Communiqués de presse Organes conventionnels
LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE SAINTE-LUCIE
17 mai 2005
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Comité des droits de l'enfant
17 mai 2005
Il entame les travaux de sa trente-neuvième session en élisant
M. Jacob Egbert Doek à sa présidence
Le Comité des droits de l'enfant a entamé, aujourd'hui, les travaux de sa trente-neuvième session en examinant le rapport de Sainte-Lucie, après avoir procédé à l'élection de son bureau et entendu une déclaration d'ouverture de Mme Mehr Khan Williams, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme.
M. Jacob Egbert Doek a été réélu à la présidence au Comité; Mme Joyce Aluoch, Mme Moushira Khattab, Mme Yanghee Lee et M. Norberto Liwski ont été élus vice-présidents et Mme Nevena Vuckovi?-Sahovi? rapporteuse.
Examinant le rapport initial de Sainte-Lucie, la corapporteuse du Comité pour l'examen de ce rapport, Mme Alison Anderson, a présenté en fin de journée des observations préliminaires, relevant notamment un certain manque de dynamisme de la société civile pour promouvoir les droits de l'enfant. De nombreux problèmes se posent en outre en matière de justice pour mineurs, dont certains sont dus à la pénurie de ressources. Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Sainte-Lucie, avant de les rendre publiques à la fin de la session, le vendredi 3 juin prochain.
Entamant l'examen du rapport saint-lucien, la rapporteuse du Comité chargée de ce rapport, Mme Awa N'Deye Ouedraogo, avait pour sa part souligné que, malgré les amendements qui y ont été apportés, la législation de Sainte-Lucie n'est pas suffisamment conforme aux dispositions et principes de la Convention. La loi sur les enfants et les jeunes autorise les châtiments corporels, s'est-elle en outre inquiétée.
La délégation de Sainte-Lucie était dirigée par M. Jon Odlum, Secrétaire parlementaire au Ministère de la santé, des services humains, des affaires familiales et des questions de parité, qui a souligné que ces dernières années, le pays a vu s'opérer un changement radical dans les habitudes de sa jeunesse, ce qui a eu des répercussions sur tous les secteurs de la société. Parmi les problèmes les plus graves auxquels le pays est confronté, figure le problème des violences et autres abus contre les enfants tels que l'inceste, problèmes qui sont alimentés par la croissance des familles monoparentales dirigées par les mères, le plus souvent jeunes et inexpérimentées. Consciente de ces problèmes, Sainte-Lucie s'est notamment engagée à mettre en place un cadre législatif sur lequel une politique de changement pourrait s'appuyer. Ainsi, la réforme du droit de la famille, qui devrait aboutir cette année, porte spécifiquement sur la garde des enfants, leur statut, les soins aux enfants, la participation des enfants.
La délégation de Sainte-Lucie était également composée de la Directrice des services humains et des affaires familiales, Mme Clemencia Eugene, et de la Conseillère supérieure de la Couronne au Bureau du Procureur général, Mme Georgis Taylor-Alexander, qui ont fourni aux experts des compléments d'informations en ce qui concerne, notamment l'enregistrement des naissances; la violence contre les enfants; les châtiments corporels; l'âge de la responsabilité pénale et l'administration de la justice pour mineurs; les questions d'éducation et de santé; ainsi que le travail des enfants.
En début de séance, MM. Awich Pollar, David Brent Parfitt, Kamal Siddiqui et Jean Zermatten ont fait une déclaration solennelle en tant que nouveaux membres du Comité.
Demain à partir de 10 heures, le Comité examinera l'examen le deuxième rapport périodique des Philippines (CRC/C/65/Add.31).
Déclaration d'ouverture
MME MEHR KHAN WILLIAMS, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a souhaité une chaleureuse bienvenue aux quatre nouveaux membres du Comité, à savoir MM. Pollar, Parfitt, Siddiqui et Zermatten. Elle a également félicité ceux qui ont été réélus, à savoir Mmes Al-Thani, Aluoch, Lee, Smith et Vuckovi?-Sahovi?. Elle a enfin remercié ceux dont le mandat s'est achevé le 28 février dernier, à savoir M. Al-Sheedi, Mme Chutikul, M. Citarella et Mme Sardenberg.
Mme Khan Williams a rappelé que dans son rapport intitulé «Dans une liberté plus grande», le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a notamment proposé la création d'un Conseil des droits de l'homme, le renforcement du Haut Commissariat aux droits de l'homme et l'harmonisation des travaux des organes de traités. Rappelant que le Secrétaire général avait prié la Haut-Commissaire aux droits de l'homme de présenter, dans un délai de 60 jours, un plan d'action, Mme Khan Williams a fait part du processus de consultation des groupes régionaux mené à bien par le Haut Commissariat à cette fin. Elle a précisé que la Haut-Commissaire présenterait le 20 mai prochain son plan d'action, lequel s'inscrira dans le débat sur la réforme des Nations Unies qui se tiendra au mois de septembre prochain à New York.
Mme Khan Williams a par ailleurs rappelé que le Secrétaire général avait également demandé que soient finalisées les directives harmonisées concernant la présentation des rapports à tous les organes de traités. À cet égard, elle a souligné que le projet de directives révisées sur le document de base élargi et les rapports ciblant un traité spécifique serait examiné le mois prochain par la quatrième réunion intercomités et par la septième réunion des présidents d'organes de traités. Aussi, Mme Khan Williams a-t-elle exhorté les membres du Comité des droits de l'enfant à présenter tout commentaire ou toute suggestion qu'ils voudront bien faire à M. Kamel Filali - désigné rapporteur lors de la troisième réunion intercomités - qui présentera son rapport lors de la quatrième réunion intercomités.
S'agissant des ateliers de suivi de la Convention relative aux droits de l'enfant, Mme Khan Williams a indiqué qu'après le succès de l'atelier sous-régional de Bangkok l'an dernier, le Haut Commissariat aux droits de l'homme a décidé d'organiser cette année des ateliers de suivi similaires au Qatar (19-21 juin) et en Argentine (28-30 novembre). Une autre activité du Haut Commissariat a trait au projet, financé par l'Union européenne, qui vise à accroître la sensibilisation des organisations non gouvernementales, des institutions nationales de droits de l'homme et des médias au système des organes chargés de la surveillance des traités de droits de l'homme, a rappelé Mme Khan Williams, attirant l'attention sur l'atelier national qui s'est récemment tenu dans ce cadre à Sri Lanka. La semaine dernière, a poursuivi Mme Khan Williams, le Haut Commissariat a convoqué à Genève le quatrième d'une série d'ateliers sur la mise en œuvre des recommandations des organes de traités. Enfin, a conclu Mme Khan Williams, l'étude du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies sur la violence contre les enfants entre dans une phase cruciale avec les neuf consultations régionales organisées à travers le monde.
