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Communiqués de presse Organes conventionnels

LA GEORGIE DEFEND SON ACTION DEVANT LES EXPERTS DU COMITE DES DROITS DE L’HOMME, PREOCCUPES PAR LES DISCRIMINATIONS A L’EGARD DES MINORITES ET DES RELIGIONS

19 Mars 2002



Comité des droits de l'homme
1987e et 1988e séances - matin et après-midi
19 mars 2002
 
  
Les droits de l’homme ne sont pas un luxe pour les pays riches et stables, mais font au contraire souvent avancer la prospérité, a fait remarquer l’expert australien du Comité des droits de l’homme, M. Ivan Shearer, après que la délégation de Géorgie ait commencé, mardi, de répondre aux nombreuses questions concernant son deuxième rapport périodique.  La délégation géorgienne a en effet fréquemment avancé le manque de ressources, la mauvaise situation économique du pays et une transition difficile du totalitarisme vers la démocratie pour justifier certaines lacunes juridiques relevées par les experts.
 Mme Rusudan Beridze, chef de la délégation, a ainsi expliqué qu’une réforme de l’appareil judiciaire serait entreprise dès que les ressources financières nécessaires seront rassemblées; de même, la mise en œuvre de mesures visant à faire de la Géorgie un pays libre de la torture nécessitera des ressources supplémentaires et une formation spécifique du personnel.  Elle-même et son équipe ont reconnu l’existence de problèmes persistants dans les droits de la défense, la protection des personnes gardées à vue ou placées en détention préventive et ont annoncé un certain nombre d’aménagements à venir.  La représentante a souligné qu’après l’indépendance, son pays avait réaffirmé son engagement en faveur des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.  La représentante a toutefois fait remarquer qu’il reste difficile d’appliquer ces textes en dépit de la réelle volonté politique de construire un Etat fondé sur le respect des droits de l’homme et libertés fondamentales.
 La délégation géorgienne a par ailleurs reconnu une lacune importante de son Code pénal qui a effacé une disposition ancienne relative à la discrimination raciale et religieuse dans ce pays.  Or, l’intolérance religieuse est apparue comme l’une des principales sources de préoccupation des experts: ainsi, pour M. Abdelfattah Amor (Tunisie), les manifestations de haine ou de discrimination envers ceux qui ne sont pas orthodoxes ont constitué "un vrai problème qui, de l’étranger, fait de la Géorgie le pays de l’intolérance religieuse".  D’autres experts ont également relevé la discrimination enregistrée dans les médias et les restrictions à la liberté de la presse.  Tout en cherchant à minimiser l’impact de ces restrictions, la délégation géorgienne a reconnu l’existence d’un problème et s’est engagée à tenir le Comité informé des mesures concrètes qui seront prises en la matière.
En conclusion, le Président du Comité, M.Prafullachandra Natwarlal Bhagwati (Inde), a estimé que l’Etat partie avait réalisé des progrès considérables depuis l’examen de son rapport initial et l’a félicité pour la mise en œuvre des recommandations formulées par le Comité à l’issue de cet examen.  Il a relevé toutefois la persistance de la torture comme l’aspect le plus inquiétant pour la situation des droits de l’homme.
Le Comité des droits de l’homme entamera demain, mercredi 20 mars à 10 heures,  l’examen du cinquième rapport périodique de la Suède. 
EXAMEN DU DEUXIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE LA GÉORGIE
Réponses de l'Etat partie aux questions des experts
Avant de répondre aux questions posées hier par les experts, Mme RUSUDAN BERIDZE, Secrétaire adjointe aux questions des droits de l’homme, Conseil national de sécurité de la Georgie, a fait valoir que son pays avait connu une douloureuse transition entre le totalitarisme et la démocratie, accompagnée de troubles civils.  A un expert qui avait posé la question du rapatriement des peuples du sud déportés par Staline pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a fait valoir qu’il faudrait une douzaine d’années à compter de la promulgation de la loi sur le retour avant que les 300 000 déplacés d’Abkhazie, qui se trouvent en Russie ou en Azerbaïdjan, puissent retrouver leur foyer et leur nationalité géorgienne.
