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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA LITUANIE

18 Novembre 2003



17 novembre 2003

Le Comité contre la torture a entamé cet après-midi l'examen du rapport initial de la Lituanie sur les mesures adoptées par ce pays en vue de mettre en œuvre les dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, le chef de la délégation lituanienne, M. Gintaras Svedas, Vice-Ministre de la justice de Lituanie, a indiqué que la ratification de la Convention contre la torture en 1996 a déjà eu des effets positifs pour la prévention des actes de torture. Il a également indiqué que les nouveaux codes de procédure pénale et de mise en accusation sont entrés en vigueur et ont induit de profonds changements dans la mise en œuvre des dispositions de la Convention grâce à l'introduction de nombreuses innovations notamment en ce qui concerne des peines alternatives à la prison. Ces mesures ont d'ores et déjà permis de réduire la surpopulation carcérale, a-t-il fait valoir.

M. Svedas a par ailleurs indiqué que la Lituanie a élaboré un plan d'action national pour la protection et la promotion des droits de l'homme et a fait valoir les garanties et les voies de recours existantes. La Lituanie a fait d'importants progrès dans le développement d'une structure institutionnelle pour les droits de l'homme, a en outre affirmé M. Svedas, évoquant en particulier l'institution d'un ombudsman parlementaire. Il a également mis l'accent sur l'attention particulière accordée au développement des capacités des personnels chargés des arrestations, de la détention, des interrogatoires ou du traitement des personnes incarcérées et de l'intégration des droits de l'homme dans leur formation, notamment en ce qui concerne l'interdiction et la prévention de la torture.

Le rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport de la Lituanie, M. Alexander Yakovlev, a souligné que la Lituanie est aujourd'hui une démocratie indépendante et s'est interrogé sur la façon dont les institutions judiciaires ont été réformées et restructurées depuis l'époque soviétique, en particulier pour garantir leur indépendance. Il s'est également interrogé sur les garanties de protection des droits des accusés dans les lieux de détention et relevé que la torture ne saurait être considérée uniquement comme un abus de pouvoir. Il a demandé quelles mesures étaient prises en vue d'une meilleure application de la Convention.

Mme Felice Gaer, corapporteuse du Comité pour le rapport de la Lituanie, s'est pour sa part félicitée des mesures adoptées pour réduire la surpopulation carcérale et a souligné les différences énormes entre l'État de droit en cours de construction et la situation terrible qui a prévalu pendant l'occupation soviétique. Elle s'est toutefois interrogée sur la façon dont sont menées les enquêtes sur les allégations de torture et sur les sanctions appliquées pour mauvais traitements exercés par la police. S'agissant du service d'enquête au sein du Ministère de l'intérieur, qui aurait un rôle à la fois préventif et d'enquête, elle s'est inquiétée du bon fonctionnement et de l'impartialité de ce système. Elle a également requis des informations sur le rôle de l'Ombudsman en ce qui concerne la gestion des prisons et demandé des explications sur l'augmentation du nombre de plaintes.

D'autres membres du Comité se sont interrogés sur la formation continue des policiers mais aussi sur la formation des médecins pour leur permettre de déceler les signes de torture. Des inquiétudes ont été exprimées en ce qui concerne les mauvaises conditions de détention dans les centres de détention de la police.

La délégation lituanienne était également composée de représentants des Ministères de la justice et de l'intérieur ainsi que de la Mission permanente de la Lituanie auprès des Nations Unies à Genève.

Le Comité reprendra ses travaux demain matin à partir de 10 heures pour entamer l'examen du rapport initial du Cameroun. Il entendra les réponses de la Lituanie mercredi matin à partir de 10 heures.

Présentation du rapport de la Lituanie

M. GINTARS SVEDAS, Vice-Ministre de la justice de la Lituanie et chef de la délégation, a affirmé que la ratification de la Convention contre la torture en 1996 a déjà eu des effets positifs pour la prévention des actes de torture. Il a précisé que la Constitution interdit la torture et est mise en œuvre non seulement par le Code pénal mais à travers d'autres instruments internationaux ratifiés par la Lituanie, tels que le Statut de Rome ou la Convention européenne des droits de l'homme. En outre, il a indiqué que les nouveaux codes de procédure pénale et de mise en accusation sont entrés en vigueur et ont induit de profonds changements dans la mise en œuvre des dispositions de la Convention. En effet, de nombreuses innovations ont été introduites, notamment en ce qui concerne des peines alternatives à la prison, telles que le travail communautaire notamment. À cet égard, il a souligné que ces nouveautés ont d'ores et déjà permis de réduire la surpopulation carcérale qui est passée de plus de 10 800 prisonniers à 8 200 pour une capacité totale de 9 700 places. Le nouveau code pénal prévoit de nouvelles procédures plus rationnelles et efficaces visant notamment à accélérer les enquêtes et les procédures, tout en garantissant une application des sanctions fondée sur la légalité, l'égalité devant la loi et l'humanisme, ainsi que sur l'individualisation de l'application des peines et la garantie que celle-ci ne puisse déboucher sur la torture ou tout autre traitement dégradant. Par ailleurs, le Code civil réglemente les questions liées à la responsabilité et aux dommages causés par des actions ou décisions illégales de la part des autorités. À cet égard, le Parlement a adopté une loi sur l'indemnisation associée à une allocation budgétaire et qui prévoit également la possibilité d'être indemnisé sans engager une procédure judiciaire.

