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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT PÉRIODIQUE DE L'ARGENTINE

17 Septembre 2002



CRC
31ème session
17 septembre 2002




Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le deuxième rapport périodique de l'Argentine sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. Présentant en fin de journée ses observations préliminaires sur la situation des droits de l'enfant dans le pays, Mme Marilia Sardenberg Gonçalves, membre du Comité et rapporteuse pour l'examen du rapport argentin, a notamment relevé que le pays souhaite des changements, mais a estimé qu'il fallait que les efforts s'accélèrent.
La rapporteuse a en outre appelé de ses vœux une consolidation de l'action engagée en faveur des enfants avant même l'avènement du gouvernement qui sortira des élections de mai prochain. Elle a par ailleurs mis l'accent sur les problèmes que rencontre le pays en matière de VIH/sida, de mortalité infantile, de violence et de torture. Le Comité adoptera ultérieurement, dans le cadre de séances à huis clos, des observations finales sur l'Argentine avant de les rendre publiques à la fin de la session, le vendredi 4 octobre 2002.
Présentant en début de journée le rapport de son pays, M. Alfredo Vicente Chiaradia, Représentant permanent de l'Argentine auprès des Nations Unies à Genève, a assuré le Comité de l'attachement de son pays à l'état de droit depuis la chute du gouvernement militaire il y a une vingtaine d'années. S'agissant de la crise actuelle qui est à l'origine, dans une large mesure, des difficultés que connaissent les enfants et la société argentins, M. Chiaradia a déclaré que, d'un point de vue économique, «l'Argentine a sans doute touché le fond et ne peut désormais que remonter».
Le Président du Conseil national des mineurs et de la famille, M. Norberto Ignacio Liwski, a pour sa part affirmé que la population demeure préoccupée par les situations qui continuent de porter atteinte à l'intégrité physique et psychologique des enfants, et qui rendent nécessaire des réformes institutionnelles permettant d'éviter tout acte de torture ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant à l'encontre des enfants. L'adolescence représente aujourd'hui en Argentine le segment de la société le plus vulnérable puisque les adolescents, non seulement ne travaillent pas, mais, de surcroît, ne suivent pas d'études. Environ 60% des familles comptant des adolescents vivent dans l'indigence, a indiqué M. Liwski.
Également composée de représentants de la mission permanente de l'Argentine auprès des Nations Unies à Genève, la délégation argentine a notamment indiqué qu'au mois de juin dernier, on estimait à 8,6 millions le nombre d'enfants vivant en dessous du seuil de pauvreté dans le pays. En outre, le nombre d'enfants entrés dans le monde du travail pourrait atteindre 1,5 million. On estime à 50 000 le nombre de personnes qui parcourent la nuit les rues de Buenos Aires pour rechercher dans les détritus des objets pouvant être réutilisés, a également souligné la délégation, attirant l'attention sur le phénomène des cartoneras.
La délégation a en outre fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, notamment, de la coordination de l'action en faveur de l'enfance, de l'impact de la pauvreté dans le pays, des questions d'éducation et de travail des enfants, de la situation de la communauté mapuche, des questions de santé, de l'administration de la justice pour mineurs, de la violence institutionnelle, des priorités du pays en matière de protection et de promotion des droits de l'enfant, ainsi que des disparitions d'enfants durant la période de la dictature.
Le Comité doit examiner demain, à huis clos, des projets de recommandations générales portant sur le sida, la santé des adolescents et les institutions nationales en matière de droits de l'homme. Il entamera jeudi matin, à 10 heures, en séance publique consacrée à l'examen du deuxième rapport périodique du Royaume-Uni (CRC/C/83/Add.3).

