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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE MADAGASCAR

03 août 2004

3 août 2004


Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a achevé ce matin l'examen, entamé hier après-midi, du rapport périodique de Madagascar sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, M. Lucien Rakotoniaina, Président du Comité de rédaction des rapports aux instruments internationaux liés aux droits de l'homme du Ministère de la justice de Madagascar, a souligné que la présentation des rapports cumulés reflète la bonne foi des autorités malgaches de rompre avec l'inaction du passé et d'entamer le rattrapage du retard cumulé depuis des années. Elle exprime non seulement la volonté de Madagascar d'honorer ses engagements internationaux mais aussi sa ferme conviction que l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale est fondamentale pour l'avènement d'un ordre international démocratique et équitable. Il a souhaité que l'examen en cours permettra d'évaluer les acquis dans la lutte pour l'éradication de la discrimination raciale et de recenser les actions à entreprendre à l'avenir pour une lutte plus efficace.

M. Rakotoniaina a fait valoir notamment que les droits des étrangers sont protégés au même titre que ceux des nationaux et que les personnes appartenant à ces groupes peuvent accéder à des fonctions électives. À cet égard, il a attiré l'attention sur le fait que des parlementaires appartiennent aux collectivités d'origine indopakistanaise, chinoise, comorienne et française jouissant de la nationalité malgache. Dans le domaine économique, M. Rakotoniaina a mis en avant les nouvelles lois adoptées en 2003 permettant l'accès des étrangers à la propriété foncière. Il a également indiqué que le Code pénal incrimine la propagande raciste et l'incitation à la haine raciale. Toutefois, le chef de la délégation a souligné que la pleine réalisation des droits de l'homme ne peut être atteinte sans la réalisation d'un développement économique qui doit servir de base à la réduction des inégalités et à l'éradication de la pauvreté.

La délégation malgache était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la justice, du Ministère de l'éducation nationale et de la recherche scientifique, du Ministère de la population, de la protection sociale et des loisirs, de l'Institut national de la statistique, du Secrétariat d'État de la sécurité publique ainsi que de représentants d'organisations non gouvernementales et de la société civile.

Le rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport malgache, M. Nourredine Amir, a salué les «réponses vraies» apportées par la délégation aux questions souvent très difficiles. Il s'est félicité que ces réponses mettent un terme à ces près de vingt ans d'absence de Madagascar devant le Comité. M. Amir a mis l'accent sur les efforts des autorités actuelles qui, depuis 2003, s'efforcent de mettre un terme à la grave crise politique qu'a connu le pays et de créer les conditions pour la réconciliation nationale. Des efforts notables sont également consentis en vue de trouver les moyens adéquats pour redonner à Madagascar sa pleine capacité d'être en adéquation avec les objectifs visant à éliminer toutes les formes de discrimination raciale ainsi que toutes les autres sources de tensions. Toutefois, M. Amir a souhaité des éclaircissements notamment sur la définition des minorités et sur le fait de savoir si Madagascar se borne à l'énoncé de principes ou entend mettre en œuvre les mesures concrètes et détaillées telles que demandées par le Comité. En effet, relève-t-il, si le rapport identifie les institutions judiciaires compétentes en matière de protection des droits de l'homme, il n'en dit pas davantage pour ce qui est de réprimer et pénaliser les auteurs des violations et indemniser les victimes.

Plusieurs membres du Comité ont relevé des ambiguïtés s'agissant de la position des minorités au sein de la société malgache. En outre, ils ont rappelé la préoccupation permanente du Comité sur les recoupements existants entre discrimination économique et discrimination raciale ou ethnique. Certains ont exprimé un vif intérêt pour le fihavanana, ce mode coutumier de conciliation, et souhaité recevoir davantage d'informations à ce sujet.

En fin de séance, le Comité a tenu un court débat sur l'opportunité de mener une discussion thématique sur la prévention du génocide.


Le Comité tiendra cet après-midi, à partir de 15 heures, un débat général sur la question des réserves à la Convention, en préparation de la réunion qu'il doit avoir, demain après-midi, avec la Commission du droit international.


