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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE QUATRIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE

19 Novembre 2003



18 novembre 2003

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier après-midi et aujourd'hui, le quatrième rapport périodique de la Fédération de Russie sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Il adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur ce rapport avant de les rendre publiques à la fin de la session, le vendredi 28 novembre 2003.
Présentant le rapport de son pays, le Ministre russe du travail et du développement social, M. Alexander Pochinok, a notamment mis l'accent sur la nouvelle législation adoptée dans le domaine économique et social, en particulier l'ensemble de lois portant réforme de la loi sur les retraites et le nouveau code du travail. Il a indiqué qu'un code social est en cours d'élaboration qui va donner les grandes orientations juridiques pour la protection sociale de la population tant au niveau fédéral que régional. Aujourd'hui, le défi en matière de promotion et de mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels en Fédération de Russie n'est pas d'ordre juridique; il est d'ordre financier, tant il est vrai que le pays ne parvient pas à financer complètement toutes les dispositions de la loi. Un quart de la population vit encore en dessous du seuil de pauvreté, mais cette proportion a rapidement baissé ces dernières années, a poursuivi M. Pochinok.
En ce qui concerne la situation en République de Tchétchénie, M. Pochinok a rappelé qu'il y a quelques années, la loi de la charia s'appliquait dans cette république, qui ne comptait pas d'établissements sociaux ou culturels. Désormais, le système mis en place permet d'assurer une source de revenus et une aide à chacun, a insisté le Ministre.
La délégation russe était également composée de M. Leonid Skotnikov, Représentant permanent de la Fédération de Russie auprès des Nations Unies à Genève, et du Vice-Représentant permanent, M. Alexander Bavykin, ainsi que de représentants du Ministère du travail et du développement social; du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de la justice; du Ministère de la culture; du Ministère du développement économique; du Comité d'État des statistiques.
La délégation a fourni aux experts des compléments d'informations s'agissant, notamment, des activités du Commissaire aux droits de l'homme; de la lutte contre la corruption; des conditions de détention; du bizutage au sein de l'armée; de la situation en République de Tchétchénie et des personnes déplacées en Ingouchie; de la situation du chômage; du droit du travail, s'agissant plus particulièrement du droit de grève et du salaire minimum; de la lutte contre la pauvreté; des questions de santé et d'éducation; et de la traite des êtres humains, notamment à des fins d'exploitation sexuelle. Sur ce dernier point, la délégation a déclaré que la traite des femmes est un problème grave dont l'ampleur s'est néanmoins réduite et reste moindre que ce que l'on écrit généralement à ce sujet. Le Code pénal prévoit déjà de lourdes peines pour les personnes qui participent à la traite des femmes, mais étant donné que cela ne suffit pas, la Fédération de Russie entend se doter d'une loi très puissante pour lutter contre ce phénomène, a indiqué la délégation.
Le Comité entamera demain matin, à 10 heures, l'examen du deuxième rapport périodique de la République populaire démocratique de Corée (E/1990/6/Add.35).
Présentation du rapport
M. ALEXANDER POCHINOK, Ministre du travail et du développement social de la Fédération de Russie, a déclaré que son pays apprécie beaucoup les recommandations présentées par le Comité à l'issue de l'examen du précédent rapport du pays. Les choses ont beaucoup changé depuis cette date en Fédération de Russie, a-t-il souligné. Dans les années 1990, la Fédération de Russie a subi deux crises importantes, au début et à la fin de la décennie. Le pays a dû réformer son système législatif et cela fait maintenant dix ans que la Fédération de Russie dispose d'une Constitution qui a prouvé sa force pérenne. La Fédération de Russie a conscience de l'importance croissante de ses responsabilités sociales, du fait de la ratification de divers instruments internationaux, dans le contexte de la mondialisation et de l'adhésion du pays à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), a assuré M. Pochinok. Les normes internationales se reflètent dans les différents codes tels que le Code civil et le Code de la famille, a-t-il précisé. Les dispositions des instruments internationaux ratifiés par la Fédération de Russie sont d'application directe, a précisé le Ministre.