Présentation du rapport de Sainte-Lucie
M. JON ODLUM, Secrétaire parlementaire au Ministère de la santé, des services humains, des affaires familiales et des questions de parité de Sainte-Lucie, a rappelé que le pays est une petite île des Caraïbes peuplée de 160 000 habitants. Ces dernières années, Sainte-Lucie a vu s'opérer un changement radical dans les habitudes de sa jeunesse, ce qui a eu des répercussions sur tous les secteurs de la société. Parmi les problèmes les plus graves auxquels le pays est confronté, figure le fait que les moins de 13 ans sont devenus une espèce en danger, du fait des violences et autres abus contre les enfants tels que l'inceste, bien que peu d'éléments de preuve aient pu être réunis à ce sujet. Ces problèmes, a estimé M. Odlum, sont alimentés par la croissance des familles monoparentales dirigées par les mères, le plus souvent jeunes et inexpérimentées. Consciente de ces problèmes, Sainte-Lucie a néanmoins engagé des efforts concertés afin d'y faire face; le pays s'est engagé à mettre en place un cadre législatif sur lequel une forte politique de changement pourrait s'appuyer.
Rappelant que le rapport initial de son pays couvre la période allant de 1993 à 2003, M. Odlum a indiqué que depuis 2003, le droit de la famille a connu une évolution rapide dans la sous-région caraïbe, ce qui a eu un impact direct sur les droits de l'enfant. La réforme du droit de la famille engagée à Sainte-Lucie traite spécifiquement de la garde des enfants, de leur statut, des soins aux enfants, de la participation des enfants; maintenant que le processus de consultations concernant cette réforme est achevé, la nouvelle législation devrait entrer en vigueur avant la fin de l'année 2005, a indiqué M. Odlum. S'agissant du droit pénal, M. Odlum a fait valoir que le Code pénal entré en vigueur en janvier dernier prévoit, dans ses articles 167 à 175, des peines plus précises et plus lourdes pour un certain nombre de délits impliquant des enfants, tels que l'abandon ou encore l'enlèvement d'enfant. Le Ministère des services humains a par ailleurs créé une base de données visant la surveillance des enfants à risque et des enfants victimes de violences et d'abus.
Le Gouvernement de Sainte-Lucie œuvre énergiquement à l'universalisation des soins de santé, a poursuivi M. Odlum. Face à l'augmentation du nombre des abandons scolaires, le Ministère de l'éducation est en train de mener à bien une étude visant à évaluer scientifiquement la gravité de la situation à cet égard, a-t-il ajouté. Au début de l'année scolaire 2004, trente conseillers scolaires ont été nommés, de sorte que les enfants présentant des problèmes comportementaux et émotionnels devraient pouvoir être identifiés et recevoir l'attention requise. Le Ministère de la santé travaille actuellement à l'élaboration d'une politique de santé à l'attention des enfants et des adolescents. En outre, grâce à l'assistance du Fonds des Nations Unies pour l'enfance, un régime de formation à la gestion des violences contre les enfants devrait être mis en place. Également avec le soutien de l'UNICEF, a précisé M. Odlum, Sainte-Lucie mène actuellement une étude sur les enfants qui devrait permettre de mieux connaître les vulnérabilités de cette catégorie de la population et donc contribuer à définir des programmes et services sociaux susceptibles d'améliorer la qualité de vie des enfants.
Le rapport initial de Sainte-Lucie (CRC/C/28/Add.23) indique que le pays compte 151 143 habitants (2001) dont 28,3% ont moins de 15 ans et 61,1% moins de 34 ans. Parmi les importantes mesures législatives ayant fait suite à la ratification de la Convention, le rapport cite la loi de 1994 relative aux tribunaux chargés des affaires familiales; la loi de 1995 relative à la violence domestique; et la loi de 1996 relative aux saisies-arrêts sur salaire. Il n'existe pas, dans la législation de Sainte-Lucie, de définition unique et uniforme de l'enfant, applicable dans tous les cas, reconnaît le rapport. Ainsi la loi de 1972 sur les enfants et les adolescents définit un enfant comme «toute personne âgée de moins de 12 ans», mais qualifie de jeune toute personne âgée de moins de 16 ans et d'adolescent toute personne âgée de 12 ans mais n'ayant pas encore atteint l'âge de 16 ans. Un texte plus récent comme la loi de 1995 sur la violence domestique considère comme enfant toute personne âgée de 18 ans maximum. La loi de 1972 sur les enfants et les adolescents fixe un âge précis pour la responsabilité pénale, en disposant qu' «aucun enfant de moins de 12 ans ne peut être déclaré coupable d'une quelconque infraction». Le Code pénal donne toutefois une définition différente, puisqu'il dispose qu' «aucun acte commis par un enfant âgé de moins de 8 ans ne peut être qualifié d'infraction». La loi de 1999 sur l'éducation a pour objet de promouvoir l'accès à l'enseignement primaire et secondaire pour tous les enfants âgés de 5 à 15 ans. La loi sur le travail des femmes, des adolescents et des enfants définit l'enfant comme toute personne âgée de moins de 14 ans. La création du poste de commissaire parlementaire ou ombudsman est l'une des mesures administratives prévues par la Constitution pour garantir la protection des droits civils et constitutionnels, ajoute le rapport. Le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant est non seulement énoncé dans la législation de Sainte-Lucie, mais aussi appliqué implicitement par les autorités administratives lorsque celles-ci exécutent les lois qui touchent à la vie des enfants, à leur liberté, aux soins dont ils ont besoin et à leur sécurité.
