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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT INITIAL DE LA MAURITANIE

25 Septembre 2001



CRC
28ème session
25 septembre 2001
Matin



La Secrétaire d'État mauritanienne à la condition féminine souligne que le
nouveau code du statut personnel fixe à dix-huit ans l'âge légal du mariage


Le code du statut personnel dont s'est doté la Mauritanie interdit le mariage précoce en fixant l'âge minimum du mariage à dix-huit ans, a indiqué ce matin la Secrétaire d'État mauritanienne à la condition féminine, Mme Mintata Mint Heddeid, devant le Comité des droits de l'enfant qui entamait l'examen du rapport initial de son pays.


Une loi portant obligation de l'enseignement fondamental dès l'âge de six ans et prévoyant des sanctions pénales pour les parents récalcitrants a été adoptée par la Mauritanie, a encore indiqué la Secrétaire d'État. Elle a en outre précisé que des tribunaux spécialisés pour mineurs, ainsi que des centres de rééducation sociale ont été institués dans le pays.

Faisant observer que la Mauritanie est un pays immense, globalement sous-peuplé, où les communications se font difficilement et où la sécheresse et la désertification sont particulièrement aiguës, Mme Mint Heddeid a identifié un certain nombre de difficultés qui subsistent dans le pays. Parmi celles-ci, elle a notamment déploré la persistance de conceptions et d'interprétations erronées de textes religieux induisant des attitudes culturelles et des mentalités peu favorables à l'émancipation de la femme et à la protection des enfants; la faiblesse des ressources humaines, matérielles et financières; ainsi que les mauvaises conditions climatiques et géographiques qui engendrent une urbanisation accélérée, un exode rural incontrôlé et une sédentarisation non planifiée - autant de facteurs aggravant la pauvreté et le démantèlement de la structure familiale.

La délégation mauritanienne dirigée par Mme Mint Heddeid est également composée de M. Mohamed Saleck Ould Mohamed Lemine, Représentant permanent de la Mauritanie auprès de l'Office des Nations Unies et des organisations internationales à Genève, ainsi que de représentants du Secrétariat d'Etat à la condition féminine; du Ministère des affaires économiques et du développement; du Commissariat aux droits de l'homme, à la lutte contre la pauvreté et à l'insertion; et de la Chambre commerciale du tribunal de Nouakchott.

(à suivre) Certains membres du Comité ont fait part de leur préoccupation face à la réserve émise par la Mauritanie à l'encontre de tout ce qui, dans la Convention relative aux droits de l'enfant, serait contraire à l'Islam. Un expert a dénoncé les insuffisances dont souffre la Mauritanie dans le domaine de l'enregistrement des naissances en faisant observer que cela amène l'armée à recruter de jeunes enfants car l'âge qui figure sur leurs papiers d'identité ne correspond pas à leur âge véritable.

Le Comité achèvera cet après-midi, à 15 heures, l'examen du rapport mauritanien. Les experts présenteront alors des observations préliminaires sur ce rapport, prélude aux observations finales que le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, et rendra publiques à la fin de la session, le vendredi 12 octobre 2001.


Présentation du rapport initial de la Mauritanie

Présentant le rapport initial de son pays, MME MINTATA MINT HEDDEID, Secrétaire d'État à la condition féminine de la Mauritanie, a indiqué que le retard accusé dans la présentation de ce rapport résulte exclusivement des insuffisances administratives et non d'une quelconque négligence à l'égard des enfants, sur lesquels repose tout l'avenir du pays. Elle a salué l'assistance apportée par l'UNICEF à la Mauritanie dans le cadre de l'élaboration du présent rapport. La Constitution mauritanienne de 1991 établit la primauté des conventions internationales ratifiées par le pays sur les lois internes du pays, a par ailleurs précisé la Secrétaire d'État. Elle a ajouté que la Constitution offre aux citoyens la possibilité d'invoquer directement ces conventions devant les juridictions nationales.

Fruit d'une large concertation avec la société civile et les partenaires du développement, le Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté se fixe des objectifs ambitieux en matière de croissance économique et de réduction de la pauvreté; d'accès aux services sociaux de base, d'amélioration de leur qualité et de leur efficacité; et de réduction des disparités régionales et entre les sexes. Les progrès accomplis au cours de la décennie écoulée sont à cet égard de bonne augure, a affirmé Mme Mintata Mint Heddeid avant de préciser que la pauvreté dans la population est passée de 56,6% en 1990 à 50,5% en 1996. Durant cette même période, a-t-elle ajouté, le taux brut de scolarisation a doublé, passant de 46% à 90%, alors que le taux d'accessibilité aux structures sanitaires dans un rayon de 10km est passé de 30% à 80%. Le taux de mortalité infantile, pour sa part, est passé de 124 pour mille à 105 pour mille. La Secrétaire d'État a souligné que l'enfance est le premier bénéficiaire de ces progrès économiques, sociaux et culturels en raison de l'attention particulière dont elle fait l'objet dans la société mauritanienne. Elle a assuré que la Stratégie nationale de promotion féminine, la Politique nationale de la famille, le Plan national d'action pour la lutte contre la malnutrition et le Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté ont eu des répercussions positives sur la survie, la protection et le développement de l'enfant.