Présentation du rapport
M. ALFREDO VICENTE CHIARADIA, Représentant permanent de l'Argentine auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que le fait que le Président du Conseil national du mineur et de la famille soit venu présenter au Comité le rapport de son pays témoigne de l'importance que l'Argentine accorde au dialogue avec le Comité des droits de l'enfant. Malgré certaines circonstances difficiles que le pays a traversées du fait de certains comportements, il ne saurait y avoir de doutes, depuis la chute du gouvernement militaire il y a une vingtaine d'années, quant à l'engagement de l'Argentine à assurer l'état de droit. Récemment, l'Argentine a ratifié le Protocole facultatif à la Convention se rapportant à l'implication des enfants dans les conflits armés et a entamé le processus législatif visant la ratification du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants, a indiqué M. Chiaradia.
S'agissant de la crise actuelle que connaît le pays, qui est à l'origine dans une grande mesure des difficultés que connaissent les enfants et la société argentins, le représentant a assuré que les Argentins sont en train d'en tirer les leçons. Il a ajouté que, si l'on n'y prend garde, de telles situations pourraient se reproduire ailleurs. Lorsqu'un pays connaît quatre années de récession, que le PIB de ce pays chute de près de 15% en un an, que le chômage atteint jusqu'à 30% de la population, que les banques doivent bloquer les comptes pour éviter les risques de faillite et l'effondrement total du système bancaire, il faut s'attendre à des conséquences, a poursuivi M. Chiaradia. Les citoyens perdent alors confiance dans leur gouvernement et tout cela ne manque pas d'avoir des incidences sur la situation des enfants. M. Chiaradia a fait observer que ce qui s'est passé en Argentine a pu être constaté dans d'autres pays formant ce qu'il a appelé la «classe moyenne de la communauté internationale», c'est-à-dire des pays qui ont reçu à un moment donné un flux important de capitaux et d'investissements avant que ce flux ne s'inverse. D'un point de vue économique, «l'Argentine a sans doute touché le fond et ne peut désormais que remonter», a estimé le Représentant permanent.
Présentant le rapport de son pays, M. NORBERTO IGNACIO LIWSKI, Président du Conseil national du mineur et de la famille, a souligné qu'un gouvernement de transition a été mis en place en Argentine il y a quelques mois pour «sauver le pays». Au moment de la rédaction du présent rapport périodique, l'Argentine n'avait pas encore conscience qu'elle allait traverser les heures les plus difficiles de son histoire, a indiqué M. Liwski. Il y a quelques mois, des ébordements sociaux ont entraîné des pertes en vies humaines, dont plus de la moitié étaient des jeunes. M. Liwski a toutefois souligné que les institutions démocratiques du pays ont pu être maintenues. Néanmoins, le chômage et le sous-emploi ont accéléré l'exclusion sociale, a-t-il expliqué.
Le fait que se perpétuent des situations portant atteinte à l'intégrité physique et psychologique des enfants et que de tels actes soient très fréquents a ému la communauté nationale et souligné la nécessité d'engager des réformes institutionnelles permettant d'éviter tout acte de torture ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant à l'encontre des enfants, a en outre déclaré M. Liwski.
En ce qui concerne les réserves que l'Argentine a émises à l'égard des dispositions de la Convention s'agissant de l'adoption, M. Liwski a mis l'accent sur la situation complexe qui est celle de l'Argentine, le pays ayant connu par le passé des irrégularités s'agissant de la vente et du trafic internationaux d'enfants. La réserve argentine sur ces questions répond à un souci de protéger les enfants argentins contre toute menace de trafic et de vente d'enfants, a indiqué M. Liwski. Il n'y a pas en Argentine de dispositions entravant la possibilité d'adoption nationale, a-t-il assuré.
