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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

21 Janvier 2009

Comité des droits de l'enfant
21 janvier 2009

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le deuxième rapport périodique de la République démocratique du Congo sur les mesures prises par cet État partie pour donner effet aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

M. Upio Kakura Wapol, Ministre des droits humains de la République démocratique du Congo, a souligné qu'en dépit de l'environnement politique et économique marqué par la guerre à l'Est du pays et au regard des violations massives des droits de l'homme que cette situation entraîne inévitablement, le Gouvernement a inscrit parmi ses priorités la promotion et la protection des droits et libertés consacrés par les différents instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Il a informé le Comité que la Loi du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant réunit en un seul texte toutes les dispositions légales concernant l'enfant, en même temps qu'elle les adapte aux normes internationales. Le pays a en outre lancé un plan d'action national pour la prévention et la lutte contre les violences faites aux enfants. Le Ministre a aussi attiré l'attention sur la politique nationale dans le domaine de l'éducation fondée sur le principe de gratuité de l'enseignement de base, l'inscription massive des enfants en âge de scolarité et la réhabilitation et la construction d'écoles. S'agissant des enfants en conflit avec la loi, des réformes en profondeur entreprises depuis 2001 vont aboutir à la création de tribunaux pour enfants, prévus par la Loi de protection de l'enfant qui vient d'être adoptée.

La délégation était également composée de la Ministre du genre, de la famille et de l'enfant, Mme Marie-Ange Lukiana Mufwankolo, et du Représentant permanent de la République démocratique du Congo auprès des Nations Unies à Genève, M. Antoine Mindua Kesia-Mbe; ainsi que d'autres représentants des ministères sus-mentionnés, de même que des Ministères de la justice, de la coopération internationale et régionale, de la santé et des affaires étrangères. Elle a fourni des compléments d'information en ce qui concerne, entre autres, les questions budgétaires; les mesures prises en matière de lutte contre les violences sexuelles; la lutte contre la corruption et l'impunité; l'enregistrement des naissances; les enfants des rues; les enfants sorciers; le travail des enfants; l'adoption; les questions de santé et d'éducation; ainsi que l'implication d'enfants dans le conflit armé. À cet égard, la délégation a notamment indiqué que les forces armées régulières ont pris des mesures afin qu'il n'y ait plus d'enfants dans leurs rangs.

La rapporteuse du Comité chargée de l'examen du rapport, Mme Moushira Khattab, a exprimé l'espoir que la paix soit bientôt instaurée dans le pays, tant il est vrai que le conflit armé reste l'un des principaux obstacles à l'application de la Convention. En attendant, l'État se doit de respecter et de protéger les droits de l'enfant pendant le conflit armé, a-t-elle souligné. Tous les groupes armés ainsi que les forces armées doivent respecter les droits de l'enfant, a insisté Mme Khattab. Elle a félicité le pays pour l'adoption toute récente de la Loi sur la protection de l'enfant. Le Comité devrait lui recommander de mettre en œuvre un plan national d'action concentré sur les enfants marginalisés, notamment les enfants victimes de discrimination comme les filles, les enfants affectés par le conflit armé, les enfants affectés par la pauvreté ou encore les enfants affectés par le VIH/sida. La discrimination existante dans le pays reste l'un des principaux sujets de préoccupation, a souligné Mme Khattab.

Des observations finales du Comité sur le rapport de la République démocratique du Congo seront rendues publiques à l'issue de la session, le vendredi 30 janvier 2009.


À sa prochaine séance publique, vendredi matin à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport présenté par la République populaire démocratique de Corée.


Présentation du rapport

M. UPIO KAKURA WAPOL, Ministre des droits humains de la République démocratique du Congo, a souligné qu'en dépit de l'environnement politique et économique marqué par la guerre récurrente à l'Est du pays et au regard des violations massives des droits de l'homme que cette situation entraîne inévitablement, le Gouvernement a inscrit parmi ses priorités la promotion et la protection des droits fondamentaux et des libertés individuelles consacrés par les différents instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et aux droits de l'enfant en particulier.

M. Wapol a indiqué que son pays vient de se doter de la loi du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant. Il s'agit d'une avancée significative dans le processus de promotion et de protection des droits de l'enfant, a-t-il souligné.