Mme Mintata Mint Heddeid a en outre indiqué que son département ministériel - le Secrétariat d'État à la condition féminine - a été créé en 1992 afin d'assurer une meilleure coordination et une bonne exécution des politiques et programmes relatifs aux enfants. Un organe consultatif, dénommé Conseil national de l'enfance, assiste le Secrétariat d'État dans l'élaboration des politiques. La Secrétaire d'État a fait part de l'arsenal juridique mis en place par son pays en faveur de la protection de l'enfance. Ainsi, un code du statut personnel a-t-il été promulgué qui interdit le mariage précoce en fixant l'âge minimum du mariage à 18 ans. A également été adoptée une loi portant obligation de l'enseignement fondamental dès l'âge de six ans et prévoyant des sanctions pénales pour les parents récalcitrants. Des tribunaux spécialisés pour mineurs ainsi que des centres de rééducation sociale ont été institués. La Mauritanie a adhéré à plusieurs instruments juridiques internationaux dont les conventions n 138 et n 182 de l'OIT sur l'âge minimum d'accès à l'emploi et l'interdiction des pires formes de travail des enfants.

Faisant observer que la Mauritanie est un pays immense, globalement sous-peuplé, où les communications se font difficilement et où la sécheresse et la désertification sont particulièrement aiguës, la Secrétaire d'État a identifié un certain nombre de difficultés qui subsistent dans le pays. Parmi celles-ci, elle a notamment déploré l'insuffisance des données statistiques; la persistance de conceptions et d'interprétations erronées de textes religieux induisant des attitudes culturelles et des mentalités peu favorables à l'émancipation de la femme et à la protection des enfants; la faiblesse des ressources humaines, matérielles et financières; l'insuffisance des infrastructures économiques et sociales; ainsi que les mauvaises conditions climatiques et géographiques (sécheresse et désertification) qui impliquent une urbanisation accélérée, un exode rural incontrôlé et une sédentarisation non planifiée - autant de facteurs qui aggravent la pauvreté et le démantèlement de la structure familiale.

En dépit des progrès remarquables enregistrés dans la mise en oeuvre de la Convention, beaucoup d'efforts restent à fournir, notamment du point de vue de la mise en place d'une base nationale de données sur les enfants; de l'adoption d'une politique nationale de la petite enfance; de l'approbation du projet de Code pénal et du projet de Code de procédure pénale pour mineurs; de l'élaboration (actuellement en cours) d'un Plan national de promotion des droits de l'homme, suite à la signature le mois dernier d'un accord de coopération technique avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme; de la réactualisation de la Stratégie nationale de la promotion féminine; et de la nécessité de mettre en application les directives de l'Initiative 20/20.

Le rapport initial de la Mauritanie (CRC/C/8/Add.42) indique qu'en juin 1992, la Mauritanie a élaboré, avec l'appui de l'UNICEF, un programme d'action pour la décennie 1992-2001 afin de contribuer à l'élaboration de la situation des enfants dans le pays. Ce plan national d'action est constitué d'une analyse-diagnostic de la situation de l'enfant à partir de laquelle ont été fixés les principaux objectifs à atteindre. Ces objectifs ambitieux ont été révisés et mis à jour par le Plan directeur de la santé et des affaires sociales pour la période 1998-2002 élaboré par le Ministère de la santé et des affaires sociales. Les objectifs globaux consistent notamment à réduire de moitié d'ici 2002 la morbidité et la mortalité des enfants de moins de 5 ans; à améliorer l'état nutritionnel des populations, en particulier en ce qui concerne les groupes les plus vulnérables (enfants, femmes, populations en situation précaire); à réduire d'un tiers le taux de mortalité maternelle d'ici 2002; à assurer à tous l'approvisionnement en eau potable, l'assainissement et le contrôle de la qualité des aliments; et à améliorer et développer le système éducatif.

S'agissant de la définition de l'enfant, le rapport indique que le Code du travail mauritanien fixe à 14 ans l'âge minimum d'admission au travail. D'autre part, les rapports sexuels ne sont envisagés que dans le cadre unique du mariage et le Code pénal punit quiconque provoque ou tente de provoquer l'avortement. Les médecins peuvent toutefois pratiquer l'avortement thérapeutique en cas de danger encouru par la mère.