 Concernant la violence faite aux femmes, elle a indiqué que la Commission d’Etat pour la détermination de la politique nationale pour la promotion de la femme, qu’elle préside, a mené de vastes campagnes de sensibilisation à travers le pays et qu’il était toujours difficile d’obtenir des chiffres précis, mais elle a démenti celui de 50 % de femmes touchées, avancé par un expert, le jugeant dérisoire.
 A propos de la corruption des juges, sur laquelle l’avaient interrogé MM. Lallah et Amor et Mme Quiroga: Mme Beridze a assuré qu’une réforme de l’appareil judiciaire serait entreprise dès que les fonds seront rassemblés mais que dès à présent, les juges perçoivent dix fois et les magistrats six fois plus que le salaire moyen du pays.  Certes ces salaires sont catastrophiquement bas mais la situation économique ne permet pas de faire mieux pour le moment.  Enfin, a-t-elle estimé, la corruption n’est pas une seule question de salaire mais de valeurs personnelles et les juges ne sont pas plus concernés que d’autres secteurs de la population.
 Au sujet des remarques concernant les ravages faits par la tuberculose dans les prisons, la représentante a expliqué que le manque de médicaments est une des causes principales de la propagation de la maladie.  C’est pourquoi, la Géorgie a fait appel à la Croix-Rouge pour examiner tous les détenus, élaborer des plans de santé et de distribuer des médicaments.  Les cas d’infection ont baissé à 500 parmi lesquels 380 malades sont en institutions médicales spécialisées.  En outre, si un prisonnier veut consulter un médecin de son choix, il peut le faire immédiatement.
 La représentante a rappelé qu’après l’indépendance, la Géorgie a adhéré aux Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme.  Cependant, il a été et il est toujours difficile d’appliquer ces documents en dépit de l’existence d’une réelle volonté politique de construire un Etat fondé sur le respect des droits humains fondamentaux.  Certains progrès ont cependant été réalisés.
 En matière de prostitution, la représentante a indiqué que des discussions approfondies se tiennent sur légalisation à appliquer en la matière.  Cependant, des contradictions très fortes existent.  Il existe en effet plusieurs centaines de prostituées mais aucun cas de violence policière n’a été relevé et si une femme présente une plainte au tribunal, elle sera protégée par la loi.  Il existe en outre un contrôle médical très sérieux.
En ce qui concerne la question de l’intolérance religieuse, la représentante a rappelé que l’Etat reconnaît le rôle particulier de l’Eglise orthodoxe tout en demeurant laïc et indépendant.  Il n’y a pas de manifestation d’intolérance religieuse même si des problèmes subsistent à l’encontre de confessions particulières.  Il a été question d’une union religieuse mais beaucoup de résistances se sont élevées.  La liberté religieuse fait en outre intégralement partie de la tradition.  Actuellement, le Gouvernement envisage des mesures d’urgence pour assurer la liberté et la qualité du culte et le ministère public prête toute l’attention qu’ils méritent aux délits liés aux croyances religieuses tout en tenant compte de la Constitution.  Le Ministère de la justice a la responsabilité de préparer le projet de loi sur les organisations religieuses.
 Toujours à propos des délits liés à la religion, un certain nombre de ces cas ont été traités et leurs auteurs traduits en justice, mais aucune décision pénale n’a encore été prise.  Au nombre des manifestations de ce type les plus récentes, Mme Beridze a évoqué le cas d’un évêque qui, sur une chaîne de télévision privée, a appelé à la haine religieuse mais qui ne peut être traduit au pénal car le Code pénal ne prévoit rien à cet égard.  Un article sur ce point était contenu dans l’ancien code mais en a été retiré, c’était une erreur, a reconnu la représentante en promettant que cette lacune allait être corrigée.
 Prenant la parole à son tour, un autre représentant de l’Etat partie, M. GEORGE TSKIALASHVILI, Vice-Ministre de la justice, a abordé les nombreuses questions concernant la torture: le représentant a assuré que, contrairement à ce qui avait été dit, une définition de la torture était contenue dans le Code pénal géorgien, article 126, même si elle ne correspond pas à celle de la Convention internationale contre la torture.  Tout acte de torture, s’il a été commis par un officiel de l’Etat, est considéré comme crime avec circonstance aggravante, a-t-il assuré, notant toutefois que la mise en oeuvre du Plan devant faire de la Géorgie un pays libre de la torture nécessitait des ressources, une formation du personnel et une bonne supervision des agences qui font appliquer la loi.
