Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DES PHILIPPINES SUR L'IMPLICATION D'ENFANTS DANS LES CONFLITS ARMÉS

30 Mai 2008



Comité des droits de l'enfant
30 mai 2008


Le Comité des droits de l'enfant a examiné, cet après-midi, le rapport initial présenté par les Philippines en vertu du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant et portant sur l'implication des enfants dans des conflits armés.

Présentant des observations préliminaires sur ce rapport, M. David Brent Parfitt a souligné que dans ses observations finales, qui seront rendues publiques à la fin de la session, le Comité abordera notamment les problèmes s'agissant notamment de certains aspects de la formation obligatoire dans les lycées. Le Comité souhaitera aussi s'assurer que les Philippines ont l'intention d'inclure les enfants dans le processus de paix dans lequel le pays est engagé, a ajouté M. Parfitt. M. Parfitt a relevé que des enfants sont encore recrutés par les forces armées aux Philippines et que des informations attestent que des groupes paramilitaires utilisent des enfants au sein de leurs forces.

Mme Celia C. Yangco, Sous-Secrétaire au Ministère du bien-être social et du développement des Philippines, a présenté le rapport de son pays en soulignant qu'une la loi prévoit depuis 1992 la protection des enfants dans les conflits armés et reconnaît les enfants comme «zones de paix», bien avant que les Philippines ne ratifient le Protocole. En outre, les Forces armées se sont dotées en 1991 d'un mémorandum relatif à la prise en charge et au traitement des enfants dans les conflits armés, a-t-elle fait valoir. Elle a par ailleurs indiqué que le bureau de l'Ombdusman exerce une certaine juridiction sur le personnel militaire et a notamment le pouvoir d'engager une enquête préliminaire et éventuellement des poursuites concernant des cas qui lui sont portés à son attention. Elle a également indiqué que les Philippines peuvent exercer une juridiction extraterritoriale en cas de crime de guerre d'enrôlement d'enfant de moins de 15 ans dans les forces armées ainsi qu'en cas d'implication dans les hostilités d'une personne de moins de 18 ans si cet acte est commis en dehors des Philippines par un citoyen philippin ou à l'encontre d'un citoyen philippin. Mme Yangco a également souligné que le Gouvernement poursuit un processus global de paix pour traiter la question du conflit armé avec les groupes rebelles.

La délégation philippine était également composée de Linda M. Hornilla, Sous-Secrétaire au Ministère de la justice; de Melchor P. Rosales, Sous-Secrétaire au Ministère de l'intérieur et du gouvernement local; et de Erlinda F.Basilio, Représentant permanent des Philippines auprès des Nations Unies à Genève et d'autres membres de la Mission permanente, ainsi que de représentants du Ministère de la défense nationale, de la Police nationale et du Conseil pour la protection de l'enfance. Elle a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, notamment, du processus de paix en cours; des éventuelles poursuites engagées contre des personnes ayant utilisé des enfants dans le cadre de conflits armés; ou encore des allégations de recrutement forcé d'autochtones dans les forces armées. À cet égard, la délégation a catégoriquement rejeté les allégations selon lesquelles des membres des populations autochtones seraient recrutés par la contrainte dans les forces armées.


Le Comité entamera lundi matin, à 10 heures, l'examen du rapport présenté par l'Érythrée en vertu de la Convention.


Présentation du rapport

MME CELIA C. YANGCO, Sous-Secrétaire au Ministère du bien-être social et du développement des Philippines, a souligné que la population des Philippines est jeune puisque les enfants composent près de la moitié de la population totale. Le pays accorde donc la plus haute importance au développement et au bien-être des enfants car elles les considèrent comme la ressource la plus préciseuse. Les Philippines disposent déjà depuis longtemps d'un Code sur le bien-être des enfants et des jeunes, adopté en 1975, soit bien avant que le pays ne ratifie la Convention relative aux droits de l'enfant. La loi de protection spéciale de 1992, qui prévoit la protection des enfants dans les conflits armés et reconnaît les enfants comme «zones de paix» a été adoptée bien avant que les Philippines ne ratifient le présent Protocole facultatif, a par ailleurs fait valoir Mme Yangco. En outre, les Forces armées des Philippines se sont dotées en 1991 d'un mémorandum relatif à la prise en charge et au traitement des enfants dans les conflits armés, a-t-elle ajouté.