Examen du rapport

Un expert a fait part de sa préoccupation face à la réserve émise par la Mauritanie à l'égard de la Convention en vertu de laquelle le pays affirme qu'il émettra des réserves à l'encontre de tout ce qui serait contraire à l'Islam. Un expert a invité le pays à revoir cette réserve en soulignant que la Convention ne saurait en aucune manière être contraire à l'Islam. Un autre expert a fait observer que dans la mesure où la Mauritanie n'a pas précisé cette réserve lors du dépôt de son instrument de ratification de la Convention, cette réserve n'a pas été enregistrée.

'La Mauritanie a émis une réserve au moment de la signature de la Convention mais il semble qu'il y ait un problème du fait que cette réserve n'a pas été réaffirmée au moment de la ratification de la Convention', a déclaré la délégation mauritanienne avant de préciser que le pays ferait appel au Conseil juridique de l'ONU pour éclaircir cette question. 'Nous ne vous encourageons pas à finaliser cette procédure' (de présentation officielle de la réserve), a affirmé un expert en faisant valoir que la situation actuelle est favorable au Comité.

Un membre du Comité a fait observer que la Mauritanie n'a ratifié que trois des six principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Ce pays n'a par ailleurs ratifié aucun des deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, a relevé cet expert.

Un autre expert a dénoncé les insuffisances dont souffre la Mauritanie dans le domaine de l'enregistrement des naissances en faisant observer que cela amène l'armée à recruter en fait de jeunes enfants car l'âge qui figure sur leurs papiers d'identité ne correspond pas à leur âge véritable. Relevant que le service militaire semble obligatoire en Mauritanie, un membre du Comité s'est enquis de l'âge minimum auquel ce service est dû.

Certains membres du Comité ont déploré le manque de statistiques précises concernant la situation des enfants mauritaniens.

Un expert a fait état de rapports seront lesquelles les organisations non gouvernementales (ONG) rencontreraient des difficultés pour intervenir en faveur de l'enfance dans le pays.

Un expert s'étant inquiété de la connotation discriminatoire que pourrait revêtir la célébration de la Journée de l'enfant africain ou de la Journée de l'enfant arabe, la délégation mauritanienne a assuré qu'il ne faut percevoir aucune discrimination dans la célébration de ces deux journées. En fait, c'est l'Organisation de l'unité africaine (OUA) qui a proclamé le 16 juin de chaque année Journée de l'enfant africain. Dans le cadre de la célébration de cette Journée, la Mauritanie mène pendant quinze jours un certain nombre d'activités destinées à vulgariser la Convention relative aux droits de l'enfant. Le 2 octobre est quant à lui consacré à la célébration de la Journée de l'enfant arabe.

La délégation a précisé que l'adoption par la Mauritanie d'un code de la famille (dénommé Code du statut personnel) ne remonte qu'à quelques mois. Ce code traite de toutes les questions liées, entre autres, au mariage, à la pension alimentaire et à la succession. En fixant à 18 ans l'âge légal du mariage, ce code permet de lutter efficacement contre le mariage précoce qui, à l'instar du gavage des jeunes filles, du tatouage ou de l'excision, est considéré comme une pratique néfaste. A cet égard, il convient de souligner que la Mauritanie s'est dotée d'un Comité national de lutte contre les pratiques néfastes. La pratique du gavage des jeunes filles est en régression dans le pays, a assuré la délégation après avoir expliqué que cette pratique consistait à gaver d'aliments et de boissons les jeunes filles afin d'en faire plus rapidement - dès l'âge de 12 ans environ - des femmes bonnes à marier. Le fait que l'âge légal du mariage ait été fixé à 18 ans devrait en outre contribuer à l'élimination de cette pratique qui n'a ainsi plus de raison d'être.

Les orphelins ne sont pas abandonnés en Mauritanie, a assuré la délégation. La tradition africaine, empreinte de solidarité, permet d'empêcher que ces enfants ne se retrouvent rejetés dans les rues, a-t-elle fait valoir avant de reconnaître qu'il se peut que le bouleversement des structures familiales ait tendance, à terme, à éroder cette solidarité.

S'agissant de l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a indiqué que la majorité pénale est fixée en Mauritanie à 18 ans révolus. Il n'en demeure pas moins qu'une distinction s'opère entre les enfants pourvus de discernement et les autres. Pour les enfants non pourvus de discernement, c'est-à-dire n'ayant pas atteint l'âge de 12 ans, toute responsabilité pénale est exclue. Pour les autres, c'est-à-dire ceux qui ont entre 12 et 18 ans, la responsabilité pénale est retenue mais elle est atténuée en vertu du principe de 'l'excuse de minorité'.

Rappelant que le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale avait relevé la persistance, dans certaines régions de la Mauritanie, de vestiges de pratiques relevant de l'esclavage et de la servitude involontaire, un expert s'est enquis des mesures prises par le pays pour remédier à ce problème.

Ce même expert s'est enquis de la situation des enfants apatrides qui avaient été déportés et qui sont revenus dans le pays depuis 1996 mais n'ont toujours pas réussi à obtenir la nationalité mauritanienne.



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