 Il a par ailleurs annoncé qu’à partir du 1er avril, l’examen médical sera obligatoire pour toutes les personnes qui arriveront en détention préventive, après 72 heures dans les locaux de la police.  Le bureau du Procureur général disposera ainsi de tout le matériel nécessaire pour poursuivre des cas éventuels de brutalités policières.  D’ailleurs, a noté le représentant, grâce aux changements intervenus dans les institutions et au sein du personnel, le nombre de cas traduits devant les tribunaux a déjà augmenté de façon très importante.
 L’Etat partie ayant été interrogé par les experts sur le sort de personnes endettées, il a répondu que des sanctions étaient prévues par le Code de procédure civile, ainsi le tribunal peut exiger d’un débiteur qu’il s’engage à ne pas quitter son lieu de résidence et ceci n’est pas compatible avec l’article 11 du Pacte, a reconnu le représentant, soulignant toutefois qu’aucun cas de ce type n’avait été enregistré.  Il en est de même pour les cas de faillites.  En revanche, la législation ne prévoit pas qu’un individu puisse aller en prison parce qu’il n’est pas en mesure de s’acquitter d’une obligation contractuelle.
 Concernant l’aide judiciaire, il a fait valoir qu’elle est prévue par le Code de procédure pénale, (art 78) si la personne n'a pas les moyens de payer un avocat.  Une nouvelle loi de transition promulguée en été 2001 prévoit le statut de la défense jusqu’en juin 2002, date à laquelle un nouveau statut définira l’aide apportée par l’Etat.  Mais restent des problèmes pratiques pour mettre en oeuvre tous ces changements, notamment des problèmes de ressources mais aussi de qualification.
 Répondant aux questions des experts sur les décès enregistrés dans les postes de police, il a rappelé les chiffres récents montrant beaucoup de progrès -en 2001, 31 morts contre 92 en 97-.  La tuberculose reste la première cause de décès, a-t-il dit.  Quant aux autres causes, dans tous les cas de décès, des enquêtes ont été menées par le bureau du Procureur public et il lui revient ensuite de lancer une procédure pénale ou pas, mais en ce cas il doit motiver sa décision.  Cette décision peut être remise en question par les parties intéressées et la décision du Procureur de ne pas ouvrir de procédure peut être contestée dans un délai de dix jours auprès des tribunaux.  Mais il a encore insisté sur le fait qu’aucune enquête n’avait montré l’implication du personnel pénitentiaire dans quelque décès que ce soit.
      En ce qui concerne l’absence de statut d’une personne lors de la première détention de 12 heures avant l’accusation, le représentant a reconnu qu’il existait un vide juridique, la législation ne déterminant pas clairement le statut de la personne et son droit à disposer d’un avocat.  En outre, des abus commis par la police peuvent en effet être perpétrés.  Cependant, le Groupe de travail spécial composé d’autorités judiciaires et de membres du Parlement a entamé l’élaboration d’un nouveau code pénal qui devrait combler ce vide juridique.  Le projet de réforme devrait être présenté au Président dans deux à trois mois.  Le statut du Pacte dans la législation nationale renvoie à l’article 6 de la Constitution qui indique que cette dernière est la loi suprême de l’Etat.  La législation doit être conforme aux accords et traités internationaux si ces derniers ne sont pas contraires à la Constitution.  En outre, les dispositions des accords publiés officiellement ont une application directe en Géorgie s’ils n’exigent pas de modification de la loi.
 En matière d’indépendance de la justice, le représentant a indiqué que le Conseil de la justice a été organisé en 1997 et que cela a représenté une mesure progressive dans le processus de réforme juridique en Géorgie.  Contrairement à ce qui se produisait auparavant, où le pouvoir judiciaire était placé sous le contrôle du pourvoir exécutif, le Conseil est à présent indépendant.  A propos du renvoi des juges et des garanties de leur indépendance, la Géorgie dispose d’une jurisprudence particulière pour ces questions qui reconnaît notamment le non-respect du devoir professionnel.  Le Conseil de la justice doit d’ailleurs participer à la Commission disciplinaire pour le renvoi des juges.  En ce qui concerne le droit des étrangers, le représentant a rappelé qu’il existe une égalité des droits entre les ressortissants géorgiens et les étrangers.  La restriction constitutionnelle ne concerne que l’activité politique des non ressortissants qui doit être conforme aux dispositions contenues dans les pactes internationaux.  En outre, il n’existe pas de restriction pour les personnes détentrices du secret d’Etat.  La tradition soviétique a disparu même s’il existe encore des contradictions.  La nouvelle loi sur le statut des étrangers est en cours de préparation.