Le Président du Conseil national des mineurs et de la famille a par ailleurs indiqué que dans les 23 provinces argentines, les centres de protection des enfants, des adolescents et de la famille – au nombre de 37 au total (il peut y avoir plus d'un centre par province) – collaborent avec les organisations de la société civile afin d'œuvrer au respect des droits fondamentaux, notamment en matière d'éducation et d'alimentation. Les autorités ont également accordé la priorité à une politique de prévention de l'exclusion sociale, a également souligné M. Liwski. L'adolescence représente aujourd'hui en Argentine le segment de la société le plus vulnérable puisque non seulement cette partie de la population ne travaille pas mais en plus elle n'étudie pas. Environ 60% des familles comportant des adolescents (personnes âgées entre 14 et 18 ans) vivent dans l'indigence, a indiqué M. Liwski. Les adolescents sont aujourd'hui exposés à des risques de se retrouver dans des situations de violation du droit pénal du fait, notamment, du risque qu'ils encourent de se voir impliqués dans des trafics de stupéfiants, a précisé le Président du Conseil national des mineurs et de la famille.
Le deuxième rapport périodique de l'Argentine (CRC/C/70/Add.10) souligne que la jouissance et l'exercice de tous les droits de l'homme protégés par l'ordre juridique en vigueur en Argentine sont garantis à tous les habitants de la République. Comme l'a précisé la Cour suprême de justice de la nation, le terme «habitant» vise aussi bien les étrangers que les nationaux et s'applique aux personnes qui résident sur le territoire de la République dans l'intention d'y demeurer, et qui y habitent, même si elles n'y ont pas établi un domicile avec tous les effets juridiques qui s'y attachent. Le rapport précise en outre que la Convention relative aux droits de l'enfant a valeur de loi constitutionnelle. Il indique par ailleurs que le Conseil national du mineur et de la famille a été créé pour donner effet aux engagements découlant de la ratification de la Convention. Ce Conseil fonctionne désormais en régime d'autarcie économique et financière pour l'administration de ses ressources, poursuit le rapport. En 1998, a été approuvé un projet de loi portant création de la charge de défenseur des droits de l'enfant et de l'adolescent. Le Défenseur est proposé, nommé et révoqué par le Congrès national à la majorité des deux tiers des membres présents de chacune des deux Chambres. Il ne reçoit d'instructions d'aucune autorité et il lui incombe, à lui seul, de décider des affaires dont il se saisit.
Le rapport reconnaît qu'à la différence d'autres pays latino-américains, l'Argentine a un faible taux de fécondité moyenne (2,8 enfants par femme) au regard duquel le taux de mortalité maternelle
est élevé. Ce taux, qui en 1996 était de 4,7 pour 10 000 naissances vivantes pour l'ensemble du pays, reste élevé par rapport aux normes internationales malgré une certaine baisse, surtout si l'on tient compte d'un niveau de non-déclaration estimé à 50%. En ce qui concerne la dénutrition – l'une des causes de la mortalité infantile – l'Argentine n'est pas en mesure d'effectuer un diagnostic global de l'état nutritionnel des mères et des enfants faute de registres appropriés dans diverses provinces.
Le rapport indique par ailleurs que la Commission nationale pour le droit à l'identité a été créée par le décret n°1328/92 pour donner une impulsion à la recherche d'enfants disparus et déterminer le lieu où se trouvent les enfants enlevés et disparus dont l'identité est connue et les enfants nés alors que leur mère était illégitimement privée de liberté. Sont donc aussi concernées, ici, la recherche et la localisation des enfants disparus victimes de la dictature et des enfants victimes de vol ou de trafic de mineurs. Cette Commission conseille également en permanence les personnes majeures qui ont des doutes sur leur véritable identité et les aide à accomplir les démarches nécessaires pour élucider leur cas. De son côté, le pouvoir judiciaire a ouvert diverses enquêtes sur les enlèvements de mineurs nés en captivité pendant la période 1976-1983, précise le rapport. S'il en est ainsi, c'est parce que les lois dites «loi de l'obéissance due» et «loi du point final» – abrogées par la loi du Congrès n°24.952 du 25 mars 1998 – avaient expressément exclu de leur champ d'application le délit d'enlèvement de mineurs. Neuf personnes sont actuellement poursuivies pour des délits d'enlèvement de mineurs commis sous le gouvernement de fait qui a dirigé le pays de 1976 à 1983, précise le rapport. Parmi les inculpés, on compte M. Jorge Videla, premier Président du régime de facto, actuellement placé en résidence surveillée à domicile, indique le rapport daté de 1999. On compte aussi le dernier Président de fait, M. Reynaldo B.Bignone, arrêté le 20 janvier 1999.
