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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DU NIGÉRIA

26 Janvier 2005

Comité des droits de l'enfant
26 janvier 2005


Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le deuxième rapport périodique du Nigéria sur l'application par ce pays des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

En fin de journée, les co-rapporteurs du Comité chargées de l'examen de ce rapport, Mmes Lucy Smith et Yanghee Lee, ont présenté des observations préliminaires. Mme Smith a salué la volonté du Nigéria de faire avancer son plan d'action en faveur de l'enfant au niveau fédéral. La législation, prometteuse, est en bonne voie, a-t-elle ajouté; il n'en demeure pas moins que la loi sur le papier ne suffit pas et que sa mise en œuvre, c'est-à-dire sa transcription dans la réalité, est tout aussi importante. Des efforts accrus doivent notamment être déployés dans les domaines de l'éducation et de la justice juvénile, a précisé Mme Smith. Pour Mme Lee, il ne fait aucun doute que le Nigéria se préoccupe de ses enfants et considère la question des enfants comme étant hautement prioritaire.

Les observations finales du Comité sur ce rapport ainsi que sur tous les autres rapports examinés au cours de la session seront adoptées en séance privée et rendues publiques à la fin de la session, vendredi prochain, le 28 janvier 2005.

à la demande de Mme Rita Akpan, Ministre des affaires féminines du Nigéria, le Comité a observé en début de journée une minute de silence à la mémoire des victimes du raz de marée de l'Océan indien il y a exactement un mois.

Présentant le rapport de son pays, Mme Akpan a indiqué qu'afin de traduire dans la réalité les dispositions de la Convention, plusieurs mesures ont été prises au Nigéria dans le domaine juridique et institutionnel ainsi que dans les domaines de l'application des lois, de la survie et de la participation des enfants. Mme Akpan a par ailleurs attiré l'attention sur les activités menées en matière d'interception, de secours, de rapatriement et de réhabilitation s'agissant des enfants victimes de trafic et des enfants qui se trouvent dans des situations d'abus ou dont la force de travail est exploitée; ainsi qu'en matière de poursuites des adultes coupables de ces situations. Les efforts visant à poursuivre les responsables du trafic d'êtres humains n'ont pas été à la mesure de l'importance et de l'accroissement de ce crime à travers le pays, a ajouté la Ministre.

La délégation nigériane était également composée, entre autres, du Représentant permanent du Nigéria auprès des Nations Unies à Genève, M. Joseph U.Ayalogu, ainsi que de représentants de la Commission parlementaire sur les affaires féminines; du Parlement des enfants; de l'Agence de développement de l'enfant; du Comité national de mise en œuvre des droits de l'enfant; du Ministère de la santé; du Ministère de l'éducation; du Ministère des affaires féminines; et du Ministère des affaires étrangères.

La délégation a fourni aux experts des compléments d'informations s'agissant, notamment, de l'application du droit coutumier et de la charia; des châtiments corporels; de la définition de l'enfant; de l'enregistrement des naissances; des questions de santé et d'éducation; de la situation des enfants handicapés; des possibilités offertes aux enfants de porter plainte pour violation de l'un quelconque de leurs droits; de la traite des personnes; des questions d'adoption; des enfants orphelins; de la prévention des affrontements intercommunautaires; ainsi que de l'administration de la justice pour mineurs.

Le Comité doit reprendre ses travaux en séance publique vendredi matin, vers 11 heures, pour présenter ses observations finales sur les rapports examinés au cours de cette session et clore ainsi les travaux de sa trente-huitième session.