Présentation du rapport de Madagascar

M. ALFRED RAMBELOSON, Représentant permanent de Madagascar à Genève, a invoqué diverses raisons pour expliquer que Madagascar n'a pas fourni de rapport depuis 1986, notamment le fait que l'établissement de ces rapports constitue une charge financière et technique assez lourde pour un pays en développement et parmi les moins avancé tel que Madagascar. Toutefois, a-t-il fait valoir, Madagascar a mis les bouchées doubles pour rattraper ces retards et présenter un rapport cumulé. En outre, malgré ces retards, Madagascar n'a pas pour autant failli à ces engagements internationaux dans la mise en œuvre de la Convention, a-t-il ajouté souhaitant que l'examen en cours permettra d'évaluer les acquis dans la lutte pour l'éradication de la discrimination raciale et de recenser les actions à entreprendre à l'avenir pour une lutte plus efficace.

Présentant le rapport de Madagascar, le Chef de la délégation malgache, M. LUCIEN RAKOTONIAINA, Président du Comité de rédaction des rapports aux instruments internationaux liés aux droits de l'homme du Ministère de la justice, a fait valoir que la présentation des rapports cumulés reflète la bonne foi des autorités malgaches de rompre avec l'inaction du passé et d'entamer le rattrapage du retard cumulé depuis des années. Elle exprime non seulement la volonté de Madagascar d'honorer ses engagements internationaux mais aussi sa conviction ferme que l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale est fondamentale pour l'avènement d'un ordre international démocratique et équitable. M. Rakotoniaina a ensuite fait une brève présentation de son pays à travers son territoire, sa population et sa démographie ainsi que ses infrastructures, sa structure démographique, son cadre juridique de protection des droits de l'homme, sa politique de santé, d'éducation et de culture.

Le représentant malgache a indiqué que les dispositions d'une convention internationale ratifiée par Madagascar sont d'application immédiate et s'imposent au juge. Il a fait valoir les principes constitutionnels et les principes d'ordre politique, en particulier le fait que les droits des minorités tels que les migrants, les réfugiés et les personnes d'origines nationales différentes sont protégés au même titre que ceux des nationaux et que les personnes appartenant à ces groupes peuvent accéder à des fonctions électives. À cet égard, il a attiré l'attention sur le fait que certains parlementaires et élus appartiennent aux collectivités d'origine indopakistanaise, chinoise, comorienne et française jouissant de la nationalité malgache. Dans le domaine économique, M. Rakotoniaina a mis en avant les nouvelles lois adoptées en 2003 réglementant l'accès des étrangers à la propriété foncière. Dans le domaine culturel, il a attiré l'attention sur la mise en place de l'Office de l'éducation de masse et du civisme pour renforcer l'éducation aux droits de l'homme.

Au nombre des évolutions d'ordre législatif, judiciaire, administratif et autres, M. Rakotoniaina a notamment mentionné une loi de 1989 qui stipule que «aucun parti ni organisation politique ne peut continuer à exister si son objectif tend directement ou indirectement à mettre en cause l'unité de la nation ou procède d'une plate forme ségrégationniste à caractère ethnique, tribal ou confessionnel"; la promulgation de la loi réprimant toute forme de discrimination sur le plan pénal; la gratuité et l'accessibilité de tous à l'enseignement public et le caractère obligatoire de l'enseignement primaire; et le projet visant à pallier les carences constatées dans l'enregistrement des naissances.

L'égalité en matière d'accès à la justice est garantie par le Code de procédure pénal qui prévoit en outre une assistance juridictionnelle aux plus démunis, et ce à toutes les étapes de la procédure. En matière d'information, le principe constitutionnel de liberté d'expression sans discrimination est prévu dans le décret sur la communication. M. Rakotoniaina a en outre souligné les efforts de renforcement des capacités nationales dans le domaine des droits de l'homme grâce à l'aide du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), et en particulier par le biais de formations des personnels chargés de l'application des lois, ainsi que la mise en place, en 1996, d'une Commission des droits de l'homme et d'un Conseil supérieur de lutte contre la corruption qui, de même que la Médiature, est apte à recevoir des plaintes.