Les experts ont à nouveau posé des questions relatives à la liberté de religion et ont demandé en particulier si toutes les Eglises étaient traitées de la même façon que l’Eglise orthodoxe de Géorgie.  A ce sujet, M. HIPOLITO SOLARI YRIGOYEN a cité des problèmes concernant des Témoins de Jéhovah, des membres de l’Eglise baptiste et de l’Eglise catholique.  Il a également demandé comment le pays garantit le respect de l’Article 20 du Pacte prohibant l’incitation à la haine et à la discrimination raciale.  M. ABDELFATTAH AMOR a, quant à lui, fait le constat de l’intolérance religieuse qui secoue depuis longtemps la Géorgie.  Ces manifestations ont fait des victimes parmi tous ceux qui ne sont pas orthodoxes.  De même, une violence intolérable entoure les groupes minoritaires.  Il y a ici un vrai problème qui fait de la Géorgie à l’étranger le pays de l’intolérance religieuse.  En outre, les autorités locales ne font pas preuve de zèle mais ont tendance à laisser faire, voire à s’aligner du côté des extrémistes.  Les autorités pourraient donc faire davantage en termes de prévention de l’intolérance et de la discrimination, notamment dans les écoles.  S’agissant des minorités et des Arméniens en particulier, il s’est interrogé sur des incidents qui semblent avoir été provoqués gratuitement.  En ce qui concerne les cas relatifs à des persécutions contre des religieux qui seront présentés devant des juridictions compétentes le 15 avril 2002, Sir Nigel RODLEY a demandé de préciser les mesures de protection prises contre ceux qui soutiennent les extrémistes et qui prennent d’assaut les tribunaux et en perturbent le fonctionnement.  Quelles seront les actions prises pour veiller à ce que les procès se déroulent dans des conditions justes et équitables ?
 En ce qui concerne les questions électorales, M. AMOR a relevé que les candidatures sont subordonnées à des parrainages: est-il alors possible d’exiger le parrainage tout en affirmant le secret du vote ?  Dans quelle mesure ce dernier est-il préservé quand les personnes ont déjà fait acte d’allégeance envers un parti ou un candidat, a-t-il également demandé.  M. ECKART KLEIN, à propos de la liberté d’expression et des médias, s’est dit très surpris de lire dans le rapport que seuls les Géorgiens ont la liberté de la presse.  Il a aussi demandé dans quelles circonstances un journaliste peut être amené à révéler ses sources et s’il y a un équilibre entre les opinions politiques sur les antennes de télévision et de radio.  Il a également souhaité des précisions sur les procédures suivies dans le pays lorsque le Comité fait des observations.
 M. MAXWELL YALDEN a estimé qu’il était insatisfaisant de se contenter d’indiquer que l’institution de l’ombudsman est bien reçue.  Il a donc souhaité obtenir des détails et des chiffres sur les activités de cette institution.  M. NISUKE ANDO a pour sa part demandé si, dans le cas où des personnes déplacées accédaient au droit de vote dans leur nouveau lieu de résidence, elles perdaient leur statut de déplacés.  M. LOUIS HENKIN a souligné le besoin de protéger les ONG qui jouent un rôle important dans l’Etat de Géorgie.  Il a également demandé quelles ont été les mesures prises pour protéger les enfants des rues et pourquoi le nombre d’orphelins dans les institutions a doublé en un an.  En outre, qu’en est-il de l’avortement et du droit des homosexuels?  M. IVAN SHEARER s’est interrogé, quant à lui, sur la formation des juges.  Est-ce que des programmes de formation suffisent pour préparer les juges à leurs fonctions et à tenir compte des dispositions du Pacte?  Que font en outre les universités pour former aux droits de l’homme? 

Intervenant également, M. DAVID KRETZMER a souligné une contradiction en ce qui concerne le pouvoir du procureur général.  En effet, il a été dit que ce dernier doit s’adresser à un tribunal pour qu’une personne soit arrêtée.  Cependant, le rapport indique qu’une personne peut être placée en garde à vue jusqu’à six mois sur ordre du procureur.  Si l’on en croit le rapport, le procureur général peut donc décider en matière de garde à vue, ce qui constitue, de l’avis de l’expert, un vestige du régime soviétique. 