Le Ministre des droits humains a par ailleurs rendu compte des efforts déployés par son pays pour rattraper le retard pris dans la soumission des rapports initiaux concernant les deux protocoles facultatifs à la Convention. Ainsi, a-t-il précisé, le rapport dû au titre du Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés a-t-il été rédigé et transmis au Secrétaire général des Nations Unies. S'agissant de l'autre Protocole, relatif à la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, l'élaboration du rapport y relatif est prévue pour le second semestre de cette année, a-t-il ajouté.

Depuis la présentation de son rapport initial, a poursuivi M. Wapol, la République démocratique du Congo a fourni un effort considérable: d'une part pour ratifier la plupart des conventions internationales et régionales de protection des droits de l'enfant, notamment les deux protocoles à la Convention relative aux droits de l'enfant et les conventions n°138 et 182 de l'Organisation internationale du travail, et, d'autre part, pour adapter sa législation interne aux normes internationales en matière de protection des enfants. À cet égard, M. Wapol a souligné que, pour la première fois, la Constitution a donné une définition de l'enfant en son article 41 qui dispose que «l'enfant mineur est toute personne, sans distinction de sexe, qui n'a pas encore atteint 18 ans révolus». Le Ministre a par ailleurs fait observer que la loi du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant a le mérite de réunir en un seul texte toutes les dispositions légales concernant l'enfant, en même temps qu'elle les adapte aux normes internationales. Depuis 1998, a ajouté M. Wapol, a été créé un Conseil national de l'enfant chargé de coordonner les activités de mise en œuvre de la Convention et dont la réforme est en cours pour améliorer ses performances. En outre, a fait valoir le Ministre, les ressources budgétaires consacrées aux secteurs sociaux sont en constante augmentation depuis 2001, la part du budget national de l'éducation étant passé de 3% en 2004 à 8,2% en 2008.

En ce qui concerne l'enregistrement des naissances, a poursuivi M. Wapol, le plan national d'action mis sur pied en 2004 pour augmenter le nombre d'enfants déclarés à l'état civil a été intégré en 2008 dans un plan global de re-dynamisation de l'état civil qui est en cours de finalisation. La mise en œuvre de ce plan a déjà produit des résultats encourageants, a assuré le Ministre, précisant que le nombre de naissances déclarées à l'état civil est passé, dans la ville de Kinshasa, de 25,9% en 2001 à 45% en 2008.

Les droits de l'enfant liés à sa survie, à son développement, à sa protection et à sa participation font l'objet d'une attention particulière du Gouvernement, a poursuivi le ministre. Toutefois, le Gouvernement déplore que les efforts consentis dans ce domaine avec l'appui des partenaires sont partiellement annihilés par la résurgence de la guerre à l'Est du pays, dont les premières victimes sont naturellement et malheureusement les enfants et les femmes – qui constituent la majorité des 950 000 personnes déplacées recensées dans les provinces Orientale, du Nord et du Sud-Kivu. Cette guerre a causé plus de cinq millions de morts, a rappelé le Ministre des droits humains; elle occasionne des recrutements de milliers d'enfants par des bandes armées, a-t-il ajouté. Le Gouvernement ne ménage aucun effort pour mettre fin à cette situation, afin de permettre aux institutions légitimes issues des élections libres et démocratiques de consacrer un peu plus de ressources aux secteurs ayant une incidence sur le bien-être des enfants.

En ce qui concerne la lutte contre les violences, abus et exploitations de tous genres, ce sont surtout les enfants abandonnés, parmi lesquels les enfants taxés de sorcellerie, qui subissent les pires traitements, a poursuivi le Ministre. Ayant pris la mesure de cette situation, la République démocratique du Congo a inscrit dans la Constitution la lutte contre les violences et maltraitances dont les enfants sont victimes, a-t-il indiqué. En outre, un plan d'action national pour la prévention et la lutte contre les violences faites aux enfants est mis en œuvre et diverses lois nationales prévoient de lourdes sanctions à l'encontre des auteurs de telles violences.

Dans le domaine de l'éducation, M. Wapol a fait valoir que le Gouvernement met en œuvre la politique nationale tendant à assurer l'accès à l'éducation à tous les enfants. Les principaux piliers de cette politique nationale sont: le principe de gratuité de l'enseignement de base, consacré par la Constitution; l'inscription massive des enfants en âge de scolarité, en ciblant en particulier les filles; la réhabilitation et la construction d'écoles. Cette politique a permis d'obtenir des résultats encourageants, notamment du point de vue des taux d'inscription, qui sont en augmentation régulière depuis 2006, a indiqué le Ministre des droits humains.

