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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LES RAPPORTS DU GUATEMALA SUR LA MISE EN ŒUVRE DES DEUX PROTOCOLES FACULTATIFS

01 Juin 2007

Comité des droits de l'enfant
1er juin 2007

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, les rapports initiaux présentés par le Guatemala au titre de chacun des deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, à savoir le Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et le Protocole facultatif sur l'implication des enfants dans les conflits armés.

La rapporteuse du Comité pour le Guatemala, Mme Rosa María Ortiz, a notamment salué les lois récentes adoptées par le Guatemala dans nombre de domaines pour lutter contre la vente d'enfants et la prostitution des enfants mais a rappelé l'importance de budgets appropriés pour la mise en œuvre. Elle a aussi souligné que le Guatemala est un pays de transit, d'origine et de destination de filles victimes de traite et a relevé des informations selon lesquelles des agents de police et des services d'immigration ont parfois été complices de la traite. Elle a également fait état d'informations concernant des «grossesses louées» avec mères porteuses; elle s'est aussi inquiétée de «soustractions» d'enfants à leurs mères légitimes et d'altérations des registres d'état civil. Elle a en outre attiré l'attention sur l'existence d'intermédiaires offrant des enfants à la vente. L'ensemble de ces pratiques s'inscrit dans le cadre de véritables réseaux de criminalité organisée ayant des connexions internationales et qui, parfois, impliquent des autorités et des agents de l'État. Le corapporteur, M. Kamel Filali, a pour sa part relevé, au nombre des problèmes que rencontre le Guatemala dans ce domaine, la traite des enfants; l'existence de réseaux organisés; les comportements de policiers; les enquêtes judiciaires qui n'aboutissent pas voire ne commencent pas du tout.

S'agissant du Protocole facultatif se rapportant à l'implication des enfants dans les conflits armés, Mme Ortiz, chargée également de ce dossier, a relevé que des traumatismes liés au conflit armé qui a marqué le pays pendant 36 ans persistent et doivent encore être pris en compte, même s'il n'y a pas aujourd'hui d'enfant impliqué dans un quelconque conflit armé au Guatemala. Le corapporteur, M. Jean Zermatten, a pour sa part souligné que s'il n'y a pas à proprement parler de «groupes armés» au Guatemala, il y a en revanche des bandes armées ayant des buts non pas militaires mais de criminalité et qui font appel à des enfants de moins de 18 ans.

Le Comité adoptera ses observations finales sur ces deux rapports du Guatemala lors d'une séance à huis clos, avant de les rendre publiques à la fin de la session, vendredi prochain, 8 juin 2007.

Les deux rapports ont été présentés par M. Carlos Ramiro Martínez, Représentant permanent du Guatemala auprès des Nations Unies à Genève, qui a assuré que son pays déploie un effort constant pour consolider la démocratie et l'État de droit et assurer le respect et la promotion des droits de l'homme. Le pays est confronté, comme d'autres, au défi de la lutte contre la pauvreté ainsi qu'à des problèmes liés à la délinquance transnationale organisée, au trafic de stupéfiants, à la traite de personnes et aux migrations. Le pays a toutefois engagé avec détermination des initiatives dans l'espoir d'instaurer de meilleures conditions de vie pour tous. Il n'existe pas d'enfants guatémaltèques participant à des conflits armés, ni occupant des fonctions militaires, a par ailleurs déclaré le Représentant permanent.

La délégation guatémaltèque était également composée de représentants de la Commission des mineurs et de la famille; de la Cour suprême; du Ministère de la gouvernance : du bureau du Procureur général; du Secrétariat au bien-être social; du Secrétariat aux œuvres sociales de l'épouse du Président; de la Commission présidentielle des droits de l'homme; et de la Mission permanente à Genève. Elle a fourni des compléments d'informations en ce qui concerne, entre autres, les mesures prises afin de lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et prendre en charge les victimes; la justice pour mineurs; les adoptions; l'enlèvement d'enfants; le processus de ratification du Statut de Rome de la Cour pénale internationale; les centres de formation civile ou militaire; l'utilisation de mineurs et d'enfants dans les maras ou bandes manipulées par la criminalité transnationale.


