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Communiqués de presse Organes conventionnels

SENSIBLE AUX QUESTIONS DE PARITE HOMME/FEMME, L’OUGANDA DOIT ENCORE ELIMINER SES LOIS DISCRIMINATOIRES, ESTIMENT LES EXPERTS DU CEDAW

09 août 2002



Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
9 août 2002
575et 576èmes séances – matin et après-midi





Engagé sur la voie de la reconstruction économique malgré la persistance de troubles civils dans le Nord et l’Est du pays, l’Ouganda n’est pas encore parvenu à assurer aux femmes la pleine jouissance de leurs droits et libertés fondamentales, ont estimé aujourd’hui les experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW). Ceux-ci ont fortement engagé la Ministre pour la parité entre les sexes, le travail et le développement social de l’Ouganda, Mme Bakoko-Bakoru, à aligner les lois discriminatoires du pays sur la nouvelle Constitution de 1995, qui a été perçue en revanche comme un modèle pour le reste du continent africain.

La Ministre avait présenté ce matin le troisième rapport périodique de son pays qui, en ratifiant en 1985 la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, s’est engagé à présenter tous les quatre ans les mesures prises pour assurer l’épanouissement des femmes dans tous les domaines de la vie

Les experts ont reconnu que l’Ouganda, un des pays les plus pauvres au monde marqué par des années d’instabilité politique, s’était montré sensible aux questions de parité, ce que reflète sa nouvelle Constitution. A travers des actions positives, la proportion de femmes dans les processus de prise de décisions a considérablement augmenté passant de 9 % en 1994 à 39 % aujourd’hui. Le Vice-Président du pays, le Ministre adjoint de la justice, le Vice-Président du Parlement, l’Inspecteur général adjoint de la police sont des femmes. Le Parlement compte 70 femmes députées.

Le taux de mortalité infantile est passé de 122 à 97 décès pour 1 000 naissances vivantes. En 1999, 38% des étudiants au sein des universités publiques étaient des femmes et les programmes d’alphabétisation ont profité à 215 477 femmes depuis 1992. Le taux d’infection par le VIH/sida est passé de 22% il y a dix ans, à 6,1% en 2002.

L’Ouganda n’a toutefois pas répondu à toutes les attentes du Comité, les experts relevant l’absence dans la législation locale des principes «excellents» contenus dans la Constitution, notamment pour ce qui touche à la loi foncière ou aux dispositions régissant les relations matrimoniales. Dans ce domaine, vous avez manqué de volonté politique, a signalé l’experte du Nigéria, Mme Fatima Kwaku. En effet, la polygamie et les mutilations génitales sont encore pratiquées, et la femme ougandaise doit obtenir l’autorisation de son mari pour voyager. Il n’existe pas non plus de dispositions juridiques pour lutter contre le harcèlement sexuel et la violence domestique. De plus, rien n’est prévu pour protéger les femmes victimes de la prostitution.

Les experts ont suggéré à l’Etat partie d’abolir les lois et pratiques discriminatoires et de procéder à une véritable lutte contre les stéréotypes. Car, si en théorie la loi écrite prend le pas sur le droit coutumier, dans la pratique, la vie des femmes est dictée par les traditions, a fait observer l’experte de Cuba, Mme Maria Yolanda Ferrer Gomez.

Le Comité examinera lundi 12 août, à partir de 10 heures, la situation de la femme au Guatemala.


PRÉSENTATION DU TROISIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE L’OUGANDA
Rapport (CEDAW/C/UGA/3)

Ce rapport présente les mesures visant à protéger les droits des femmes et à faire face aux questions d’équité entre les sexes. La nouvelle Constitution de 1995 reconnaît l’égalité entre les sexes devant la loi mais le Gouvernement ougandais travaille encore à incorporer les principes constitutionnels interdisant la discrimination dans sa législation nationale.

Depuis que le Gouvernement ougandais a ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, des mesures ont été prises pour favoriser le progrès et la promotion de la femme dans les domaines politique, social, économique et culturel. Ces mesures comprennent la mise en place d’un dispositif national de promotion de la femme, l’adoption d’une Politique nationale d’équité entre les sexes et d’un Plan national en faveur des femmes, l’inclusion de considérations d’équité entre les sexes dans le manifeste de l’élection présidentielle de 1996, une réforme législative et des actions palliatives dans divers domaines.