Présentation du rapport du Nigéria

Présentant le rapport de son pays, Mme RITA AKPAN, Ministre des affaires féminines du Nigéria, a souligné que depuis l'examen du rapport initial en 1996, le Nigéria n'a ménagé aucun effort pour répondre aux préoccupations exprimées par le Comité dans un plusieurs domaines essentiels. Elle a ajouté que son pays appréciait grandement les recommandations qui lui ont été adressées par le Comité en vue d'une mise en œuvre effective de la Convention. En traitant de ces préoccupations et recommandations, le deuxième rapport périodique tient compte de la complexité du Nigéria et attire l'attention sur les progrès lents mais constants réalisés aux fins de l'obtention de statistiques nationales ainsi que sur les différents niveaux de développement économique qui existent entre les diverses régions du pays. Le rapport constate les contraintes qui pèsent sur la mise en œuvre de la Convention, ainsi que les changements positifs qui se produisent à différents niveaux dans les différentes régions du pays. Il analyse l'impact de la Convention sur des groupes cibles et institutions, ainsi que les défis associés à la structure fédérale du pays.

Un certain nombre de mesures concrètes ont été prises par le pays pour assurer la réalisation progressive de la Convention, a poursuivi Mme Akpan. Afin de traduire dans la réalité les dispositions de la Convention, a-t-elle précisé, un certain nombre de mesures ont été prises dans le domaine juridique et institutionnel ainsi que dans les domaines de la diffusion de la Convention, de l'application des lois, de la survie et de la participation des enfants. Une loi sur les droits de l'enfant ainsi qu'une loi sur l'interdiction du trafic de personnes ont été adoptées en 2003, a notamment souligné la Ministre. Plusieurs États ont en outre adopté des lois portant interdiction des pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes et aux enfants telles que les mutilations génitales féminines. Au niveau institutionnel, un Département du développement de l'enfant a été créé au sein de ce qui est devenu le Ministère des affaires féminines. Un Comité national de mise en œuvre des droits de l'enfant a également été mis sur pied en 1994 et des comités de mise en œuvre des droits de l'enfant ont ensuite été créés au niveau des gouvernements locaux et des gouvernements des États. Mme Akpan a ajouté qu'en 2003, le Nigéria a créé l'Agence nationale pour l'interdiction du trafic de personnes. En outre, un Rapporteur spécial sur les droits de l'enfant a été nommé au sein de la Commission nationale des droits de l'homme.

En ce qui concerne l'application des lois, la Ministre des affaires féminines a notamment fait part de la mise en place, en 2002, dans les postes de police du pays, de bureaux pour les jeunes, les enfants et les femmes. Elle a également attiré l'attention sur les activités menées en matière d'interception, de secours, de rapatriement et de réhabilitation s'agissant des enfants victimes de trafic et des enfants qui se trouvent dans des situations d'abus ou dont la force de travail est exploitée; ainsi qu'en matière de poursuites des adultes coupables de ces situations. Mme Akpan a également fait part de l'existence d'un programme visant à retirer les enfants de la rue et à les réadapter socialement - certains d'entre eux étant même rendus à leurs familles lorsque cela est possible. La Ministre nigériane des affaires féminines a par ailleurs indiqué qu'une campagne de sensibilisation et de formation sur la Convention et la loi de 2003 sur les droits de l'enfant est actuellement menée à l'intention des groupes et organes professionnels impliqués dans la protection de l'enfance.

Les efforts visant à poursuivre les responsables du trafic d'êtres humains n'ont pas été à la mesure de l'importance et de l'augmentation de ce crime à travers le pays, a par ailleurs précisé Mme Akpan. Au cours de la dernière décennie, a-t-elle ajouté, une hausse rapide du trafic d'enfants s'est produite à l'intérieur du Nigéria et à travers ses frontières. En conclusion, la Ministre a rappelé que le Nigéria doit surmonter un énorme défi associé à son histoire, à la taille de sa population (plus de 120 millions d'habitants) et aux nombreux groupes linguistiques (plus de 350) que compte le pays.