Lundi matin, à 10 heures, le Comité examinera le rapport initial présenté par l'Ukraine en vertu du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/UKR/1).



Présentation des rapports du Guatemala

Présentant les rapports soumis par son pays au titre des deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, M. CARLOS RAMIRO MARTÍNEZ, Représentant permanent du Guatemala auprès des Nations Unies à Genève, a assuré que le Guatemala déploie un effort constant pour consolider la démocratie et l'État de droit et assurer le respect et la promotion des droits de l'homme, honorant en outre ses engagements souscrits au niveau international. Le Guatemala, comme d'autres pays, fait face au défi de la lutte contre la pauvreté ainsi qu'à des problèmes liés à la délinquance transnationale organisée, au trafic de stupéfiants, à la traite de personnes et aux migrations. Le pays a néanmoins engagé avec détermination des initiatives dans l'espoir d'instaurer de meilleures conditions de vie pour tous, a fait valoir le Représentant permanent.

M. Ramiro Martínez a notamment fait part de l'adoption en 2003 de la «loi de protection intégrale de l'enfance et de l'adolescence», qui se fonde sur l'intérêt supérieur de l'enfant. Il a également rappelé que, suite à l'adoption des deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention, d'importantes politiques et d'importants instruments de travail ont été mis en place, au nombre desquels on peut citer la politique de lutte contre la traite de personnes et le Plan d'action soutenant ladite politique; l'élaboration et la mise en œuvre d'un Protocole d'aide aux jeunes filles victimes d'exploitation sexuelle; ou encore la récente approbation, le 23 mai dernier, de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale. Le Guatemala reconnaît que, pour apporter à tous les enfants guatémaltèques les garanties permettant d'assurer leur croissance dans des conditions adéquates, il convient d'engager de nouvelles actions et de poursuivre celles déjà mentionnées sur des thèmes tels que ceux d'une loi spécifique sur les adoptions ou de la qualification d'un délit de traite.

En ce qui concerne le Protocole facultatif sur l'implication des enfants dans les conflits armés, M. Ramiro Martínez a rappelé que le mois de décembre dernier a marqué le dixième anniversaire de la signature des Accords de paix qui mirent fin à un épisode de 36 années de conflit armé interne au Guatemala. Il a souligné que le pays s'est attaché à reconstruire la nation, à rétablir le tissu social et à créer les conditions qui, en temps de paix, permettent de prévenir toute action future susceptible de mettre de nouveau en péril les vies d'hommes et de femmes, de garçons et de fillettes.

Il n'existe pas d'enfants guatémaltèques participant à des conflits armés, ni occupant des fonctions militaires, a par ailleurs déclaré M. Ramiro Martínez. Comme cela a été reconnu par le rapport de la Commission pour l'éclaircissement historique, les deux parties au conflit (armée et guérilla) ont toutes deux utilisé des enfants durant la guerre, a rappelé le Représentant permanent. Il s'agit toutefois d'une pratique du passé, condamnable en tout points, mais dont on peut fort heureusement dire aujourd'hui qu'elle n'existe plus, a-t-il insisté.