Parmi les lois les plus récentes adoptées par la Fédération de Russie dans le domaine économique et social, le Ministre a cité l'ensemble de lois portant réforme de la loi sur les retraites et le nouveau code du travail. Ce dernier est en parfaite conformité avec les instruments internationaux fondamentaux, y compris les conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur ces questions, a-t-il insisté. Il a par ailleurs indiqué qu'un code social est en cours d'élaboration qui va remplacer toute une série de lois et donner les grandes orientations juridiques pour la protection sociale de la population tant au niveau fédéral que régional. Aujourd'hui, le défi en matière de promotion et de mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels en Fédération de Russie n'est pas d'ordre juridique; il est d'ordre financier, tant il est vrai que le pays ne parvient pas à financer complètement toutes les dispositions de la loi. Comme l'a indiqué le Président Vladimir Poutine, l'ensemble des obligations existantes équivaut à peu près à deux fois le budget du pays. Il convient donc d'œuvrer à une bonne croissance, c'est-à-dire à une croissance dynamique. Or, si l'on observe les indicateurs, on constate par exemple que les investissements et le PIB croissent rapidement, a souligné M. Pochinok.
Le Ministre du travail et du développement social a indiqué que la Fédération de Russie s'est fixé pour objectif de doubler le budget social dans les dix années à venir. L'inflation reste certes relativement élevée (12% par an en moyenne), mais les réserves en or ont quadruplé ces dernières années et depuis trois ans, la dette est remboursée conformément aux calendriers fixés, a-t-il fait valoir. On estime que les revenus de la population vont bientôt dépasser le rythme de croissance de l'économie, ce qui devrait permettre de réduire le nombre de pauvres vivant en dessous du seuil de la pauvreté, a poursuivi M. Pochinok. Un quart de la population vit en dessous de ce seuil, mais cette proportion baisse rapidement ces dernières années, grâce notamment aux efforts déployés pour régler le problème de la pauvreté économique, a-t-il ajouté. Une personne qui travaille doit percevoir un salaire décent, a-t-il déclaré. Or, le salaire minimum est aujourd'hui quatre fois et demi plus élevé que ce qu'il était au début de 2000 et la pension de retraite moyenne correspond désormais à peu près à ce dont a besoin un retraité pour vivre, a fait valoir le Ministre. Aujourd'hui, a-t-il ajouté, 5,7 millions de personnes peuvent, selon l'OIT, être considérées comme des chômeurs, alors que la Fédération de Russie comptait 8,7 millions de chômeurs en 1999. On s'attend à ce que d'ici 2007, la Fédération de Russie soit confrontée non pas à un problème de chômage mais à un problème de manque de main-d'œuvre qualifiée, a déclaré M. Pochinok.
Le nombre de grèves constitue l'un des indicateurs importants du bien-être d'une population dans le secteur social, a par ailleurs suggéré le Ministre, qui a indiqué que, pour le premier semestre de 2003, on enregistre soixante grèves à travers le pays. Ces dernières années, les fonds alloués par le Gouvernement aux personnes handicapées ont triplé, a poursuivi M. Pochinok. Il a par ailleurs indiqué que le pays est parvenu en 2002 à réduire d'un quart le nombre des délits commis par des mineurs. La Fédération de Russie est également en train de procéder à une réforme dans le domaine du logement et le nombre de familles en attente d'une amélioration de leur logement a été réduit de moitié, a fait valoir le Ministre.
Dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la culture, un grand nombre de lois importantes ont été adoptées ces dernières années, a d'autre part affirmé M. Pochinok. La propagation de la tuberculose a été stoppée, a-t-il notamment souligné. Si les taux d'infection ont certes diminué, la Fédération de Russie compte néanmoins, selon les derniers chiffres disponibles, 229 000 personnes infectées par le VIH/sida. Les problèmes de la toxicomanie et du sida sont étroitement liés en Fédération de Russie, a ajouté le Ministre. Il a souligné que le pays est en train de poursuivre la réforme du système d'assurance sociale et médicale. Des changements radicaux sont en outre intervenus ces dernières années dans le domaine de l'enseignement supérieur en Fédération de Russie, a-t-il poursuivi.