S'agissant des enfants en conflit avec la loi, a poursuivi M. Wapol, des réformes en profondeur entreprises depuis 2001 vont aboutir à la création de tribunaux pour enfants prévus par la Loi de protection de l'enfant du 10 janvier dernier.

En dépit des efforts fournis par le Gouvernement et des progrès accomplis, les difficultés persistent dans l'application de la Convention, a conclu le Ministre. Il a réaffirmé l'engagement de la République démocratique du Congo d'assumer la réalisation de tous les droits garantis au titre de la Convention, en tenant compte des recommandations que présentera le Comité à l'issue du présent dialogue.


Le deuxième rapport périodique de la République démocratique du Congo (CRC/C/COD/2) indique que le Gouvernement, conscient du retard accumulé dans l'accomplissement de ses obligations internationales, a mis sur pied sous la coordination du Ministère des droits humains, un nouveau Comité interministériel chargé de l'élaboration des rapports initiaux et périodiques pour tous les instruments internationaux ratifiés par le pays. Il rappelle que le Dialogue intercongolais a abouti à la signature de l'Accord global et inclusif, le 17 décembre 2002, à Pretoria, en Afrique du Sud. Sur la base de cet accord politique, une Constitution a été adoptée et promulguée, le 4 avril 2003, permettant ainsi la mise sur pied d'un gouvernement de transition incluant toutes les parties belligérantes, l'opposition politique ainsi que la société civile. Le rapport indique par ailleurs que les accords et traités internationaux auxquels la République démocratique du Congo a adhéré ou qu'elle a ratifié ont une force supérieure aux lois internes. Le Conseil national de l'enfant (CNEN) est chargé de coordonner les activités de mise en œuvre de la Convention et en assure le suivi. Plus concrètement, les interventions en matière de protection des droits de l'enfant sont encadrées par des plans d'action sectoriels élaborés en coopération avec tous les intervenants tant publics que privés, souligne le rapport. La Constitution dispose que «l'enfant mineur est toute personne, sans distinction de sexe, qui n'a pas encore atteint 18 ans révolus.» Cette définition s'applique dès lors à tous les secteurs où des flottements persistaient encore, s'agissant de l'âge à prendre en compte, notamment l'âge du mariage ou de la majorité pénale. L'unique exception demeure celle de l'âge minimum d'admission à l'emploi. Ainsi, le Code du travail de 2002 relève l'âge minimum d'admission à l'emploi qui passe de 14 ans à 16 ans. En matière de travail, une distinction est faite, conformément aux Conventions de l'OIT, entre les pires formes de travail auxquels sont soustraites toutes les personnes âgées de moins de 18 ans, et les travaux légers et salubres que les enfants âgés de 16 ans au moins peuvent effectuer.

Le rapport indique que 34 % d'enfants en moyenne sont déclarés à l'état civil. Un Plan d'action national adopté en juillet 2004 constitue le cadre unique dans lequel s'inscrivent toutes les actions de promotion de l'enregistrement des naissances à l'état civil. À ce jour, près de 400 officiers de l'état civil ont été formés à Kinshasa et aux chefs lieux des provinces et dans certaines localités du pays sur les procédures et les lois en matière d'enregistrement des naissances et sur l'utilisation des registres. L'un des défis à relever est celui d'arriver à mettre en place un mécanisme pouvant permettre à tous les enfants qui n'ont pas pu être enregistrés dans le délai légal de 30 jours, de se rattraper sans payer des frais de procédure judiciaire et les amendes prévues par la loi, pour les déclarations tardives. On estime à 300 000 le nombre d'enfants vivant avec le VIH/sida, et environ un million d'enfants congolais ont perdu au moins un parent pour une cause liée au VIH/sida. Ces enfants affectés par le VIH/sida sont intégrés dans les familles d'accueil et dans la communauté, précise le rapport. Les violences sexuelles constituent aussi un phénomène très préoccupant qui touche particulièrement les femmes et les filles. En effet, si elles avaient pris pendant la guerre des formes barbares en ce qu'elles impliquaient surtout des membres des forces et groupes armés, elles sont actuellement de plus en plus commises par les civils. Depuis le milieu de l'année 2005, plus de 30 000 victimes de sévices sexuels ont été recensées sur l'ensemble du territoire national; 70 % d'entre elles ont reçu de l'aide sous une forme ou l'autre.