Bien que la question du bien-fondé des châtiments corporels à l'école revienne périodiquement à l'ordre du jour, cette pratique est toujours en vigueur à Sainte-Lucie, poursuit le rapport. Il convient en outre de noter que la loi de 1972 sur les enfants et les adolescents autorise expressément les parents, les enseignants ou toute autre personne ayant la charge ou la responsabilité légale de mineurs à administrer à ces derniers des moyens de correction raisonnables. D'autres dispositions de cette même loi autorisent le placement en détention de mineurs dont l'état de dépravation est tel que les mesures normales de rééducation de suffiraient pas et, si cette mesure est prévue dans la décision judiciaire. La question de la pension alimentaire et la difficulté d'obtenir que les pères s'acquittent de leur obligation d'entretien envers leurs enfants constituent un sujet de préoccupation permanent pour plusieurs mères de famille à Sainte-Lucie, et en particulier pour les mères célibataires chefs de famille. Le Code pénal de Sainte-Lucie criminalise l'avortement, ajoute le rapport. Jusqu'à présent, Sainte-Lucie n'a pas adopté une politique nationale ou une loi spécifique relative aux droits des handicapés. La loi sur l'éducation rend obligatoire la scolarisation des enfants jusqu'à l'âge de 16 ans. Il semble toutefois que des pratiques limitées de travail des enfants aient toujours existé en milieu rural, au moment des jours de récolte des bananes. L'exploitation sexuelle des enfants à Sainte-Lucie est un problème complexe et multidimensionnel dont les origines sont d'ordre individuel, familial, socioéconomique et culturel.
Examen du rapport
La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Sainte-Lucie, MME AWA N'DEYE OUEDRAOGO, a relevé que si le pays compte un peu plus de 44 000 enfants de moins de 15 ans, aucune statistique ne permet de connaître le nombre d'enfants âgés de 15 à 18 ans. Le taux de scolarisation au niveau du primaire est assez bon, puisqu'il se situe à 91%, a poursuivi Mme Ouedraogo. Elle a souligné que le chômage est assez élevé chez les jeunes et que la pauvreté sévit dans le pays. Tout en rappelant que la présentation de ce rapport accuse un certain retard, Mme Ouedraogo l'a jugé «souvent analytique mais pas assez critique». Ce rapport suit néanmoins les directives du Comité concernant l'élaboration des rapports des États parties, a-t-elle noté.
Malgré les amendements qui y ont été apportés, la législation n'est pas suffisamment conforme aux dispositions et principes de la Convention relative aux droits de l'enfant, a poursuivi Mme Ouedraogo. Elle a en outre demandé si une politique nationale pour l'enfance avait été adoptée. La loi sur les enfants et les jeunes autorise les châtiments corporels, lesquels sont largement infligés aux enfants comme mesure disciplinaire, en particulier à l'école et dans d'autres institutions, s'est par ailleurs inquiétée Mme Ouedraogo. Elle a également fait part de sa préoccupation face aux brutalités policières, soulignant que certaines informations font même état d'exécutions extrajudiciaires.
La corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Sainte-Lucie, MME ALISON ANDERSON, a mis l'accent sur la nécessité pour le pays de prendre des mesures afin d'harmoniser les textes ayant trait à la définition de l'enfant et s'est enquise des délais que se sont éventuellement fixés les pouvoirs publics afin de procéder à cette harmonisation. Mme Anderson a souhaité en savoir davantage s'agissant de l'incidence du déclin du marché de la banane sur la situation des enfants et sur leur capacité à disposer des ressources nécessaires pour leur développement. Le pays possède-t-il des lignes d'appel d'urgence à l'attention des enfants et le médiateur parlementaire peut-il recevoir des plaintes émanant directement des enfants, a par ailleurs demandé Mme Anderson?
Un autre membre du Comité a relevé que Sainte-Lucie a adhéré à peu d'instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme. Si Sainte-Lucie a ratifié la Convention n°182 de l'OIT sur l'élimination des pires formes de travail des enfants, elle n'a en revanche toujours pas ratifié la Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi, a-t-il notamment souligné. Ce même expert, suivi par d'autres membres du Comité, a souhaité en savoir davantage sur l'âge minimum de la responsabilité pénale; il s'est en outre inquiété que des enfants de moins de 18 ans puissent apparemment être condamnés à des peines d'emprisonnement à perpétuité.
Un expert a souhaité savoir si la baisse du taux de naissance constituait un sujet de préoccupation pour les autorités de Sainte-Lucie. Un autre membre du Comité a souhaité connaître le taux d'enregistrement des naissances dans le pays.
La délégation a indiqué qu'à Sainte-Lucie, l'enregistrement des naissances peut se faire soit à l'hôpital, soit dans chaque village sur le registre de district. C'est aux parents qu'il incombe de procéder à cet enregistrement et, selon la loi, tout manquement à cet égard constitue un délit, même s'il est vrai qu'aucun mécanisme ne permet véritablement de surveiller la situation de ce point de vue, a précisé la délégation. Attirant l'attention sur l'obligation de présenter un certificat médical afin d'inscrire un enfant à l'école, la délégation a fait valoir qu'il est toujours possible de rectifier la situation si une naissance n'a pas été enregistrée dans le délai légal d'un an.
En réponse aux interrogations soulevées par l'augmentation des notifications de cas de violence à l'encontre des enfants à Sainte-Lucie, la délégation a expliqué qu'avec le déclin de l'industrie de la banane, de nombreuses mères travaillent désormais dans le secteur du tourisme et doivent donc laisser leurs enfants aux mains de beaux-pères ou d'adultes qui parfois les maltraitent.
La question des châtiments corporels est très douloureuse à Sainte-Lucie comme dans l'ensemble des Caraïbes, a affirmé la délégation, reconnaissant à cet égard que certaines dispositions législatives sont indirectement en infraction avec la Convention. La délégation a néanmoins fait part de l'existence d'un projet de protocole sur la maltraitance à l'égard des enfants. Les autorités entendent promouvoir une politique de tolérance zéro à l'égard des châtiments corporels, a assuré la délégation. Très prochainement, un plan d'action quinquennal sera inauguré à cette fin, a-t-elle précisé. Les autorités se retrouvent néanmoins en opposition avec les parents et les enseignants qui ont toujours estimé que les châtiments corporels constituaient une bonne mesure disciplinaire, a souligné la délégation.
La délégation a également fait part d'un projet de création d'un comité indépendant qui serait gardien des droits de l'enfant dans le pays.
