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Communiqués de presse Organes conventionnels

MALGRE LES EFFORTS CONSENTIS, LES EXPERTS S’INQUIETENT DES INEGALITES QUI SUBSISTENT A L’ENCONTRE DES MINORITES EN HONGRIE, EN PARTICULIER LES ROM

22 Mars 2002



Comité des droits de l'homme
1991ème et 1992ème séances - matin et après-midi
22 mars 2002
 
 
Au titre de l’article 40 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques que la Hongrie a signé en 1976, le Comité des droits de l’homme examinait aujourd’hui le quatrième rapport périodique de cet Etat partie.  Lors de l’examen du précédent rapport périodique en 1993, le Comité s’était inquiété du fait que la Constitution et la législation hongroises n’incorporaient pas toutes les dispositions du Pacte et que son statut dans le système juridique n’était pas clairement défini.  A cela, M. Lipôt Höltzl, du Ministère de la justice hongrois, a répondu lors de la présentation du rapport que la Constitution avait été modifiée, notamment pour ce qui concerne les articles sur les minorités qui contrevenaient aux dispositions du Pacte et qui ont été corrigés.
C’est d’ailleurs sur ce sujet, en particulier à propos du statut des Rom, que le Comité avait également eu l’occasion, à la suite de l’examen du rapport précédent, de formuler de nombreuses observations.  Dans ce contexte, la délégation hongroise a présenté aujourd’hui les mesures prises par le Gouvernement en matière de non-discrimination, lesquelles sont, de l’avis de plusieurs experts, encore inadéquates malgré de réels efforts consentis.  Au nombre de ces efforts, la délégation hongroise a souligné que la Constitution garantit notamment la préservation de la langue et de la culture rom.  La loi, unique dans le cadre européen, garantit les droits individuels et collectifs rom, y compris le droit à l’autogouvernance.  Cette loi, qui assure le droit d’établir une administration autonome du peuple rom, a d’ailleurs fait l’objet de louanges de la part d’un des experts du Comité.  Il a cependant été rappelé que le Comité exigeait l’établissement de critères précis pour la définition de l’appartenance à une minorité et avait contesté le principe de libre identification en vigueur en Hongrie.  La question qu’ont alors posé les experts est celle de savoir si le Gouvernement a pensé à introduire des nouveaux critères d’identification.  En matière d’éducation des Rom, le représentant hongrois a également pu fournir aux experts des détails sur les mesures prises par le Gouvernement, précisant que le Ministère de l’éducation a mis en place de nouveaux centres éducatifs pour la minorité rom et qu’il existe un amendement qui interdit de placer des enfants rom dans des «écoles spécialisées» sans l’accord des parents, disposition jugée toutefois insuffisante par les experts.
Les experts se sont par ailleurs inquiétés du nombre élevé de personnes détenues avant le jugement ainsi que du droit conféré à la police de recourir à des détentions de court terme, par exemple de douze heures, pendant lesquelles les victimes n’ont ni le droit d’informer leurs familles ni celui de recourir à un avocat.  La police a également été stigmatisée eu égard au nombre très élevé de dérapages et brutalités, là encore très souvent au détriment des minorités en général et des Rom en particulier, puisque, selon un des experts citant les statistiques fournies par une ONG locale, 70% des plaintes déposées émanent de ces derniers alors qu’ils ne représentent que 7% de la population dans un pays qui ne prévoit pas de loi antidiscrimination.  Or les experts se sont étonnés que moins de la moitié des plaintes déposées pour brutalités policières donne effectivement lieu à l’ouverture d’une procédure pénale, les procureurs jugeant généralement les preuves des plaignants insuffisantes.  A cet égard, récapitulant les commentaires, le Président du Comité, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, expert indien, a demandé au Gouvernement hongrois d’instituer une autorité indépendante chargée de surveiller les agissements de la police.
Le Comité se réunira à nouveau en séance publique lundi 25 mars à 15 heures.