Par ailleurs, la délégation a précisé qu'il n'existe pas de personnes déplacées à l'intérieur du pays et que Madagascar admet la présence de réfugiés sur son territoire comme en témoigne le cas des 40 réfugiés africains pris en charge par le PNUD. En matière de santé, les principes constitutionnels prévoient la reconnaissance à tout individu du droit à la protection de sa santé dès sa conception, et Madagascar a mis en place une politique nationale de santé fondée sur une stratégie des soins de santé primaire et sur le droit à la santé de tous les citoyens. À cet égard, M. Rakotoniaina a reconnu une inégalité de demande de soins suivant la localisation géographique mais non pas d'inégalités spécifiques à caractère ethnique. En outre, un conseil national de lutte contre le sida présidé par le Chef de l'État vise notamment à sensibiliser la population en vue de lutter contre la stigmatisation et l'exclusion des victimes. En ce qui concerne les mesures prises en vue de corriger les inégalités, la délégation a fait valoir que Madagascar est partie à plus de 35 conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT) et que les personnes en difficultés peuvent obtenir le soutien d'un réseau d'institutions de protection sociale et sanitaires, ainsi que de programmes de réinsertion professionnelle et sociale initiée par les organisations non gouvernementales.
En matière d'éducation, l'État accorde la priorité à l'éducation pour tous d'ici à 2015. M. Rakotoniaina a rappelé à cet égard que la Constitution et la législation interdisent la discrimination et que les inégalités d'accès à l'éducation se situent entre populations urbaines et rurales et non entre ethnies. Des efforts ont été déployés pour vaincre une certaine discrimination à l'égard des filles et pour vaincre les croyances traditionnelles tendant à favoriser les garçons. Il a fait par ailleurs observer que l'éducation aux droits de l'homme est intégrée à partir du primaire et est renforcée au niveau du secondaire. Pour ce qui est de la propagande raciste ou de l'incitation à la haine raciale, il a fait valoir que le Code pénal en fait un délit punissable et qu'à l'exception de certaines périodes de troubles politiques, il y a très peu de cas de ce genre. Des mesures sont toutefois prises pour favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre nations et groupes raciaux ou ethniques, notamment dans le cadre du système d'éducation.

En conclusion, le chef de la délégation malgache a souligné que la pleine réalisation des droits de l'homme ne peut être atteinte sans la réalisation d'un développement économique qui doit servir de base à la réduction des inégalités et à l'éradication de la pauvreté. Il a également mis en avant la création, en 2003, du Comité chargé de la rédaction des rapports initiaux et périodiques, qui a été créé en octobre 2003, et la collaboration étroite de l'État avec les organisations non gouvernementales et la société civile, en particulier dans le cadre de l'élaboration des rapports.


Les dixième à dix-huitième rapports périodiques de Madagascar (CERD/C/476/Add.1) présente les principes et les évolutions concernant l'application des différents articles de la Convention internationales contre toutes les formes de discrimination. À cet égard, il évoque notamment le fait que la Constitution garantit qu'aucune fraction du peuple ne peut s'attribuer l'exclusivité de la souveraineté et dispose que les nationaux sont égaux en droit et jouissent des mêmes libertés fondamentales protégées par la loi sans discrimination fondée sur le sexe, le degré d'instruction, la fortune, l'origine, la race, la croyance religieuse ou l'opinion. En outre, des mesures concrètes ont été prises depuis la promulgation de la loi réprimant toute forme de discrimination, notamment la loi sur la jouissance des droits civiques sans discrimination et les mesures relatives aux droits de la défense qui disposent que toute personne sans discrimination que ce soit peut bénéficier d'une assistance diligentée à tous les niveaux de la procédure et qui démontrent l'effectivité du principe de l'égalité de tous devant la loi sans discrimination. Une loi sur la communication promulguée en 1990 dispose par ailleurs que tout acte de discrimination de toute forme est réprimée sur le plan pénal par des peines d'emprisonnement et d'amende.

L'article 24 de la Constitution prévoit un enseignement public, gratuit et accessible à tous ainsi qu'un enseignement primaire obligatoire et les articles 25 et 26 prévoient l'interdiction de discrimination quant au droit de participer à toutes activités culturelles ainsi que dans l'exercice de son travail ou de son emploi. L'État malgache s'est efforcé par ailleurs de mettre fin à la discrimination contre les étrangers à qui, jusqu'ici, on a refusé le droit d'accéder à la propriété foncière, en procédant à une réforme législative, note le rapport.


