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COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT: JOURNÉE DE DISCUSSION GÉNÉRALE SUR LE SECTEUR PRIVÉ EN TANT QUE PRESTATAIRE DE SERVICES

20 Septembre 2002



CRC
31ème session
20 septembre 2002



Ouvrant le débat, le Haut-Commissaire aux droits de l'homme
fait sa première apparition publique devant un organe de traité
des Nations Unies depuis son entrée en fonction



Le Comité des droits de l'enfant a tenu aujourd'hui une journée de discussion générale sur le thème du «secteur privé en tant que prestataire de services et son rôle dans la mise en œuvre des droits de l'enfant». Ouvrant le débat ce matin, le Haut Commissaire aux droits de l'homme, M. Sérgio Vieira de Mello, a fait sa première apparition publique devant un organe de traité des Nations Unies depuis son entrée en fonction la semaine dernière. Il a notamment souligné, dans le cadre du bébat d'aujourd'hui, que la question importante n'est pas de savoir si les services sont meilleurs selon qu'ils sont fournis par le secteur privé ou par le secteur public mais comment, ensemble, nous pouvons nous assurer que les services appropriés soient fournis à tous les enfants.
À l'issue de cette journée de débat, le Comité a entendu les deux groupes de travail qu'il avait créés pour l'occasion, qui ont présenté leurs rapports respectifs. L'un (groupe de travail I) était chargé d'étudier la manière dont les obligations au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant se traduisent sur le terrain pour les acteurs sous-traitant les services aux enfants à des prestataires privés et l'autre (groupe de travail II) la manière dont les obligations au titre de la Convention se traduisent sur le terrain pour les prestataires privés eux-mêmes (entreprises, ONG, fondations.).
Faisant rapport sur les discussions qui se sont tenues au sein du groupe de travail I, M. John Hilary, modérateur du groupe et conseiller auprès de Save the Children, a indiqué qu'il ressort du débat que tout le monde s'accorde pour dire que les gouvernements sont les seuls responsables pour ce qui est de garantir le plein exercice des droits de l'enfant et que les gouvernements sont aussi les seuls responsables des choix politiques susceptibles d'être faits concernant la participation du secteur privé.
S'agissant des débats au sein du groupe de travail II, Mme Agnès Callamard, modératrice du groupe et représentante de Humanitarian Accountability Project, a indiqué qu'ils s'étaient notamment articulés autour de la nécessité de parvenir à un contrôle indépendant du respect par les prestataires des dispositions de la Convention, si possible par des experts de terrain. Sans bon système de plainte véritablement accessible, la notion d'auto-réglementation ne saurait avoir de sens, a-t-il également été souligné dans ce groupe.
Résumant cette journée de discussion en mettant l'accent sur les propositions concrètes qui ont été avancées, le Président du Comité, M. Jacob Egbert Doek, a notamment indiqué qu'il a été suggéré au Comité de rédiger une déclaration modèle dans laquelle les organisations non gouvernementales et autres acteurs non étatiques, à but lucratif ou non, exprimeraient leur engagement à respecter les droits inscrits dans la Convention relative aux droits de l'enfant. M. Doek a par ailleurs souligné que le besoin d'auto-réglementation, du point de vue de l'intervention des différents prestataires de services aux fins de la mise en œuvre des droits de l'enfant, ne fait aucun doute et que cette auto-réglementation doit être efficace.
En début de journée, le Rapporteur spécial sur le droit à la santé, M. Paul Hunt, qui est également membre du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, a fait une déclaration dans laquelle il a souligné que le droit international n'est ni pour ni contre la privatisation des services et que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels n'exige ni n'exclut aucune forme de gouvernement ni aucun système économique, pourvu qu'ils soient démocratiques et que tous les droits de l'homme soient respectés.
S'agissant notamment du droit à une eau salubre M. Hunt a souligné que la privatisation des services d'eau est une question de droits de l'homme relevant du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Lundi matin, à 10 heures, le Comité examinera le deuxième rapport périodique des Seychelles (CRC/C/3/Add.64).