EXAMEN DU QUATRIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE LA HONGRIE
Rapport (CCPR/C/HUN/2000/4)
Ce rapport vise essentiellement à décrire, d’une part, les nouvelles institutions qui ont été créées en vue de renforcer la démocratie et, d’autre part, à donner un aperçu complet des pratiques et méthodes de travail des autorités hongroises ainsi que des résultats obtenus.  Aux termes de l’article 70 de la Constitution, la Hongrie assure à toute personne séjournant sur son territoire les droits de l’homme et les droits civils, sans discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l’opinion politique ou autre, l’origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.  L’article 5 du Code du travail interdit toute discrimination entre employés fondée sur le sexe, l’âge, la nationalité, la race, l’origine, la religion, l’opinion politique, l’appartenance à une organisation représentant les intérêts des employés ou les activités s’y rapportant ou sur tout autre motif sans relation avec l’emploi.  Selon l’article 75 de ce même Code, les femmes et les mineurs ne peuvent être affectés à des tâches qui peuvent être nuisibles à leur état physique ou à leur développement.
En matière de droit d’asile, la loi du 1er mars 1998 stipule que les personnes originaires de pays non européens peuvent aussi demander le statut de réfugié aux autorités hongroises.
Lorsqu’il a examiné le troisième rapport périodique de la Hongrie en 1993, le Comité des droits de l’homme s’est dit préoccupé par le fait que la Constitution et la législation interne hongroises n’incorporaient pas tous les énoncés dans le Pacte et que son statut dans le système juridique hongrois n’était pas clairement défini.  Or, en 1990, lors de la signature de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, l’Assemblée nationale a adopté une résolution selon laquelle la Convention ne pouvait être ratifiée qu’après un examen systématique de l’ordre et de la pratique juridiques hongroises destiné à vérifier leur compatibilité avec la Convention.  A cet effet, une commission gouvernementale a été constituée et a procédé, pendant dix-huit mois de travail acharné, à l’examen de la totalité juridique concernée.  La portée de l’étude a été élargie aux observations générales du Comité des droits de l’homme, aux décisions prises par le Comité au sujet des communications qui lui étaient présentées en vertu du Protocole facultatif, ainsi qu’à la pratique juridique de la Commission de la Cour européenne des droits de l’homme, de même qu’au texte du Pacte.  Sur la base de l’étude de compatibilité, la Commission a demandé que des modifications substantielles soient apportées à treize lois.  Par conséquent, la Cour constitutionnelle peut à présent déclarer nul un texte de loi hongrois qui est contraire à un traité international tel que le Pacte.
Il existe en outre six lois qui prévoient l’indemnisation financière des victimes de violations des droits de l’homme.  Une commission parlementaire a également été créée pour pallier les lacunes des mécanismes d’autocontrôle du pouvoir de l’Etat, compléter les garanties servant à protéger les droits constitutionnels et renforcer le rôle de supervision du Parlement.
Le rapport indique aussi que la Cour constitutionnelle a déclaré que la peine capitale était anticonstitutionnelle et, depuis la présentation du précédent rapport, la Hongrie a ratifié la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou des traitements inhumains ou dégradants.

La loi hongroise attribue également aux tribunaux compétence pour ordonner le traitement médical dans un établissement psychiatrique.  Par ailleurs, des progrès notables ont été faits dans le domaine des garanties dont disposent les personnes privées de leur liberté, notamment par l’existence d’une nouvelle législation régissant la durée de la détention.  Les enquêtes menées par le ministère public montrent, quant à elles, que dans les établissements de détention, la dignité des détenus est généralement respectée.
Le rapport précise que la loi de 1993 sur l’entrée, le séjour en Hongrie, et l’immigration garantit à ces derniers la liberté de circulation sur le territoire hongrois.
La loi de 1997 sur l’organisation et l’administration des tribunaux a supprimé la Cour suprême en tant qu’entité administrative distincte ainsi que le pouvoir administratif qu’exerçait l’exécutif sur le judiciaire.
Trois nouvelles lois garantissant la liberté de conscience et de religion ont été adoptées et, dans le domaine des médias, une loi a été promulguée sur la radio-télévision qui assure la diversité de l’information et la liberté d’expression.  Le Code du travail assure la protection des responsables syndicaux alors que la Constitution protège les institutions du mariage et de la famille.  Le rapport souligne également que le Code pénal sanctionne les interruptions de grossesse provoquées ou illégales.