M. Svedas a par ailleurs indiqué que, pour aller de l'avant, la Lituanie a élaboré un plan d'action national pour la protection et la promotion des droits de l'homme conformément aux recommandations de la Déclaration de Vienne. Soulignant que les meilleures dispositions légales sont inutiles si elles ne sont pas mises en œuvre, M. Svedas a également mis en avant les garanties et les voies de recours existantes. À cet égard, il a évoqué en particulier le droit de porter devant les tribunaux toute violation des droits et de porter plainte ainsi que de recevoir une assistance juridique pour toute personne ayant des difficultés financières indépendamment de sa nationalité. La Lituanie a fait d'importants progrès dans le développement d'une structure institutionnelle pour les droits de l'homme, a en outre fait valoir M. Svedas évoquant en particulier l'institution d'un ombudsman parlementaire, d'un ombudsman pour l'égalité entre les hommes et les femmes et d'un ombudsman pour les droits de l'enfant. Avec le développement rapide de la société civile, un grand nombre d'organisations non gouvernementales travaillant dans divers domaines de la protection des droits de l'homme ont vu le jour, a ajouté le Vice-Ministre.

La Lituanie a mis en place une institution de police spécialisée, le service de protection des victimes et des témoins, qui organise et s'occupe de la mise en œuvre des mesures de protection contre l'influence criminelle, a par ailleurs indiqué M. Svedas. Il a également mis l'accent sur l'attention particulière accordée au développement des capacités des personnels chargés des arrestations, de la détention, des interrogatoires ou du traitement des personnes incarcérées et de l'intégration des droits de l'homme dans leur formation, notamment en ce qui concerne l'interdiction et la prévention de la torture.

Le rapport initial de la Lituanie (CAT/C/37/Add.5) indique que les droits fondamentaux de l'homme sont consacrés par le chapitre II de la Constitution de la République de Lituanie, qui interdit également la torture et les autres traitements inhumains ou dégradants. Tous, nationaux, ressortissants étrangers ou apatrides, ont droit à une égale protection de la loi contre toute atteinte à leur vie et à leur santé, à leur liberté, à leurs biens, à leur honneur et à leur dignité, et peuvent exercer tous autres droits et libertés qui leur sont garantis par la Constitution et autres textes normatifs. Ils ont droit aussi à une égale protection de la loi contre tous actes ou omissions des institutions ou organismes de l'État et de leurs agents. La loi reconnaît à toute personne le droit de s'adresser à la justice, selon les modalités prévues par la loi, pour défendre un droit violé ou contesté, ou un intérêt légitime.

En ce qui concerne l'obligation de prendre des mesures efficaces pour empêcher que des actes de torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ne soient commis, telle qu'elle est énoncée dans la Convention, elle est reprise au chapitre II de la Constitution, dont l'article 21 prohibe tout acte de torture dans tout territoire sous la juridiction de l 'État et interdit de torturer une personne, de la blesser, de l'humilier, de lui faire subir de mauvais traitements ainsi que d'établir de telles peines. Il interdit aussi de soumettre quiconque à une expérience scientifique ou médicale à son insu et sans son consentement. Les dispositions constitutionnelles qui répriment les actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sont transposées dans le droit pénal lituanien. Tout acte de torture est considéré comme un crime au regard de la loi pénale. Le Code de procédure pénale garantit à toute personne qui affirme être victime d'un crime le droit de déposer plainte auprès de la police ou du parquet qui les examine dans les trois jours au plus tard. Le Code de procédure pénale dispose que quiconque ayant subi un dommage causé par une infraction pénale peut déposer une demande d'indemnisation, y compris pour couvrir les sommes nécessaires à sa réadaptation.