En ce qui concerne la situation en République de Tchétchénie, le Ministre a rappelé qu'il y a quelques années, la loi de la charia s'appliquait dans cette république, qui ne comptait pas d'établissements sociaux ou culturels. Désormais chacun a droit à recevoir une retraite et à percevoir une allocation pour enfants. S'il n'est pas possible d'assurer un emploi à chacun, il n'en demeure pas moins que 60 000 emplois ont été créés ces derniers temps, a fait valoir M. Pochinok. Le système mis en place permet désormais d'assurer une source de revenus, une aide à chacun des habitants de la République de Tchétchénie, a-t-il insisté.
Le quatrième rapport périodique de la Fédération de Russie (E/C.12/4/Add.10), daté de novembre 2001, souligne que plus de 140 nationalités et ethnies cohabitent dans la Fédération de Russie. Celle-ci est composée de 21 républiques, 6 territoires, 49 régions, 1 région autonome et 10 districts autonomes qui possèdent soit leur propre Constitution, soit leurs propres statuts et législations. Deux lois ont été adoptées pour développer la disposition constitutionnelle consacrant le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes: la loi fédérale de 1996 sur l'autonomie culturelle des nationalités et la loi fédérale de 1999 sur les garanties apportées aux droits des peuples autochtones peu nombreux. L'autonomie culturelle des nationalités est une forme d'autodétermination culturelle nationale qui rassemble les citoyens se réclamant d'une nationalité déterminée en une certaine société formée sur la base de l'auto-organisation volontaire dans le but de régler de manière indépendante les problèmes touchant la préservation de leur identité, le développement de leur langue, de leur éducation, de leur culture. En 2000, 11 groupes ethniques avaient fait usage dans la Fédération de Russie du droit de créer leur autonomie culturelle nationale: les Ukrainiens, les Kurdes, les Allemands, les Tziganes, les Azerbaïdjanais, les Lezghiens, les Bélarussiens, les Tatares, les Coréens, les Serbes et les Juifs.
Le rapport souligne en outre que la Cour suprême, par son arrêt du 31 octobre 1995, a expliqué que, dans l'examen des affaires dont ils sont saisis, les tribunaux doivent considérer que les principes et normes généralement reconnus du droit international font partie intégrante du système juridique russe. Si d'autres règles que celles prévues par la loi sont établies par un traité international de la Fédération de Russie, les règles du traité international prévalent. En cette période de difficultés sociales et financières, poursuit le rapport, des violations des droits des citoyens se produisent comme par le passé sur le territoire de la Fédération de Russie. Il existe un fossé entre les principes constitutionnels et la pratique réelle. Cette situation s'explique par de nombreuses raisons, dont voici les principales: infractions à la législation fédérale, nihilisme juridique et défense de préséances et d'intérêts étroitement corporatistes dans la création du droit, absence de délimitation précise de la compétence des organes fédéraux du pouvoir et des sujets de la Fédération, inapplication des mécanismes établis d'harmonisation des actes normatifs édictés par des organismes publics de différents niveaux, absence de système précis de contrôle d'État. Comme par le passé, faible est la protection qu'offrent les tribunaux aux citoyens.