Le rapport indique par ailleurs qu'en Argentine, la durée de la scolarité obligatoire est de dix années à compter de l'âge de 5 ans. D'après le recensement national de la population réalisé en 1991, à 14 ans, 30,5% des enfants étaient actifs en Argentine en milieu rural, tandis qu'en milieu urbain, cette part était de 11,7%.

Examen du rapport
Mme Marilia Sardenberg Gonçalves, membre du Comité et rapporteuse pour l'examen du rapport argentin, a affirmé que selon elle, l'Argentine est un pays développé puisque le revenu annuel par habitant s'élevait il y a peu de temps à 8 000 dollars. Elle s'est en outre réjouie que l'Argentine ait signé les deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention et ratifié celui portant sur l'implication des enfants dans les conflits armés. Elle s'est également réjouie de l'adoption d'une loi contre les violences domestiques et de la création d'un bureau pour venir en aide aux victimes de la violence familiale. Mme Sardenberg a par ailleurs salué la signature par l'Argentine d'un mémorandum d'accord avec l'Organisation internationale du travail (OIT) au titre du Programme pour l'élimination du travail des enfants (IPEC).
Mme Sardenberg s'est enquise du mandat et du fonctionnement du Conseil national des mineurs et de la famille. Elle s'est également enquise de la situation des enfants autochtones et des enfants membres d'autres minorités ainsi que de la situation des femmes et des fillettes. Il semble que la discrimination perdure à l'égard de ces groupes de la population et que les choses aient peu évolué dans ce domaine, a déclaré Mme Sardenberg.
Mme Sardenberg a souhaité obtenir davantage de renseignements sur la situation en matière de violence institutionnelle, de châtiments corporels, de brutalités policières et de conditions carcérales. Elle a fait état d'informations fort alarmantes reçues de certaines organisations non gouvernementales concernant des exécutions dans le pays.
Un autre membre du Comité a mis l'accent sur l'existence de rapports sur les mauvais traitements infligés par les membres des forces de l'ordre, le Conseil de l'enfance faisant lui-même état de centaines de cas à cet égard. Qu'en est-il des enquêtes à ce sujet, a demandé l'expert?
Des mesures ont-elles été prises pour élever à 18 ans l'âge minimum du mariage pour les filles, s'est demandé un autre expert. Un membre du Comité s'est enquis des mesures prises pour remédier à l'accroissement de la mortalité infantile. Certains se sont inquiétés de la situation s'agissant des grossesses précoces d'adolescentes.
Un autre expert s'est demandé si l'Argentine avait étudié la possibilité de mettre en place une procédure ou un mécanisme qui permettrait d'évaluer, avant qu'elles ne soient effectivement mises en place, l'impact que les différentes mesures envisagées peuvent avoir sur la situation des enfants.
En Argentine, le taux de prévalence du VIH/sida est le plus élevé de toute l'Amérique latine, a fait observer un membre du Comité.
Un autre expert s'est enquis de la situation de la communauté mapuche eu égard, notamment, à la question de l'eau.
La délégation argentine a affirmé partager la préoccupation exprimée par certains experts s'agissant du faible degré de coordination entre le niveau national, d'une part, et les provinces fédérées, de l'autre. Il est néanmoins possible, même en cette période de crise, de jeter les bases d'un nouveau système de coordination, a assuré la délégation.