Examen du rapport

M. NOURREDINE AMIR, Rapporteur du Comité pour le rapport de Madagascar, a fait un rappel succinct de la situation de Madagascar depuis 1988 et a indiqué que Madagascar a toujours affirmé qu'une cohabitation paisible existait entre nationaux et étrangers. Il a toutefois rappelé qu'en 1994, le Comité exprimait déjà des préoccupations quant à l'absence de statistiques, au silence de la Constitution sur les problèmes de la femme, à l'influence patriarcale sur le droit positif, à la pratique de la prostitution et autres maux sociaux, au taux de mortalité maternelle et infantile et à la polygamie. En 1989, le Comité avait déjà constaté que la situation des enfants ne cessait de se dégrader, que le revenu per capita avait chuté de 50% en vingt ans et que la régression économique risquait d'avoir pour conséquence une crise majeure autant politique qu'institutionnelle. En 1996, il émettait de graves préoccupations sur la détérioration constante des conditions économiques, sociales et culturelles et sur le fait que l'appauvrissement général du pays, le dysfonctionnement des services sociaux, et l'existence de tensions entre différents groupes de la population ne pouvaient mener que vers des phénomènes de discrimination raciale ou ethnique.

M. Amir a souligné que les violences politiques, l'incitation à des tensions interethniques ainsi que des menaces sur la cohésion et l'intégrité territoriale ont prévalu mais que, depuis 2002, les autorités actuelles s'efforcent de mettre un terme à la grave crise politique qu'a connu le pays en vue de créer les conditions pour la réconciliation nationale. Des efforts notables sont également consentis en vue de trouver les moyens adéquats pour redonner à Madagascar sa pleine capacité d'être en adéquation avec les objectifs visant à éliminer toutes les formes de discrimination raciale ainsi que toutes les autres sources de tensions. Dans son ordonnancement constitutionnel, Madagascar propose des solutions durables pour gérer une société martyrisée par les catastrophes naturelles, défavorisée par sa situation géographique et par une vulnérabilité économique structurelle qui produit de l'exclusion sociale à une échelle massive.

Toutefois, M. Amir a souhaité des éclaircissements notamment sur la définition des minorités et sur le fait de savoir si Madagascar se borne à l'énoncé de principes ou entend mettre en œuvre les mesures concrètes et détaillées telles que demandées par le Comité. En effet, relève-t-il, si le rapport identifie les institutions judiciaires compétentes en matière de protection des droits de l'homme, il n'en dit pas davantage pour ce qui est de réprimer et pénaliser les auteurs des violations et indemniser les victimes. En particulier, M. Amir s'est interrogé sur la situation des enfants, en particulier les enfants des rues non scolarisés, sur la question de l'égalité des sexes ou encore sur les ambiguïtés concernant l'interdiction de la torture.

Le rapporteur a préconisé l'adoption de procédures de contrôle en complément de mesures constructives à la suite de celles déjà prises par les autorités malgaches. À cet égard, il s'est félicité tout particulièrement de l'existence de parlementaires et élus d'origine indopakistanaise, chinoise, comorienne et française de nationalité malgache ainsi que de l'avancée représentée par l'adoption de nouvelles lois régissant l'accès des étrangers à la propriété foncière.