Le rapport initial présenté par le Guatemala en vertu du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/GTM/1) souligne que la Loi de 2003 sur la protection intégrale des enfants et des adolescents a permis d'instituer une nouvelle approche de la prise en charge des enfants fondée sur la reconnaissance de l'enfant en tant que sujet de droits et d'obtenir l'engagement des différentes instances et des différents secteurs de s'employer ensemble à mettre en œuvre des stratégies qui aident les enfants et les adolescents à avoir une vie pleinement satisfaisante, à atteindre un développement intégré et à prendre une part active à la vie de la société. Le processus d'application de la loi n'a pas été facile, mais a donné des résultats positifs, poursuit le rapport. L'un des progrès les plus importants a été la création de la Commission nationale de l'enfance et de l'adolescence, organisme directeur chargé des politiques publiques dans le domaine de l'enfance, où siègent à égalité les représentants d'organismes publics et de la société civile. Le pays est néanmoins conscient de l'existence de pratiques illégales telles que la traite des personnes aux fins de l'exploitation sexuelle, le trafic illicite et d'autres actes méprisables commis principalement à l'encontre des enfants et des adolescents. Le Guatemala doit à sa situation géographique stratégique d'être utilisé par des réseaux internationaux de trafiquants comme pays de transit vers les pays du Nord ou pays de destination pour un grand nombre de personnes, surtout des femmes et des enfants qui ont été attirés dans le pays après s'être laissé abuser. Malgré certaines déficiences, le Guatemala déploie des efforts importants dans la lutte contre ces fléaux, ce qui n'a pas été facile en raison, essentiellement, de la faiblesse des ressources techniques, matérielles et financières disponibles. Un Plan national de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales a été mise ne œuvre depuis 2001.

Il y aurait 15 000 enfants et adolescents victimes de l'exploitation sexuelle à
des fins commerciales pour l'ensemble du pays, ajoute le rapport. La dernière réforme adoptée par le Congrès de la République sur l'infraction de traite des personnes (article 194 du Code pénal) décrit cette infraction de manière conforme à la définition qu'en donne le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. L'article remanié est libellé comme suit: «Traite des personnes. Quiconque, de quelque manière que ce soit, encourage, suscite, facilite ou finance le recrutement, le transport, le transfert, l'accueil ou la réception d'une ou de plusieurs personnes ou y collabore ou y participe en recourant à la menace, à l'usage de la force ou d'autres formes de contrainte, à l'enlèvement, à la fraude, à la duperie, à l'abus de pouvoir, ou en tirant parti d'une situation de vulnérabilité ou de la remise ou de la réception de paiements ou d'avantages afin d'obtenir le consentement d'une personne exerçant une autorité sur une autre aux fins d'exploitation sexuelle est passible d'une peine d'emprisonnement de six à 12 ans».

Le rapport initial présenté par le Guatemala au titre du Protocole facultatif se rapportant à l'implication des enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/GTM/1) rappelle que pendant 36 ans, le Guatemala a été le théâtre d'un conflit armé interne qui a cessé avec la signature de l'Accord pour une paix ferme et durable, conclu en 1996 entre le Gouvernement et l'Union révolutionnaire nationale guatémaltèque (URNG). On peut donc analyser la participation d'enfants et d'adolescents dans les forces armées pendant deux périodes distinctes: celle du conflit armé interne qui couvre quasiment quatre décennies (1960-1996) et celle qui s'est écoulée depuis la signature de la paix. Force est de reconnaître à ce propos que l'enrôlement forcé a été une pratique courante pendant les années de guerre, tant de la part de l'armée régulière que de celle des groupes de la guérilla, rassemblés sous la bannière de l'URNG, poursuit le rapport. Si l'on en croit le rapport officiel de la Commission pour la vérité historique mise en place en vertu des accords de paix, ainsi que les rapports d'organisations non gouvernementales et de mouvements autochtones comme la Coordination nationale des veuves du Guatemala, 45 % de la population masculine, dont 20 % de mineurs, ont été enrôlés à un moment donné du conflit armé interne par l'une ou l'autre des parties belligérantes. Après la fin du conflit armé interne, plus de 3000 guérilleros de l'URNG ont participé à des programmes de réinsertion, indique le rapport. On estime qu'il y avait 214 mineurs, précise-t-il. Il n'existe malheureusement pas de registre officiel permettant de savoir exactement combien de mineurs ont participé à la guerre, que ce soit dans les rangs de l'armée ou aux côtés de la guérilla. Cependant, comme l'État est responsable de veiller à ce que cette pratique ne soit tolérée sous aucun prétexte et de faire respecter la loi, l'une des principales mesures prises immédiatement après la signature de la paix a consisté à interdire expressément, en toutes circonstances, l'engagement même volontaire de mineurs de 18 ans dans l'armée.