En ce qui concerne l'âge de la responsabilité pénale, la délégation a indiqué que la loi de 1972 - antérieure à la ratification de la Convention par Sainte-Lucie - fixait l'âge minimum à 12 ans. Cette disposition a été réaffirmée par une législation adoptée en janvier dernier, a précisé la délégation. Certains voudraient que cet âge minimum soit abaissé eu égard au grand nombre de délits perpétrés par des enfants de moins de 12 ans; néanmoins, les autorités ne pensent pas que ce soit là le meilleur moyen de régler le problème, a précisé la délégation. Depuis 2001, a-t-elle ajouté, les mineurs ne peuvent pas être condamnés à plus de 3 années d'emprisonnement. Les mineurs sont envoyés dans des centres de détention pour mineurs, et si un mineur devient majeur avant la fin de sa peine, il sera alors transféré dans un centre de détention pour adultes. Un jeune de 16 à 18 ans peut, s'il commet un délit très grave, être condamné à perpétuité; mais cela n'est jamais arrivé, a par la suite indiqué la délégation. Elle a fait part de l'intention des autorités de faire en sorte que tous les mineurs de moins de 18 ans soient traités comme des enfants dans le système de justice pénale. Pour un mineur, la garde à vue dans un poste de police, sans chef d'accusation, n'est utilisée qu'à des fins d'enquête et pour une période de 72 heures maximum, a assuré la délégation. Au-delà de cette période de trois jours, la personne doit, soit être libérée, soit être accusée et déférée à un tribunal. Ce n'est que dans de très rares cas et uniquement sur décision d'un juge que la détention préventive peut se prolonger.
Souhaitant rectifier une erreur contenue dans le rapport initial de Sainte-Lucie, la délégation a indiqué que conformément au Code civil de Sainte-Lucie, tout mariage entre enfants de moins de 16 ans est nul et non avenu. Pour le mariage de jeunes âgés de 16 à 18 ans, le consentement parental est obligatoire, a précisé la délégation.
La délégation a indiqué que des conseils d'étudiants existent dans toutes les écoles de Sainte-Lucie; ce sont en quelque sorte des filiales du Conseil national de la jeunesse.
Un expert a fait observer que la résistance du Gouvernement à mettre une ligne téléphonique d'urgence à la disposition d'enfants confrontés à des problèmes parce qu'il craint d'être submergé d'appels, témoigne précisément de la nécessité de mettre en place un tel service.
Un membre du Comité a relevé que les dispositions relatives au recouvrement de la pension alimentaire sont discriminatoires selon que l'enfant est ou n'est pas issu du mariage.
En ce qui concerne les questions de santé, un membre du Comité, relevant que la prévalence du VIH/sida était de 1,7% en 2002, s'est enquis des politiques prévues en ce qui concerne cette maladie, en particulier s'agissant des enfants.
La délégation a rappelé le principe global en vigueur à Sainte-Lucie en vertu duquel les services de soins de santé sont gratuits pour les enfants et les mères, le prix du ticket modérateur étant minime. Sainte-Lucie est assez fière de ses services de soins de santé natals et prénatals, a précisé la délégation.
Un comité est en train d'œuvrer à l'élaboration d'une politique en faveur des enfants handicapés, a par ailleurs indiqué la délégation.
S'agissant des questions d'éducation, un expert s'est inquiété que tous les enfants du pays n'aient pas accès à l'éducation secondaire. Nombre d'enfants abandonnent l'école après le primaire, a ajouté cet expert. Ce qui est prohibitif pour les parents, a expliqué la délégation, ce sont les coûts des transports, de la cantine et des manuels scolaires. Aussi, des mesures ont-elles été prises pour fournir aux élèves des manuels scolaires, a fait valoir la délégation. Elle a expliqué que l'enseignement primaire obligatoire va de 6 à 15 ans; néanmoins, à partir de 12 ans, les élèves qui réussissent un examen peuvent suivre un enseignement secondaire jusqu'à l'âge de 18 ans. Malheureusement, le pays ne compte pas suffisamment d'écoles secondaires pour accueillir tous les enfants, de sorte que ceux qui ne réussissent pas cet examen retournent dans les écoles primaires jusqu'à l'âge de 15 ans. Les enfants qui ne peuvent pas aller dans les écoles secondaires peuvent aussi aller dans des écoles de secrétariat ou des écoles techniques qualifiantes.
La loi sur l'éducation interdit l'emploi à plein temps des enfants de moins de 15 ans, a précisé la délégation. Au-delà de cet âge, les jeunes peuvent contracter un emploi; en-deçà, l'emploi d'un jeune est un délit, sauf s'il s'inscrit dans le programme scolaire ou s'il s'agit seulement d'un petit boulot saisonnier.
Il n'y a pas à Sainte-Lucie de problèmes spécifiques s'agissant des enfants des rues, a par ailleurs affirmé la délégation.
La délégation a souligné que Sainte-Lucie avait un besoin pressant de foyers pour jeunes filles mineures, non seulement celles en conflit avec la loi mais aussi celles en situation de danger pour diverses raisons.
L'exploitation sexuelle et commerciale des enfants relève d'une «économie souterraine» et peu de données sont donc disponibles à ce sujet, a affirmé la délégation. Néanmoins, un rapport publié suite à une étude menée à l'échelle régionale dans les Caraïbes considère que ce phénomène ne constitue pas un problème à Sainte-Lucie, a fait valoir la délégation.
Observations préliminaires
La corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Sainte-Lucie, MME ALISON ANDERSON, a remercié la délégation pour l'expertise dont elle a fait preuve dans ses réponses aux questions des experts. Mme Anderson a relevé un certain manque de dynamisme de la société civile pour ce qui est de l'action visant à promouvoir les droits de l'enfant. Ce qui est fait en faveur des droits de l'enfant résulte des initiatives du Gouvernement plutôt qu'à l'initiative de la société civile. Aussi, il serait judicieux de revitaliser le secteur des organisations non gouvernementales dans le pays, a estimé Mme Anderson. La corapporteuse a par ailleurs constaté un affaiblissement du noyau familial. En ce qui concerne l'éducation, le principal problème semble être l'accès à une éducation de qualité pour les adolescents et les enfants handicapés, a poursuivi Mme Anderson. Pour ce qui est de la justice pour mineurs, de nombreux problèmes se posent, dont certains sont dus à la pénurie de ressources, a-t-elle ajouté.