Actuellement le taux de scolarisation est assez faible car il se situe à 40 % du total des enfants en âge scolaire, indique le rapport. Dans cette perspective, la Constitution a institué, pour la première fois, la gratuité de l'enseignement de base. Elle dispose en effet que: «L'enseignement primaire est obligatoire et gratuit dans les établissements publics». La persistance des zones d'insécurité constitue également un frein à l'éducation des enfants, non seulement à cause des déplacements constants des familles et donc des enfants, mais aussi des destructions des infrastructures scolaires que les affrontements armés et le déploiement des militaires entraînent, tel au nord de la province du Katanga, en Ituri ou à Beni, dans la province du Nord-Kivu, en 2005. Des études menées dans le secteur minier démontrent que plus de 60 000 enfants (dont 30 à 40 % de filles selon les sites) travaillent dans les carrières de diamant, de cuivre ou d'or, soit dans l'exploitation minière proprement dite, soit dans les activités connexes impliquant le commerce informel, le gardiennage, le portage, les travaux ménagers ou même la prostitution surtout pour les filles. L'âge de ces enfants varie entre 5 et 17 ans. Plus de 60 % d'entre eux ne vont plus à l'école, mais surtout la plupart de ceux qui essaient malgré tout d'allier travail et études ne dépassent pas l'école primaire. Le Gouvernement, avec l'appui significatif de la coopération internationale, a consenti des efforts considérables pour sortir des forces et groupes armés tous les enfants y associés d'une manière ou d'une autre (soldats, porteurs, garçons de compagnie, ménagères, etc.), et dont le nombre a été estimé à plus de 30 000, parmi lesquels plus ou moins 15 % de filles, indique par ailleurs le rapport.

Examen du rapport

Observations et questions des membres du Comité

MME MOUSHIRA KHATTAB, rapporteuse du Comité chargée de l'examen du rapport de la République démocratique du Congo, a félicité le pays pour son adoption, la semaine dernière (10 janvier 2009), de la loi sur la protection de l'enfant. Elle a en outre relevé que l'approche autocritique adoptée par la République démocratique du Congo témoigne que le pays est conscient des problèmes auxquels il est confronté. Mme Khattab a souhaité savoir comment avait été rédigé le rapport présenté aujourd'hui.

La rapporteuse a par ailleurs souligné que les membres du Comité sont particulièrement préoccupés par les conséquences, pour les enfants, du conflit armé que connaît la République démocratique du Congo depuis plusieurs années. Compte tenu de la situation interne que connaît le pays, comment sont considérés les enfants et combien de personnes ont-elles connaissance de l'existence des droits de l'enfant, a-t-elle demandé? Dans quelle mesure le Gouvernement sera-t-il en mesure de mettre en œuvre les recommandations qui fera le Comité à l'issue du présent dialogue, a également demandé Mme Khattab? Les problèmes actuels du pays ne détourneront-ils pas l'attention des enfants qui méritent de faire l'objet d'une attention particulière, s'est-elle inquiétée?

La moitié des enfants ne vont pas à l'école et nombre de ceux qui y vont n'achèvent pas leur scolarité, a par ailleurs fait observer la rapporteuse. En ce qui concerne la santé des enfants, le Comité est très préoccupé par le taux élevé de mortalité infantile des enfants de moins de cinq ans, a-t-elle ajouté.

Mme Khattab s'est en outre enquise de la proportion de l'aide internationale à la République démocratique du Congo qui est consacrée aux enfants. Elle s'est également enquise des dotations budgétaires du Conseil national de l'enfant, se disant en outre profondément déçue de l'absence de tout représentant de ce Conseil au sein de la délégation congolaise. Le Conseil national de l'enfant semble avoir un rôle marginal, alors que le Ministère du genre, de la famille et de l'enfant semble concentrer tous les pouvoirs – fussent-ils d'ailleurs insuffisants, a relevé Mme Khattab.

La République démocratique du Congo connaît plusieurs formes de discriminations, a poursuivi Mme Khattab. Il connaît notamment une discrimination fondée sur le sexe, à l'encontre des fillettes et des femmes; une discrimination fondée sur le handicap; ainsi que de graves discriminations à l'encontre les enfants accusés d'être sorciers, a précisé la rapporteuse.

Eu égard aux violences sexuelles qui s'exercent dans le pays, y compris dans les camps de personnes déplacées, quelles sont les activités que mènent les autorités sur le plan de l'éducation, tant il est vrai que toute cette violence ne saura être éradiquée par le biais d'une simple loi, a demandé Mme Khattab?