Présentation et réponses de l'Etat partie
M. LIPÔT HÖLTZL, Secrétaire adjoint, Ministère de la justice, a indiqué que le système de protection internationale des droits de l’homme constitue la base de la politique des droits de l’homme en Hongrie.  Cette dernière a quasiment ratifié tous les instruments de protection des droits de l’homme et participe aux travaux préparatoires d’élaboration de nouveaux instruments.  Le représentant a en outre noté que le 25ème anniversaire de l’entrée en vigueur du Pacte international relatif aux droits civils et politiques a été célébré en Hongrie l’année dernière et a insisté sur le fait que le Gouvernement de la Hongrie est toujours prêt à collaborer avec le Comité des droits de l’homme.
Certains changements significatifs ont été introduits dans le système juridique hongrois.  Les institutions démocratiques se sont affermies et fonctionnent bien, notamment en ce qui concerne la Cour constitutionnelle.  Un nouveau corpus de lois a en outre été promulgué l’an dernier et la Hongrie travaille actuellement à la rédaction de nouveaux textes qui régiront la Cour pénale.  La perspective essentielle du changement législatif concerne le renforcement des droits des minorités et en particulier des Rom.  A cet égard, un plan d’action à moyen terme a été voté par le Parlement en 1999.
La Hongrie se prépare également à l’entrée dans l’Union européenne et, à cette fin, tente d’adapter son système juridique aux normes européennes.  Enfin, le représentant a ajouté que la Hongrie a fait tout son possible pour prendre les mesures nécessaires de lutte contre le terrorisme tout en protégeant les droits de l’homme.

A plusieurs reprises, a expliqué le Chef de la délégation hongroise, la Cour constitutionnelle a conclu qu’il y avait une incompatibilité entre la législation nationale et le Pacte.  Le Pacte constituant une référence importante, il s’agit de voir s’il y a lieu de modifier éventuellement la Constitution, comme ce fut le cas pour la partie concernant les droits de l’homme fondamentaux.  Le représentant a ainsi cité l’exemple des articles sur les minorités, qui contrevenaient aux dispositions du Pacte et ont été corrigées.  La Cour a également relevé l’absence de dispositions sur les grâces et les remises de peine (Art.9 du Pacte) et cette disposition manquante a été introduite le 1er mars 2000.
Il a ensuite répondu à une question portant sur la restriction des droits en cas d’état d’urgence: cette disposition est prévue mais exclut les droits fondamentaux qu’il a énumérés: droit à la vie et à la dignité, interdiction de la torture, des traitements cruels et des expérimentations scientifiques sans consentement, droit à la liberté de la personne, respect du principe d’innocence et de la présomption d’innocence, droit à la défense et à recourir à la loi et aux tribunaux avant d’être condamné, liberté de conscience et de religion, égalité homme/femme dans tous les domaines, droit des minorités nationales et ethniques et enfin, droit à la citoyenneté.  IL a ensuite cité les restrictions applicables dans ce type de situation, indiquant que la mise en oeuvre de ces restrictions était réglementée par un Acte unique: la presse et les médias doivent être contrôlés et censurés; la radio et la télévision sont surveillées; restriction à la liberté de mouvement notamment par l’imposition du couvre-feu; restriction ou interdiction du passage des frontières; introduction d’une justice militaire avec limitation du droit d’appel.  Mais, a insisté le représentant, toutes ces restrictions sont compatibles avec le Pacte.
Concernant les minorités, en particulier la minorité rom, la Constitution leur garantit l’emploi de leur langue, y compris à l’école, et la préservation de la culture.  La loi, unique dans le cadre européen selon le représentant, garantit leurs droits individuels et collectifs, y compris le droit à l’autogouvernance; elle leur assure le droit d’établir une administration autonome, au plan local et national, et si ces droits ont été violés les minorités peuvent recourir à tous les moyens juridiques nationaux existants, auprès du Parlement, des tribunaux, de l’Ombudsman (ou Médiateur) dédié aux droits des minorités.  Ce dernier surveille le respect des droits de minorités et reçoit les plaintes éventuelles, les citoyens pouvant s’adresser au Médiateur quand ils jugent que leurs droits constitutionnels ont été violés ou l’exercice de ces droits mis en danger.  Il a par ailleurs indiqué qu’en 2001, le Ministère de la justice a versé 3,150 millions de florins et 20 millions sont prévus pour 2002, au profit d’un réseau d’ONG défendant les droits de la minorité rom, la conseillant et lui donnant notamment accès gratuit à un avocat.
Le représentant a précisé que le Ministère de l’éducation a mis en place de nouveaux centres éducatifs pour la minorité rom.  Afin d’augmenter la proportion d’enfants rom scolarisés, l’Office pour les minorités ethniques et nationales organise des cours de formation pour que la minorité rom profite pleinement des droits qui lui sont consacrés dans la législation.  Il existe en outre un amendement qui exclut de placer des enfants rom dans des écoles spécialisées sans l’accord des parents. Un système garantissant la qualité de programmes d’éducation efficaces et utiles pour la minorité rom a également été introduit et des bourses sont disponibles pour payer les frais scolaires des étudiants rom.