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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
17 mai 2005
Il entame les travaux de sa trente-neuvième session en élisant
M. Jacob Egbert Doek à sa présidence
Le Comité des droits de l'enfant a entamé, aujourd'hui, les travaux de sa trente-neuvième session en examinant le rapport de Sainte-Lucie, après avoir procédé à l'élection de son bureau et entendu une déclaration d'ouverture de Mme Mehr Khan Williams, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme.
M. Jacob Egbert Doek a été réélu à la présidence au Comité; Mme Joyce Aluoch, Mme Moushira Khattab, Mme Yanghee Lee et M. Norberto Liwski ont été élus vice-présidents et Mme Nevena Vuckovi?-Sahovi? rapporteuse.
Examinant le rapport initial de Sainte-Lucie, la corapporteuse du Comité pour l'examen de ce rapport, Mme Alison Anderson, a présenté en fin de journée des observations préliminaires, relevant notamment un certain manque de dynamisme de la société civile pour promouvoir les droits de l'enfant. De nombreux problèmes se posent en outre en matière de justice pour mineurs, dont certains sont dus à la pénurie de ressources. Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Sainte-Lucie, avant de les rendre publiques à la fin de la session, le vendredi 3 juin prochain.
Entamant l'examen du rapport saint-lucien, la rapporteuse du Comité chargée de ce rapport, Mme Awa N'Deye Ouedraogo, avait pour sa part souligné que, malgré les amendements qui y ont été apportés, la législation de Sainte-Lucie n'est pas suffisamment conforme aux dispositions et principes de la Convention. La loi sur les enfants et les jeunes autorise les châtiments corporels, s'est-elle en outre inquiétée.
La délégation de Sainte-Lucie était dirigée par M. Jon Odlum, Secrétaire parlementaire au Ministère de la santé, des services humains, des affaires familiales et des questions de parité, qui a souligné que ces dernières années, le pays a vu s'opérer un changement radical dans les habitudes de sa jeunesse, ce qui a eu des répercussions sur tous les secteurs de la société. Parmi les problèmes les plus graves auxquels le pays est confronté, figure le problème des violences et autres abus contre les enfants tels que l'inceste, problèmes qui sont alimentés par la croissance des familles monoparentales dirigées par les mères, le plus souvent jeunes et inexpérimentées. Consciente de ces problèmes, Sainte-Lucie s'est notamment engagée à mettre en place un cadre législatif sur lequel une politique de changement pourrait s'appuyer. Ainsi, la réforme du droit de la famille, qui devrait aboutir cette année, porte spécifiquement sur la garde des enfants, leur statut, les soins aux enfants, la participation des enfants.
La délégation de Sainte-Lucie était également composée de la Directrice des services humains et des affaires familiales, Mme Clemencia Eugene, et de la Conseillère supérieure de la Couronne au Bureau du Procureur général, Mme Georgis Taylor-Alexander, qui ont fourni aux experts des compléments d'informations en ce qui concerne, notamment l'enregistrement des naissances; la violence contre les enfants; les châtiments corporels; l'âge de la responsabilité pénale et l'administration de la justice pour mineurs; les questions d'éducation et de santé; ainsi que le travail des enfants.
En début de séance, MM. Awich Pollar, David Brent Parfitt, Kamal Siddiqui et Jean Zermatten ont fait une déclaration solennelle en tant que nouveaux membres du Comité.
Demain à partir de 10 heures, le Comité examinera l'examen le deuxième rapport périodique des Philippines (CRC/C/65/Add.31).
Déclaration d'ouverture
MME MEHR KHAN WILLIAMS, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a souhaité une chaleureuse bienvenue aux quatre nouveaux membres du Comité, à savoir MM. Pollar, Parfitt, Siddiqui et Zermatten. Elle a également félicité ceux qui ont été réélus, à savoir Mmes Al-Thani, Aluoch, Lee, Smith et Vuckovi?-Sahovi?. Elle a enfin remercié ceux dont le mandat s'est achevé le 28 février dernier, à savoir M. Al-Sheedi, Mme Chutikul, M. Citarella et Mme Sardenberg.
Mme Khan Williams a rappelé que dans son rapport intitulé «Dans une liberté plus grande», le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a notamment proposé la création d'un Conseil des droits de l'homme, le renforcement du Haut Commissariat aux droits de l'homme et l'harmonisation des travaux des organes de traités. Rappelant que le Secrétaire général avait prié la Haut-Commissaire aux droits de l'homme de présenter, dans un délai de 60 jours, un plan d'action, Mme Khan Williams a fait part du processus de consultation des groupes régionaux mené à bien par le Haut Commissariat à cette fin. Elle a précisé que la Haut-Commissaire présenterait le 20 mai prochain son plan d'action, lequel s'inscrira dans le débat sur la réforme des Nations Unies qui se tiendra au mois de septembre prochain à New York.
Mme Khan Williams a par ailleurs rappelé que le Secrétaire général avait également demandé que soient finalisées les directives harmonisées concernant la présentation des rapports à tous les organes de traités. À cet égard, elle a souligné que le projet de directives révisées sur le document de base élargi et les rapports ciblant un traité spécifique serait examiné le mois prochain par la quatrième réunion intercomités et par la septième réunion des présidents d'organes de traités. Aussi, Mme Khan Williams a-t-elle exhorté les membres du Comité des droits de l'enfant à présenter tout commentaire ou toute suggestion qu'ils voudront bien faire à M. Kamel Filali - désigné rapporteur lors de la troisième réunion intercomités - qui présentera son rapport lors de la quatrième réunion intercomités.
S'agissant des ateliers de suivi de la Convention relative aux droits de l'enfant, Mme Khan Williams a indiqué qu'après le succès de l'atelier sous-régional de Bangkok l'an dernier, le Haut Commissariat aux droits de l'homme a décidé d'organiser cette année des ateliers de suivi similaires au Qatar (19-21 juin) et en Argentine (28-30 novembre). Une autre activité du Haut Commissariat a trait au projet, financé par l'Union européenne, qui vise à accroître la sensibilisation des organisations non gouvernementales, des institutions nationales de droits de l'homme et des médias au système des organes chargés de la surveillance des traités de droits de l'homme, a rappelé Mme Khan Williams, attirant l'attention sur l'atelier national qui s'est récemment tenu dans ce cadre à Sri Lanka. La semaine dernière, a poursuivi Mme Khan Williams, le Haut Commissariat a convoqué à Genève le quatrième d'une série d'ateliers sur la mise en œuvre des recommandations des organes de traités. Enfin, a conclu Mme Khan Williams, l'étude du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies sur la violence contre les enfants entre dans une phase cruciale avec les neuf consultations régionales organisées à travers le monde.