D'après les chiffres fournis par le Comité d'État de statistique de Russie, poursuit le rapport, en 2000, 151 800 personnes ont eu un accident du travail, mortel pour 4 400 d'entre eux − dont 255 femmes et 23 mineurs de 18 ans. Les données recueillies permettent de constater depuis quelques années en Russie une tendance légèrement positive à la diminution des accidents du travail. Dans le secteur privé, 80 % des employés travaillaient dans des conditions insalubres. Depuis quelques années, ajoute le rapport, on observe une évolution négative des indicateurs de la santé génésique des femmes appartenant aux différentes tranches d'âge: le nombre d'avortements reste élevé, de même que les taux de morbidité et de mortalité maternelle et infantile. L'état de santé des nouveau-nés tend également à se dégrader. Un tiers d'entre eux souffre de problèmes de santé divers. Alors que la population rurale est passée de 26, 1 % en 1995 à 27 % en 2000, le réseau des établissements de soins en milieu rural tend à diminuer. Les problèmes de santé publique se sont particulièrement aggravés dans les régions des peuples autochtones peu nombreux du nord ayant un mode de vie nomade, notamment dans les districts autonomes du Taïmyr (Dolgano-Nénets), d'Evenks et de Nénets. En Russie et plus particulièrement dans les régions de l'Extrême-Nord, l'incidence de la tuberculose a atteint un niveau critique en 1999. Selon les chiffres officiels, il y avait 379 900 malades atteints de la tuberculose à la fin de 2000, et 130 700 nouveaux cas ont été diagnostiqués la même année. Dans ce contexte, un programme fédéral spécifique intitulé «Mesures urgentes de lutte contre la tuberculose en Russie, 1998-2004» a été adopté. Les services de santé s'inquiètent de la recrudescence de maladies autrefois rares, telles que l'hépatite A et B ou la diphtérie.
Examen du rapport
Un membre du Comité a souhaité connaître les actions concrètes menées par le Médiateur dans le domaine de l'environnement. L'environnement est en effet intimement lié à l'eau et à l'ensemble de la chaîne alimentaire, a-t-il souligné. La délégation a expliqué que le Commissaire aux droits de l'homme (Médiateur) est chargé d'assurer la garantie des droits et libertés des citoyens. D'un côté il assure une surveillance générale de la situation et, de l'autre, il présente de nombreux rapports sur telle ou telle question, a précisé la délégation. Le rapport du Commissaire aux droits de l'homme sur l'environnement a révélé des violations particulièrement caractéristiques dans ce domaine, a-t-elle reconnu. Tous les organes de l'exécutif doivent répondre à ce type de rapports, a poursuivi la délégation. Ces rapports donnent généralement lieu à des amendements législatifs et à diverses mesures, a-t-elle expliqué. Il existe actuellement 24 commissaires aux droits de l'homme qui opèrent dans les différentes entités de la Fédération de Russie et examinent environ 30 000 requêtes.
Un autre membre du Comité a rappelé que le droit à l'autodétermination comprend le droit de disposer des ressources naturelles. Dénonçant les pilleurs de biens publics, ce même expert s'est demandé ce que font les organes de contrôle chargés de veiller à ce que les fonds publics soient dépensés conformément à la loi. Il a évoqué l'opacité du système d'information publique; la «mentalité d'assisté» des personnes à la merci des pouvoirs publics; ainsi que la faiblesse de la société civile, qui est mal organisée, et celle de la presse.
La délégation a fait valoir qu'un programme de lutte contre la corruption est en cours d'élaboration en Fédération de Russie. Une réforme administrative s'avère nécessaire pour lutter contre la corruption, a-t-elle souligné. Elle a rappelé que la Cour des comptes est chargée de veiller au bon fonctionnement du système de financement public. Le détournement de fonds entraîne d'ores et déjà des sanctions pénales, a assuré la délégation.
Un expert a attiré l'attention sur le problème des pratiques discriminatoires qui empêchent des personnes qui avaient auparavant la citoyenneté de l'Union soviétique d'obtenir la citoyenneté russe. La délégation a notamment indiqué que la Fédération de Russie est en train de modifier sa législation de manière à instituer un régime selon lequel toute personne ayant un passeport soviétique pourra désormais obtenir la nationalité russe. Quoi qu'il en soit, la possession d'un passeport n'est toutefois pas nécessaire aux fins de la réalisation de l'ensemble des droits de l'homme, a en outre souligné la délégation.
