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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ENTAME L'EXAMEN DU QUINZIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DU DANEMARK

12 Mars 2002



CERD
60ème session
12 mars 2002
Après-midi




Il examine également la situation au Turkménistan
en l'absence de rapport


Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a entamé, cet après-midi, l'examen du quinzième rapport périodique du Danemark sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Comité a également examiné, en l'absence de délégation, la situation au Turkménistan, État partie qui accuse un important retard dans la présentation de son rapport.

Présentant le rapport de son pays, M. Tyge Lehmann, Représentant permanent du Danemark auprès des Nations Unies à Genève, a notamment indiqué qu'un comité spécialement créé par le Ministère de la justice a recommandé que la Convention soit intégrée dans le droit interne danois. Il a par ailleurs indiqué qu'une radio locale s'est vu interdire d'émettre pour une période de trois mois en raison de la diffusion d'un programme laissant transparaître une attitude haineuse et raciste à l'égard de diverses minorités. La délégation a également indiqué que, le 17 janvier 2002, le Gouvernement danois a lancé une nouvelle politique visant à améliorer encore davantage l'intégration des étrangers vivant dans le pays.

La délégation danoise est également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère pour l'intégration, du Ministère de la justice et du Ministère du travail.

La Rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Danemark, Mme Patricia Nozipho January-Bardill, s'est inquiétée que la couverture des prestations de sécurité sociale ait été réduite aux seules personnes ayant résidé sept ans au moins au Danemark. Elle a également exprimé sa préoccupation devant le durcissement de la législation sur le mariage en vertu de laquelle les deux conjoints doivent désormais résider légalement au Danemark pour pouvoir se marier. Elle s'est par ailleurs inquiétée des informations faisant état d'une hausse alarmante du nombre d'attaques contre des musulmans suite aux événements du 11 septembre dernier.

S'agissant de la situation au Turkménistan, qui a accumulé un important retard dans la présentation de son rapport périodique, le Rapporteur du Comité chargé de la question, M. François Lonsény Fall, a souligné que diverses sources font état de nombreuses violations des droits de l'homme dans le pays, en particulier s'agissant des restrictions imposées à la minorité russe dans de nombreux domaines et des restrictions imposées à la liberté de mouvement des citoyens.

En fin de séance, le Comité a poursuivi l'adoption de ses observations finales concernant le rapport de la Lituanie. Le Comité se dit notamment préoccupé par les tendances xénophobes à l'égard des requérants d'asile et réfugiés tchétchènes et demande à la Lituanie de prendre à cet égard des mesures préventives et d'éducation.


Le Comité achèvera demain matin, à partir de 10 heures, son dialogue avec la délégation danoise.


Présentation du rapport du Danemark

Présentant le rapport de son pays, M. Tyge Lehmann, Représentant permanent du Danemark auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que cela fait plus de 25 ans que le Danemark entretient un dialogue avec ce Comité. Il a salué les diverses recommandations générales et décisions adoptées par cet organe depuis sa création et qui constituent incontestablement pour les États parties d'importantes directives pour les aider dans leur lutte contre le racisme et la discrimination raciale. La Conférence de Durban a par ailleurs créé un nouvel élan pour les travaux de ce Comité, a en outre estimé le représentant.

M. Lehmann a indiqué qu'un comité spécialement créé par le Ministère de la justice afin de se pencher sur cette question a recommandé que la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale soit intégrée dans le droit interne danois. Il est cependant encore trop tôt pour dire quand un projet de loi en ce sens sera soumis au Parlement, a ajouté le Représentant permanent. M. Lehmann a par ailleurs fait savoir au Comité que la radio locale Oasen – au sujet de laquelle le Comité avait déjà, par le passé, exprimé certaines inquiétudes – s'est vu interdire d'émettre pour une période de trois mois (qui s'achèvera le 1er mai prochain) en raison de la diffusion d'un programme laissant transparaître une attitude haineuse et raciste à l'égard de diverses minorités. En cas de récidive, cette radio risque une interdiction définitive d'émission, a précisé le Représentant permanent.

La délégation danoise a indiqué que, le 17 janvier 2002, le Gouvernement danois a lancé une nouvelle politique visant à améliorer encore davantage l'intégration des étrangers vivant au Danemark. Cette politique s'est accompagnée d'une loi présentée au Parlement le mois dernier qui a été jugée conforme aux recommandations du Conseil de l'Europe et du HCR en la matière, a précisé la délégation. Le taux de chômage des immigrés en provenance des pays en développement reste encore assez important puisqu'il se situe aux alentours de 20-25%, a par ailleurs reconnu la délégation.