Une nouvelle loi sur le service civique adoptée en application de l'Accord général relatif aux droits de l'homme offre aux Guatémaltèques la possibilité de servir la patrie selon deux formules: service militaire ou service social. Le Gouvernement a pris dans le cadre de l'Accord général relatif aux droits de l'homme divers engagements qu'il a traduits dans la pratique par des mesures concrètes. Ainsi, la conscription aux fins du service militaire obligatoire ne doit pas s'accompagner de coercition ni entraîner des violations des droits de l'homme; elle constitue un devoir et un droit civiques et, de ce fait, doit être juste et non discriminatoire. Conformément à cet engagement, la pratique de l'enrôlement forcé a cessé, tant pour les adultes que pour les mineurs, souligne le rapport. À l'heure actuelle, conformément aux dispositions de la loi portant création de l'armée guatémaltèque (décret no 72-90), la conscription se fait sur présentation spontanée, sur convocation, ou par contrainte en cas de refus de répondre à la convocation, indique plus loin le rapport.
Aucune disposition de la législation guatémaltèque n'autorise l'abaissement de l'âge de la conscription dans des circonstances exceptionnelles, ajoute le rapport. Depuis la signature de la paix entre le Gouvernement et l'Union révolutionnaire nationale guatémaltèque (URNG), en 1996, et la démobilisation des groupes armés appartenant à l'URNG, aucun nouveau groupe armé n'est apparu dans le pays, indique par ailleurs le rapport. À ce jour, ajoute-t-il, l'enrôlement forcé d'enfants ne constitue pas une infraction pénale; les juridictions de droit commun doivent poursuivre cet acte illicite en retenant des qualifications existantes comme la disparition forcée, la séquestration ou la soustraction de mineurs.


Examen du rapport relatif au Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

Observations et questions des membres du Comité

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport, MME ROSA MARÍA ORTIZ, a rappelé que le Guatemala compte treize millions d'habitants et qu'il s'agit d'un pays multiethnique, multiculturel et multilingue dont environ 40% de la population est maya. Mme Ortiz a relevé que 40% des enfants achèvent le troisième degré de scolarité. Environ 67% des enfants souffrent de malnutrition chronique et environ 5000 enfants vivent dans les rues, a-t-elle poursuivi, ajoutant sur ce dernier point qu'apparemment, le recrutement par des bandes et les rafles policières ont diminué ce nombre. Il semble que près de 10 000 enfants appartiendraient à des bandes dans lesquelles ils trouveraient une sorte de refuge protecteur. Elle a en outre fait état d'informations selon lesquelles 334 enfants auraient été tués en un an dans ce contexte.

Le Guatemala est un pays de transit, d'origine et de destination de filles victimes de traite à des fins d'exploitation sexuelle et de travail infantile, a poursuivi Mme Ortiz. La traite a lieu principalement dans la capitale et dans les villes frontalières avec le Mexique et El Salvador, a-t-elle précisé. Des informations indiquent que des agents de police et des services d'immigration ont parfois été complices de la traite, a-t-elle ajouté.

Mme Ortiz a également fait état d'informations relatant des «grossesses louées» avec mères porteuses; elle a aussi fait état de soustractions d'enfants à leurs mères légitimes et d'altérations des registres d'état civil. Elle a en outre attiré l'attention sur l'existence d'agences internationales d'adoption et d'intermédiaires offrant des enfants à la vente. L'ensemble de ces pratiques s'inscrit dans le cadre de véritables réseaux de criminalité organisée ayant des connexions internationales et qui, parfois, impliquent des autorités et des agents de l'État, a affirmé Mme Ortiz.