S'agissant de l'impact de la pauvreté dans le pays, la délégation a indiqué qu'au mois de juin dernier, on estimait que 19 millions de personnes sur une population de 36 millions vivaient en dessous du seuil de pauvreté en Argentine. Sur ces 19 millions de pauvres, 8,4 millions sont indigents, c'est-à-dire qu'ils ne parviennent pas à couvrir leurs besoins alimentaires élémentaires, et 8,6 millions sont des enfants. Sept enfants sur dix naissent dans des foyers pauvres et quatre sur dix vivent dans l'indigence. Au cours de ces quatre dernières années, près de 80% des mineurs de moins de 18 ans sont passés à un moment ou un autre en dessous du seuil de pauvreté. On estime à 83% la proportion des foyers pauvres qui comptent des enfants de moins de 18 ans à charge. Ces sept derniers mois, les mesures adoptées afin de pallier cette situation s'articulent autour de trois grandes actions: le programme fédéral d'urgence alimentaire (qui couvre près de sept millions de personnes), le plan dit des chefs de foyer (en vertu duquel les foyers ciblés se voient attribuer une rente – certes faible du fait de la dévaluation du peso – de 150 pesos par mois) et le programme médical (qui permet notamment d'assurer que les familles vivant dans l'indigence aient accès aux médicaments).
S'agissant des questions d'éducation, la délégation a indiqué que, dans un certain nombre de régions connaissant une situation critique, des menaces pèsent sur la continuité de l'enseignement, en particulier en ce qui concerne le troisième cycle. Il y a un an, les données officielles concernant tant les zones rurales qu'urbaines estimaient à 250 000 environ le nombre de mineurs de moins de 14 ans travaillant dans le pays. La Commission nationale sur le travail des enfants a récemment affirmé que d'après des projections pour les mois à venir, le nombre d'enfants entrés dans le monde du travail (même lorsqu'ils continuent d'aller à l'école, ne serait-ce que parce qu'elle continue à leur offrir des repas) pourrait atteindre 1,5 million. On estime qu'à Buenos Aires, la nuit, 50 000 personnes parcourent les rues de la ville pour rechercher dans les détritus des objets pouvant être réutilisés. Le phénomène des cartoneras a atteint une proportion inconnue jusqu'alors, a affirmé la délégation.
En ce qui concerne l'éducation des enfants autochtones, la délégation a assuré qu'un enseignement bilingue leur est dispensé qui respecte l'identité culturelle de chaque ethnie.
La délégation a par ailleurs rappelé que l'essentiel de la communauté mapuche en Argentine se concentre en Patagonie. S'agissant du conflit relatif aux poursuites engagées dans la Province de Neuquén pour usurpation de terres mapuche, la délégation a indiqué que c'est le Procureur général, en tant que «Défenseur général», qui assume en personne la défense du cacique Antonio Salazar.
S'agissant des questions de santé, la délégation a reconnu que la prévalence du VIH/sida en Argentine atteint aujourd'hui un taux très élevé. La délégation a d'autre part reconnu la lenteur et le caractère sinueux de la réponse apportée par les autorités dans ce domaine puisque l'État n'a toujours pas mis en place de politique de prévention qui permettrait d'agir en amont, c'est-à-dire avant que l'infection par la maladie ne soit effective. Parmi les victimes du VIH/sida, on compte un nombre sans cesse plus élevé de jeunes, de femmes et de pauvres infectés. La zone critique de la maladie se situerait dans la zone urbaine de Buenos Aires ainsi que dans le Sud-Ouest (région de la Mantanza).
Un expert ayant relevé que 60% des décès d'enfants intervenant en Argentine auraient pu être évités, la délégation a fait valoir que le Ministère de la santé s'est proposé de promouvoir une stratégie de soins de santé primaire.
En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a souligné que le Conseil national des mineurs et de la famille s'oppose vigoureusement à tout projet législatif qui viserait à abaisser l'âge minimum de la responsabilité pénale. D'après la législation en vigueur en Argentine, une personne peut être considérée comme partiellement responsable du point de vue pénal dès l'âge de 16 ans. À 18 ans, la responsabilité pénale est pleine, a précisé la délégation.