La ventilation des statistiques par sexe laisse clairement apparaître un écart entre hommes et femmes dans un certain nombre de domaines, notamment la santé, l’éducation, la prise de décisions, l’emploi, les questions de famille et de logement, la main-d’oeuvre, les incapacités et la pauvreté. Le rapport indique qu’en Ouganda, le Gouvernement et les organisations non gouvernementales (ONG) travaillent ensemble à la promotion de la femme. Les ONG sont en mesure de fournir des données, d’examiner certaines stratégies et de fournir des informations sur les questions d’actualité intéressant les droits de la femme. Le rapport indique également que le Gouvernement ougandais a pris un certain nombre de mesures temporaires visant à accélérer l’égalité de fait entre les hommes et les femmes. La Constitution prévoit notamment la création d’une commission de l’égalité des chances, destinée à donner toute sa signification à l’action palliative en faveur des groupes marginalisés. En adoptant le principe de l’enseignement primaire universel, le Gouvernement prend en charge l’éducation primaire des enfants issus de familles nombreuses.

En ce qui concerne les rôles conférés traditionnellement aux hommes et aux femmes et les stéréotypes en Ouganda, on note certaines caractéristiques communes à toutes les cultures de l’Ouganda qui laissent entrevoir une définition précise des rôles des hommes et des femmes et une tendance à stéréotyper les femmes. Ces phénomènes sont liés aux traditions patriarcales enracinées dans toutes les cultures. Le Gouvernement a, dans ce contexte, adopté une stratégie de sensibilisation aux considérations d’équité entre les sexes destinée à contrer la tendance aux stéréotypes. Certaines initiatives des médias et des ONG tendent à combattre la présentation stéréotypée des femmes.

La situation de conflit armé qui persiste dans le Nord et l’Ouest de l’Ouganda a entraîné la disparition de nombreuses jeunes femmes et jeunes filles dans les régions où se poursuit la lutte armée. Ces victimes sont parfois réduites à l’état d’esclavage sexuel. La loi portant création du Code pénal, chapitre 106 de la législature ougandaise est le principal instrument à utiliser pour combattre le problème de la traite des femmes. Les dispositions de cette loi peuvent s’interpréter comme interdisant toute forme de trafic de femmes, à l’intérieur du pays ou avec l’étranger. S’agissant de leur participation dans la vie politique et publique, les femmes restent encore en moins grand nombre que les hommes aux postes de décisions en Ouganda et, ce, à tous les niveaux: pays, districts, collectivités. Cependant, les campagnes menées et les mesures prises par le Gouvernement et les ONG féminines pour encourager les femmes à se présenter aux élections aux échelons local, régional et national ont eu un certain impact.

La politique du Gouvernement en matière d’éducation n’est pas discriminatoire en ce sens qu’elle offre l’égalité des chances pour les deux sexes. Néanmoins, l’éducation des femmes en Ouganda reste en retard sur celle des hommes. Dans le domaine du travail, les lois et coutumes reconnaissent rarement la valeur du travail des femmes. Celles-ci sont généralement cantonnées dans des travaux ne nécessitant pas de qualification particulière, mal rémunérés, répétitifs et à forte intensité de main-d’oeuvre. Le rapport indique en outre que les femmes sont moins à même d’utiliser les services de santé, même lorsque ceux-ci leur sont offerts. D’une façon générale, en dehors des questions traditionnelles concernant la santé maternelle et infantile, les problèmes de santé spécifiques aux femmes ne sont pas traités comme une grande priorité. De même, pour ce qui est de l’accès des femmes à des prêts bancaires et hypothécaires et autres formes de crédit, la situation reste encore largement défavorable aux femmes.

Les lois sur le mariage, le divorce ou l’héritage restent dépourvues à ce jour de toute considération d’équité entre les sexes. La femme reste en état de subordination. Les mariages polygames sont contractés en vertu du droit coutumier et des lois islamiques. Les propositions du projet de loi sur les rapports au sein de la famille qui tendent à imposer des conditions à la polygamie se heurtent à une farouche résistance.