Compléments d'information de la délégation

En réponse aux questions posées par les membres du Comité concernant l'état préoccupant de la situation de la femme à Madagascar, la délégation a détaillé un certain nombre de mesures prises en leur faveur, s'agissant notamment de l'égalité entre hommes et femmes en matière de succession et en matière de salaire, aux réformes en matière de régime matrimoniaux par la suppression du partage inégalitaire au détriment des femmes et à l'élaboration d'un nouveau code de la famille. En outre, la délégation a mis en avant le lancement du Programme d'actions nationales «genre et développement» (PANAGED) qui prévoit l'intégration des femmes dans l'élaboration des programmes de développement et l'intégration de la sexospécificité dans toutes les activités de l'État. Le Programme prévoit notamment un accès facilité au crédit, une campagne pour la santé reproductive et la promotion de l'éducation sexuelle auprès des jeunes, une campagne pour l'éducation et la formation notamment des filles déscolarisées, la promotion de l'égalité de l'homme et de la femme devant la loi, notamment en matière d'éducation des enfants, et l'encouragement des femmes à assumer des responsabilités politiques. La délégation a fait remarquer que les femmes sont actuellement majoritaires dans les domaines de l'éducation, de la santé et de la magistrature, ainsi que dans les milieux scolaires. En outre, les femmes ont accès à des métiers qui étaient auparavant strictement réservés aux hommes et elles bénéficient de formations et programmes de promotion.
En ce qui concerne les droits de l'enfant, la délégation a mis en avant le lancement de l'opération EKA, qui vise à attribuer un acte de naissance à tous les enfants malgaches, ainsi que l'adoption d'un certain nombre de mesures visant à protéger et assurer le bien-être des enfants : la production de films de sensibilisation sur la pédophilie et la prostitution infantile; l'adoption d'un plan national de lutte contre les pires formes de travail des enfants; l'adoption d'une loi punissant le proxénétisme; la tenue d'un atelier national sur la réforme législative en matière de protection des mineurs; la mise en place de programmes pour les jeunes défavorisés et le lancement d'une campagne de vaccination généralisée, notamment. S'agissant des enfants des rues, la délégation a fait valoir qu'il s'agit d'un phénomène urbain et que des programmes conjoints existent avec le système des Nations Unies notamment pour leur alphabétisation, leur formation professionnelle et leur réinsertion.

Dans le domaine de la santé, la délégation a précisé que le déséquilibre régional de l'accès aux soins s'explique par l'insuffisance des moyens techniques et financiers et non par un problème d'ordre ethnique. C'est pour la même raison que les campagnes de sensibilisation sur le VIH/sida n'ont pas pu couvrir la totalité du territoire national.

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a mis en avant la réorganisation du Ministère de l'éducation nationale, qui a entraîné une augmentation des besoins financiers pour la période 2004-2006 d'environ 15% pour le primaire et 3% pour le collège. Par ailleurs, elle a indiqué que la revalorisation de l'identité culturelle ne se fait pas seulement par les livres mais également par les échanges culturels, l'organisation d'événements, la valorisation de la tradition orale et la sensibilisation à travers la radio et la télévision. Elle a en outre précisé que la langue malgache est unique dans sa diversité, en particulier en termes de prononciation et d'intonation.

Au sujet du fihavanana, la délégation a précisé qu'il s'agit de valeurs morales et traditionnelles respectées par l'ensemble de la population, vénérant à la fois la tolérance, la convivialité, le respect mutuel et la solidarité. Tous les Malgaches se considèrent comme parents et s'apportent ainsi volontiers une assistance mutuelle en cas de fléau intéressant la collectivité tels que famines ou dégâts cycloniques, par exemple. Ce fihavanana a permis, en plus du droit positif, d'éviter des affrontements sanglants malgré des incitations insistantes, répétées et monnayées à la haine tribale qui sont toujours intervenues dans des périodes de crises. Madagascar a très rarement connu de cas d'affrontement ethniques au cours de son histoire, a indiqué la délégation, ajoutant que dans les quelques cas qui ont pu se produire, ils ont été limités grâce au recours au fihavanana qui a permis de trouver un règlement pacifique. La délégation a par ailleurs indiqué que la création d'associations à base tribale est légale et a précisé que la mesure d'interdiction évoquée dans le rapport a été annulée par la Chambre administrative.

S'agissant de la situation dans les institutions pénitentiaires et d'inquiétudes exprimées quant à la population carcérale, la délégation a rectifié un certain nombre de chiffres, indiquant notamment que pour l'année 2003, 18 901 personnes étaient emprisonnées dont 12 472 à titre préventif. Pour réduire le nombre de personnes en attente de jugement, la Cour d'appel d'Antananarivo tient des sessions toute l'année et une réforme du système pénal est en cours pour réduire le temps de détention préventive. La délégation a en outre précisé que des poursuites ont été engagées et que des procès ont eu lieu à l'encontre des auteurs d'exactions commises pendant la crise de 2001 et que les victimes ont pu obtenir des réparations.