Mme Yangco a par ailleurs souligné que le pays dispose de nombreuses autres lois protégeant les enfants en général. Elle a notamment cité la loi sur les droits des populations autochtones, qui prévoit l'impossibilité de recruter, en quelque circonstance que ce soit, des enfants appartenant aux populations autochtones/communautés culturelles. D'autre part, la loi de 2003 contre le trafic de personnes prévoit des sanctions en cas de recrutement, de transfert ou d'enlèvement d'enfants en vue de les engager dans des activités armées. Quant à la loi sur l'élimination des pires formes de travail des enfants, elle interdit le recrutement d'enfants à des fins d'utilisation dans un conflit armé. Il est donc très clair que les Philippines ne permettent pas le recrutement ou l'emploi d'enfants dans leurs forces armées, a insisté la chef de l a délégation philippine. Le pays n'excuse aucun méfait d'aucun de ses agents, en particulier contre les enfants et, si un tel méfait venait à se produire, des mesures disciplinaires existent.

Mme Yangco a indiqué que le bureau de l'Ombdusman exerce une certaine juridiction sur le personnel militaire et a notamment le pouvoir d'engager une enquête préliminaire et éventuellement des poursuites sur les cas qui lui sont soumis. En fait, il existe même un bureau de l'ombudsman adjoint pour l'armée. Aucun cas n'a été enregistré de trafic d'enfants engagés dans des activités armées aux Philippines ou à l'étranger ces cinq dernières années, a en outre assuré Mme Yangco. Elle a également précisé que les Philippines peuvent assumer une juridiction extraterritoriale en cas de crime de guerre d'enrôlement d'enfant de moins de 15 ans dans les forces armées ou d'utilisation d'enfant de moins de 15 ans pour participer activement aux hostilités ainsi qu'en cas d'implication dans les hostilités d'une personne de moins de 18 ans si cet acte est commis en dehors des Philippines par un citoyen philippin ou à l'encontre d'un citoyen philippin.

Dans le cadre des lois et pratiques philippines, a précisé Mme Yangco, la notion de participation directe d'un enfant à des hostilités renvoie à son implication en tant que combattant et/ou en tant qu'espion, guide, coursier, messager, cuisinier, soutien médical ou autres capacités similaires. Les enfants impliqués dans des conflits armés s'entendent d'enfants recrutés soit par la force, soit pas obligation, soit volontairement par des forces/groupes armés étatiques ou non, a ajouté Mme Yangco.

Mme Yangco a également souligné que le Gouvernement philippin continue de mener un processus global de paix pour traiter la question du conflit armé avec les groupes rebelles. Des programmes et services sont continuellement mis en œuvre au bénéfice des familles affectées et des communautés exposées en général.

Les enfants impliqués dans un conflit armé qui sont sauvés ou qui se rendent sont renvoyés au Ministère du bien-être social et du développement pour bénéficier d'une intervention psychologique en vue de leur réintégration au sein de la communauté. Ceux qui ne peuvent pas être réintégrés au sein de leur famille pour des raisons de sécurité sont temporairement placés dans des centres résidentiels gérés par le Gouvernement ou par des organisations non gouvernementales ou bien sont placés dans des familles d'accueil, a expliqué Mme Yangco. La loi sur la justice juvénile exempte les enfants de moins de 15 ans de toute responsabilité pénale, a-t-elle précisé. Parallèlement, les jeunes de 15 à 18 ans qui ont commis un délit ne sont pas condamnés; leur condamnation est suspendue et ils sont envoyés dans des centres de réhabilitation pour enfants et jeunes.

Le rapport initial des Philippines au titre du Protocole facultatif concernant l'implication des enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/PHL/1) indique que le Conseil pour la protection de l'enfance coordonne les efforts déployés par les différents organismes pour que la question des enfants nécessitant une protection spéciale, en particulier des enfants impliqués dans des conflits armés, soit traitée de manière globale, au moyen de mesures appropriées et efficaces de sûreté, de sécurité et de réadaptation. Le Comité pour la protection de l'enfance est le point focal du Gouvernement philippin pour les questions relatives à l'enfance; il relève de la présidence. Le Gouvernement philippin n'autorise en aucun cas la participation directe de mineurs aux hostilités. En témoigne la politique mise en œuvre par les Forces armées philippines (AFP), en vertu de laquelle seules les personnes âgées d'au moins 18 ans peuvent être enrôlées. Ce principe est énoncé dans la circulaire no 13 sur l'engagement ou le réengagement sélectif, adoptée par le Ministère de la défense nationale et les Forces armées en juillet 1991.

Conformément à la règle relative à l'âge minimum de l'engagement volontaire dans les forces armées énoncée dans le Protocole, la section 14 de la loi de 1998 portant réorganisation de la Police nationale des Philippines, et une circulaire de la Commission nationale de la police fixent l'âge minimum du recrutement dans la Police nationale des Philippines à 21 ans et l'âge maximum de l'engagement dans la Police nationale des Philippines à 30 ans.