Le deuxième rapport périodique du Nigéria (CRC/C/70/Add.24) indique qu'en octobre 1994, le Gouvernement fédéral du Nigéria a inauguré le Comité national de protection des droits de l'enfant, chargé de faire connaître à la population la Convention relative aux droits de l'enfant et la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant - auxquelles le pays est partie. Ce comité a par la suite été décentralisé aux niveaux des États et des pouvoirs locaux. En septembre 2000, le Nigéria a été l'un des premiers pays d'Afrique à signer les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention, rappelle le rapport. Montrant qu'il est déterminé à mettre en œuvre la Convention, le Nigéria a pris les mesures nécessaires pour satisfaire aux exigences du Plan d'action du Sommet mondial pour les enfants et élaboré un Plan d'action national décrivant en détail les activités à mettre en œuvre en vue de la réalisation des objectifs fixés. Le rapport souligne par ailleurs que la Commission nationale des femmes est devenue le Ministère des affaires féminines et du développement social en 1995. Le Département du développement de l'enfant relève désormais de ce ministère et est le principal organe chargé de la mise en œuvre des dispositions de la Convention et de son suivi. Après avoir été adopté par le Conseil exécutif fédéral, un projet de loi relatif à l'enfance est actuellement devant l'Assemblée nationale et l'on peut espérer qu'il sera promulgué prochainement. Il tient compte des dispositions de la Convention et intègre les droits qui y sont consacrés. Certains États ont en outre promulgué à leur niveau des lois qui protègent les enfants. S'agissant de la place de la Convention en droit interne, le rapport souligne que selon la Constitution de 1999, aucun traité conclu entre la Fédération et tout autre pays n'aura force de loi avant d'avoir été approuvé par l'Assemblée nationale. Il en découle que la Convention n'ayant pas été intégrée au droit interne, elle n'a aucun statut dans le pays. Toutefois, en vertu de la Constitution, l'Assemblée nationale peut adopter des lois applicables à l'ensemble ou à une partie de la Fédération sur des questions ne figurant pas sur la liste exclusive du pouvoir législatif aux fins de la mise en œuvre d'un traité.

Le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures qui ont eu des effets importants sur les enfants nigérians, poursuit le rapport. La première est l'éducation de base pour tous, qui oblige chaque enfant à fréquenter l'école, laquelle est gratuite jusqu'au premier cycle du secondaire. La seconde est le programme de lutte contre la pauvreté, qui a permis de créer des institutions offrant des prêts et des microcrédits aux plus démunis ainsi que des stages de formation et autres mesures d'autonomisation des familles visant à les sortir de la pauvreté. Des ressources importantes et une grande volonté politique ont été mises au service du Programme national de vaccination, soutenu par plusieurs organismes donateurs, ajoute le rapport. Il reconnaît par ailleurs qu'il n'y a pas de définition uniforme de l'enfant au Nigéria. À titre d'exemple, le Code pénal retient les âges de 7 ans à 12 ans, selon les cas, aux fins de la responsabilité pénale. L'âge minimum du consentement à des relations sexuelles est de 18 ans dans la plupart des États; toutefois, il est de 13 ans dans deux États du sud. Pour ce qui est de l'engagement volontaire dans les forces armées, l'âge requis est de 18 ans; toutefois, diverses divisions des forces armées sont dotées de leurs propres écoles qui accueillent et forment des élèves mineurs. Mais les enfants ne prennent pas part à des activités militaires, souligne le rapport. Il affirme par ailleurs que dans certaines régions du nord, des enfants almajiri sont utilisés comme fomentateurs de troubles puis comme boucliers humains. Plusieurs études ont confirmé la participation d'enfants à des affrontements intercommunautaires ou politiques, qu'ils soient victimes ou, malheureusement, auteurs de crimes, d'incendies criminels, de cambriolages ou de vols. Selon certaines informations, des enfants de 15 à 18 ans participent activement aux conflits récurrents qui ont lieu en pays Ogoni et, plus récemment, aux affrontements communautaires qui se sont déroulés à Shagamu, Kano, Kaduna et Lagos.