En ce qui concerne les violences racistes à l’encontre des étrangers, le représentant a indiqué qu’au titre du Code pénal, l’usage de la violence est interdit.  Une nouvelle partie de la loi de procédure pénale offre en outre la possibilité aux victimes d’entamer une action.  Les délits des policiers sont, quant à eux, en diminution.
En matière de protection des informations sur l’appartenance à un groupe ethnique, le représentant a indiqué que selon la loi relative à cette question, le droit des autorités est restreint.  En effet, elles ne peuvent recueillir des informations que si le citoyen concerné en est d’accord.  Il a ajouté que 12 minorités ethniques et une minorité nationale participent au Parlement mais qu’aucun Rom n’a actuellement de mandat.  C’est pourquoi, en vue des élections de 2002, un accord avec la plus grande des organisations rom a été passé afin que la liste nationale fasse figurer des politiciens rom.  Il y a en outre deux maires et dix maires adjoints rom.
M. Höltzl a reconnu que les femmes restaient sous-représentées dans la vie politique, notamment au Parlement et au Gouvernement qui compte une seule femme Ministre -à la Justice- mais noté qu’il n’existait pourtant aucun obstacle officiel à leur participation.  Concernant la violence à l’encontre des femmes, il a indiqué qu’elles constituaient 30 % des victimes des cas enregistrés chaque année.  En 2000, 26% des meurtres, soit 90 au total et 295 cas de coups et blessures ont été perpétrés par le conjoint, selon les statistiques officielles.
M. KAROLY BARD, expert indépendant et juriste, membre de la délégation de l'Etat partie a ensuite pris la parole pour expliquer qu’en vertu de la loi, les preuves obtenues par l’emploi de la force ou de la violence étaient rejetées.  S’il y a eu même menace, le policier peut être condamné à 5 ans de prison maximum.  Pour les mauvais traitements au cours d’une procédure officielle (punissable d’une peine maximale de deux ans), il y a eu 700 à 800 plaintes déposées par an au cours des dernières années mais il a relevé que souvent les enquêtes avaient été refusées: afin d’empêcher des poursuites non fondées, la loi établit en effet des normes élevées pour lancer une enquête de ce type.  Toutefois, le Procureur général a enquêté sur la question en 1998: ceci a montré que dans 50 % des cas, le Procureur avait refusé l’enquête mais avait généralement, auparavant, tenté d’obtenir un complément d’information.  Dans la grande majorité des cas, le rejet de la plainte pouvait donc selon lui s’expliquer par le fait qu’il n’y avait pas de soupçon raisonnablement fondé.  Dans 20 % des cas toutefois, la décision du Procureur de classer la plainte a été invalidée.  M. Bard a reconnu qu’il était nécessaire d’améliorer les capacités d’enquête des procureurs et le contrôle de la police.  Il a également indiqué qu’il n’y avait pas de limite absolue à la détention avant jugement.  Cette notion doit être introduite dans le nouveau code de procédure pénale en cours d’élaboration, avec une limite à trois ans prolongée par le tribunal de trois mois en trois mois au-delà d’un an.
M. HÖLTZL a repris la parole pour reconnaître que la Hongrie connaissait une surpopulation carcérale, avec un taux d’utilisation atteignant 159 % des capacités en 2001.  Il a également reconnu que la majorité des installations pénitentiaires devaient être rénovées et indiqué qu’un programme de construction et de modernisation avait été adopté mais nécessitait de nouvelles ressources.  Quant aux demandeurs d’asile ou étrangers en situation illégale et placés dans des centres de détention ou d’accueil, l’ombudsman avait critiqué en 1999 devant le Parlement les conditions d’hébergement et de nouveaux centres ont commencé à être construits ainsi que des centres communautaires pour les réfugiés, dont l’expulsion a été interdite.
 