Pour ce qui est de l'objectif visant la signature d'ici à 2010 d'accords de paix globaux avec les groupes rebelles pour mettre un point final aux hostilités, le Bureau du Conseiller présidentiel pour le processus de paix a franchi un certain nombre d'étapes décisives dans les négociations de paix avec les groupes rebelles suivants, grâce à l'appui des Comités de négociation du Gouvernement de la République des Philippines: Front islamique de libération Moro (MILF); Parti Rebolusyonaryong Manggagawa ng Pilipinas (RPMP) ? Armée de la révolution prolétarienne (RPA) ? Brigade Alex Boncayao (ABB); Parti Rebolusyonaryong Manggagawa ng Mindanao (RPM-M); et Parti communiste des Philippines (CPP) ? Nouvelle armée du peuple (NPA) ? Front démocratique national (NDF). Dans le cadre du processus global de paix, le Gouvernement philippin applique le Programme en faveur des enfants impliqués dans des conflits armés établi par le décret portant adoption du Programme-cadre global pour les enfants impliqués dans les conflits armés et faisant obligation à toutes les administrations et autorités locales d'appliquer ledit programme. D'une manière générale, ce programme vise à faire des enfants une «zone de paix». Les porte-parole des acteurs non étatiques ont pris l'engagement, écrit ou oral, de ne pas enrôler et de ne pas utiliser des enfants de moins de 18 ans dans les hostilités, ajoute le rapport. Il fait en outre état du Plan d'action stratégique du Comité interinstitutions sur les enfants impliqués dans les conflits armés (2005-2010).

Examen du rapport

M. DAVID BRENT PARFITT, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport des Philippines, a relevé que de toute évidence, le pays prend le Protocole facultatif très au sérieux, ce dont témoigne notamment l'importance de la délégation que le pays présente cet après-midi devant le Comité. La législation philippine couvre l'essentiel des aspects abordés dans le Protocole facultatif, a-t-il ajouté. Les Philippines sont souvent citées, au sein du groupe asiatique, parmi les pays appliquant des pratiques optimales à cet égard, a-t-il fait observer.

Il n'en demeure pas moins qu'il reste aux Philippines de nombreux enfants victimes de conflits armés, qui en subissent les conséquences et sont déplacés à l'intérieur du pays, a souligné M. Parfitt. Des enfants sont encore recrutés par les forces armées aux Philippines; il reste donc des enfants soldats dans le pays, a-t-il insisté. Des informations attestent que des groupes paramilitaires utilisent des enfants au sein de leurs forces, a poursuivi M. Parfitt. Des condamnations ont-elles été prononcées contre des personnes ayant utilisé des enfants dans le cadre de conflits armés, a demandé le rapporteur?

Dans le cadre des négociations de paix, l'impunité est-elle proposée aux groupes qui utilisent des enfants soldats, a par ailleurs souhaité savoir M. Parfitt ?

Le rapporteur a d'autre part jugé pour le moins troublant d'apprendre que certains de ces enfants soldats ont été poursuivis au pénal, alors que le Protocole prévoit que des mesures de réintégration sociale des enfants victimes de ce phénomène doivent être promues.

M. Parfitt s'est en outre enquis des contrôles mis en place afin de veiller à ce que les armes de petit calibre ne se retrouvent pas entre les mains de groupes ou de pays qui utilisent des enfants soldats.

Un autre membre du Comité a fait état d'informations issues d'un rapport du Rapporteur spécial sur les droits des populations autochtones, M. Rodolfo Stavenhagen, datant de 2003, qui fait état de pratiques de recrutements forcés au sein des forces armées, des forces de police et des forces paramilitaires aux Philippines.

Un autre expert a souhaité savoir si les Philippines avaient l'intention de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

Les groupes armés ont-ils connaissance de l'existence du Protocole, a demandé un expert ?

Un membre du Comité a relevé que les régions du centre de Mindanao sont les plus touchées par la pauvreté aux Philippines et il a souligné que la pauvreté est cause de nombreux fléaux et qu'elle peut donc être à l'origine de l'adhésion de certaines personnes à des groupes rebelles, paramilitaires voire terroristes. Il a demandé quelles mesures sont prises par les autorités pour remédier à ce problème. Des progrès ont certes été réalisés dans le domaine de la justice pour mineurs; néanmoins, les conditions dans les centres de détention pour mineurs sont très graves, a ajouté l'expert, affirmant avoir eu l'occasion de visiter certains de ces centres il y a quelques années. Que font les autorités pour éviter que les enfants ne soient victimes de mines antipersonnel, a-t-il par ailleurs demandé?