Présentation par l’Etat partie

Mme ZOE BAKOKO-BAKORU, Ministre pour l’égalité entre les sexes, le travail et le développement social, a indiqué que lorsque son pays a ratifié la Convention, de nombreux obstacles se posaient à la mise en oeuvre de ses dispositions. Le Mouvement de résistance nationale a dû lancer une campagne de reconstruction et de développement s’engageant fermement à garantir le respect des droits de l’homme et le développement socioéconomique. Aujourd’hui, la stratégie de développement repose sur le Plan d’élimination de la pauvreté qui vise à éliminer la pauvreté extrême d’ici à 2017. Les sexospécificités y sont un principe directeur.

A la suite de la restauration de la paix et de conditions de sécurité relatives depuis 15 ans, l’économie à connu une croissance de 6,5 % par an. Le taux de pauvreté extrême est passé de 56% en 1992 à 25 % en 2000. Cette année, la croissance économique a été de 6 % en raison des bonnes performances des secteurs agricole et de la construction.

En 1995, l’Ouganda a promulgué une nouvelle Constitution qui est l’instrument le plus sensible aux sexospécificités. Il a également adopté une Politique nationale sur la parité entre les sexes et un Plan d’action national pour les femmes. Des mesures ont été prises pour renforcer le cadre juridique en vigueur. La loi sur les relations matrimoniales, sur les offenses sexuelles et la loi du travail sont en cours d’évaluation. Un projet de politique nationale sur l’emploi qui contient les dispositions de la Convention de 1995 sur le travail informel des femmes.

A travers des actions positives, la proportion de femmes dans les processus de prise de décisions a considérablement augmenté passant de 16,9 % en 1994 à 39 % aujourd’hui. Le Vice-Président du pays, le Ministre adjoint de la justice, le Vice-Président du Parlement, l’Inspecteur général adjoint de la police sont des femmes. Au niveau local, un nombre important de femmes se trouvent à des postes de prise de décisions. L’action positive du Gouvernement, avec la participation de la société civile, s’est traduite par la fourniture de programmes de formation pour les femmes. L’Association des femmes parlementaires participe à des programmes de formation des femmes parlementaires pour qu’elles disposent des compétences leur permettant d’être des législateurs efficaces qui contribueront à faire adopter des lois sexospécifiques. Il existe un projet pilote de gestion des mesures liées à la sexospécificité.

L’existence d’un mécanisme national de surveillance de l’intégration des sexospécificités a facilité la promotion de la condition de la femme. La mission actuelle du Gouvernement est la transformation et la protection sociale des communautés. Ce programme met l’accent sur les pauvres, les femmes vulnérables et les enfants, les handicapés, les travailleurs et les personnes âgées.

Un Programme d’éducation primaire universelle a été défini afin que chaque enfant puisse bénéficier d’une éducation gratuite. Ce programme a permis à 6,9 millions d’enfants d’aller à l’école en 2001, parmi lesquels 3,37 millions sont des fillettes. Ce programme prévoit également de fournir des ressources supplémentaires aux enfants handicapés. Le secteur de l’éducation est en outre celui qui bénéficie de la plus large part du budget du Gouvernement à hauteur de 26%. En outre, il faut noter qu’en 1999, 38% des étudiants au sein des universités gouvernementales étaient des femmes. Priorité du Gouvernement, l’alphabétisation a profité à 215 477 femmes depuis 1992. De nombreuses organisations de la société civile mettent aussi en place avec succès des programmes d’alphabétisation. De même, le domaine de l’assainissement de l’eau revêt une importance fondamentale dans la mesure où il a un impact direct sur la vie des femmes. Il faut notamment s’efforcer de réduire les distances qu’ont à parcourir les femmes et les enfants pour puiser de l’eau potable.

La Ministre s’est également félicitée du fait que le taux d’infection par le VIH/sida est passé de 22% il y a dix ans à 6,1% en 2002 grâce aux campagnes de sensibilisation, de dépistage volontaire et de prévention de la transmission de la mère à l’enfant. Le Gouvernement de l’Ouganda a en outre répondu à l’appel du CEDAW pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes. Le Code pénal ougandais condamne notamment les violences perpétrées à l’égard des femmes et des enfants. D’autres mesures portant spécifiquement sur la violence domestique contre les femmes et les enfants sont actuellement en cours d’élaboration.