M. KAMEL FILALI, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la République démocratique du Congo, a souligné que la situation du pays est difficile et que les conflits qui le traversent sont dévastateurs, notamment du point de vue de leurs conséquences sur les enfants. En dépit de ces difficultés, la République démocratique du Congo a renforcé son cadre juridique de protection des droits de l'enfant, a relevé M. Filali. Mais si le pays compte de nombreuses lois, dans le contexte actuel du pays, quel est leur impact sur les droits de l'enfant?

En ce qui concerne l'âge de la responsabilité pénale, les juges ne font qu'appliquer la loi de 1978 qui traite en adultes les mineurs de 16 à 18 ans. Or, le mineur a été défini dans la Constitution comme toute personne n'ayant pas atteint l'âge de 18 ans révolus, a fait observer M. Filali.

Souvent, les lois sont votées mais ne sont pas assorties de décrets d'application, de sorte que l'on ne sait pas comment les appliquer; parfois, elles ne sont même pas publiées dans le Journal Officiel, a relevé le corapporteur.

Il semble y avoir eu une régression, entre 2001 et 2007, en ce qui concerne le taux d'enregistrement des naissances, ont en outre souligné M. Filali et Mme Khattab.


Un autre membre du Comité a souhaité connaître la part du budget national consacrée aux dépenses militaires et s'est enquis de l'évolution du budget militaire ces dernières années.

Un membre du Comité a fait part de ses préoccupations face aux taux élevés de mortalité infantile et de malnutrition qui sévissent en République démocratique du Congo ainsi que face à la situation des enfants soldats, des enfants déplacés et des enfants des rues. Serait-il possible de faire en sorte que chacun dans le pays - institutions et familles confondues - soit conscient que les enfants doivent se voir accorder la priorité dans tous les domaines, tant il est vrai que l'avenir du pays dépend du droit de l'enfant à vivre, à survivre et à se développer?

Une experte s'est enquise des mesures prises par la République démocratique du Congo pour remédier au fléau des accusations portées à l'encontre d'enfants accusés de sorcellerie – phénomène qui est loin d'être marginal.

N'y aurait-il pas en République démocratique du Congo une tendance à demander aux organisations non gouvernementales de fournir des services qui devraient relever de la responsabilité de l'État, s'est inquiété un membre du Comité?

Un expert a fait observer qu'en l'état actuel, la législation de la République démocratique du Congo n'incrimine pas spécifiquement la torture.

Un membre du Comité ayant relevé que si le nombre d'affaires de violence sexuelle portées à l'attention des juridictions compétentes s'accroît, le nombre de poursuites engagées ne suit malheureusement pas la même évolution.

S'agissant de l'âge minimum de la responsabilité pénale, un membre du Comité a attiré l'attention sur la situation des mineurs de 16 à 18 ans en conflit avec la loi poursuivis en vertu de la loi de juillet 1978 qui les considère comme des adultes. Les magistrats semblent tenir à l'application de cette loi de 1978 au détriment d'autres lois qui, elles, considèrent comme mineure toute personne âgée de moins de 18 ans, a fait observer cet expert.

Un autre membre du Comité s'est enquis de ce qu'il en est de la corruption par intervention dans les affaires de violence sexuelle, où les personnes inculpées sont trop souvent systématiquement libérées. Il apparaît que les auteurs de crimes de violences sexuelles ne sont poursuivis que si des organisations bilatérales ou multilatérales assument le coût des actions en justice, a fait observer cette experte. Elle a en outre souligné que la Représentante spéciale pour les enfants et les conflits armés, Mme Radhika Coomaraswamy, s'est rendue en République démocratique du Congo et a fait, à l'issue de cette visite, un certain nombre de recommandations qui n'ont, semble-t-il, guère été suivies d'effet. Quelles mesures sont-elles prises afin d'assurer que les membres des forces armées de la République démocratique du Congo ne commettent des crimes tels que ceux commis à Goma en octobre dernier, où des filles ont été violées et sept enfants tués, a en outre demandé l'experte? Elle s'est en outre enquise des poursuites engagées contre les auteurs des meurtres de 160 enfants tués lors ce que l'on a appelé le massacre du jour de Noël. Cette même experte a soulevé le problème du travail des enfants en attirant en particulier l'attention sur les formes dangereuses du travail des enfants dans les mines du Katanga. Si certains enfants soldats ont été libérés, nombre d'enfants continuent d'être recrutés dans l'armée nationale, a-t-elle part ailleurs déclaré. Cette experte a en outre demandé pourquoi les policiers arrêtent les enfants des rues, en les détenant avec des adultes avant de les libérer.

Un autre expert s'est enquis de l'existence éventuelle d'une traite transfrontalière d'enfants.