Déclaration du Haut Commissaire aux droits de l'homme
M. SÉRGIO VIEIRA DE MELLO, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a souligné que son intervention aujourd'hui devant le Comité des droits de l'enfant constitue sa première apparition publique devant un organe de traité des Nations Unies depuis son entrée en fonction la semaine dernière. Aucun être humain n'a plus besoin de protection et d'aide que les jeunes et aucun être humain ne recèle davantage d'espoir pour l'avenir que les jeunes, a ensuite déclaré le Haut-Commissaire aux droits de l'homme. Il a assuré bien connaître la souffrance qu'endurent nombre d'enfants de par le monde. M. Vieira de Mello a invité chacun à réfléchir au rôle que jouent le secteur privé et les partenariats entre le public et le privé dans les pays qui se relèvent d'un conflit et qui offrent généralement d'importantes possibilités d'investissement. La question importante n'est pas de savoir si les services sont meilleurs selon qu'ils sont fournis par le secteur privé ou par le secteur public mais comment, ensemble, nous pouvons nous assurer que les services appropriés soient fournis à tous les enfants.
Cette journée de discussion générale doit déboucher sur des résultats concrets, a poursuivi M. Vieira de Mello. Il s'est dit choqué de voir le peu de connaissances qu'ont la plupart des gens de l'existence même d'organes tels que le Comité des droits de l'enfant.

Aperçu du débat
Le Président du Comité, M. JACOB EGBERT DOEK, a fait observer que le thème de cette journée de discussion générale ne découle pas de manière naturelle de la Convention relative aux droits de l'enfant. En effet, le secteur privé n'est pas mentionné du tout dans la Convention. Les juristes objecteront donc, non sans raison, que les obligations et droits de ce secteur ne sauraient être basés sur la Convention, a relevé M. Doek. Néanmoins, le secteur privé est souvent très impliqué dans la promotion du bien-être des enfants et constitue donc un acteur de taille pour la mise en œuvre des droits de l'enfant en fournissant toute une gamme de services à travers le monde, a-t-il souligné. Le Président du Comité s'est fait l'écho de la préoccupation croissante exprimée par les différents comités et rapporteurs spéciaux des Nations Unies face à la tendance croissante à une privatisation non seulement des entreprises commerciales détenues par l'État mais aussi des services visant à satisfaire les besoins fondamentaux en matière notamment d'eau, de santé et d'éducation.
M. Doek a notamment indiqué avoir reçu des contributions, émanant en particulier d'organisations non gouvernementales, qui affirment qu'il faut s'opposer à l'idée de tirer un revenu de l'incarcération d'enfants et recommandaient au Comité de ne pas soutenir la privatisation des centres de détention pour enfants. D'autres contributions soulignent qu'il vaut mieux avoir des services lucratifs durables plutôt que de compter sur un service public déficient qui n'atteint que la classe moyenne. M. Doek a rappelé que l'objet de cette journée de discussion n'est pas de décider si le Comité est pour ou contre le secteur privé.
M. PAUL HUNT, membre du Comité des droits économiques, sociaux et culturels et Rapporteur spécial sur le droit à la santé, a attiré l'attention sur les obligations des États en matière de fourniture de services en rappelant que le droit international n'est ni pour ni contre la privatisation des services. En effet, pour promouvoir la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels n'exige ni n'exclut aucune forme de gouvernement ni aucun système économique, pourvu qu'ils soient démocratiques et que tous les droits de l'homme soient respectés. S'agissant du droit à la santé, M. Hunt a mis l'accent sur la nécessité de bien saisir les normes en vertu desquelles existent des obligations dans ce domaine. Pour sa part, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels estime que le droit à la santé va au-delà du droit aux soins de santé. Il existe en effet des prémisses tels que le droit à une eau salubre et le droit à un logement convenable, pour n'en citer que deux, a expliqué M. Hunt. Il en découle que la privatisation des services d'eau est une question de droits de l'homme relevant du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, a ajouté le Rapporteur spécial. Comme l'a souligné le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, les biens, services et installations de santé doivent être accessibles à tous et être de bonne qualité, a par ailleurs rappelé M. Hunt. Au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, on attend donc d'un État qu'il s'assure que les installations et services de santé, qu'ils soient à la charge du secteur privé ou du secteur public, soient accessibles à tous et de bonne qualité.
M. Hunt a affirmé que le droit à la santé impose aux États parties l'obligation de s'abstenir d'interférer ou de laisser un tiers interférer dans la jouissance du droit à la santé. Le droit à la santé impose également aux États parties d'adopter les mesures nécessaires afin d'assurer la mise en œuvre de ce droit. L'État peut privatiser les services de santé mais il ne saurait privatiser ses obligations internationales en matière de droits de l'homme. Ces obligations demeurent même lorsque ce sont des acteurs privés qui fournissent les services considérés.