Les femmes ougandaises sont parties prenantes du processus de construction de la paix et de règlement des conflits sous des formes diverses. Elles ont par exemple contribué récemment à dissiper la rébellion dans le Nord-Ouest du pays où des rebelles et leurs commandants ont tué des personnes innocentes. Enfin, la Ministre a fait savoir que la nécessité de générer des documents et des données ventilées par sexe ainsi que la nécessité d’évaluer l’impact des interventions du Gouvernement représentent une priorité du Gouvernement. Toutefois, les attitudes et pratiques traditionnelles restent le principal obstacle à l’instauration de l’égalité entre les sexes en Ouganda.


Dialogue avec les experts

Mme CHARLOTTE ABAKA, experte du Ghana et Présidente du Comité, a félicité le Gouvernement ougandais pour les progrès réalisés au niveau de la participation politique des femmes, relevant que la présidence du Parlement est assurée par une femme.

Mme FATIMA KWAKU, experte du Nigéria, a également félicité le Gouvernement ougandais pour avoir adopté la nouvelle Constitution en 1995 qui est particulièrement sensible aux questions relatives à l’égalité entre les sexes. Ces mesures sont essentielles pour l’Afrique. Elle s’est également réjouie des chiffres officiels positifs, de la politique en matière d’éducation et des mesures de lutte contre le sida qui ont mené à une réduction forte des taux de contamination. Toutefois, dans certains domaines, vous restez loin des attentes du Comité. L’un des domaines lacunaires le plus remarqué est l’absence dans la législation nationale des principes excellents énoncés par la Constitution, notamment pour ce qui touche au droit foncier ou aux régimes matrimoniaux. Dans ce domaine, le Gouvernement ougandais a manqué de volonté politique.

Mme Kwaku a ajouté que la Commission des droits de l’homme contribue aussi à servir la cause des femmes. Elle a souhaité en connaître la composition et les cas de violation des droits des femmes qu’elle aurait eus à traiter. Malgré son interdiction par le droit ougandais, la prostitution gagne du terrain. Envisagez-vous de revoir votre politique en la matière afin de protéger les femmes qui en sont victimes?

Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a jugé que la nouvelle Constitution marque un pas en avant hardi. Toutefois, plusieurs lois ont encore un caractère discriminatoire et elles doivent être amendées dès que possible. Elle a souhaité connaître le calendrier du Plan d’action pour les femmes.

Mme MARIA YOLANDA FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a relevé que la nouvelle Constitution exprime la volonté du Gouvernement de faire appliquer les dispositions de la Convention tout en soulignant l’importance de la complémentarité des lois et des mécanismes d’application. Elle a relevé que si, en théorie, la loi écrite prend le pas sur le droit coutumier, dans la pratique, la vie des femmes est dictée par les traditions. Les femmes sont encore à la traîne en matière de santé, d’emploi, d’éducation. C’est la raison pour laquelle, la lutte contre les stéréotypes doit figurer parmi les priorités du Gouvernement. Ces préjugés se retrouvent parmi les magistrats qui négligent les cas de violence sexuelle par exemple. Il faut faire un travail de sensibilisation dans les communautés locales. La violence dans les foyers est importante mais les lois ne s’y réfèrent pas. Des pratiques comme les mutilations génitales existent encore. Quelles sont les mesures que compte prendre le Gouvernement pour mettre fin à ces pratiques?

Mme HANNA BEATE SCHOPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a demandé comment la perspective sexospécifique a été intégrée au travail des différents ministères. Existe-t-il en outre un calendrier visant à supprimer les dispositions discriminatoires qui existent toujours dans la législation? S’agissant des mesures temporaires spéciales, elle a voulu savoir si elles se sont heurtées à une résistance de la part des hommes. Est-ce que les mesures, qui expliquent au public que les femmes bénéficiant d’un traitement préférentiel dans le domaine de l’éducation ne sont pas plus stupides que les autres, ont-elles été mises en oeuvre? Quel est le statut de la Convention des droits de l’homme dans le statut juridique de l’Ouganda?

Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a demandé si les femmes sont considérées sur un pied d’égalité en ce qui concerne la propriété foncière.