La situation sanitaire générale des enfants reste très peu satisfaisante, a souligné un expert. Un enfant sur huit meurt avant l'âge de un an et un sur cinq avant l'âge de cinq ans, a-t-il fait observer.

Le nombre d'enfants à l'école reste faible en dépit des efforts louables consentis par le pays pour intégrer un nombre accru d'enfants dans le système scolaire, a pour sa part souligné un expert. En outre, contrairement à ce que prescrit la loi, nombre d'écoles primaires ne sont pas gratuites, a fait observer ce membre du Comité. Des initiatives sont-elles prises afin de faire en sorte que toutes les écoles soient une zone protégée pour les enfants, a-t-il par ailleurs demandé?

Un membre du Comité a relevé que les informations contenues dans le rapport ne permettent pas de se faire une idée du nombre d'enfants vivant hors de leur famille, c'est-à-dire – en dehors des enfants des rues – du nombre d'enfants qui vivent dans des institutions. Quelles sont ces institutions, a demandé cette experte? Elle s'est par ailleurs enquise de l'existence d'éventuelles adoptions traditionnelles, soulignant la nécessité de prendre en compte les droits de l'enfant dans tous les types d'adoptions.

Un autre membre du Comité s'est enquis des programmes destinés à venir en aide aux enfants réfugiés ou déplacés internes, dont bon nombre sont de fait chefs de famille.

Un expert a fait état d'informations selon lesquelles des groupes armés - voire l'armée elle-même -interviendraient directement dans les écoles pour enrôler des enfants.

Renseignements complémentaires fournis par la délégation

La délégation a souligné que les femmes et les enfants de la République démocratique du Congo lancent un appel à la solidarité internationale afin d'éradiquer les bandes armées qui sévissent, en particulier, à l'Est du pays. Elle a rappelé que l'origine de la situation actuelle dans l'Est du pays remonte à la création du couloir humanitaire de l'Opération turquoise, à l'époque où la République démocratique du Congo avait accepté d'ouvrir ses frontières pour accueillir un million de personnes qui étaient menacées dans leur pays. Cette décision s'est finalement soldée par l'exportation en République démocratique du Congo de pratiques génocidaires et de pratiques de violence sexuelle, a souligné la délégation. Elle a préconisé de rouvrir ce couloir humanitaire afin que les populations qui s'étaient réfugiées en République démocratique du Congo rentrent chez elles. Ces bandes armées se trouvent dans le pays parce qu'elles ne peuvent pas rentrer chez elles, a insisté la délégation.

S'agissant des questions de santé, la délégation a notamment indiqué que la couverture du vaccin DTC (diphtérie, tétanos, coqueluche) est passée à 85,5% en 2007, contre 75,4% l'année précédente. Le taux d'incidence de la diarrhée a quant à lui était réduit à 13%, a-t-elle ajouté. Le taux national de séropositivité au VIH/sida est quant à lui passé de 2,2% en 2006 à 3,2% en 2007, a par ailleurs indiqué la délégation.

En ce qui concerne l'éducation, la délégation a souligné que la politique des autorités dans ce domaine s'inscrit dans le cadre de la Stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté du pays, qui énonce clairement le principe de l'accroissement des services sociaux, et notamment de l'éducation, afin de lutter contre les vulnérabilités de l'enfant. La Constitution dispose en son article 43 que l'enseignement primaire est obligatoire et gratuit dans les établissements publics, a rappelé la délégation. Aussi, des efforts sont-ils déployés pour concrétiser ces dispositions, a-t-elle souligné. Un Fonds national de promotion de l'enseignement a été institué par décret présidentiel en 2007, a-t-elle en outre indiqué.

En ce qui concerne l'adoption, la délégation a notamment indiqué que c'est le Ministère de la justice qui est en charge des questions d'adoption. Elle a assuré qu'il n'existe aucun obstacle à la ratification par le pays de la Convention de La Haye sur la coopération dans le domaine des adoptions internationales; aussi, cette option reste-t-elle ouverte.

En ce qui concerne la lutte contre les violences sexuelles, la délégation a indiqué qu'au-delà de la loi elle-même, la République démocratique du Congo s'est dotée d'un plan d'action national pour la lutte contre ce type de violences. Au niveau Gouvernemental, existe un groupe thématique sur les questions de genre, assorti d'un sous-groupe consacré spécifiquement aux violences sexuelles, a précisé la délégation. Des mesures sont également prises pour former les juges chargés spécifiquement de l'instruction des dossiers de violence sexuelle, a-t-elle ajouté.

