de torture.

La délégation chilienne a fait part au Comité de la ferme volonté de son gouvernement - dans le cadre de sa proposition "Il n'y a pas de demain sans hier" - de continuer à panser les plaies résultant des graves violations des droits de l'homme qui se sont produites entre le 11 septembre 1973 et le 10 mars 1990. À cet égard, elle a rappelé que la politique des droits de l'homme mise en œuvre par le Gouvernement repose sur les trois piliers que sont la vérité, la justice et la réparation.

La délégation chilienne a ensuite expliqué que l'action des carabiniers chiliens était soumise au contrôle de l'Inspection générale. Il existe en outre un système de promotion du personnel qui prend en compte le respect des valeurs éthiques. Pour sa part, la police de sûreté est dotée d'une inspection générale qui dispose notamment de pouvoirs d'enquête sur les abus commis par le personnel en matière de droits de l'homme. La police de sûreté est également supervisée par le Département de réforme de la procédure pénale et le Conseil supérieur de déontologie. En outre, il existe un service de contrôle qui est chargé, au quotidien, de vérifier que le traitement des détenus est conforme aux normes juridiques, réglementaires et administratives pertinentes. La gendarmerie chilienne fait l'objet d'un contrôle de la part d'organes administratifs et judiciaires, a ajouté la délégation. Pour leur part, les juges d'instruction sont légalement tenus de surveiller et de garantir la conformité de l'exécution des peines privatives de liberté avec la réglementation en vigueur. Ils ont compétence pour modifier les sanctions disciplinaires qui pourraient être décidées par les autorités pénitentiaires.

La délégation chilienne a par ailleurs déclaré que le retard pris dans l'application de la réforme de la procédure pénale dans la région métropolitaine s'explique par la nécessité d'assurer une préparation adéquate des forces de police et du Service de médecine légale de la région. C'est la raison pour laquelle l'entrée en vigueur de la réforme en région métropolitaine a été retardée de 6 mois par rapport au calendrier initial. Contrairement à ce que suggérait un expert, il n'est pas possible de réduire ce délai en commençant par appliquer une partie seulement de la réforme, a déclaré la délégation.

S'agissant du traitement des délinquants juvéniles, la délégation a affirmé que les prévenus âgés de moins de 18 ans ne peuvent pas être détenus avec des adultes. Les prisons récemment construites assurent une séparation totale entre délinquants mineurs et majeurs, a souligné la délégation. Elle a attiré l'attention sur la promulgation, en mars 2002, d'une loi de procédure pénale qui permet d'améliorer la protection des droits des mineurs.

La délégation a rappelé la volonté de son gouvernement de renforcer la société et les institutions chiliennes afin que jamais ne puissent se reproduire des violations systématiques de droits de l'homme. C'est dans cet esprit que la question de la ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture est actuellement étudiée par les services compétents des Ministères de la justice et de l'intérieur. Le Chili ratifiera le plus rapidement possible le Protocole, a souligné la délégation

La délégation a reconnu l'existence de problèmes de surpopulation carcérale, de vétusté des prisons et de manque de personnel pénitentiaire au Chili. Conscient des risques inhérents à cette situation, tant pour le personnel pénitentiaire que pour les détenus, le Gouvernement chilien a consenti des efforts très importants dans ces domaines, a-t-elle souligné. A ainsi été lancé, en partenariat avec les entreprises du secteur privé, un programme de construction de nouveaux établissements qui répondent parfaitement aux normes applicables en la matière. Par ailleurs, le Gouvernement a procédé à l'embauche de nouveaux personnels. Le champ d'action des entreprises privées dans le domaine de l'administration pénitentiaire est strictement réglementé par la loi, a en outre souligné la délégation.

Répondant à une question sur les mesures prises par le Chili pour prévenir les abus sexuels en prison, la délégation a souligné que l'administration pénitentiaire fournit des instructions générales applicables à tous les détenus, quelles que soient les raisons pour lesquelles ils sont incarcérés. Le but de ces instructions est de garantir la sécurité de tous dans les prisons. Tout agent des services pénitentiaires témoin d'une infraction à ces instructions est tenu de la signaler aux autorités compétentes. En outre, les personnes emprisonnées à la suite de crimes ou délits sexuels sont détenues dans des cellules distinctes, a précisé la délégation.

Des procédures garantissent que tout témoignage ou déclaration obtenu sous la torture sera jugé irrecevable, a poursuivi la délégation. Elle a souligné que le Chili s'est en outre doté d'institutions, comme le défenseur des droits de l'homme, qui sont chargées de lutter de manière préventive contre la torture dans les lieux de détention.



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