Mme BAKOKO-BAKORU a fait savoir que l’intégration de mesures en faveur de la parité entre les sexes a très souvent rencontré une résistance de la part des hommes. Cependant, des associations de femmes parlementaires, avant qu’une question ne soit débattue au Parlement, tiennent des réunions, s’adressent aux assemblées de districts ainsi qu’aux membres masculins du Parlement. Il faut en effet que les personnes soient éduquées avant que la question ne soit débattue. Les femmes doivent donc mener un travail de plaidoyer. La question est de savoir comment les femmes ougandaises peuvent réunir leurs forces et harmoniser leurs efforts pour que les parlementaires soient à l’écoute de leurs problèmes lors de l’adoption de lois, notamment en ce qui concerne la propriété foncière.

La Ministre a en outre fait savoir qu’elle n’était pas en mesure d’indiquer le nombre de femmes membres de la Commission des droits de l’homme mais a précisé que son Président était une femme. Le microfinancement n’est en outre plus considéré comme un don ou une aumône publique depuis la mise en oeuvre d’une nouvelle politique qui permet de le gérer plus efficacement. S’agissant de la prostitution, Mme Bakoko-Bakoru a fait observer que les efforts du Gouvernement visant à réduire l’incidence du VIH/sida soulignent sa réaction positive à l’égard des populations à risque auxquelles appartiennent les prostituées. Malheureusement à ce jour, il n’existe pas de loi qui garantisse une protection aux prostituées. Nous savons cependant qu’elles existent et nous disposons de programmes destinés à les sensibiliser à une protection vigilante.

Un programme réussi en matière de mutilation sexuelle a été mené grâce à des fonds du FNUAP mais, faute de financement régulier, il a été interrompu. La Ministre a également indiqué que la tradition exige que les femmes s’abstiennent de dénoncer leur conjoint en matière de violence domestique; cependant, de plus en plus de femmes se mobilisent contre ces pratiques. C’est pourquoi, il est nécessaire de renforcer les lois dans ce domaine. Venir à bout de la pauvreté suppose l’instauration de la paix dans les pays voisins, notamment pour que notre pays puisse exporter ses produits.

Mme BAKOKO-BAKORU a convenu qu’il existe des lois discriminatoires comme celle sur la propriété foncière et celle régissant les relations matrimoniales. L’accès à la justice des personnes les plus pauvres est un de nos domaines d’action prioritaire. Nous disposons pour cela des services d’une association de femmes avocates qui fournissent une assistance judiciaire aux femmes. Nous
diffusons l’idée que la justice est un droit et non un privilège. Les femmes peuvent être propriétaires de biens immobiliers et l’absence de titre de propriété ne les empêche pas d’obtenir un crédit. La question débattue actuellement est de savoir si la femme peut être copropriétaire avec son mari. Nous avons besoin de lois pour protéger les droits des femmes dans ce domaine et, pour cela, nous devons exercer une influence sur les législateurs.

Mme AYSE FERIDE ACAR, experte de la Turquie, s’est dite préoccupée par les raisons invoquées par l’Etat partie pour ne pas adopter de lois domestiques non discriminatoires sous prétexte qu’elles menacent l’institution familiale. Cela revient à dire que le respect des droits de la femme irait à l’encontre du maintien de la cellule familiale. En fait, les sociétés qui consacrent les droits fondamentaux de la femme constituent la meilleure protection de l’institution familiale. Est-ce que les lois sur la violence domestique entraînent également la désintégration de l’institution familiale?. Recevez-vous une contribution de la part des dirigeants religieux lors de l’adoption des lois sur la famille?

Mme IVANKA CORTI, experte de l’Italie, a constaté que le phénomène de la prostitution augmente sans que des mesures suffisantes soient mises en place pour celles qui veulent y renoncer.

Mme FRANCES LIVINGSTON RADAY, experte d’Israël, a adressé des éloges à l’Etat partie pour les dispositions de l’article 33 de sa Constitution qui prévoient l’annulation de pratiques qui vont à l’encontre de la dignité de la femme. Toutefois, des inégalités subsistent dans la législation sur les relations matrimoniales. Ainsi, la polygamie est encore pratiquée et les femmes doivent obtenir l’autorisation du mari pour voyager. Comment l’Etat partie prévoit-il d’abolir les lois contraires à la Constitution et au bien-être et à la dignité des femmes?

Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, a félicité l’Etat partie pour ses réformes importantes de 1995 visant à harmoniser sa législation avec la Convention. L’agenda pour les femmes en Ouganda est cependant inachevé, d’où la nécessité d’un processus juridique permettant de contester les lois discriminatoires.