Questions des experts
M. MAXWELL YALDEN, expert du Canada, a regretté l’absence de loi généralisée antidiscriminatoire et a suggéré la mise en place de mesures exécutoires allant au-delà des structures des ombudsmans.  Il a en outre souhaité que davantage d’efforts soient déployés en faveur de l’amélioration des conditions de vie quotidienne de la communauté rom et a fait remarquer que 71% des plaintes déposées auprès du Commissaire parlementaire pour les droits des minorités et ethniques émanent de Rom alors qu’ils ne représentent que 7% de la population.
Poursuivant sur le problème posé par la discrimination à l’encontre des Rom, M. ECKART KLEIN, expert de l’Allemagne, a estimé que trop de mauvais traitements leur sont infligés par la police.  Les Rom semblent en outre être plus vite soumis à arrestation avant le procès.  Un nombre trop élevé d’arrestations sommaires sont effectuées dans des conditions humiliantes sans réparation digne de ce nom.  M. MARTIN SCHEININ, expert de la Finlande, a évoqué la discrimination contre les Rom touchant à l’éducation publique: il a jugé insuffisant l’argument selon lequel le consentement des parents était obligatoire pour placer ces enfants en école spécialisée.  A propos de l’autonomie des minorités, il a loué le développement d’institutions autonomes, mais il a rappelé que la position du Comité était l’établissement de critères précis pour savoir qui appartient à une minorité ou non et qu’il avait contesté le principe de libre identification en vigueur en Hongrie.  Aussi a-t-il demandé si le Gouvernement avait pensé introduire des critères d’identification.
En ce qui concerne la population carcérale, M. YALDEN, tout comme M. KLEIN, ont souhaité connaître le pourcentage de détenus avant leur procès.  M. AHMED TWAFIK KHALIL, expert de l’Egypte, a pour sa part demandé en quel nom la police est autorisée à recourir aux détentions de court terme pendant lesquelles les victimes n’ont ni le droit d’informer leurs familles ni celui de recourir à un avocat.  M. DAVID KRETZMER, expert d’Israël, à propos des mauvais traitements et abus de la part de la police, a demandé s’il y avait d’autres procédures que celles pénales pour examiner les plaintes.  En effet, si les procureurs sont indépendants, a-t-il noté, compte tenu de l’héritage du passé, il est difficile à la population de leur faire confiance dans ce genre d’affaires d’où, selon lui, le nombre élevé de victimes qui ne portent pas plainte.  Il a en outre demandé quelles sont les preuves qui peuvent être produites dans ces affaires de brutalités policières.
M. PATRICK VELLA, expert de Malte, a demandé sur quels critères sont nommés les juges et qui peut les révoquer.  Citant le paragraphe 243 du rapport concernant l’évaluation du travail des juges tous les six ans, il a demandé quel était le type d’évaluations effectuées, par qui elles étaient faites, sur quels critères et ce que le juge pouvait en dire.  En ce qui concerne les droits de l’accusé, il a également demandé si le tribunal a l’obligation d’informer l’accusé de ses droits, de lui fournir un interprète et s’il revient au tribunal de fournir un avocat gratuit.
L’expert de l’Argentine, M. HIPOLITO SOLARI Yrigoyen, s’est inquiété de la place du Pacte dans le cadre juridique du pays.  Par ailleurs, il a regretté que les dispositions constitutionnelles proclamant l’égalité de statut des minorités et surtout des Rom soit plus un souhait qu’une réalité, au vu des statistiques.  Aussi, l’expert a-t-il demandé à la délégation d’exposer les mesures envisagées pour remédier à la situation ainsi que des éclaircissements sur ces écoles spéciales où sont envoyés les enfants rom et s’est interrogé sur l’absence de lois antidiscrimination.  Pour être membre d’une minorité reconnue par la loi faut-il avoir vécu un siècle sans discontinuer en Hongrie, a-t-il également demandé.