 M. GEORGE TSKIALASHVILI a par ailleurs détaillé l’institution de l’ombudsman, ou médiateur national, indiquant que ce dernier peut dénoncer les violations des droits de l’homme et faire rapport aux fonctionnaires et organes responsables.  Une loi organique réglemente ses activités, qui a été mise au point avec l’aide d’experts étrangers.  Le défenseur public peut mener des enquêtes indépendantes sur les violations des droits de l'homme à partir de plaintes ou de son propre chef.  Il a accès total à tout établissement de détention, aux documents des tribunaux pour s’assurer du respect des droits de l'homme pendant les procès.  En cas de violation, il a le droit de demander au tribunal de rouvrir l’affaire.  L’ombudsman peut envoyer des rapports spéciaux au Président de la Géorgie et ses recommandations sont suivies scrupuleusement.  Son équipe permanente est composée de 40 personnes, qui opèrent dans l’ensemble du pays, et il a jusqu’à présent reçu 5 000 plaintes par an, qui sont le plus souvent des déclarations de personnes recherchant un conseil juridique à titre gracieux.  Enfin le représentant a annoncé l’ouverture prochaine d’un site web sur les activités de l’ombudsman.
 Concernant l’intégration du Pacte dans la législation nationale, il a jugé que le public n’était pas, faute d’éducation, en mesure d’invoquer les textes relatifs à la protection des droits de l’homme et ne connaissait l’existence que des plus renommés.  Par ailleurs, a-t-il indiqué, la durée de la détention préventive est déterminée par un juge dans des circonstances exceptionnelles et, s’il y a besoin de prolongation, sur la base d’une demande formulée par un procureur.
A la suite de la deuxième série de questions des experts, Mme BERIDZE a répondu en commençant par celles concernant l’intolérance religieuse: les premières mesures à prendre, a-t-elle convenu, doivent être l’adoption d’une loi permettant de punir les responsables et les médias doivent également contribuer à améliorer la situation.  La représentante a promis de tenir le Comité informé sur ce point et sur les améliorations qui seront enregistrées à l’avenir.  En réponse aux questions sur la connaissance qu’a la population des instruments disponibles en matière de droits de l’homme et sur les moyens de les faire mieux connaître, elle a expliqué que des mesures seraient prises par la Commission nationale des droits de l’homme, précisant que les Ministères de la défense, de la justice, de l’intérieur et des affaires étrangères avaient déjà été priés de dispenser une formation sur cette question à leur personnel.  A M. Amor qui s’était inquiété sur la garantie du secret du vote, elle a rappelé que des observateurs internationaux avaient suivi les processus électoraux.
 En ce qui concerne la représentation des femmes au niveau exécutif, la représentante de la Géorgie a indiqué que la situation est bonne dans la mesure où deux ministres sont des femmes et neuf autres femmes sont ministres adjoints.  En outre, il existe beaucoup de femmes ambassadeurs, ministres plénipotentiaires ou encore diplomates.  Elle a néanmoins indiqué que sur 235 personnes représentées au sein des organes législatifs, seulement 17 sont des femmes.  S’agissant du pouvoir judiciaire, la situation est assez bonne car les femmes ont eu la possibilité de passer les examens professionnels sans difficulté et 44% d’entre elles ont été affectées à des postes poste de juge.
 Concernant la liberté d’expression et la discrimination envers ceux qui ne sont pas citoyens de la Géorgie, M. TSKIALASHVILI a reconnu qu’il y avait un problème, expliquant que la loi en cours avait été adoptée en 1991 et n’avait pas changé depuis, alors que la Constitution a été adoptée en 1995 d’où la contradiction directe entre les deux textes.  Le problème, selon lui, est en partie technique car le terme «citoyen de la Géorgie» a beaucoup été utilisé dans les lois qui ont suivi l’indépendance.  Toutefois, il a estimé que cette incompatibilité avec la Constitution, même si elle recouvre une discrimination et pose problème, n’a pas de répercussion directe sur les non-citoyens.  Pour ce qui est de l’indépendance de la presse par rapport au pouvoir politique, il a cité des chiffres de 1999, selon lesquels 243 journaux étaient publiés, distribués sur tout le territoire et pour leur grande majorité, appartenant à des groupes privés.  En ce qui concerne la radio et la télévision, même celles financées par l’Etat, accueillent sur leurs antennes les autres opinions, a-t-il insisté, notant par ailleurs l’existence de nombreuses chaînes de télévision privées ayant beaucoup d’influence, surtout au plan local.