Mme ROSALYN HAZELLE, experte de Saint-Kitts-et-Nevis, s’est dite préoccupée par le fait que le Gouvernement ne fait rien pour lutter contre l’exploitation des prostituées et contre la loi sur l’immigration qui impute les frais de rapatriement à la femme. Dans le cas contraire, le Gouvernement peut saisir les biens de ces femmes pour rentrer dans ses frais, ce qui ne fait qu’ajouter à leur exploitation, notamment par les trafiquants d’êtres humains.

Mme BAKOKO-BAKORU a indiqué que la Journée de la femme a donné lieu à la tenue de conférences partout dans le pays. Elle a aussi fait savoir que le Gouvernement ne dispose pas de renseignements documentés sur les femmes victimes du trafic mais qu’il mène actuellement des études sur la question. L’éducation juridique existe en Ouganda. Un cours sur les droits de l’homme est dispensé depuis peu à l’intention des juristes. Les conseillers locaux sont également formés à ces questions. Elle a précisé par ailleurs que la polygamie existe en Ouganda et représente le principal obstacle à la réforme du Code de la famille. A cet égard, elle a fait remarquer qu’il n’y pas de mauvaise volonté de la part du Gouvernement mais qu’il faut qu’une loi soit adoptée en la matière.

Mme FATIMA KWAKU, experte du Nigéria, a demandé si les conditions requises pour obtenir la nationalité sont discriminatoires.

Mme CHRISTINE KAPALATA, experte de la République-Unie de Tanzanie, a suggéré à la délégation de l’Ouganda de s’efforcer de mettre en place des mécanismes qui garantissent la permanence des mesures prises en faveur de l’égalité entre les femmes une fois que le Gouvernement actuel aura cédé la place à un autre.

Mme CORTI, experte de l’Italie, a demandé comment le Gouvernement entend mobiliser les femmes pour qu’elles entretiennent les acquis obtenus en leur faveur.

Mme GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, a estimé que la réglementation relative au passeport devait être contestée en vertu de la Constitution. Le Ministère chargé de l’immigration devrait jouer un rôle plus actif à cet égard.

Mme ROSARIO MANALO, experte des Philippines, a suggéré la mise en place d’un programme au sein du Gouvernement pour encourager les femmes à être plus présentes sur la scène internationale.

Répondant aux questions et commentaires formulés par les experts, Mme BAKOKO-BAKORU a précisé que les femmes étaient bien présentes au sein du corps diplomatique. L’Ambassadeur de l’Ouganda auprès du Gouvernement des Etats-Unis est par exemple une femme. Elle a en outre fait savoir qu’elle transmettrait au Ministre des affaires intérieures les recommandations du Comité concernant la question des passeports et le fait que l’époux doive donner son consentement pour que sa femme puisse obtenir ses documents de voyage.

Mme SJAMSIAH ACHMAD, experte de l’Indonésie, a voulu savoir dans quelle mesure le contenu local des enseignements relève des collectivités locales. Comment le Gouvernement veille-t-il à ce que ces contenus contiennent le même souci d’équité entre les sexes?

Mme KWAKU, experte du Nigéria, a demandé si l’Ouganda envisage de rendre gratuits les programmes scolaires du primaire et du secondaire. Elle a également voulu connaître la date d’adoption du projet politique national pour l’emploi. Elle a en outre regretté qu’il n’existe aucune loi sur le harcèlement sexuel en Ouganda.

Mme NAELA GABR, experte de l’Egypte, a signalé que l’éducation constitue un élément essentiel de l’amélioration de la situation de la femme. Sur le chapitre de la santé, l’experte a souhaité plus de détails sur les programmes de soins de santé prévus dans le futur, en particulier dans le domaine de la planification familiale. Pour ce qui est de l’emploi, il existe une volonté politique de faire face aux inégalités. Il vous faut désormais disposer de programmes spécifiques et de politiques claires qui soient dirigés vers l’avenir et qui reposent sur des études scientifiques. C’est la femme qui subit les effets des restructurations économiques d’autant que les réseaux de sécurité sociale ne sont pas mentionnés dans le rapport.