Le même expert s'est également inquiété de la situation des Tchétchènes qui ont trouvé refuge en Ingouchie et qui, selon certaines informations, seraient forcés à retourner en Tchétchénie alors qu'ils préfèreraient rester en Ingouchie. Un autre membre du Comité a jugé insuffisantes les informations fournies par la Fédération de Russie, tant dans le rapport que dans la déclaration de présentation du Ministre du travail, s'agissant de la situation en République de Tchétchénie, où le taux de chômage atteindrait, selon certaines organisations non gouvernementales, 90% et où une grande partie de la population n'a pas accès aux soins de santé ou à l'éducation. On peut donc se demander si la situation en Tchétchénie est bien normalisée, s'est interrogé cet expert.
La délégation a rappelé que la Fédération de Russie s'est dotée d'un plan de redressement en Tchétchénie. Le budget réel de la République de Tchétchénie représente plus de 8,5 milliards de roubles, l'essentiel étant financé par le budget fédéral, a précisé la délégation. En 2003, des briquetteries ainsi que des usines de ciment et de silicate, entre autres, ont pu être reconstruites, a-t-elle souligné. En 2003, 610 maisons individuelles ont également pu être reconstruites. Les 23 bureaux de poste ainsi que tout le réseau électrique et l'approvisionnement en gaz ont été rétablis. Du pétrole est même exporté de la République, a précisé la délégation. Il faudra néanmoins des décennies pour tout remettre en état.
De graves actes de terrorisme ont pu être empêchés grâce au système de points de contrôle mis en place en République de Tchétchénie, a souligné la délégation.
Interrogée sur la question de savoir si des indemnités sont versés aux personnes dont les maisons ont été détruites, la délégation a affirmé que 48 000 maisons ont été endommagées et 18 000 entièrement détruites. Des indemnités ont déjà été versées à certains et les sommes qui leur ont été attribuées sont suffisantes pour permettre de reconstruire un logement, a assuré la délégation.
En ce qui concerne la question des personnes déplacées en Ingouchie, la délégation a rappelé que M. Francis Deng (Représentant du Secrétaire général de l'ONU sur les personnes déplacées) et Mme Angelina Jolie (Ambassadrice itinérante du HCR) se sont rendus dans la région et, d'après leurs conclusions, il n'a pas pu être constaté de cas de personnes déplacées de force.
Ces dernières années, beaucoup a été fait pour améliorer les conditions de détention, a par ailleurs déclaré la délégation. Le nombre de condamnés a diminué de 300 000 et la pratique consistant à procéder à des arrestations sans mandat d'arrêt a été réduite, a-t-elle précisé. La surface allouée à chaque détenu est désormais fixée à 4 mètres carrés, ce qui correspond à la norme internationale. Il convient néanmoins de faire en sorte que ces 4 mètres carrés par détenu soient aménagés de manière à correspondre aux normes, a ajouté la délégation.
Un membre du Comité a fait état de témoignages accablants sur la manière dont les officiers de l'armée russe se comportent à l'égard des jeunes recrues. La délégation a reconnu que le phénomène du bizutage existe bel et bien dans l'armée, même s'il est en régression. Il s'agit d'un phénomène affligeant, a reconnu la délégation. Elle a rappelé que la Fédération de Russie était en train d'opérer une transition vers une armée professionnelle. Un service civil de remplacement, prévu par la Constitution, sera opérationnel à partir de l'an prochain puisqu'une législation en ce sens a d'ores et déjà été adoptée, a par ailleurs indiqué la délégation. Relevant que les organisations non gouvernementales reprochent au pays d'avoir fixé une durée de service civil supérieure à celle du service militaire, la délégation a fait valoir que la durée du service militaire va être réduite de moitié et que celle du service civil sera donc également réduite en proportion.