Le quinzième rapport périodique du Danemark (CERD/C/408/Add.1) indique que la loi de 1998 sur l'intégration des étrangers au Danemark, entrée en vigueur le 1er janvier 1999, a notamment pour objectif de faire en sorte que les réfugiés et les immigrés soient des membres actifs de la société danoise, sur un pied d'égalité avec les citoyens danois. Cette loi prescrit qu'il soit proposé aux étrangers nouvellement arrivés de prendre part à un programme d'initiation destiné à améliorer leurs chances individuelles d'emploi, comprenant un cours de compréhension de la société danoise, des cours de danois et un stage d'orientation consistant en une formation ou un enseignement pratique ou théorique. La loi contient aussi des règles en vertu desquelles une indemnité initiale spéciale est allouée aux étrangers qui ne peuvent pourvoir à leurs propres besoins, et ce jusqu'à ce qu'ils soient en mesure de le faire. Lors de l'entrée en vigueur de la loi sur l'intégration, le Gouvernement a mis en place un plan d'action destiné à en évaluer les dispositions. En application du plan d'action adopté, un questionnaire à été envoyé en août 1999 à 34 autorités locales du Danemark. Les résultats de cette enquête, publiés en décembre 1999, ont montré que les autorités locales ont, dans une large mesure, réussi à fournir un logement aux réfugiés, à établir des plans d'action et à dispenser des cours de danois avant l'expiration des délais impartis par la loi. En même temps, cette enquête a montré que les étrangers sont peu nombreux à avoir trouvé un emploi régulier et que, dans une large mesure, ils ont bénéficié de l'aide prévue par les règles applicables aux cas particuliers. Afin d'accorder aux étrangers les meilleures conditions possibles pour participer activement à l'action d'intégration, le Gouvernement a décidé de rehausser l'indemnité initiale.

Depuis l'établissement du précédent rapport périodique du Danemark, cinq affaires de violation de la loi interdisant la discrimination raciale ont donné lieu à des poursuites au pénal, poursuit le rapport. Depuis cette même date, il y a eu six condamnations pour violation de l'article 266 b) du Code pénal – qui interdit la diffusion de propos ou de propagande racistes. Depuis la présentation du dernier rapport, la loi de mai 2000 portant modification, entre autres, de la loi sur les étrangers a amendé plusieurs dispositions de cette dernière relatives au regroupement familial, ajoute le rapport. L'une des conséquences de cet amendement est que le droit au regroupement familial des conjoints âgés de moins de 25 ans a été aboli.

S'agissant du Groenland, le rapport indique que la Haute cour orientale du Danemark a rendu son jugement dans la procédure engagée par un groupe de citoyens et 598 plaignants contre le cabinet du Premier ministre à la suite de la construction de la base aérienne de Thulé et du transfert en 1953 de la partie de la population qui habitait à proximité de la base, dans le village d'Uummannaq. La Cour a conclu que l'État n'était pas lié par les demandes territoriales portant sur l'aire de la base puisque la base aérienne de Thulé a été construite dans le respect du droit international et interne. L'État s'est vu imposer de dédommager les citoyens collectivement pour les droits de chasse perdus et de verser une indemnité aux plaignants concernés par le transfert de population. Les plaignants ont décidé d'interjeter appel de cette décision devant la Cour suprême danoise, où l'affaire est actuellement en instance. «Elle sera probablement tranchée au cours de l'année 2001», indique le rapport.


Examen du rapport du Danemark

La Rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Danemark, Mme Patricia Nozipho January-Bardill, a rappelé que la Convention interdit explicitement toute forme de discrimination et s'est donc demandé comment le Danemark justifie l'abolition du concept de «réfugié de facto" suite à laquelle seuls les réfugiés se trouvant sous la protection des conventions internationales se verront autoriser à vivre au Danemark. Mme January-Bardill a demandé les motifs du changement de la règle applicable en matière d'octroi du permis de résidence permanente, le permis étant désormais octroyé à l'issue de cinq années de résidence permanente au lieu de trois auparavant.

Mme January-Bardill a exprimé sa préoccupation que la couverture des prestations de sécurité sociale ait été réduite aux seules personnes ayant résidé sept ans au moins au Danemark. L'experte s'est en outre inquiétée du durcissement de la législation sur le mariage en vertu de laquelle les deux conjoints doivent désormais résider légalement au Danemark pour pouvoir se marier, ce qui, une fois de plus, exclut les requérants d'asile qui ne peuvent donc pas se marier dans le pays.