Il n'en demeure pas moins que le Guatemala déploie des efforts pour faire face à cette situation d'ensemble, a reconnu Mme Ortiz. Elle a notamment salué l'adoption du Protocole sur le rapatriement des enfants victimes de la traite ou encore la récente ratification de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

Mme Ortiz s'est enquise de l'instance ayant en charge la coordination de l'action en faveur de l'enfance au Guatemala.

M. KAMEL FILALI, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport guatémaltèque, a pour sa part estimé que le rapport présenté par le Guatemala manque de clarté et comporte certaines incohérences qui laissent le champ libre à des interprétations diverses. Il a fait état de l'existence d'un certain nombre de problèmes au Guatemala, au nombre desquels il a cité la traite des enfants; l'existence de réseaux organisés; le comportement de policiers; les enquêtes judiciaires qui n'aboutissent pas voire ne commencent pas du tout; la traite des enfants; la prostitution; la pornographie; ainsi que le problème des enfants pris en transit entre des pays tiers et le Guatemala.

M. Filali s'est par ailleurs enquis de la place du Protocole dans l'ordre juridique interne. Relevant que tous les crimes énoncés à l'article 3 du Protocole ne sont pas intégrés dans la législation interne, M. Filali a souhaité savoir si les tribunaux guatémaltèques peuvent invoquer directement les dispositions du Protocole.

Les réserves que le pays avait émises à l'égard de la Convention de 1969 sur le droit des traités persistent-elles aujourd'hui, a demandé M. Filali ?

Où en est la révision du Code pénal dont il semble qu'elle se trouve actuellement devant le Congrès, s'est par ailleurs enquis l'expert ? Il a jugé disproportionnées et inadéquates les sanctions prévues par rapport à certaines infractions visées par le Protocole.


Un autre membre du Comité a fait état d'informations selon lesquelles lorsque les forces de police font des descentes dans les maisons de prostitution guatémaltèques, elles entreprennent de renvoyer dans leur pays les enfants étrangers qui y sont interpellés. Aussi, cet expert s'est-il enquis de la procédure qui est suivie entre le moment où ses enfants étrangers sont interpellés et leur renvoi vers la frontière. Il s'est en outre fait l'écho d'informations selon lesquelles la protection et les mesures de réadaptation psychosociale en faveur des victimes sont quasiment inexistantes. Les enfants victimes de crimes visés par ce Protocole sont gardés en centre de détention avec des enfants en conflit avec la loi, s'est par ailleurs inquiété l'expert. Le Guatemala ne dispose pas d'un programme de protection des victimes efficace, a-t-il insisté. Selon des informations fournies par une organisation non gouvernementale, aucune victime n'aurait été indemnisée.

En ce qui concerne les enfants de la rue, une étude laisse apparaître qu'ils sont dans leur quasi-totalité victimes d'exploitation sexuelle, a fait observer un membre du Comité. Un autre expert a inquiété que selon le rapport présenté par le Guatemala, le pays compte 15 000 enfants victimes de l'exploitation sexuelle à des fins commerciales.

Un membre du Comité a souhaité savoir comment s'y prenaient les autorités guatémaltèques pour faire face au problème des enfants adoptés qui reviennent ensuite au Guatemala pour connaître leur origine.

Renseignements complémentaires fournis par la délégation

En réponse aux questions posées par les membres du Comité, la délégation a indiqué qu'un protocole vient d'être approuvé au Guatemala afin de protéger les filles victimes d'exploitation sexuelle à des fins commerciales. Elle a en outre fait état d'une campagne de sensibilisation qui a été lancée à travers le pays afin de mettre fin à ce type d'exploitation. Malheureusement, nombre de camionnettes qui sillonnaient le pays dans le cadre de cette campagne ont été vandalisées. Jusqu'ici, aucune évaluation des diverses mesures prises pour lutter contre ce phénomène n'a encore été entreprise, a par ailleurs reconnu la délégation.