Un expert a relevé que le salaire minimum tourne autour des 20 dollars mensuels alors que le minimum vital est évalué à environ trois fois plus. Un autre membre du Comité s'est enquis des mesures envisagées par le Gouvernement pour harmoniser les salaires moyens, qui varient énormément à travers le pays puisqu'ils peuvent aller de 700 roubles dans certaines régions à 2 800 roubles à Moscou voire 8 000 roubles dans les villes des zones pétrolifères.
Il est vrai que le salaire minimum en Fédération de Russie est extrêmement bas, puisqu'il s'établit à 600 roubles, a reconnu la délégation, tout en précisant que cette somme ne constitue pas, en fait, la totalité du revenu réellement perçu par le travailleur. Elle a en outre affirmé que la différence de salaires entre hommes et femmes s'explique par le fait que les femmes occupent généralement des postes qui sont moins bien rémunérés; on trouve par exemple moins de femmes que d'hommes aux postes de niveau supérieur où intervient la prise de décision.
Plusieurs experts ont fait état d'informations selon lesquelles le droit de grève subirait d'importantes limitations. L'Organisation internationale du travail elle-même a relevé que, selon l'article 410 du Code du travail, les deux tiers des travailleurs doivent être présents pour décider d'une grève, ce qui constitue un quorum plutôt élevé. En outre, la législation stipule qu'il faut annoncer combien de temps la grève va durer, ce qui paraît difficile à prévoir a priori, a estimé un expert.
La délégation a souligné qu'il existe en Fédération de Russie de puissantes centrales syndicales capables de mobiliser un nombre considérable de personnes.
En ce qui concerne la situation des chômeurs en Fédération de Russie, la délégation a indiqué que le pays compte officiellement 5,4 millions de personnes sans emploi si l'on inclut celles qui travaillent dans le secteur informel. Les véritables chômeurs, ceux qui n'exercent aucun emploi, sont donc en fait nettement moins nombreux, a poursuivi la délégation. Le nombre véritable de chômeurs se situe probablement aux environs de 1,8 million, ce qui représente moins de 2% de la population active, a-t-elle précisé. Ces chômeurs peuvent demander une indemnisation et bénéficier d'une formation, a fait valoir la délégation.
À partir de 53 ans, les travailleurs peuvent prendre leur retraite grâce à des programmes de départ à la retraite anticipé, a par ailleurs indiqué la délégation. L'âge moyen de la retraite est de 60 ans pour les hommes, a-t-elle indiqué. Le montant des pensions de retraite dépasse le minimum vital, a par ailleurs fait valoir la délégation.
Un membre du Comité s'est inquiété des chiffres mentionnés dans le rapport concernant le nombre, élevé, d'accidents de travail enregistrés en Fédération de Russie. À cet égard, la délégation a fait valoir que le nombre de morts a été réduit de moitié ces dernières années, en particulier dans le secteur des mines de charbon.
Un expert a jugé élevés les chiffres selon lesquels il y aurait 10,6 millions de personnes handicapées en Fédération de Russie sur une population totale d'environ 144 millions d'habitants. Devant le risque d'abus du système d'aide aux handicapés, il s'est enquis de la définition de la personne handicapée retenue dans le pays. La délégation a déclaré que sur les 10 millions de personnes handicapées que compte le pays, environ 4 millions souffrent d'une invalidité liée au travail.
En ce qui concerne la lutte contre la pauvreté, la délégation a notamment indiqué qu'une aide sociale est apportée, sous des formes diverses, à environ 13 millions de Russes. Dans les entités de la Fédération qui sont confrontées à des difficultés budgétaires, une aide est fournie en nature, a précisé la délégation.
S'agissant encore de la lutte contre la pauvreté, la délégation a indiqué que, selon les experts les plus pessimistes, douze à quinze millions de personnes en Fédération de Russie ont des revenus qui ne leur permettent pas de vivre ni même de s'alimenter normalement. Aussi, les autorités ont-elles mis sur pied un important système permettant de venir en aide à ces personnes.