La délégation a précisé les objectifs, fonctions et attributions de la Commission nationale des droits de l'homme et de la Médiature. L'objectif général de la Commission est de faire connaître à chaque citoyen ses droits et obligations mais aussi de généraliser l'éducation civique, de changer les mentalités sur les comportements et coutumes violant les droits de l'homme et de faire mieux respecter les droits de la femme et de l'enfant. La Commission a une fonction essentiellement consultative et éducative; elle peut examiner des plaintes individuelles ou collectives mais ne dispose pas de pouvoirs de décision. En ce qui concerne la Médiature, elle a pour mission de défendre les droits des individus qui sont en conflit avec les institutions mais, à l'instar de la Commission nationale des droits de l'homme, elle n'a pas de pouvoirs d'investigation ou d'instruction.

En réponse à des questions sur le statut des réfugiés, la délégation a précisé que Madagascar a adhéré à la Convention internationale sur le statut des réfugiés en 1967 mais ne l'a pas encore ratifiée pour des raisons liées au fait que son niveau de développement économique ne permet pas d'accueillir sans restriction des réfugiés sur son territoire. Cependant, Madagascar tolère l'accueil des réfugiés, en coopération avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) qui apporte un soutien financier. En outre, la conjoncture économique et politique au lendemain de la crise de 2001 et 2002 n'a pas permis à Madagascar de prendre des mesures effectives conformément aux recommandations de Durban, a indiqué la délégation, qui a néanmoins mis l'accent sur les efforts de Madagascar dans le domaine de la promotion du multiculturalisme.

La délégation a par ailleurs apporté des précisions sur la notion de minorités, indiquant qu'il s'agit de personnes d'origine et de nationalité étrangères vivant à Madagascar. Il s'agit notamment des Français, des Grecs, des Anglais, des Chinois, des Comoriens, des Indopakistanais ou des Coréens qui vivent à Madagascar. Les groupes de personnes d'origine étrangère mais naturalisées ne constituent pas des minorités et jouissent des mêmes droits que les nationaux sans distinction de sexe, de race, de fortune, de degré d'instruction, de croyance religieuse ou d'opinion, conformément à la Constitution. En ce qui concerne les travailleurs saisonniers dits betsileo, la délégation a précisé que ces personnes, reconnues comme étant de bons travailleurs, sont recrutés pour la récolte du riz ou du coton contre une rémunération journalière et la fourniture de repas quotidiens copieux. Ils n'ont pas d'organisation syndicale mais le montant et les conditions de rémunération et de repas font l'objet d'un marchandage collectif préalable dans les villages. Ce système traditionnel de travail est considéré comme informel mais il ne génère pas de discrimination raciale vis-à-vis de ces travailleurs, a affirmé la délégation qui a précisé par ailleurs que quand on dit que les betsileo sont pauvres, il s'agit de l'ensemble de la province de Fianarantsoa qui est pauvre et pas seulement les betsileo.

La délégation a précisé les différences entre les notions «urbain» et «rural» utilisées dans les recensements et qui sont utilisées seulement pour différencier le lieu de résidence de la population. Quand il est question de population rurale ou urbaine, il ne s'agit pas d'une ségrégation ni d'une discrimination, a affirmé la délégation, mais d'un concept pour différencier les indicateurs statistiques de la population selon le lieu de résidence. Elle a en outre indiqué que la collecte d'information ne prend plus en compte la variable ethnique pour des raisons techniques mais surtout pour des raisons politiques afin d'éviter les risques de récupération et d'incitation à la haine ethnique.

En réponse à des questions sur la torture, la délégation a reconnu que le terme de «torture» n'est pas expressément mentionné dans le code pénal, indiquant toutefois qu'elle est punie par le biais d'autres incriminations. Par ailleurs, pour prévenir les cas de torture ou de sévices pendant la phase de l'enquête, une loi a été adoptée qui permet à toute personne interrogée de se faire assister par un conseil dès le début de l'enquête préliminaire sous peine de nullité des actes établis, ce qui permet d'éviter tout risque de torture. En outre, une personne victime de torture peut toujours adresser une plainte aux autorités compétentes, a indiqué la délégation.