Les autorités compétentes veillent à ce que les mineurs victimes de traite ou d'exploitation sexuelle ne soient pas traités comme des délinquants, elles veillent également à ce qu'ils soient entendus. On s'efforce en premier lieu de vérifier l'âge des victimes. Les victimes mineures sont immédiatement placées sous la protection de la justice qui, par le biais d'une équipe composée de psychologues, de travailleurs sociaux et d'avocats, s'efforce de veiller à ce que les droits de l'homme de ces enfants ne soient pas violés. C'est au nom de l'État et en faveur des enfants que le bureau du Procureur demande qu'une réparation soit accordée aux enfants victimes de ce type d'exploitation, a ajouté la délégation. Ainsi, le Procureur de la République peut se porter partie civile dans un procès.

Un expert ayant souhaité savoir si les centres d'accueil d'enfants victimes de l'exploitation sexuelle accueillent aussi les enfants étrangers, la délégation a affirmé que tel est bien le cas, en attendant que l'enquête détermine leur origine, leur nationalité et leur situation de famille pour se prononcer sur un éventuel retour dans leur pays.

La délégation a souligné que c'est le Secrétariat du bien-être social qui, au Guatemala, est chargé de la coordination et de l'exécution des politiques publiques en faveur de l'enfance.
Elle a par ailleurs indiqué que la Commission présidentielle des droits de l'homme existe depuis 1992 et que son mandat principal consiste à conseiller le Président pour tout ce qui a trait aux politiques nationales de droits de l'homme. Parmi ses attributions, figure l'élaboration de tous les rapports requis du Guatemala en vertu des différents instruments internationaux auxquels le pays est partie, a précisé la délégation.

Il existe au Guatemala des tribunaux pour mineurs qui s'occupent des mineurs à risque et des mineurs en conflit avec la loi, a fait savoir la délégation. La justice pour mineurs veille à assurer le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant et à faire en sorte que les mineurs ne soient pas traités d'une manière qui les amène à se retrouver victimes une seconde fois.

La délégation a par ailleurs fait part de la création d'un parlement des enfants.
À l'heure actuelle, a indiqué la délégation, 4000 enfants attendent d'être adoptés dans le pays et les autorités n'ont pas l'intention d'attendre la création de l'instance dirigeante chargée des adoptions, qui reste à créer conformément au projet de loi sur l'adoption, pour faire adopter ces enfants. Les normes existent en effet déjà dans le pays grâce à l'adoption par le Guatemala de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, a fait valoir la délégation.

S'agissant de la question des réserves que le Guatemala avait émises à l'égard de la Convention de Vienne sur le droit des traités, la délégation a indiqué que ces réserves ont donc été levées par décret suite au jugement de la Cour suprême qui avait statué que l'exécutif avait compétence pour lever les réserves. Ces réserves n'existent donc plus, a insisté la délégation.

Le projet de loi sur l'adoption qui a été élaboré au niveau national permettra notamment d'aborder la question des plus de 20 000 enfants qui ont été adoptés à l'étranger ces dix dernières années, a indiqué la délégation. En 2006, 4656 adoptions ont été enregistrées au Guatemala, dont 4 575 sont des adoptions internationales, le principal pays d'accueil étant les États-Unis, a précisé la délégation. Les plaintes déposées pour adoptions irrégulières se sont élevées à 80, a-t-elle ajouté. Les autorités sont en train de modifier le Code pénal afin d'y intégrer des infractions qui ne sont pas encore considérées comme telles à l'heure actuelle s'agissant de l'adoption et de diverses autres questions relevant de la protection de l'enfance, a par ailleurs souligné la délégation.

La vente d'enfants n'est pas une infraction inscrite dans le Code pénal, a souligné la délégation, il n'est donc pas possible à l'heure actuelle de condamner une personne sur cette base. Elle a toutefois précisé qu'aucune plainte pour vente d'enfants n'a été enregistrée au Guatemala. L'enlèvement reste la pratique la plus répandue pour se procurer illégalement un mineur, a-t-elle précisé.

La délégation a indiqué que des policiers ont été condamnés dans des affaires impliquant des violences contre des mineurs. Des policiers ont également été condamnés pour corruption et abus d'autorité, a-t-elle ajouté.