La délégation a d'autre part indiqué que le nombre de salariés victimes d'un retard de paiement de leurs salaires s'établit à cinq millions, contre neuf millions il y a quelques temps seulement. La loi établit désormais la responsabilité de l'employeur pour ce qui est de payer en temps voulu les salaires de ses employés, a précisé la délégation. Elle a souligné qu'en ce qui le concerne, le Gouvernement est tout à fait à jour pour ce qui est du paiement des salaires dans la fonction publique, où les retards ne dépassent plus désormais que quelques heures.
Un membre du Comité a fait part de sa préoccupation face aux informations indiquant qu'environ 50 000 quitteraient précocement leurs familles chaque année en raison de violences familiales, de problèmes financiers ou de l'alcoolisme des parents. Cet expert s'est en outre inquiété des conditions très précaires dans lesquelles semblent être détenus les enfants délinquants. Il a regretté que le système en vigueur tende davantage à punir les délinquants mineurs qu'à les réinsérer dans la société. Un autre membre du Comité s'est inquiété du taux de criminalité élevé en Fédération de Russie, ainsi que ainsi que de l'incidence de l'alcoolisme.
La délégation a reconnu que de nombreux enfants quittent leurs familles précocement et a précisé qu'environ un million d'enfants vivent dans des familles peu propices à une vie saine. L'Université sociale de Moscou compte de très nombreux étudiants qui suivent des études afin d'être dûment formés pour s'occuper des questions sociales, a ajouté la délégation. Elle a précisé qu'à partir de 2005, d'importantes responsabilités en matière sociale seront tranférées aux collectivités locales; les autorités s'efforcent donc d'assurer que, d'ici cette date, toutes les mesures préparatoires nécessaires auront bien été prises.
La délégation a par ailleurs souligné que l'élaboration du projet de loi sur la violence au sein de la famille a vu le renforcement des garanties juridiques offertes aux victimes. Une responsabilité pénale sévère est désormais prévue pour les auteurs de ce type de violence, a-t-elle ajouté.
Relevant la tendance à la privatisation et à la libéralisation du secteur du logement en Fédération de Russie, un membre du Comité a souligné que l'État ne saurait totalement se départir du secteur du logement social étant donné que nombre de pauvres ne pourront jamais acheter ni construire leur logement.
Un autre expert a jugé très inquiétant le chiffre indiquant que deux à trois millions de personnes consommeraient des stupéfiants en Fédération de Russie. D'autres experts se sont inquiétés d'informations faisant état de traite de femmes et d'enfants à des fins, en particulier, d'exploitation sexuelle. Plusieurs experts ont fait part de leurs préoccupations face au nombre élevé d'orphelins en Fédération de Russie.
La délégation a reconnu que le traite des femmes est un problème grave dont l'ampleur s'est néanmoins réduite et reste moindre que ce que l'on écrit généralement à ce sujet. On ne peut en tout cas pas parler de 500 000 personnes victimes de ce trafic comme l'a fait la Commission européenne, a assuré la délégation. En effet, il n'est pas possible de traverser les frontières sans que cela se sache et, physiquement parlant, une telle quantité de jeunes femmes ne peut donc pas quitter la Fédération de Russie sans que cela ne se sache. Le problème n'en est pas moins important et, en ce qui la concerne, la Fédération de Russie reste totalement opposée à la légalisation de la prostitution, a poursuivi la délégation. Mais le commerce du sexe rapporte beaucoup dans certains pays d'Europe occidentale, et c'est cette demande qui est à la base du problème, a-t-elle estimé. Si le commerce du sexe fonctionne légalement, notamment dans des pays d'Europe occidentale, comment peut-on interdire aux jeunes femmes de sortir du pays pour aller y travailler, s'est interrogée la délégation? Chaque année, les services douaniers interceptent environ deux à trois mille femmes qui ne disposent pas des documents nécessaires pour se rendre dans certains pays où il est possible qu'elles envisageaient d'aller travailler dans le commerce du sexe, a-t-elle précisé. Quoi qu'il en soit, le Code pénal prévoit de lourdes peines pour les personnes qui participent à la traite des femmes, a souligné la délégation. Étant donné que cela ne suffit pas, la Fédération de Russie entend se doter d'une loi très puissante pour lutter contre le phénomène de la traite des êtres humains, a-t-elle indiqué.