Mme January-Bardill a par ailleurs exprimé sa préoccupation devant des informations faisant état d'une hausse alarmante du nombre d'attaques contre des musulmans suite aux événements du 11 septembre dernier. Elle a dit attendre du Gouvernement danois qu'il se montre particulièrement vigilant, et de surveiller et de traiter ce problème. L'experte s'est également inquiétée de la tendance à la négation de l'existence de communautés autochtones au Danemark, et plus particulièrement au Groenland.


Un autre membre du Comité a relevé que les peines infligées en vertu de l'article 266b) du Code pénal, qui interdit la diffusion de propos ou de propagande racistes, ne sont pas très sévères puisqu'il s'agit essentiellement d'amendes et parfois de peines d'emprisonnement avec sursis. Ce même expert a relevé que le Comité est actuellement saisi d'une plainte individuelle alléguant d'un refus d'accès à une discothèque danoise pour des considérations de race. Or, il s'agit là d'une manifestation fréquente d'un racisme particulièrement sournois.

Plusieurs experts se sont inquiétés de l'hostilité accrue qui se manifeste dans le pays à l'encontre de la communauté musulmane depuis les attentats du 11 septembre dernier. Un membre du Comité a déclaré qu'il s'est souvent rendu dans les pays scandinaves et nordiques, qu'il a toujours salué le bilan de ces pays en matière de droits de l'homme, mais qu'il n'aurait jamais imaginé qu'il existe une telle haine des musulmans et des Arabes au Danemark, comme en témoignent nombre d'informations. Cet expert a cité les propos d'un député danois qui a déclaré que «tous les pays du monde occidental sont infiltrés par des musulmans dont certains nous parlent poliment en attendant d'être assez nombreux pour pouvoir nous tuer tous».

Il semble que les enfants bilingues des écoles maternelles ne peuvent utiliser une autre langue que le danois, a regretté un expert.

Les membres du Comité ont félicité la délégation danoise pour la régularité avec laquelle le Danemark lui présente ses rapports périodiques.

La délégation a souligné que le Danemark est très fier de la relation qu'il entretient avec le Groenland. Le gouvernement du Groenland fera part, dans le cadre de la présentation du seizième rapport périodique du Danemark, des travaux de la Commission de l'autonomie instituée au lendemain des élections parlementaires de février 1999. Ces travaux qui doivent s'achever au mois de juin prochain. L'objectif du Gouvernement danois s'agissant du Groenland est de promouvoir un partenariat dans l'action.

La délégation a par ailleurs tenu à affirmer que le sentiment de haine à l'égard des musulmans dont ont fait état plusieurs membres du Comité ne correspond pas à l'idée qu'elle se fait de la société danoise.


Examen de la situation au Turkménistan

M. François Lonsény Fall, Rapporteur du Comité chargé de l'examen de la situation au Turkménistan, a souligné que ce pays, qui a recouvré son indépendance en octobre 1991 et qui compte plus de quatre millions d'habitants, ne dispose pas d'institution nationale de protection des droits de l'homme. Diverses sources font état de nombreuses violations des droits de l'homme dans le pays, a indiqué M. Fall. Human Rights Watch fait notamment état des restrictions qui sont imposées à la minorité russe dans de nombreux domaines, notamment en matière d'emploi
et d'éducation. En outre, des restrictions sont imposées à la liberté de mouvement des citoyens, a poursuivi l'expert. M. Fall a souligné que peu d'informations sont disponibles quant à l'application de la Convention au Turkménistan. Le Comité devrait donc rappeler à ce pays les obligations qui lui incombent en vertu de l'article 9 de la Convention (relatif à la présentation des rapports au Comité).


Suite de l'adoption des observations finales concernant le rapport de la Lituanie

Le Comité a poursuivi l'adoption de ses observations finales concernant le rapport initial de la Lituanie.

Dans la partie de ces observations adoptée cet après-midi, le Comité rappelle les préoccupations qui ont été exprimées s'agissant du refus d'accorder la citoyenneté aux personnes infectées par le VIH/sida. Le Comité se dit également préoccupé par les tendances xénophobes à l'égard des requérants d'asile et réfugiés tchétchènes et demande à la Lituanie de prendre à cet égard des mesures préventives et d'éducation. Il recommande en outre au pays d'assurer la jouissance des droits sociaux, en particulier dans les domaines du logement et de la santé, à tous les requérants d'asile et réfugiés dans le besoin, quel que soit leur statut juridique. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par les informations indiquant que des politiciens et des médias ont exprimé des sentiments de haine raciale.




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