Examen du rapport relatif au Protocole facultatif se rapportant à l'implication des enfants dans les conflits armés

Observations et questions des membres du Comité

MME ROSA MARÍA ORTIZ, rapporteuse également pour l'examen de ce rapport, a relevé que les forces armées du Guatemala – tout comme l'ensemble du pays – sont encore très marquées par le conflit armé qu'a connu le pays pendant 36 ans. Des traumatismes persistent qui doivent encore être pris en compte, a-t-elle précisé. Certes, il n'y a pas aujourd'hui d'enfant impliqué dans un quelconque conflit armé au Guatemala, mais ceux qui y ont pris part par le passé demandent à être pris en charge, a souligné Mme Ortiz.

Le corapporteur pour l'examen de ce rapport, M. JEAN ZERMATTEN, a pour sa part salué la limite légale fixée à 18 ans au Guatemala pour le recrutement obligatoire et volontaire dans les forces armées.

M. Zermatten s'est enquis de la place du Protocole dans l'ordre juridique interne, s'inquiétant d'une décision d'une haute juridiction qui infirmait la suprématie du droit international sur le droit national.

Le corapporteur a par ailleurs pris note de l'intention du pays de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, relevant qu'il s'agit là d'un élément important puisque ce Statut considère comme crime de guerre l'enrôlement d'enfants. Où en est le Guatemala de son intention en la matière, a demandé l'expert ?

Le Secrétariat au bien-être social joue-t-il un rôle dans l'application du Protocole, a par ailleurs demandé M. Zermatten ?
Le Guatemala n'a pas à ce jour établi comme infraction pénale le fait de recruter des enfants en dessous de 18 ans, s'est en outre inquiété M. Zermatten. La réforme du Code pénal en cours d'examen prévoit-elle de remédier à cet état de fait, a-t-il souhaité savoir ?

Le corapporteur a relevé que les autorités guatémaltèques reconnaissent l'existence d'un problème en matière d'enregistrement des naissances; dans ce contexte, comment peut-on être sûr qu'aucun enfant de moins de 18 ans n'est enrôlé dans les forces armées ?

M. Zermatten a souligné que s'il n'y a pas à proprement parler de groupes armés au Guatemala, il y a en revanche des bandes armées ayant des buts non pas militaires mais de criminalité et qui font appel à des enfants de moins de 18 ans. Comment les autorités traitent-elles de ce problème, s'est-il enquis ?

Abordant le douloureux passé du pays, M. Zermatten a notamment relevé que la Commission sur la recherche d'enfants disparus manque cruellement de ressources pour s'acquitter de ses tâches. Qu'en est-il de la question des indemnisations, qui touchent surtout les veuves ? Les enfants qui ont été impliqués dans ces conflits armés ont-ils été indemnisés et qu'en est-il de leur réhabilitation, eu égard à la faiblesse des services psychosociaux?

M. Zermatten a par ailleurs souhaité en savoir davantage sur les institutions accueillant des centaines d'enfants et dans lesquels les élèves peuvent entrer dès l'âge de 11 ans pour un cycle de 5 ans. Il est malaisé de comprendre s'il s'agit d'écoles militaires ou civiles, a précisé l'expert. En outre, il semble que les châtiments corporels y soient pratiqués.

Renseignements complémentaires fournis par la délégation

La délégation a fait savoir que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale se trouve actuellement en deuxième lecture auprès du Congrès guatémaltèque. Conformément à la procédure habituelle en la matière, il faudra encore une troisième lecture et une adoption en plénière du Congrès avant que le Statut soit officiellement adopté, a-t-elle précisé.
La priorité sera accordée dans le budget aux dépenses sociales plutôt qu'à l'armée, a assuré la délégation.