Le Conseil national des mineurs et de la famille a obtenu confirmation que des formes de violence institutionnelle persistent dans la majeure partie des institutions s'occupant des enfants et des adolescents – et ce malgré les interdictions expresses qui existent sur le plan légal, a par ailleurs affirmé la délégation. Reste qu'il est très difficile d'établir en la matière les responsabilités des uns et des autres, a souligné la délégation. En matière de violence institutionnelle, ce qui est grave, c'est que les lois existent mais qu'on ne parvient pas à les faire respecter dans la pratique, a poursuivi la délégation. La violence institutionnelle ne saurait être admise, sous peine de se rendre complice de cette violence, a-t-elle insisté. La délégation a fait part du lancement du Programme national contre la violence institutionnelle.
La délégation a rappelé que traditionnellement en Argentine, le rôle de l'homme est étroitement associé à la garantie du revenu de la famille. Aussi, la progression du chômage n'a-t-elle pas manqué de perturber les liens familiaux, a souligné la délégation.
Interrogée sur les priorités que l'Argentine entend se fixer en matière de protection et de promotion des droits de l'enfant, la délégation a notamment déclaré que, pour que l'État assume ses responsabilités et œuvre en partenariat avec la société civile, il faudra qu'il revoie les critères d'attribution des fonds. À cet égard, s'agissant du budget 2003, a-t-il été demandé au Congrès national de doubler la part du budget consacrée au secteur social et à l'enfance, a indiqué la délégation.
La délégation a par ailleurs indiqué que la loi de protection intégrale (de l'enfance) devrait sans conteste constituer une priorité pour le Sénat. Environ 60% des provinces disposent d'ores et déjà de tribunaux familiaux, a par ailleurs indiqué la délégation avant de préciser que ces tribunaux peuvent s'avérer d'une grande utilité pour la mise en œuvre de la doctrine dite de protection intégrale.
S'agissant de la question des enfants disparus durant la période de la dictature, un membre du Comité a fait observer que sur les quelques 500 enfants disparus, seuls 70 cas ont été résolus. Cet expert s'étant enquis d'éventuels éléments nouveaux dans ce dossier, la délégation a tenu à souligner que la lutte des grands-mères de la Place de Mai représente un exemple pour les jeunes générations qui entendent œuvrer à la défense et à la promotion des droits de l'enfant. La délégation a rappelé que durant la période de la dictature, des enfants avaient été arrêtés et déportés avec leurs parents, et parfois donnés en adoption. Ces enfants sont aujourd'hui devenus de jeunes adultes et ont le droit de connaître leur identité, a déclaré la délégation avant de préciser qu'aucune disposition juridique n'empêche de poursuivre les enquêtes dans cette affaire puisque les lois dites de l'obéissance due et du point final excluent l'enlèvement de mineurs de leur champ d'application. S'agissant des cas d'adoption pratiquée durant la période du «terrorisme d'État», entre 1976 et 1983, la délégation a assuré que des enquêtes sont menées, au maximum des possibilités, sur les irrégularités qui ont été commises dans ce domaine.

Observations préliminaires sur le rapport argentin
Présentant ses observations préliminaires sur le rapport de l'Argentine, Mme Marilia Sardenberg Gonçalves, rapporteuse du Comité pour l'examen de ce rapport, a notamment déclaré être mieux en mesure de comprendre la situation qui prévaut dans le pays à l'issue de cette journée de discussion. Elle a relevé que le pays souhaite voir les choses changer mais semble confronté à des obstacles. Aussi, faudrait-il que les efforts s'accélèrent, a estimé Mme Sardenberg. Il serait très important que l'action engagée en faveur des enfants soit consolidée avant même l'avènement du prochain gouvernement qui sortira des élections de mai prochain. L'experte a par ailleurs mis l'accent sur les problèmes que rencontre le pays en matière de VIH/sida, de mortalité infantile, de violence et de torture.
La délégation argentine a assuré qu'elle respecte profondément le travail précieux mené par le Comité des droits de l'enfant. Elle s'est dite confiante qu'avec le concours des organisations non gouvernementales, elle parviendra à faire passer le message que le Comité entend transmettre à l'Argentine.



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