Les violences sexuelles à l'encontre des enfants sont effectivement une réalité et il arrive que des bébés de moins de six mois soient violés par les membres des bandes armées dans certaines régions du pays, notamment dans l'Est du pays, a par la suite reconnu la délégation.

La délégation a admis au cours du dialogue que les «forces de protection» se sont également livrées à des violences sexuelles contre des enfants.

Du fait de la stigmatisation dont elles font l'objet, les victimes de violences sexuelles ont généralement du mal à rapporter les faits dont elles sont victimes, a ajouté la délégation. Néanmoins, grâce aux campagnes qui ont été menées depuis 2006 en particulier, de plus en plus d'affaires de violence sexuelle sont portées devant les juridictions, a-t-elle fait valoir.

La délégation a fait part de l'objectif de la République démocratique du Congo de parvenir à sauvegarder la paix en préservant l'unité du pays et en éradiquant le fléau des bandes armées. Il faut que la violence sexuelle massive soit considérée comme un crime contre l'humanité afin d'être imprescriptible, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne l'implication d'enfants dans le conflit armé, la délégation a indiqué qu'une évolution positive est enregistrée du fait que les forces armées régulières ont pris des mesures afin qu'il n'y ait plus d'enfants dans leurs rangs. Pour ce qui est des milices et des groupes armés, nous espérons que le Gouvernement aura la possibilité d'agir de ce point de vue sur ces groupes qui échappent à son contrôle, a ajouté la délégation.

Il n'y a plus aucune ambiguïté quant à l'âge de la responsabilité pénale qui est désormais fixée à 18 ans en vertu de la législation applicable, a assuré la délégation. L'enfant en conflit avec la loi âgé de 14 à 18 ans est adressé aux tribunaux pour mineurs, a-t-elle précisé.

En cas de violation de ses droits, l'enfant peut saisir les organes juridictionnels classiques, a poursuivi la délégation. Mais il peut également saisir certains organes gouvernementaux, notamment le Ministère du genre, de la famille et de l'enfant - qui dispose d'une Direction de l'enfant. Par ailleurs, le Conseil national de l'enfant est un organe consultatif qui peut également être saisi pour toute question concernant les droits de l'enfant.

La délégation a reconnu la nécessité d'accroître le nombre de magistrats et de tribunaux disponibles à travers le pays.

S'agissant de la lutte contre la corruption, notamment dans le domaine de la justice rendue, la délégation a attiré l'attention sur la politique de tolérance zéro à l'égard de l'impunité adoptée par le Gouvernement et qui s'applique en premier lieu aux magistrats.

L'enregistrement des naissances est désormais totalement gratuit en vertu de la loi, a par ailleurs indiqué la délégation. Elle a néanmoins reconnu l'existence de difficultés en ce qui concerne le système d'enregistrement des naissances. L'une des causes de ces difficultés réside dans les conflits qui secouent le pays, a-t-elle précisé.

S'agissant des ressources financières, la délégation a rappelé que son pays se trouve dans une situation particulièrement difficile. Pour 2009, le budget global du pays est de 5 milliards de dollars, ce qui est incontestablement peu pour une population de 67 millions d'habitants. La délégation a remercié les partenaires traditionnels, bilatéraux et internationaux, de la République démocratique du Congo, pour l'aide qu'ils apportent au pays. La délégation a rappelé que le pays est au bénéfice de l'initiative de réduction de la dette pour les pays pauvres lourdement endettés, avec toutes les conditionnalités de la Banque mondiale que cela implique. Le pays ne peut donc agir qu'avec les moyens qui sont à sa disposition. Il n'en demeure pas moins que des mécanismes sont en place pour empêcher l'utilisation des enfants dans le conflit armé et pour protéger les enfants en situation difficile, a souligné la délégation.

La délégation a souligné que les problèmes de la République démocratique du Congo sont énormes et que le pays aurait besoin d'une aide internationale peut-être comparable au Plan Marshall. La pauvreté reste la préoccupation majeure des familles, a poursuivi la délégation. Les salaires, notamment ceux des fonctionnaires, sont certes encore bas, mais leur évolution à la hausse est indéniable ces dernières années, a-t-elle ajouté. Le salaire minimum est en effet passé à 70 dollars par mois, a-t-elle précisé, reconnaissant que ce montant ne représente certes encore qu'un tiers du panier de la ménagère pour un foyer de cinq enfants, ce qui est la norme dans le pays.