Présentation du rapport de Sainte-Lucie
M. JON ODLUM, Secrétaire parlementaire au Ministère de la santé, des services humains, des affaires familiales et des questions de parité de Sainte-Lucie, a rappelé que le pays est une petite île des Caraïbes peuplée de 160 000 habitants. Ces dernières années, Sainte-Lucie a vu s'opérer un changement radical dans les habitudes de sa jeunesse, ce qui a eu des répercussions sur tous les secteurs de la société. Parmi les problèmes les plus graves auxquels le pays est confronté, figure le fait que les moins de 13 ans sont devenus une espèce en danger, du fait des violences et autres abus contre les enfants tels que l'inceste, bien que peu d'éléments de preuve aient pu être réunis à ce sujet. Ces problèmes, a estimé M. Odlum, sont alimentés par la croissance des familles monoparentales dirigées par les mères, le plus souvent jeunes et inexpérimentées. Consciente de ces problèmes, Sainte-Lucie a néanmoins engagé des efforts concertés afin d'y faire face; le pays s'est engagé à mettre en place un cadre législatif sur lequel une forte politique de changement pourrait s'appuyer.
Rappelant que le rapport initial de son pays couvre la période allant de 1993 à 2003, M. Odlum a indiqué que depuis 2003, le droit de la famille a connu une évolution rapide dans la sous-région caraïbe, ce qui a eu un impact direct sur les droits de l'enfant. La réforme du droit de la famille engagée à Sainte-Lucie traite spécifiquement de la garde des enfants, de leur statut, des soins aux enfants, de la participation des enfants; maintenant que le processus de consultations concernant cette réforme est achevé, la nouvelle législation devrait entrer en vigueur avant la fin de l'année 2005, a indiqué M. Odlum. S'agissant du droit pénal, M. Odlum a fait valoir que le Code pénal entré en vigueur en janvier dernier prévoit, dans ses articles 167 à 175, des peines plus précises et plus lourdes pour un certain nombre de délits impliquant des enfants, tels que l'abandon ou encore l'enlèvement d'enfant. Le Ministère des services humains a par ailleurs créé une base de données visant la surveillance des enfants à risque et des enfants victimes de violences et d'abus.
Le Gouvernement de Sainte-Lucie œuvre énergiquement à l'universalisation des soins de santé, a poursuivi M. Odlum. Face à l'augmentation du nombre des abandons scolaires, le Ministère de l'éducation est en train de mener à bien une étude visant à évaluer scientifiquement la gravité de la situation à cet égard, a-t-il ajouté. Au début de l'année scolaire 2004, trente conseillers scolaires ont été nommés, de sorte que les enfants présentant des problèmes comportementaux et émotionnels devraient pouvoir être identifiés et recevoir l'attention requise. Le Ministère de la santé travaille actuellement à l'élaboration d'une politique de santé à l'attention des enfants et des adolescents. En outre, grâce à l'assistance du Fonds des Nations Unies pour l'enfance, un régime de formation à la gestion des violences contre les enfants devrait être mis en place. Également avec le soutien de l'UNICEF, a précisé M. Odlum, Sainte-Lucie mène actuellement une étude sur les enfants qui devrait permettre de mieux connaître les vulnérabilités de cette catégorie de la population et donc contribuer à définir des programmes et services sociaux susceptibles d'améliorer la qualité de vie des enfants.
Le rapport initial de Sainte-Lucie (CRC/C/28/Add.23) indique que le pays compte 151 143 habitants (2001) dont 28,3% ont moins de 15 ans et 61,1% moins de 34 ans. Parmi les importantes mesures législatives ayant fait suite à la ratification de la Convention, le rapport cite la loi de 1994 relative aux tribunaux chargés des affaires familiales; la loi de 1995 relative à la violence domestique; et la loi de 1996 relative aux saisies-arrêts sur salaire. Il n'existe pas, dans la législation de Sainte-Lucie, de définition unique et uniforme de l'enfant, applicable dans tous les cas, reconnaît le rapport. Ainsi la loi de 1972 sur les enfants et les adolescents définit un enfant comme «toute personne âgée de moins de 12 ans», mais qualifie de jeune toute personne âgée de moins de 16 ans et d'adolescent toute personne âgée de 12 ans mais n'ayant pas encore atteint l'âge de 16 ans. Un texte plus récent comme la loi de 1995 sur la violence domestique considère comme enfant toute personne âgée de 18 ans maximum. La loi de 1972 sur les enfants et les adolescents fixe un âge précis pour la responsabilité pénale, en disposant qu' «aucun enfant de moins de 12 ans ne peut être déclaré coupable d'une quelconque infraction». Le Code pénal donne toutefois une définition différente, puisqu'il dispose qu' «aucun acte commis par un enfant âgé de moins de 8 ans ne peut être qualifié d'infraction». La loi de 1999 sur l'éducation a pour objet de promouvoir l'accès à l'enseignement primaire et secondaire pour tous les enfants âgés de 5 à 15 ans. La loi sur le travail des femmes, des adolescents et des enfants définit l'enfant comme toute personne âgée de moins de 14 ans. La création du poste de commissaire parlementaire ou ombudsman est l'une des mesures administratives prévues par la Constitution pour garantir la protection des droits civils et constitutionnels, ajoute le rapport. Le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant est non seulement énoncé dans la législation de Sainte-Lucie, mais aussi appliqué implicitement par les autorités administratives lorsque celles-ci exécutent les lois qui touchent à la vie des enfants, à leur liberté, aux soins dont ils ont besoin et à leur sécurité.