Les enfants ne sont pas condamnés à mort ni à l'emprisonnement à perpétuité, indique en outre le rapport. Quelques enfants ayant commis des vols ont été condamnés à mort, mais n'ont pas été exécutés. Des lois régissent la succession à la naissance mais, dans certains États, la tradition et la religion privent encore les filles et les femmes du droit d'hériter. Dans la culture ibo, par exemple, seuls les enfants de sexe masculin ont ce droit et, dans certaines régions du sud, les femmes et les filles ne peuvent hériter puisqu'elles font elles-mêmes partie du patrimoine à transmettre. Aux niveau national, régional et local, des équipes spéciales sont chargées d'éliminer toute discrimination à l'égard des fillettes, précise le rapport. En dépit de diverses lois, les fillettes, et dans certaines régions les garçons, les enfants nés hors mariage, les enfants handicapés, les enfants d'exclus, les enfants appartenant à des minorités et les enfants originaires d'autres États sont souvent victimes de discrimination. Le Gouvernement fédéral a mis en place des programmes d'éducation spéciale destinés aux peuples nomades, aux pêcheurs et aux commerçants migrants, des programmes d'alphabétisation pour les réfugiés ainsi qu'un programme d'alphabétisation de masse. Les programmes d'éducation de base pour tous et d'élimination de la pauvreté contribuent à faire reculer la discrimination sociale, souligne le rapport. Parmi les principales difficultés rencontrées dans l'application des dispositions de l'article 2 de la Convention, figurent des attitudes et des pratiques culturelles, traditionnelles et religieuses tenaces comme l'excision, le mariage précoce, les fiançailles d'enfants, les marques tribales, une éducation stricte et autoritaire des enfants, la préférence accordée aux garçons et la résistance des décideurs au changement. Le Nigéria interdit l'adoption par les étrangers; l'adoption relevant de la compétence des États, l'absence de législation uniformisée à l'échelle du pays peut donner lieu à des abus, admet le rapport. Le trafic et l'exploitation sexuelle des enfants et des mineurs sont en augmentation, souligne en outre le rapport.

Examen du rapport

MME LUCY SMITH, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Nigéria, a jugé franc et riche en informations le deuxième rapport périodique présenté par le pays. Le Nigéria est un pays important qui exerce une grande influence au niveau régional; c'est le plus peuplé d'Afrique, a-t-elle rappelé. Ce pays connaît de longue date des tensions ethniques et religieuses qui ont eu une grande influence sur la situation des enfants, a ajouté Mme Smith. Elle a salué l'effort impressionnant que constitue la loi sur les droits de l'enfant adoptée en 2003 qui, dans nombre de domaines, s'efforce de donner effet aux dispositions de la Convention. Il existe une forte volonté politique des autorités nigérianes de renforcer les droits de l'enfant dans le pays, a déclaré Mme Smith. Mais comme chacun sait, la volonté politique ne suffit pas toujours et, de fait, le Nigéria ne jouit pas d'une très bonne réputation en matière de droits de l'homme. Il existe d'importantes disparités entre garçons et filles, entre nord et sud, ainsi qu'entre les différentes régions du pays, a souligné l'experte. Les questions relatives à la traite des enfants constituent un important défi pour le pays, a-t-elle ajouté.

Mme Smith a souhaité obtenir davantage d'informations sur la situation économique générale du Nigéria et s'est demandée si la corruption n'était pas un problème à cet égard. Le pays pâtit en outre d'un manque cruel de ressources allouées à la promotion et à la protection des droits de l'enfant, a-t-elle affirmé. Elle a souhaité en savoir davantage sur les rapports entre la loi fédérale et les lois des différents États, ainsi qu'en ce qui concerne la loi coutumière et la loi de la charia. Les instances fédérales contrôlent-elles les juridictions de la charia lorsqu'elles ont recours à des dispositions pénales issues de la charia, a demandé Mme Smith? La loi sur les droits de l'enfant, dont les dispositions en matière de participation de l'enfant sont plutôt bonnes, permet-elle aux enfants de prendre part aux décisions qui sont prises en matière d'adoption, s'est interrogée Mme Smith?