M. NISUKE Ando, expert du Japon, a rappelé que lors de l’examen du dernier rapport précédent, le Comité s’était inquiété de l’absence de tribunal administratif.  Qu’en est-il de son établissement, évoqué à l’époque dans le cadre d’une loi alors en cours d’élaboration?  Il a par ailleurs noté que plus de la moitié des avortements légaux étaient le fait de femmes mariées et a demandé si le Gouvernement avait pris des mesures pour promouvoir la contraception.  Mme CECILIA Medina Quiroga, experte du Chili, s’est jointe aux questions sur les Rom et la détention préventive et les lacunes de la planification familiale.
Sir NIGEL Rodley, expert du Royaume-Uni, comme M. KRETZMER, a demandé si la détention de court terme, de 12 heures, peut être déduite de la période de 72 heures de garde à vue.  Quel est le droit d’accès à la personne, qu’en est-il des contacts avec l’avocat pendant cette période?  Peut-on vraiment prolonger pendant trois ans la détention dans les locaux de la police, comme l’indique la loi adoptée il y a trois ans, alors que la nouvelle loi devrait la limiter à deux mois.  Selon Sir Nigel, la loi ouvre la porte à toutes sortes d’abus, surtout en ce qui concerne les pauvres.
L’expert américain, M. LOUIS HENKIN est revenu sur le sort des Rom en demandant ce qui avait été fait pour sensibiliser les membres de la police et les fonctionnaires à cette question.  A propos du terrorisme, dont il n’avait pas été question dans les précédents rapports, il a demandé ce que la Hongrie avait fait depuis les événements du 11 septembre.  Enfin, M. IVAN SHEARER, expert australien, a évoqué une loi de 1999, la loi antimafia, qui concerne le crime organisé et qui est invoquée dans les cas de prostitution: selon un rapport établi par quatre ONG, elle suppose des temps de détention assez longs.  Il a alors demandé à la délégation d’en préciser le contenu.
Répondant aux questions des experts, le chef de la délégation de Hongrie, M. HÖLTZL, a reconnu qu’il n’y avait pas de législation unique antidiscrimination, car la Cour constitutionnelle a estimé qu’elle ne constituerait pas une panacée pour répondre au problème.  Pour améliorer la situation et mieux protéger les Rom d’actes discriminatoires, il a rappelé que des mesures avaient été adoptées en 1999: il s’agissait un Plan d’action à moyen terme, très complet, touchant à tous les aspects de la vie des Rom dont l’éducation et la santé.  Parallèlement, a dit le Chef de la délégation hongroise, le Gouvernement prévoit une action à plus long terme, une dizaine d’années, l’objectif étant de faire passer une loi au Parlement.
      Le représentant de la Hongrie a expliqué qu’en matière de parité, le système de quotas pour promouvoir une meilleure participation des femmes à la vie publique a échoué en Hongrie et ne serait donc pas réintroduit.  Les prisons sont, selon le représentant, conformes aux normes internationalement reconnues, malgré la surpopulation.  Il a en outre assuré qu’en cas d’état d’urgence, l’accès au tribunal est assuré.  En matière de lutte contre le terrorisme, le représentant a précisé qu’une nouvelle législation permet à présent au Gouvernement de prendre certaines mesures d’ordre financier.  Ces restrictions ne peuvent être cependant appliquées que sur la base d’une demande émise par une institution internationale.  Une autre modification concerne l’élargissement de la responsabilité pénale au cas de soutien à des activités terroristes.
A propos de la concentration très forte de Rom dans le système carcéral, le représentant a indiqué qu’il est difficile pour les autorités de fournir des statistiques car il est interdit de constituer des dossiers sur l’origine ethnique de personnes incarcérées.