Bien que la question du bien-fondé des châtiments corporels à l'école revienne périodiquement à l'ordre du jour, cette pratique est toujours en vigueur à Sainte-Lucie, poursuit le rapport. Il convient en outre de noter que la loi de 1972 sur les enfants et les adolescents autorise expressément les parents, les enseignants ou toute autre personne ayant la charge ou la responsabilité légale de mineurs à administrer à ces derniers des moyens de correction raisonnables. D'autres dispositions de cette même loi autorisent le placement en détention de mineurs dont l'état de dépravation est tel que les mesures normales de rééducation de suffiraient pas et, si cette mesure est prévue dans la décision judiciaire. La question de la pension alimentaire et la difficulté d'obtenir que les pères s'acquittent de leur obligation d'entretien envers leurs enfants constituent un sujet de préoccupation permanent pour plusieurs mères de famille à Sainte-Lucie, et en particulier pour les mères célibataires chefs de famille. Le Code pénal de Sainte-Lucie criminalise l'avortement, ajoute le rapport. Jusqu'à présent, Sainte-Lucie n'a pas adopté une politique nationale ou une loi spécifique relative aux droits des handicapés. La loi sur l'éducation rend obligatoire la scolarisation des enfants jusqu'à l'âge de 16 ans. Il semble toutefois que des pratiques limitées de travail des enfants aient toujours existé en milieu rural, au moment des jours de récolte des bananes. L'exploitation sexuelle des enfants à Sainte-Lucie est un problème complexe et multidimensionnel dont les origines sont d'ordre individuel, familial, socioéconomique et culturel.
Examen du rapport
La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Sainte-Lucie, MME AWA N'DEYE OUEDRAOGO, a relevé que si le pays compte un peu plus de 44 000 enfants de moins de 15 ans, aucune statistique ne permet de connaître le nombre d'enfants âgés de 15 à 18 ans. Le taux de scolarisation au niveau du primaire est assez bon, puisqu'il se situe à 91%, a poursuivi Mme Ouedraogo. Elle a souligné que le chômage est assez élevé chez les jeunes et que la pauvreté sévit dans le pays. Tout en rappelant que la présentation de ce rapport accuse un certain retard, Mme Ouedraogo l'a jugé «souvent analytique mais pas assez critique». Ce rapport suit néanmoins les directives du Comité concernant l'élaboration des rapports des États parties, a-t-elle noté.
Malgré les amendements qui y ont été apportés, la législation n'est pas suffisamment conforme aux dispositions et principes de la Convention relative aux droits de l'enfant, a poursuivi Mme Ouedraogo. Elle a en outre demandé si une politique nationale pour l'enfance avait été adoptée. La loi sur les enfants et les jeunes autorise les châtiments corporels, lesquels sont largement infligés aux enfants comme mesure disciplinaire, en particulier à l'école et dans d'autres institutions, s'est par ailleurs inquiétée Mme Ouedraogo. Elle a également fait part de sa préoccupation face aux brutalités policières, soulignant que certaines informations font même état d'exécutions extrajudiciaires.
La corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Sainte-Lucie, MME ALISON ANDERSON, a mis l'accent sur la nécessité pour le pays de prendre des mesures afin d'harmoniser les textes ayant trait à la définition de l'enfant et s'est enquise des délais que se sont éventuellement fixés les pouvoirs publics afin de procéder à cette harmonisation. Mme Anderson a souhaité en savoir davantage s'agissant de l'incidence du déclin du marché de la banane sur la situation des enfants et sur leur capacité à disposer des ressources nécessaires pour leur développement. Le pays possède-t-il des lignes d'appel d'urgence à l'attention des enfants et le médiateur parlementaire peut-il recevoir des plaintes émanant directement des enfants, a par ailleurs demandé Mme Anderson?
Un autre membre du Comité a relevé que Sainte-Lucie a adhéré à peu d'instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme. Si Sainte-Lucie a ratifié la Convention n°182 de l'OIT sur l'élimination des pires formes de travail des enfants, elle n'a en revanche toujours pas ratifié la Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi, a-t-il notamment souligné. Ce même expert, suivi par d'autres membres du Comité, a souhaité en savoir davantage sur l'âge minimum de la responsabilité pénale; il s'est en outre inquiété que des enfants de moins de 18 ans puissent apparemment être condamnés à des peines d'emprisonnement à perpétuité.
Un expert a souhaité savoir si la baisse du taux de naissance constituait un sujet de préoccupation pour les autorités de Sainte-Lucie. Un autre membre du Comité a souhaité connaître le taux d'enregistrement des naissances dans le pays.
La délégation a indiqué qu'à Sainte-Lucie, l'enregistrement des naissances peut se faire soit à l'hôpital, soit dans chaque village sur le registre de district. C'est aux parents qu'il incombe de procéder à cet enregistrement et, selon la loi, tout manquement à cet égard constitue un délit, même s'il est vrai qu'aucun mécanisme ne permet véritablement de surveiller la situation de ce point de vue, a précisé la délégation. Attirant l'attention sur l'obligation de présenter un certificat médical afin d'inscrire un enfant à l'école, la délégation a fait valoir qu'il est toujours possible de rectifier la situation si une naissance n'a pas été enregistrée dans le délai légal d'un an.
En réponse aux interrogations soulevées par l'augmentation des notifications de cas de violence à l'encontre des enfants à Sainte-Lucie, la délégation a expliqué qu'avec le déclin de l'industrie de la banane, de nombreuses mères travaillent désormais dans le secteur du tourisme et doivent donc laisser leurs enfants aux mains de beaux-pères ou d'adultes qui parfois les maltraitent.
La question des châtiments corporels est très douloureuse à Sainte-Lucie comme dans l'ensemble des Caraïbes, a affirmé la délégation, reconnaissant à cet égard que certaines dispositions législatives sont indirectement en infraction avec la Convention. La délégation a néanmoins fait part de l'existence d'un projet de protocole sur la maltraitance à l'égard des enfants. Les autorités entendent promouvoir une politique de tolérance zéro à l'égard des châtiments corporels, a assuré la délégation. Très prochainement, un plan d'action quinquennal sera inauguré à cette fin, a-t-elle précisé. Les autorités se retrouvent néanmoins en opposition avec les parents et les enseignants qui ont toujours estimé que les châtiments corporels constituaient une bonne mesure disciplinaire, a souligné la délégation.
La délégation a également fait part d'un projet de création d'un comité indépendant qui serait gardien des droits de l'enfant dans le pays.