Présentation des rapports des deux groupes de travail
Faisant rapport sur les discussions qui se sont tenues au sein du groupe de travail chargé d'étudier la manière dont les obligations au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant se traduisent sur le terrain pour les acteurs sous-traitant les services aux enfants à des prestataires privés, M. JOHN HILARY, modérateur du groupe de travail I et Conseiller auprès de Save the Children, a mis l'accent sur le caractère nourri du débat qui s'est tenu au sein de ce groupe de travail. Il ressort de la discussion qu'a tenue le groupe de travail que tout le monde s'accorde pour dire que les gouvernements sont les seuls responsables pour ce qui est de garantir le plein exercice des droits de l'enfant et que les gouvernements sont aussi les seuls responsables des choix politiques susceptibles d'être faits concernant la participation du secteur privé. Chacun s'est accordé lors de la discussion pour reconnaître que ces choix politiques sont complexes et doivent tenir compte des situations spécifiques de chaque société.
Le groupe de travail a évoqué la situation des États qui doivent suivre les prescriptions du FMI, de la Banque mondiale ou de l'OMC et doivent en accepter les conditionnalités, ce qui impose des restrictions à la capacité des gouvernements à s'acquitter de leurs obligations au titre de la Convention. Aussi, a-t-il été préconisé que les pays développés, dont la présence au sein de ces institutions est forte, accordent un rang de priorités élevé à leurs obligations au titre de la Convention.
Dans tous ces domaines, il n'est pas possible de s'en tenir à une auto-réglementation et il est essentiel de faire valoir les obligations fondamentales et la responsabilité de l'État, a-t-il été souligné au sein du groupe de travail. La régulation doit s'exercer tant au niveau national qu'au niveau international, à la fois par le biais de codes spécifiques à certains secteurs et par le biais de principes généraux, dans l'esprit de ceux que tend à promouvoir le projet de la Sous-Commission relatif aux principes de droits de l'homme à l'intention des sociétés transnationales. Le groupe de travail a par ailleurs débattu de la corruption comme violation du droit de l'enfant aux services concernés.
Présentant le rapport du groupe de travail chargé d'étudier la manière dont les obligations au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant se traduisent sur le terrain pour les prestataires privés eux-mêmes (ONG, fondations, entreprises privées…), MME AGNÈS CALLAMARD, modératrice du groupe de travail II et représentante de Humanitarian Accountability Project, a indiqué que son groupe en est arrivé à l'idée que la question de l'auto-réglementation est un élément important du débat et que cette auto-réglementation ne doit pas être confondue avec une quelconque auto-accréditation. Il est en outre nécessaire de parvenir à un contrôle indépendant du respect, par les prestataires de services, des dispositions de la Convention – contrôle qui devrait si possible être exercé par des experts de terrain. En effet, sans contrôle, il est impossible de parvenir à une auto-réglementation efficace. Outre des codes de bonne conduite, il convient donc d'élaborer des indicateurs, a-t-il été souligné.
Le groupe de travail a en outre mis l'accent sur l'importance d'assurer que la collectivité concernée puisse réagir et critiquer. Sans bon système de plainte véritablement accessible, l'auto-réglementation ne saurait avoir de sens, a-t-il également été souligné dans ce groupe de travail. Le groupe a également relevé que dans bon nombre de cas, les normes existantes pour le secteur privé sont plus élevées que celles du secteur public et qu'il convient donc alors d'élever les normes du secteur public.

Résumé de la journée de discussion par le Président du Comité
Résumant cette journée de discussion en mettant l'accent sur les propositions concrètes qui ont été avancées, M. JACOB EGBERT DOEK, Président du Comité des droits de l'enfant, a notamment indiqué qu'il a été suggéré au Comité de rédiger une déclaration modèle dans laquelle les organisations non gouvernementales et autres acteurs non étatiques, à but lucratif ou non, exprimeraient leur engagement à de respecter les droits inscrits dans la Convention relative aux droits de l'enfant.
Soulignant par ailleurs que l'accent a été mis sur l'importance de la participation des enfants et sur le rôle essentiel des enfants dans les activités des entités non étatiques, M. Doek a souligné que le Comité envisage la possibilité de rédiger une recommandation générale sur la question de la participation des enfants. Le Président du Comité n'a toutefois pas caché qu'il s'agit là d'une question difficile.
M. Doek a par ailleurs souligné que le besoin d'auto-réglementation, du point de vue de l'intervention des différents prestataires de services aux fins de la mise en œuvre des droits de l'enfant, ne fait aucun doute et que cette auto-réglementation doit être efficace.
Si le Comité reconnaît que les États parties doivent respecter les dispositions de la Convention, il n'en demeure pas moins que tous les autres membres et acteurs de la société ont également des responsabilités à cet égard, a déclaré en conclusion M. Doek.



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