M. HÖLTZL a ensuite expliqué, quant à la formation des juges, que depuis le 1er octobre 1998, les candidats doivent passer un test de connaissances et un examen médical et psychologique dans le cadre d’un concours ouvert, organisé par le Conseil national de Justice.  Ce n’est qu’après un premier mandat de trois ans qu’un juge reçoit sa nomination définitive; c’est ce même qui Conseil qui prend éventuellement des sanctions contre les magistrats.
Concernant les écoles spéciales pour les enfants rom, il a expliqué qu’à l’origine ce système avait pour but d’aider les enfants et d’accélérer leur éducation dans la mesure où faute d’avoir suivi les cours de maternelle, ils étaient en retard par rapport aux autres.  La communauté rom a considéré qu’il s’agissait d’une ségrégation et l’approbation de ces derniers a été requise pour les enfants réellement en retard.  A propos de la procédure d’auto-identification des minorités, M. Höltzl a reconnu qu’elle laissait la porte ouverte à «l’effet coucou» (c’est à dire à la revendication abusive d’une appartenance à une minorité), mais qu’il n’était pas question d’y renoncer dans la mesure où cette procédure correspond au droit fondamental en Hongrie de se revendiquer d’une minorité ou d’une autre.
M. BARD, au sujet des défenseurs publics, a reconnu qu’il faut améliorer les résultats des avocats nommés d’office.  En matière de droit à la défense, le droit hongrois stipule que tout à chacun a le droit d’avoir un avocat.  Il y a des cas où la défense est obligatoire, notamment si l’accusé est un mineur ou un aliéné mental.
En ce qui concerne la place du Pacte dans l’ordre juridique hongrois, M. HÖLTZL a indiqué que le Pacte est directement applicable.  Au titre du droit hongrois, les minorités ne sont en effet que celles dont les membres ont vécu au moins pendant au moins cent ans sur le territoire hongrois.  Il y a cependant d’autres minorités qui peuvent demander à être reconnues et cette condition spéciale leur permet de former leur propre gouvernement.