MME YANGHEE LEE, co-rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Nigéria, s'est enquise du lien existant entre la loi sur les droits de l'enfant - que seuls quatre États nigérians ont ratifiée - et la loi sur les jeunes personnes. Relevant que la loi sur les jeunes personnes autorise, pour sa part, les châtiments corporels, elle s'est demandée si cette loi était appliquée dans tout le pays. Qu'a entrepris le pays pour donner effet aux recommandations antérieures du Comité s'agissant de l'enregistrement des naissances, a demandé Mme Yanghee Lee? Elle a par ailleurs fait observer qu'au Nigéria, 70% des enfants semblent vivre avec moins d'un dollar par jour.

Plusieurs autres membres du Comité ont relevé que la définition de l'enfant pose problème au Nigéria, notamment du point de vue de la responsabilité pénale, puisque dans certains États - outre le fait que cette responsabilité peut commencer à neuf, voire sept ans - des mineurs peuvent être condamnés à mort. Les tribunaux peuvent-ils condamner un enfant à des châtiments corporels voire à des formes de torture, a demandé un expert? Quels efforts le pays déploie-t-il pour faire disparaître la pratique de la polygamie, a demandé un autre membre du Comité?


Renseignements complémentaires fournis par la délégation nigériane

La délégation a assuré que le droit coutumier et la charia sont soumis à la Constitution. Or, la Constitution interdit spécifiquement que tout citoyen soit soumis à des traitements cruels, inhumains et dégradants et personne ne peut déroger à cette disposition constitutionnelle, a insisté la délégation.

En ce qui concerne les châtiments corporels, la délégation a indiqué que le Ministère de l'éducation a adressé à tous les établissements scolaires une circulaire interdisant cewtte pratique à l'école. En revanche, aucun texte de loi ne stipule expressément que les châtiments corporels sont interdits à la maison, a admis la délégation.

La délégation a fait valoir que trois femmes qui, dans trois États nigérians, avaient été condamnées à mort par lapidation en vertu de la charia et qui avaient fait appel de leur sentence ont finalement été acquittées et libérées.

À la question de savoir s'il arrivait au Nigéria que des hommes soient aussi condamnés pour adultère, la délégation a répondu par l'affirmative en signalant qu'en 2004, comme l'a relevé Human Rights Watch, un État nigérian a condamné trois hommes pour adultère.

Le droit pénal relève à la fois du Gouvernement fédéral et des États, a indiqué la délégation. Si, à ces deux niveaux de juridiction, deux lois différentes ont été adoptées sur une même question, c'est la disposition fédérale qui l'emporte, a précisé la délégation.

En ce qui concerne la définition de l'enfant, la délégation a affirmé qu'il existe à présent une définition très claire de l'enfant qui est énoncée dans la loi de 2003 sur les droits de l'enfant et selon laquelle est considérée comme un enfant toute personne âgée de moins de 18 ans. Il est également interdit à tout enfant de moins de 18 ans de contracter mariage, a ajouté la délégation. La question de la responsabilité pénale a quant à elle été traitée conformément aux recommandations du Comité puisque désormais, aucun enfant ne peut être soumis à des procédures pénales. En vertu de la loi de 2003, aucun enfant ne peut être soumis à un ordre d'emprisonnement ni à des punitions corporelles au Nigéria, a précisé la délégation.

Un membre du Comité ayant toutefois souligné que quatre États nigérians seulement ont adopté et intégré les dispositions de la loi de 2003 relative aux droits de l'enfant, la délégation a expliqué que des projets de loi visant l'intégration des dispositions de la loi de 2003 sont à l'étude dans 20 États sur les 36 que compte le pays.