La loi sur le statut juridique des étrangers dispose que la mesure d'expulsion est reportée lorsque la vie ou la santé de l'étranger est gravement menacée dans le pays vers lequel il est expulsé ou s'il risque d'y être persécuté du fait de ses convictions politiques ou pour toute autre raison. Par ailleurs, le recours à des actes de violence ou d'intimidation ou à tout autre moyen illégal en vue d'obtenir des preuves de l'accusé ou d'autres parties à la procédure est interdit. Les éléments de preuve obtenus en violation de cette disposition, c'est-à-dire par la torture, par des traitements cruels ou toute autre méthode interdite par la loi, ne peuvent être produits à aucun stade de l'enquête judiciaire ni fonder aucune décision dans le cadre d'une affaire pénale, civile ou administrative.

Examen du rapport de la Lituanie

M. ALEXANDER YAKOVLEV, rapporteur du Comité pour le rapport de la Lituanie, a souligné la Lituanie est aujourd'hui une démocratie indépendante. Il a demandé de plus amples informations sur les institutions judiciaires et la façon dont elles ont été réformées et restructurées depuis l'époque soviétique, notamment pour ce qui est de la nomination, de la révocation et de l'indépendance des juges ainsi que de la protection des droits de la défense. S'agissant des lieux de détention, il a demandé de quel ministère - justice ou intérieur - ils dépendent, insistant sur l'importance de cet aspect pour la protection des droits des accusés. M. Yakovlev a également mis l'accent sur l'importance du Parquet et de son indépendance. S'agissant de la définition de la torture, il a fait observer que la torture ne saurait être considérée seulement comme un abus de pouvoir.

M. Yakovlev a demandé quelles limites sont fixées à la durée de la détention provisoire. Il a également demandé des exemples de la pratique et des résultats obtenus par l'Ombudsman. Revenant sur des informations du Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) qui relevait des cas de mauvais traitements, il a demandé quelles mesures étaient prises en vue d'une meilleure application de la Convention.

MME FELICE GAER, corapporteuse du Comité pour le rapport de la Lituanie, s'est pour sa part félicitée des mesures adoptées pour réduire la surpopulation carcérale. Elle s'est toutefois inquiétée que les mineurs, adultes, grands criminels ou petits délinquants, hommes ou femmes, soient détenus dans les mêmes institutions et a exprimé sa préoccupation au sujet de la violence en prison. Elle a néanmoins souligné les différences importantes entre l'État de droit en cours de construction et la situation terrible qui a prévalu pendant l'occupation soviétique. Elle s'est toutefois inquiétée, à l'instar de M. Yakovlev, de l'usage du concept d'abus de pouvoir pour qualifier la torture. Mme Gaer s'est par ailleurs interrogée sur les attributions réelles et le mode opératoire des équipes de surveillance des locaux et établissements de détention. En outre, au sujet de la réglementation des activités de coercition par les forces de police, elle s'est demandée quels efforts portent réellement sur la prévention de la torture. À cet égard, elle a souligné l'importance de la formation des policiers ainsi que la nécessité d'humaniser les personnes impliquées dans la surveillance des institutions pénitentiaires. S'agissant des méthodes d'interrogatoire, M. Gaer a demandé des précisions sur les modalités et les responsabilités en cas de plainte pour coercition contre un policier. Ella a également demandé quelles mesures ont été prises pour mettre en œuvre les recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture relatives à la mise en œuvre d'un code de conduite des personnels pénitentiaires. Pour ce qui est du droit d'accès à un avocat, elle s'est inquiétée du fait que les avocats commis d'office montre parfois peu d'intérêt pour le traitement subi par leurs clients en prison.

Mme Gaer s'est par ailleurs interrogée sur la façon dont les enquêtes sur les allégations de torture se passent et comment les mauvais traitements exercés par la police sont punis concrètement. S'agissant du Service d'enquête au sein du Ministère de l'intérieur, qui aurait un rôle à la fois préventif et d'enquête, elle a exprimé des inquiétudes quant au bon fonctionnement et à l'impartialité de ce système. Elle a également requis des informations sur le rôle de l'Ombudsman en ce qui concerne la gestion des prisons et demandé des explications sur l'augmentation du nombre de plaintes. Elle a en outre demandé une évaluation de la procédure de plaintes anonymes. Elle s'est interrogée par ailleurs sur l'usage excessif de la force et de la violence au sein de l'armée.

D'autres membres du Comité se sont interrogés sur la formation continue des policiers mais aussi sur la formation des médecins pour leur permettre de déceler les signes de torture. Au sujet des centres de détention de la police, des inquiétudes ont été exprimées en ce qui concerne les mauvaises conditions de détention. En outre, malgré les efforts déployés, la surpopulation carcérale demeure un problème ainsi que les mauvaises conditions de détention, en particulier sanitaires, ont relevé certains experts, qui se sont inquiétés en particulier de la forte prévalence de la tuberculose parmi les détenus. Certains se sont par ailleurs enquis de la prévalence du crime organisé dans la société lituanienne.

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