Le délégué hongrois a expliqué que les dispositions du Pacte ont joué un rôle important dans le dispositif législatif hongrois.  A propos des tribunaux administratifs, une proposition visant à en créer n’ayant pas été retenue, les cas qui en relèveraient sont traités par les tribunaux civils.  En réponse aux questions sur l’avortement, il a expliqué qu’il s’agissait d’une possibilité mais reconnu que les dispositions de la loi rendaient en fait cette pratique très difficile.  A propos de la loi antimafia, elle vise, a-t-il dit, à lutter contre le crime organisé et contre la prostitution dans la rue et nécessitera d’être revue.  Le délégué a ensuite assuré que les questions orales auxquelles il n’avait pas répondu recevraient des réponses lors de la présentation de son prochain rapport par la Hongrie.
Puis M. Höltzl a repris ses réponses aux questions écrites posées par les experts, dont une concernait le statut des homosexuels: il a assuré que la Hongrie interdisait la discrimination pour orientation sexuelle.  Des compensations sont prévues en cas de violation, a-t-il souligné, ajoutant que les mariages homosexuels bénéficiaient théoriquement des mêmes droits que les mariages homme/femme.

A propos de la liberté d’opinion et d’expression et du droit de recevoir des informations, M. Höltzl a assuré que son pays les respectait à travers les médias: une clause lève en outre toute restriction sur les médias électroniques.  L’indépendance des radios et télévisions  est assurée et une loi empêche notamment les partis politiques d’avoir toute influence sur ces médias.  Par ailleurs, il a évoqué la loi sur les secrets officiels, qui ne concerne que le domaine public, dont elle définit le classement pour en préciser les conditions d’accès.  Aux termes de cette loi, un ombudsman classe ces informations, l’idée étant de ne garder secrètes qu’un minimum d’informations.
Enfin, le Chef de la délégation hongroise a indiqué qu’après la présentation du 3ème rapport devant le Comité, ses conclusions avaient été diffusées notamment sur internet et qu’il en irait de même pour ce rapport.  En outre, les élèves et les étudiants en droit ou étudiants des écoles de police reçoivent une éducation et une sensibilisation aux droits de l’homme.  Le Pacte, introduit dans la législation hongroise, constitue une part importante de cette dernière et est disponible pour tous, a-t-il assuré.
M. ABDELFATTAH AMOR, expert de la Tunisie, a félicité la Hongrie pour son volontarisme juridique et politique qui peut aboutir à une meilleure promotion des droits de l’homme.  Lorsque la loi hongroise sur la liberté de religion a été adoptée en 1970, elle avait été perçue comme une loi libérale en réaction aux excès qu’avait connus la Hongrie quelque temps auparavant.  Cependant, cette loi a été à l’origine d’abus.  L’expert a donc souhaité obtenir davantage d’informations sur ces abus commis et sur la nouvelle loi en cours d’élaboration qui prévoit, notamment, une définition de la religion.  Il a mis en garde contre une telle démarche, notamment contre le risque d’arbitraire.  De plus, appartient-il à l’Etat de dire ce qu’est une religion lorsqu’il n’a pas à être juge de la conviction ou de la croyance de quiconque?  Il doit se limiter à assurer le respect des manifestations de la croyance.  M. Amor a également voulu savoir pourquoi certains groupes religieux n’ont pas pu être enregistrés.  Enfin, a-t-il demandé, quelles sont les mesures prises pour faire en sorte que l’éducation devienne un facteur de tolérance et de respect.

M. RAFAEL RIVAS POSADA, expert de la Colombie, est revenu sur l’absence de législation antidiscrimination et, concernant les crimes de haine, M. ANDO a de nouveau évoqué la liberté d’expression et ses éventuelles restrictions.  Enfin le Président du Comité, M. PRAFULLACHANDRA NATWARLAL BHAGWATI, expert de l’Inde, a voulu savoir si le Pacte est intégré dans le droit hongrois au point qu’il puisse être invoqué devant un tribunal.
M. HÖLTZL en ce qui concerne la définition de la religion, a précisé qu’il ne s’agissait que de définir la notion de religion dans la mesure où il y a en Hongrie beaucoup de sectes.  Le Pacte peut en outre être invoqué devant les tribunaux.
Résumant les commentaires des experts, le Président du Comité, M. BHAGWATI a félicité la délégation hongroise pour les compléments d’information apportés en termes statistiques notamment.  Les questions posées font voir clairement que la Hongrie a fait des progrès remarquables dans le renforcement des droits de l’homme.  Après le troisième rapport, des mesures ont été prises mais la production de lois ne suffit pas.  Il faut aussi les mettre en œuvre.  Il y a des points positifs qui ont été cités comme la création d’administrations autonomes pour les minorités et le fait que certains délits ne peuvent plus être sanctionnés par des décisions administratives.  Le statut du Pacte doit néanmoins être revu afin que les dispositions antidiscrimination, en particulier, soient effectivement applicables devant les tribunaux.  La lutte contre le terrorisme ne doit en outre pas faire oublier la nécessité de défendre des droits de l’homme.  En ce qui concerne les mauvais traitements pratiqués par des agents chargés de faire respecter la loi, le Président a fait remarquer que, dans certains cas, les auteurs ont été traduits mais que les enquêtes semblent lacunaires.  La situation des Rom est aussi très préoccupante en matière, entre autres, de chômage et d’espérance de vie.
 
 
 
  
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