Plusieurs experts ont fait part de leur préoccupation face au très faible taux d'enregistrement des naissances. Qu'arrive-t-il aux enfants dont la naissance n'a pas été enregistrée lorsqu'ils arrivent à l'âge où ils doivent s'inscrire à l'école, a demandé l'un d'eux? Ce n'est pas parce qu'un enfant n'a pas d'acte de naissance qu'il ne peut pas s'inscrire à l'école; mais il doit alors obtenir une déclaration d'un tribunal concernant son âge, a expliqué la délégation.

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation s'est dite consciente des disparités qui subsistent de ce point de vue entre filles et garçons. Elle a fait valoir que de nombreuses initiatives sont en place pour combler les écarts existants à ce sujet. Du fait de la prévalence des mariages précoces et des abandons scolaires, beaucoup de jeunes filles ne sont pas aussi bien éduquées que les garçons; des programmes de bourses ont donc été mis en place à leur intention, a notamment précisé la délégation. Elle a par ailleurs souligné le caractère historique de la disposition de la loi de 2003 selon laquelle une jeune fille qui tombe enceinte peut poursuivre sa scolarité après avoir accouché. En outre, certains États, notamment dans le nord du pays, ont adopté des lois qui interdisent de retirer les jeunes filles des écoles aux fins de les marier.

En ce qui concerne les questions de santé, un membre du Comité a relevé que les indicateurs de santé du Nigéria se dégradent et que le pays détient l'un des taux de mortalité infantile les plus élevés au monde. Un membre du Comité s'est enquis des programmes mis en place en faveur des orphelins victimes du sida. Le nombre d'orphelins du sida serait parmi les plus élevés du monde, s'est inquiété un autre expert. Un membre du Comité a cité les chiffres de 5 millions d'orphelins dans le pays, dont un million d'orphelins du sida.

Compte tenu des ressources disponibles, a indiqué la délégation, le Nigéria a choisi de concentrer son action dans le domaine de la santé sur un objectif précis, à savoir l'éradication de la poliomyélite; aussi, la poursuite de cet objectif absorbe-t-elle désormais l'essentiel des ressources. Les autorités ont également choisi d'œuvrer en faveur de la promotion de l'allaitement maternel, de sorte qu'actuellement, ce sont environ 26% des nourrissons qui bénéficient de l'allaitement maternel.

Environ 90% des enfants atteints par le VIH/sida ont été infectés par une transmission verticale, c'est-à-dire de la mère à l'enfant, a en outre indiqué la délégation. Le pays compte sept millions d'orphelins dont environ 1,3 million d'enfants orphelins du sida, a précisé la délégation; ces derniers sont souvent victimes d'une stigmatisation.

La délégation a par ailleurs informé le Comité de la mise en œuvre d'un programme de prévention du paludisme à travers la distribution de moustiquaires traitées aux insecticides.

Un expert ayant noté que certaines informations indiquent que les enfants handicapés seraient victimes de stigmatisation, la délégation a assuré que des dispositions ont été prises afin d'assurer que les enfants handicapés soient intégrés dans le système éducatif normal. Des écoles spécialisées sont à la disposition de ceux d'entre eux, tels les sourds et les aveugles, qui ne sont pas aptes à suivre une éducation normale, a précisé la délégation. Les enfants handicapés ne font pas l'objet de discriminations et sont intégrés dans la communauté, comme en témoigne leur scolarisation avec les autres enfants, a insisté la délégation.