La seule école strictement militaire du Guatemala est l'École polytechnique, a indiqué la délégation. La seule condition d'admission dans cette École est d'avoir obtenu un diplôme de degré moyen et d'être majeur (18 ans révolus), a-t-elle précisé. Pour les autres institutions mentionnées par un membre du Comité, il s'agit de centres de formation civile ou militaire, a-t-elle ajouté. Ce n'est pas parce qu'un enfant est diplômé de l'un de ces centres de formation qu'il va nécessairement rentrer ensuite à l'École polytechnique, a insisté la délégation, en effet, nombre d'enfants sortant de ces instituts intègrent ensuite l'université.

Les processus post-conflit sont des processus assez lents et les autorités ne ménagent aucun effort pour retrouver les enfants qui avaient été victimes du conflit armé interne et qui sont désormais des adultes, a par ailleurs souligné la délégation.

Il n'y a pas d'enrôlement forcé dans le pays, mais le Guatemala n'en reste pas moins confronté au problème de l'utilisation de mineurs et d'enfants dans les maras ou bandes manipulées par la criminalité transnationale, a par ailleurs reconnu la délégation. À cet égard, elle a attiré l'attention sur l'initiative de création d'une commission internationale d'enquête sur les groupes clandestins et parallèles - initiative entérinée par les Nations Unies qui se trouve actuellement devant le Congrès guatémaltèque.



Observations préliminaires

La rapporteuse du Comité pour l'examen des deux rapports du Guatemala, MME ROSA MARÍA ORTIZ, a jugé très fructueuse cette journée de discussion qui a permis de mieux comprendre ce qu'entreprend le Guatemala au profit des enfants au regard des deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention. Mme Ortiz a pris note des mesures prises dans le domaine de la formation et a encouragé le pays à continuer de mettre en place des systèmes permanents de formation et de diffusion concernant les dispositions de ces instruments.

Parmi les difficultés qui ont été mentionnées, Mme Ortiz a en particulier insisté sur la question de la collecte de données, rappelant qu'il est important de disposer d'indicateurs adéquats afin de mieux évaluer et suivre la mise en application des deux Protocoles. Mme Ortiz a salué les nouvelles lois adoptées par le Guatemala dans nombre de domaines; elle a toutefois rappelé que les lois doivent être assorties de mécanismes de mise en œuvre, d'institutions et surtout de budget appropriés. Mme Ortiz a plaidé en faveur d'une accélération du processus d'incrimination d'un certain nombre de délits qui ne figurent toujours pas dans le Code pénal guatémaltèque. Elle a par ailleurs assuré le Guatemala qu'il bénéficierait de tout le soutien nécessaire du Comité pour l'adoption du projet de loi sur les adoptions.

Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport présenté par le Guatemala au titre du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, M. KAMEL FILALI, a jugé constructif franc et direct le dialogue entre la délégation et le Comité. Il a par ailleurs félicité le pays pour son processus de ratification de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale et pour sa volonté d'introduire dans sa législation interne les crimes et sanctions visés par le Protocole.

Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport relatif au Protocole sur l'implication des enfants dans les conflits armés, M. JEAN ZERMATTEN, a lui aussi jugé constructif le dialogue d'aujourd'hui. Il a dit apprécier les efforts déployés en vue de la ratification du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Le Comité souhaite que le fait de recruter des enfants soit considéré comme un crime distinct à part entière. Il souhaiterait aussi que le Protocole soit largement diffusé auprès des militaires mais également auprès des jeunes de la population civile, a ajouté M. Zermatten. Le Guatemala a un passé face auquel il doit trouver des solutions dans le cadre d'un processus de paix, a-t-il poursuivi. Le pays doit à la mémoire des enfants disparus de faire toute la lumière sur ce qui s'est passé et doit aux enfants victimes réhabilitation, réinsertion et indemnisation, a ajouté M. Zermatten. L'expert a par ailleurs souligné que, comme d'autres pays, le Guatemala se trouve confronté à une nouvelle forme de groupes armés qui utilisent les enfants et violent leurs droits, à savoir les bandes armées. À cet égard, il s'est félicité des efforts déployés par le pays pour trouver une solution transnationale à ce problème.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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