La délégation a en outre affirmé que l'impact du renforcement de la capacité nationale sur les droits de l'homme est, sans ambages, positif, notamment en ce concerne le droit de la défense. Concrètement, très peu de cas de sévices commis au cours de l'enquête sont enregistrés, a-t-elle indiqué, mettant cela sur le compte de la sensibilisation des personnes chargées de la loi à l'importance du respect des droits de l'homme dans l'exercice de leurs fonctions.
En ce qui concerne la loi sur la nationalité, la délégation a précisé que la loi date de l'indépendance et a reconnu qu'elle mérite d'être révisée pour trouver notamment des solutions aux cas d'enfants issus d'un mariage mixte. Par ailleurs, elle a estimé que le fait de ne pas autoriser les étrangers à accéder aux emplois dans l'administration de l'État ne peut être considéré comme une discrimination dans la mesure où le problème du chômage reste très important à Madagascar et que l'État s'emploie à se rapprocher de ses administrés. Toutefois, la délégation a indiqué que des postes d'assistance technique sont attribués aux étrangers au sein de différents ministères.

Sur l'étendue des vandalismes commis à l'encontre de la communauté indopakistanaise, la délégation a fait valoir que ces actes se sont limités à des vols sans atteinte à l'intégrité physique des personnes. Elle les a expliqués par l'incapacité de cette communauté à s'intégrer à la communauté malgache ainsi que par les frustrations issues d'une inégalité économique flagrante.

En réponse à une question sur la position de Madagascar vis-à-vis de la Convention internationale pour la répression du crime de génocide, la délégation a indiqué que Madagascar n'a pas ratifié la Convention mais qu'il a néanmoins participé, au sein de l'Union africaine, aux commémorations du dixième anniversaire du génocide rwandais. En outre, Madagascar s'est prononcé pour la formation d'un comité de prévention du génocide. Toutefois, Madagascar considère qu'il est indispensable de mettre en place préalablement un mécanisme de prévention de l'incitation à la haine raciale et à toute tentative de déshumanisation.


Plusieurs experts ont relevé des ambiguïtés s'agissant de la position et de la place des minorités au sein de la société malgache. En outre, ils ont rappelé la préoccupation permanente du Comité sur les recoupements existants entre discrimination économique et discrimination raciale ou ethnique. En outre, ils ont exprimé leur intérêt pour le fihavanana, ce mode coutumier de conciliation et souhaité recevoir davantage d'informations à ce sujet.


Observations préliminaires sur le rapport de Madagascar

Dans ses observations préliminaires, M. NOURREDINE AMIR, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Madagascar, a salué les «réponses vraies» apportées par la délégation aux questions souvent très difficiles. Ces réponses mettent un terme à ces près de vingt ans d'absence de Madagascar devant le Comité et ont éclairci, en une seule séance, bien des questions, s'est félicité M. Amir. Toutefois, il reste des sujets préoccupations, notamment concernant les notions de minorités et d'ethnies dans ce pays, dont les efforts tendent d'abord et avant tout vers la réconciliation nationale. Il a expliqué à cet égard comment, dans la situation actuelle de Madagascar, la reconnaissance des ethnies et des sous-ethnies risquerait d'aboutir à un morcellement de la société et de remettre en cause l'unité nationale et, partant, la réconciliation nationale.

M. Amir a par ailleurs regretté que la délégation n'ait pas insisté davantage sur l'importance des ajustements structurels et d'apports massifs de financements et d'assistance technique de la part de la communauté internationale et des institutions financières pour se relever de la crise récente. Il a en outre mis l'accent sur l'expérience originale de l'État, qui gère et coordonne des provinces autonomes dotées d'une capacité culturelle, sociale et économique. M. Amir a estimé que la délégation de Madagascar a donné totale satisfaction quant à sa manière d'aborder les problèmes. Il s'est félicité de la reprise du dialogue et souhaité qu'elle soit annonciatrice de nouvelles informations sur cette république rénovée de Madagascar.

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