S'agissant des possibilités offertes aux enfants de porter plainte pour violation de l'un quelconque de leurs droits, la délégation a fait valoir que le Ministère fédéral des affaires féminines dispose d'un service juridique fournissant une aide gratuite aux enfants et aux femmes victimes d'atteintes à leurs droits; la plupart des enfants et des femmes savent que ce service leur est offert. Il est en outre possible à tout citoyen, y compris aux enfants, de déposer plainte auprès de la Commission nationale des droits de l'homme, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne la traite des personnes, la délégation a assuré que de nombreuses mesures ont été prises pour faire face à la situation qui prévaut de ce point de vue dans le pays. L'Agence nationale pour l'interdiction de la traite de personnes a notamment été créée il y a à peine un an. Le Nigéria est le premier pays d'Afrique à s'être doté d'une telle institution spécialement mandatée pour faire face au problème de la traite, a souligné la délégation. Le Nigéria dispose en outre de toute une législation relative à la traite des êtres humains, a-t-elle ajouté. En matière de lutte contre la traite des personnes, une coopération étroite s'est instaurée entre la police, les services d'immigration, les services de sécurité de l'État et les autres institutions chargées de l'application des lois, a assuré la délégation. Au Nigéria, le phénomène de la traite des enfants a une dimension à la fois interne et externe. Depuis que la Cour suprême a rendu son arrêt condamnant à trois ans d'emprisonnement une personne impliquée dans un trafic d'êtres humains, chacun a compris que le Nigéria avait fermement l'intention d'éradiquer ce phénomène, a souligné la délégation.

S'agissant des questions d'adoption, un membre du Comité s'est enquis des mesures prises pour protéger les enfants dans le contexte des adoptions informelles. La délégation a indiqué que la loi de 2003 sur les droits de l'enfant comporte des dispositions relatives à l'adoption et à la mise sous tutelle des enfants. Les autorités nigérianes étudient maintenant les modalités qui permettraient de faire en sorte que l'intérêt supérieur de l'enfant soit dûment pris en compte lorsque des soins de substitution sont envisagés, de manière à éviter, autant que faire se peut, le placement de l'enfant en institution. L'adoption internationale est interdite au Nigéria car le pays ne dispose pas des mécanismes de surveillance adéquats qui lui permettraient de surveiller les enfants placés dans le cadre de telles adoptions, a précisé la délégation. Elle a souligné que le Président de la République lui-même a adopté un enfant.

Un membre du Comité a fait part de sa préoccupation face à la situation des enfants des camps de réfugiés, eu égard aux informations faisant état d'exploitation sexuelle, d'abus et de violences à l'encontre de ces enfants. Qu'entreprend le Nigéria pour assurer une protection adéquate à ces enfants?

Interrogée sur la manière dont les autorités entendent prévenir les affrontements intercommunautaires, la délégation a notamment souligné que le Gouvernement nigérian a mis en place dans chaque État une agence de gestion des cas d'urgence. Nombre de mécanismes de règlement des différends existent au niveau des communautés, a par ailleurs fait valoir la délégation.

Un membre du Comité ayant mentionné le chiffre de 6000 enfants détenus en prison avec des adultes, la délégation a affirmé que selon la loi nigériane, les enfants en conflit avec la loi ne sont pas considérés comme des délinquants mais comme des personnes ayant besoin d'être prises en charge et protégées. Les autorités sont persuadées que l'institutionnalisation des enfants en conflit avec la loi doit absolument être découragée et rester une mesure de dernier recours, a assuré la délégation.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires, Mme LUCY SMITH, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Nigéria, a remercié la délégation pour les informations qu'elle a fournies tout au long de la journée et qui ont permis de répondre à un grand nombre de préoccupations exprimées par les experts. Mme Smith a salué la volonté du Nigéria de faire avancer son plan d'action en faveur de l'enfant au niveau fédéral. La législation, prometteuse, est en bonne voie, a ajouté Mme Smith. Il n'en demeure pas moins que la loi sur le papier ne suffit pas et que sa mise en œuvre, c'est-à-dire sa transcription dans la réalité, est tout aussi importante, a-t-elle souligné. Des efforts accrus doivent notamment être déployés dans les domaines de l'éducation et de la justice juvénile, a poursuivi l'experte. Il faut espérer que le Nigéria continuera à jouer, dans cette région de l'Afrique, un rôle de chef de file en matière de droits de l'enfant, a déclaré Mme Smith.

Pour Mme YANGHEE LEE, co-rapporteuse du Comité pour le rapport du Nigéria, il ne fait aucun doute que le Nigéria se préoccupe de ses enfants et considère la question des enfants comme étant hautement prioritaire.


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