La délégation des Philippines a souhaité dissiper un malentendu associé à certains aspects d'une formation dispensée aux élèves de quatrième année d'études en lycée. En fait, a-t-elle précisé, ces jeunes suivent un enseignement qui leur présente l'organisation, la structure et la discipline de l'armée. L'objet est en fait de préparer le jeune à décider en connaissance de cause du métier qu'il fera une fois adulte. Les militaires ne sont pas associés à cet enseignement qui constitue en fait un élément de la «formation avancée des citoyens», a insisté la délégation. C'est la discipline et non pas le combat par le biais d'une quelconque instruction militaire que nous apprenons à ces jeunes, a-t-elle ajouté.

S'agissant du processus de paix, la délégation a indiqué que l'objectif du Gouvernement est de mettre un terme à tout conflit armé dans le pays. Le Gouvernement entend conclure d'ici 2010 des accords de paix avec tous les groupes rebelles, a précisé la délégation.

Après entrée en vigueur d'un accord de paix dans une zone, ce sont les services nationaux et le programme d'intégration sociale des Philippines qui sont censés prendre le relais des services jusqu'ici éventuellement assurés par les rebelles, a expliqué la délégation.

Il y a un processus de paix mais il n'y a pas encore, à ce jour, d'accord de paix qui contraindrait toutes les parties de respecter quelque disposition que ce soit, a ensuite précisé la délégation. Un cessez-le-feu a été obtenu et des pourparlers ont lieu entre les parties, mais sans parvenir à un accord, a-t-elle insisté.

La délégation a par ailleurs rejeté catégoriquement les allégations selon lesquelles des membres des populations autochtones seraient recrutés par la force par les forces armées. Un tel recrutement forcé est strictement interdit. En outre, l'armée est une armée de volontaires et il y a d'ailleurs plus de volontaires qui se présentent que l'armée ne peut en accueillir, a ajouté la délégation. Nous ne pouvons absolument pas accepter le rapport du Rapporteur spécial, M. Stavenhagen, mentionné aujourd'hui par un membre du Comité, a insisté la délégation, rappelant qu'elle avait en son temps, devant la Commission des droits de l'homme, rejeté les allégations contenues dans ce rapport.

Suite à une question soulevée par un membre du Comité, la délégation a indiqué que les autorités qui prennent en charge les enfants démobilisés n'ont eu connaissance d'aucun cas d'enfant soldat de sexe féminin ayant donné naissance à un enfant.

Toute personne souhaitant disposer d'une arme à feu, y compris dans un contexte professionnel, doit demander une autorisation spéciale auprès de la police qui n'accorde le permis que si la vie du demandeur est en danger. L'âge minimum pour le permis de port d'arme est fixé à 21 ans, a précisé la délégation. Le Bureau des douanes contrôle les exportations d'armes à feu par tous les points de sortie du pays, a par ailleurs indiqué la délégation.

La délégation a indiqué n'avoir connaissance d'aucun cas de condamnation ni de poursuites à l'encontre d'une personne qui aurait recruté un enfant dans un conflit armé.


Un membre du Comité a fait part de son étonnement face à cette déclaration de la délégation au regard du nombre important d'enfants recrutés par des groupes armés aux Philippines. Un autre expert s'est inquiété d'informations faisant état de l'existence de cas d'enfants assassinés parce qu'ils ont des parents appartenant à des groupes armés. Que font les autorités pour empêcher de telles situations et condamner les coupables ?

En réponse à d'autres questions, la délégation a indiqué que, grâce à la loi sur la justice pour mineurs, il n'y a plus d'enfants dans les centres de détention puisqu'ils ne peuvent pas être jugés au pénal en dessous de 15 ans.

Il n'y a pas de mines antipersonnel aux Philippines a affirmé la délégation, qui a ajouté qu'il n'y a pas d'indication que des enfants auraient pu en être victimes, même si des groupes armés détiennent des mines antipersonnel.

Observations préliminaires

M. DAVID BRENT PARFITT, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport philippin, a remercié la délégation pour la franchise des réponses qu'elle a apportées aux questions soulevées par les experts. Il a souligné que dans ses observations finales, le Comité reprendra un certain nombre de problèmes évoqués cet après-midi, s'agissant notamment de certains aspects de la formation obligatoire dans les lycées. Le Comité souhaitera aussi s'assurer que les Philippines ont l'intention d'inclure les enfants dans le processus de paix. En outre, dans certaines régions du pays, les services sociaux font défaut, a relevé M. Parfitt.
__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

VOIR CETTE PAGE EN :