En ce qui concerne l'âge de la responsabilité pénale, la délégation a indiqué que la loi de 1972 - antérieure à la ratification de la Convention par Sainte-Lucie - fixait l'âge minimum à 12 ans. Cette disposition a été réaffirmée par une législation adoptée en janvier dernier, a précisé la délégation. Certains voudraient que cet âge minimum soit abaissé eu égard au grand nombre de délits perpétrés par des enfants de moins de 12 ans; néanmoins, les autorités ne pensent pas que ce soit là le meilleur moyen de régler le problème, a précisé la délégation. Depuis 2001, a-t-elle ajouté, les mineurs ne peuvent pas être condamnés à plus de 3 années d'emprisonnement. Les mineurs sont envoyés dans des centres de détention pour mineurs, et si un mineur devient majeur avant la fin de sa peine, il sera alors transféré dans un centre de détention pour adultes. Un jeune de 16 à 18 ans peut, s'il commet un délit très grave, être condamné à perpétuité; mais cela n'est jamais arrivé, a par la suite indiqué la délégation. Elle a fait part de l'intention des autorités de faire en sorte que tous les mineurs de moins de 18 ans soient traités comme des enfants dans le système de justice pénale. Pour un mineur, la garde à vue dans un poste de police, sans chef d'accusation, n'est utilisée qu'à des fins d'enquête et pour une période de 72 heures maximum, a assuré la délégation. Au-delà de cette période de trois jours, la personne doit, soit être libérée, soit être accusée et déférée à un tribunal. Ce n'est que dans de très rares cas et uniquement sur décision d'un juge que la détention préventive peut se prolonger.
Souhaitant rectifier une erreur contenue dans le rapport initial de Sainte-Lucie, la délégation a indiqué que conformément au Code civil de Sainte-Lucie, tout mariage entre enfants de moins de 16 ans est nul et non avenu. Pour le mariage de jeunes âgés de 16 à 18 ans, le consentement parental est obligatoire, a précisé la délégation.
La délégation a indiqué que des conseils d'étudiants existent dans toutes les écoles de Sainte-Lucie; ce sont en quelque sorte des filiales du Conseil national de la jeunesse.
Un expert a fait observer que la résistance du Gouvernement à mettre une ligne téléphonique d'urgence à la disposition d'enfants confrontés à des problèmes parce qu'il craint d'être submergé d'appels, témoigne précisément de la nécessité de mettre en place un tel service.
Un membre du Comité a relevé que les dispositions relatives au recouvrement de la pension alimentaire sont discriminatoires selon que l'enfant est ou n'est pas issu du mariage.
En ce qui concerne les questions de santé, un membre du Comité, relevant que la prévalence du VIH/sida était de 1,7% en 2002, s'est enquis des politiques prévues en ce qui concerne cette maladie, en particulier s'agissant des enfants.
La délégation a rappelé le principe global en vigueur à Sainte-Lucie en vertu duquel les services de soins de santé sont gratuits pour les enfants et les mères, le prix du ticket modérateur étant minime. Sainte-Lucie est assez fière de ses services de soins de santé natals et prénatals, a précisé la délégation.
Un comité est en train d'œuvrer à l'élaboration d'une politique en faveur des enfants handicapés, a par ailleurs indiqué la délégation.
S'agissant des questions d'éducation, un expert s'est inquiété que tous les enfants du pays n'aient pas accès à l'éducation secondaire. Nombre d'enfants abandonnent l'école après le primaire, a ajouté cet expert. Ce qui est prohibitif pour les parents, a expliqué la délégation, ce sont les coûts des transports, de la cantine et des manuels scolaires. Aussi, des mesures ont-elles été prises pour fournir aux élèves des manuels scolaires, a fait valoir la délégation. Elle a expliqué que l'enseignement primaire obligatoire va de 6 à 15 ans; néanmoins, à partir de 12 ans, les élèves qui réussissent un examen peuvent suivre un enseignement secondaire jusqu'à l'âge de 18 ans. Malheureusement, le pays ne compte pas suffisamment d'écoles secondaires pour accueillir tous les enfants, de sorte que ceux qui ne réussissent pas cet examen retournent dans les écoles primaires jusqu'à l'âge de 15 ans. Les enfants qui ne peuvent pas aller dans les écoles secondaires peuvent aussi aller dans des écoles de secrétariat ou des écoles techniques qualifiantes.
La loi sur l'éducation interdit l'emploi à plein temps des enfants de moins de 15 ans, a précisé la délégation. Au-delà de cet âge, les jeunes peuvent contracter un emploi; en-deçà, l'emploi d'un jeune est un délit, sauf s'il s'inscrit dans le programme scolaire ou s'il s'agit seulement d'un petit boulot saisonnier.
Il n'y a pas à Sainte-Lucie de problèmes spécifiques s'agissant des enfants des rues, a par ailleurs affirmé la délégation.
La délégation a souligné que Sainte-Lucie avait un besoin pressant de foyers pour jeunes filles mineures, non seulement celles en conflit avec la loi mais aussi celles en situation de danger pour diverses raisons.
L'exploitation sexuelle et commerciale des enfants relève d'une «économie souterraine» et peu de données sont donc disponibles à ce sujet, a affirmé la délégation. Néanmoins, un rapport publié suite à une étude menée à l'échelle régionale dans les Caraïbes considère que ce phénomène ne constitue pas un problème à Sainte-Lucie, a fait valoir la délégation.
Observations préliminaires
La corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Sainte-Lucie, MME ALISON ANDERSON, a remercié la délégation pour l'expertise dont elle a fait preuve dans ses réponses aux questions des experts. Mme Anderson a relevé un certain manque de dynamisme de la société civile pour ce qui est de l'action visant à promouvoir les droits de l'enfant. Ce qui est fait en faveur des droits de l'enfant résulte des initiatives du Gouvernement plutôt qu'à l'initiative de la société civile. Aussi, il serait judicieux de revitaliser le secteur des organisations non gouvernementales dans le pays, a estimé Mme Anderson. La corapporteuse a par ailleurs constaté un affaiblissement du noyau familial. En ce qui concerne l'éducation, le principal problème semble être l'accès à une éducation de qualité pour les adolescents et les enfants handicapés, a poursuivi Mme Anderson. Pour ce qui est de la justice pour mineurs, de nombreux problèmes se posent, dont certains sont dus à la pénurie de ressources, a-t-elle ajouté.
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