En réponse aux préoccupations exprimées s'agissant de la situation des nombreux orphelins que compte le pays, la délégation a expliqué que le nombre important d'orphelins s'explique par l'instabilité de la famille en Fédération de Russie, de nombreux foyers se désintégrant. Les autorités s'efforcent de faire en sorte que ces enfants puissent retrouver un foyer. Pour ce qui est des adoptions, la délégation a indiqué que s'il arrive que des adoptions internationales soient autorisées, la grande majorité des enfants adoptés le sont en Fédération de Russie. Il y a certes eu des cas d'adoption douteux, mais chaque cas suspect a fait l'objet d'une enquête, a assuré la délégation. Quoi qu'il en soit, aucun cas de traite ou de vente d'enfants n'a été décelé, a-t-elle indiqué.
Relevant que le taux de mortalité maternelle est relativement élevé en Fédération de Russie par rapport au niveau européen, un expert a souhaité connaître le pourcentage de femmes qui accouchent dans les établissements hospitaliers.
La délégation a reconnu les forts taux de mortalités maternelle et infantile dans le pays et a déclaré que le gouvernement est très inquiète de cet état de fait. Alors qu'en 1991, 941 femmes sont mortes de complications liées à l'accouchement, ce nombre a été divisé par deux l'an dernier, a toutefois souligné la délégation. La même tendance est signalée en matière de mortalité infantile, a-t-elle fait valoir. Il n'en demeure pas moins que les indicateurs restent encore élevés dans ce domaine, a-t-elle reconnu.
La délégation a souligné que le système national de santé n'a pas été privatisé et reste gratuit pour tous les ressortissants du pays.
En Fédération de Russie, même s'il reste encore élevé, le nombre d'avortements a baissé de moitié ces dix dernières années, a par ailleurs fait valoir la délégation.
En ce qui concerne les questions d'éducation, un membre du Comité a souhaité savoir si, dans l'ensemble des entités composant la Fédération de Russie, un enseignement est dispensé dans les langues nationales des divers peuples. La délégation a indiqué que des enseignements sont effectivement dispensés dans les langues autochtones dans de très nombreux établissements scolaires à travers tout le pays. Elle a en outre mis l'accent sur la création inédite d'une université destinée aux peuples autochtones.
Toutes les législations des entités composant la Fédération de Russie ont été mises en conformité avec la législation fédérale et avec les dispositions des instruments internationaux ratifiés par le pays, a par ailleurs souligné la délégation.
La délégation a par ailleurs affirmé que la Fédération de Russie n'est pas en mesure de dépenser son excédent budgétaire sous peine de déclencher un processus inflationniste. Il n'en demeure pas moins que la part des dépenses sociales ne cesse d'augmenter et représente désormais un quart du budget, sans compter les salaires et les retraites.
La délégation a par la suite souligné que le poids de la dette représente désormais moins du tiers du produit national brut. Le paiement des intérêts de la dette prélevant une moindre part du budget de l'État, une part plus importante de ce budget peut dès lors être consacrée aux dépenses sociales, a expliqué la délégation.
La délégation a indiqué que la Fédération de Russie entend faire en sorte que la Charte sociale européenne, qui devrait bientôt être présentée devant la Douma, puisse s'appliquer totalement sur l'ensemble du territoire de la Fédération de Russie.
En ce qui concerne le protocole facultatif qui est envisagé pour habiliter le Comité recevoir des plaintes pour violation des droits figurant dans le Pacte, la délégation a estimé que ce nouvel instrument devrait être souple et offrir aux États la possibilité de définir concrètement les articles à l'égard desquels ils acceptent de reconnaître la compétence du Comité. La Fédération de Russie est néanmoins tout à fait favorable à l'adoption d'un tel protocole facultatif, a assuré la délégation.

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