Mme TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a observé que les progrès sont manifestes dans les domaines de l’éducation et de la santé mais il n’en va pas de même dans le secteur de l’emploi. L’experte s’est dite frappée par les inégalités en termes de temps de travail que de repos entre l’homme et la femme. Le tableau général est assez sombre dans ce domaine. Hormis les lois, quels sont les programmes envisagés?

Mme CORTI, experte de l’Italie, relevant que les femmes comptent pour 70 % de la main-d’œuvre agricole qui est un secteur largement informel. Comment envisagez-vous de protéger cette population active qui représente un segment particulièrement vulnérable de la population? Elle a souhaité connaître le salaire des travailleuses tant dans le secteur public que dans le secteur privé. Existe-t-il un salaire minimum garanti?

Mme BAKOKO-BAKORU a expliqué que les réductions du budget de la santé ne vont pas affecter les fonds consacrés à la lutte contre le sida. Nous avons en effet adopté une approche intersectorielle. Tous les ministères ont une composante de lutte contre le VIH/sida. La législation ougandaise ne garantit pas le salaire minimum. En 1989, la planification familiale était de 1,9 % mais, dix ans plus tard, elle s’applique à 38 % des femmes. En dépit de cette évolution, les femmes continuent à avoir sept enfants en moyenne, qu’elles soient éduquées ou pas. Ce n’est pas l’accès aux préservatifs ou aux soins de santé qui en sont la cause mais les croyances. Les femmes pensent qu’elles assurent la sécurité de leur couple en ayant de nombreux enfants. L’avortement est illégal sauf en cas de viol ou lorsque la santé de la mère est en danger. L’enseignement primaire est universel. En ce qui concerne l’éducation, nous devons faire face à une surcharge des classes, le nombre d’enfants scolarisés étant passé de 2 à 6 millions. Le Gouvernement a été mis au défi de construire de nouveaux bâtiments et d’assurer la qualité de l’enseignement. Nous avons connu des situations où nous avions un enseignant pour 100 élèves. Le Gouvernement s’est fixé pour objectif d’assurer l’enseignement secondaire universel. Nous devons également trouver une solution au problème posé par les orphelins du sida. L’Ouganda dispose de structures d’accueil mais pas de prestations à l’intention de ces personnes.

Mme FENG CUI, experte de la Chine, a souhaité des précisions sur l’importance donnée aux zones rurales au sein du Gouvernement. Quelles sont, en outre, les mesures prises pour éliminer les coutumes discriminatoires et favoriser la participation des femmes à la vie politique de ces zones?

Mme ABAKA, experte du Ghana, a incité le Gouvernement ougandais à codifier les coutumes et pratiques traditionnelles des zones rurales afin de rendre plus performante la lutte contre le VIH/sida. Elle a également demandé si l’accès à l’eau potable est gratuit.

Répondant aux questions des experts, Mme BAKOKO-BAKORU a affirmé que l’accès à l’eau potable est gratuit dans les régions rurales mais peut être payant dans la périphérie des villes. Les taux de mortalité dus à des avortements sont trop élevés, a-t-elle estimé. Il faut donc continuer d’éduquer les femmes et les jeunes filles pour en parler ouvertement. Enfin, elle a regretté que les femmes n’aient toujours pas accès au crédit contre des titres de propriété.

Mme TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a regretté l’absence d’une législation séparée sur la violence domestique.

Mme SCHOPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, s’est demandée si le Gouvernement avait l’intention de ratifier le Protocole facultatif à la Convention.

Mme LIVINGSTONE RADAY, experte d’Israël, a évoqué l’écart entre la Constitution et le droit de la famille. La polygamie, les dispositions relatives à l’adultère, la garde des enfants, le viol conjugal sont contraires à la Convention et à l’article 36 de la Constitution. Beaucoup de ces pratiques sont étroitement liées au VIH/sida, les femmes étant davantage victimes de la pandémie en raison de la polygamie et d’autres pratiques. Elle a suggéré au Gouvernement d’abolir la polygamie, ce qui pourrait mener à un amendement du droit familial.

La Ministre de l’Ouganda, Mme BAKOKO-BAKORU, a expliqué que les divergences entre le droit de la famille et la Constitution sont héritées de la période post-coloniale. Nous devons en effet amender nos lois et notre Code pénal. Nous avons ratifié le Protocole facultatif sur les enfants dans les conflits armés et envisagerons dans le futur l’adoption du Protocole facultatif à la Convention.




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