 Pour ce qui est de l’indépendance du système judiciaire, le représentant a estimé qu’il s’agissait d’un problème mineur par rapport à la corruption.  L’emprisonnement de magistrats ne peut être décidé que par un juge et non pas par une autorité administrative.  Toutes les décisions concernant la prolongation d’une détention sont également décidées par un juge sur la base d’une enquête.  L’ombudsman peut quant à lui fournir une aide concrète à ceux qui souffrent de violations.  A cet égard, des rapports seront prochainement envoyés au Comité.  En réponse à la question sur la formation des défenseurs publics en Géorgie, le représentant a indiqué qu’elle est assurée par le suivi régulier de séminaires et de formations organisés par différents groupes ciblés, y compris les organisations non gouvernementales.
En outre, il n’existe pas de problème législatif concernant les minorités nationales dans la mesure où la Constitution et la loi énoncent le principe d’égalité devant la loi.  Cependant, cette égalité doit être suivie par une égalité dans les faits.  A cet égard, des mesures positives devraient être prises pour permettre la pleine participation des minorités nationales à la vie publique, notamment pour éliminer les obstacles linguistiques.  La plupart des minorités ont en effet une connaissance faible du géorgien et cela les empêche de participer pleinement au sein de la société géorgienne.  Un programme spécial a été mis en place mais le Gouvernement rencontre des difficultés financières pour le mener à bien.
 Après avoir entendu les dernières réponses de la délégation géorgienne, le Président du Comité, M. PRAFULLACHANDRA NATWARLAL BHAGWATI (Inde), a félicité l’Etat partie pour son rapport complet, soumis dans les délais requis et pour le dialogue franc et constructif qui en a résulté.  Selon lui, la délégation a répondu de façon approfondie aux nombreuses questions des experts; elle a prouvé qu’elle faisait de son mieux pendant cette période de transition vers la démocratie et a réalisé des progrès considérables depuis l’examen de son rapport initial.  Il l’a félicitée pour la mise en oeuvre des recommandations formulées par le Comité, à l’issue de l’examen du rapport initial.
 Le Comité, par la voix de son Président, s’est félicité de l’abolition de la peine de mort et de la ratification du deuxième protocole facultatif sur l’abolition de la peine de mort.  Il a toutefois souligné qu’il ne comprenait pas pourquoi les personnes ne recouraient pas davantage au Tribunal constitutionnel pour mieux protéger leurs droits de l’homme: cela signifie que le public n’est pas bien informé de ses droits ou alors qu’il n’a pas confiance en ses tribunaux, a-t-il jugé.  Le Président a rappelé que le Comité était préoccupé par le fait que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques n’arrivait qu’au troisième rang seulement de la hiérarchie normative du pays et par les restrictions à la liberté de mouvement d’une personne faisant l’objet d’une plainte civile: ces dispositions restrictives, a-t-il souligné, sont en violation de l’article 11 du Pacte.
 De l’avis du Président, l’aspect le plus inquiétant reste toutefois l’existence de la torture malgré la déclaration du Président Chevardnadze affirmant que le problème n’existait plus: malgré les données fournies par l’Etat, il y a des plaintes dans ce domaine et on ne sait pas exactement ce qui se passe au niveau de la police, a relevé le Président.  Il a également demandé que les autorités géorgiennes prennent les mesures nécessaires pour faire face rapidement à la violence domestique, notamment en sensibilisant la population à ce problème.  Enfin, il a souhaité exprimer sa préoccupation sur le fait que la Géorgie n’a pas pris en compte toutes les recommandations du Comité, soulignant qu’il n’appartient pas aux pays concernés de ne pas appliquer certaines dispositions qui ne leur plaisent pas.
 Malgré tout, le Président a reconnu les progrès considérables réalisés dans la mise en oeuvre des droits de l’homme et s’est dit convaincu que la Géorgie est en voie de mettre en place un régime fondé sur le respect des droits de l’homme.
 
 
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