Pour ce qui est de la situation des enfants des rues, des actions de reclassement de ces enfants sont menées par le Gouvernement, a par ailleurs indiqué la délégation. Il n'en demeure pas moins que les autorités sont davantage enclines à appuyer les organisations non gouvernementales et autres qui viennent en aide à ces enfants, a-t-elle ajouté. Les autorités se sont efforcées, souvent en vain, de ramener dans leurs familles les enfants des rues, a précisé la délégation; mais le fait est que si la situation de la famille de ces enfants n'évolue pas, ces derniers repartent dans la rue et il convient donc de trouver d'autres alternatives à leur retour dans leurs familles.

Pour ce qui est des enfants sorciers, le Ministère des affaires sociales mène une campagne de sensibilisation sur cette question, notamment à l'intention des chefs religieux, a en outre indiqué la délégation. Elle a en outre indiqué qu'un projet de loi sur la question est actuellement examiné par le parlement. La nouvelle loi prévoit des sanctions pénales à l'encontre de tout parent qui accuserait un enfant de sorcellerie, a ensuite précisé la délégation.

En ce qui concerne le travail des enfants, la délégation a rappelé que le Comité national de lutte contre les pires formes de travail des enfants créé en 2008 a mis en place un programme d'action concret. L'UNICEF, quant à elle, est en train de créer des écoles de proximité dans les régions minières afin de ramener à l'école les enfants qui travaillent dans les mines.


Observations préliminaires

La rapporteuse du Comité chargée de l'examen du rapport de la République démocratique du Congo, MME MOUSHIRA KHATTAB, a indiqué que le Comité interprète la présence d'une délégation de haut niveau durant le dialogue de ce jour comme un signe d'engagement renouvelé du pays pour améliorer la vie des enfants de la République démocratique du Congo conformément à ce que prévoit la Convention. Le Comité est conscient des limites et contraintes qui sont celles du pays et est confiant quant à l'impact positif qu'aura le présent dialogue, a-t-elle ajouté. L'un des principaux obstacles étant le conflit armé, il faut espérer que la paix sera bientôt instaurée, a-t-elle souligné. En attendant, l'État se doit de respecter et de protéger les droits de l'enfant pendant le conflit armé. Tous les groupes armés ainsi que les forces armées doivent respecter les droits de l'enfant, a insisté Mme Khattab.

La rapporteuse a précisé que le Comité ne devrait pas manquer, dans ses observations finales, de recommander à la République démocratique du Congo de mettre en place un organe plus fort chargé des questions relatives aux droits de l'enfant, qui soit doté des ressources adéquates. La République démocratique du Congo doit en outre continuer à mettre en place un cadre juridique adéquat conforme à la Convention. Le pays doit en outre instituer un mécanisme de contrôle conforme aux Principes de Paris et doté d'un mandat clair en faveur des enfants. Il faut en outre mettre en œuvre un plan national d'action concentré sur les enfants marginalisés, notamment les enfants victimes de discrimination comme les filles, les enfants affectés par le conflit armé, les enfants affectés par la pauvreté ou encore les enfants affectés par le VIH/sida.

La situation de discrimination restant l'un des principaux sujets de préoccupation, il convient, outre les outils juridiques qui l'interdisent, d'éliminer la discrimination sociétale en accroissant la sensibilisation à cette fin, a poursuivi Mme Khattab.

La définition de l'enfant doit être harmonisée avec celle énoncée dans la Convention dans les différents domaines, a ajouté la rapporteuse. Il convient en outre de promouvoir l'enregistrement des naissances, a-t-elle indiqué. Il faut en outre relever les salaires des enseignants et éliminer les coûts cachés de l'éducation, tout en faisant en sorte que l'école reste une zone protégée exempte de forces armées, notamment en Ituri et dans le Nord-Kivu, a déclaré Mme Khattab. Le droit à la santé étant gravement compromis, il convient pour le pays d'allouer davantage de ressources à l'amélioration des indicateurs de santé, notamment en termes de mortalité infantile, de vaccination et de nutrition. Il convient également pour le pays de se pencher sur les causes profondes de diverses formes de violations du droit de l'enfant à être protégé, notamment pour ce qui est des enfants des rues, des enfants qui travaillent ou encore des enfants déplacés internes, sans parler des mutilations génitales féminines ou des mariages précoces. Pour ce qui est de la justice juvénile, nombre de problèmes sont liés à la culture et aux perceptions prévalant en République démocratique du Congo.

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