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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ACHÈVE SON DIALOGUE AVEC LA DÉLÉGATION SÉNÉGALAISE

07 août 2002



CERD
61ème session
7 août 2002
Matin



Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a achevé ce matin son dialogue avec la délégation sénégalaise. Le rapporteur pour l'examen du rapport sénégalais, M. Nourredine Amir, a salué la conviction, la foi avec laquelle le Sénégal se saisit des questions relatives aux droits de l'homme. Le rapporteur a également souligné que l'aide internationale devrait être à la hauteur des efforts déployés par le Sénégal pour promouvoir les droits de l'homme dans le pays.
M. Amir s'est par ailleurs réjoui de l'intention affirmée par la délégation d'inviter son gouvernement à se pencher sur la question de la ratification des Conventions internationales de 1954 et de 1961 relatives aux droits des apatrides. Tout en se félicitant de la mise en place d'un grand nombre d'institutions relatives aux droits de l'homme, un autre membre du Comité a rappelé que seul l'accès à un tribunal permet aux victimes d'obtenir une juste réparation.
Dirigée par Mme Marne Bassine Niang, Commissaire aux droits de l'homme, la délégation sénégalaise a répondu aux questions des experts concernant, notamment, l'égalité entre les hommes et les femmes, l'accès à la justice, les réfugiés et apatrides, le système de castes, ainsi qu'à la situation en Casamance. La délégation a insisté en particulier sur le fait que les réfugiés et apatrides présents sur son territoire bénéficient sont traités sur un pied d'égalité avec les nationaux. Ainsi, bénéficient-ils d'opportunités d'emploi égales à celles de l'ensemble des Sénégalais. La délégation sénégalaise a par ailleurs exprimé la volonté du Gouvernement de procéder au démantèlement des forces armées en Casamance, en vue du rétablissement de la sécurité de la région.
Au cours de la présente séance, les experts suivants ont pris la parole :
MM. Régis de Gouttes, Linos Alexander Sicilianos, Morten Kjaerum, José Augusta Lindgren Alves, Patrick Thornberry, Raghavan Vasudevan Pillai, Tang Chengyuan, Yuri Rechetov, Mahmoud Aboul-Nasr, Kurt Herndl, ainsi que Mme Patricia Nozipho January-Bardill.
En fin de séance, le Comité a décidé de procéder à l'examen de la situation aux Îles Fidji au cours de la séance de demain matin.
Le Comité entamera cet après-midi, à 15 heures, l'examen du rapport de l'Arménie (CERD/C/372/Add.3)

Fin de l'examen du rapport du Sénégal
La délégation sénégalaise a déclaré qu'en raison de sa situation géographique et de sa stabilité politique, le Sénégal a pu attirer, depuis 1989, de nombreux réfugiés fuyant leur pays en raison de la dictature. Partant, la délégation a déclaré que son pays est une nation d'intégration qui n'exclut aucun ressortissant africain. Il est exact, a reconnu la délégation, que le Sénégal n'a pas adhéré aux Conventions internationales de 1954 et 1961, pierres angulaires de la protection des réfugiés et apatrides. Il s'agit d'une omission, a estimé la délégation. Cette lacune ne saurait d'aucune manière être interprétée comme relevant d'une volonté de ne pas traiter dignement de la question des réfugiés et apatrides.
La délégation a précisé qu'il existe au Sénégal une Commission nationale intitulée «Commission d'éligibilité au statut de réfugié», pour le contrôle et la gestion de la question des réfugiés. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ainsi que l'Office des migrations internationales ont le statut d'observateur près la Commission. C'est le Président de la République qui, in finé, accorde la nationalité sénégalaise. Les statistiques montrent que la quasi totalité des décisions prises par la Commission sont entérinées par le Président de la République. La délégation a précisé que le demandeur d'asile n'est pas considéré comme un délinquant. Il dispose de la liberté d'aller et venir. Il peut arriver que des réfugiés soient arrêtés pour délit de vagabondage. Dans de tels cas, ils seront libérés après une garde à vue limitée dans le temps. Par ailleurs, les demandeurs d'asile bénéficient, autant que les nationaux, d'opportunités d'emploi.
Sur la question du conflit en Casamance, la délégation a exprimé la volonté du Gouvernement sénégalais de mettre un terme au conflit. Elle a signalé l'existence de poches de résistance tenues par des rebelles. L'armée sénégalaise a mené récemment une opération visant le démantèlement des forces armées en vue du rétablissement de la sécurité de la région. Le Mouvement des forces démocratiques de la Casamance est reconnu par le Gouvernement sénégalais, a indiqué la délégation. En revanche sa branche armée n'est pas reconnue car il ne peut y avoir deux armées dans le pays.
Le Sénégalais n'a pas le réflexe judiciaire, a poursuivi la délégation. Il n'est pas dans la tradition sénégalaise de recourir au tribunal. Toutefois, l'accès à la justice étant un droit fondamental, le Ministère de la justice a mis en place un fonds doté d'un budget de 200 millions de francs CFA en vue de fournir une aide juridique aux personnes dans le besoin.
S'agissant de l'éducation des jeunes filles, la délégation a souligné l'augmentation constante des budgets de l'éducation nationale, doté à l'heure actuelle de 35% du budget de l'État. 42% du budget de l'éducation nationale est destiné à l'éducation de base. Poursuivant, la délégation a souligné la mise en œuvre de deux grands programmes visant à sevrer les jeunes filles de leurs mères, afin qu'elles ne soient pas uniquement initiées aux tâches domestiques.
La délégation a ensuite souligné que nombre de textes du code pénal sénégalais ont été modifiés afin d'assurer la transposition en droit interne des exigences propres à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le fait que le Code pénal sanctionne des actes de discrimination fondés sur la religion ne doit pas occulter le fait que les religions coexistent de façon harmonieuse dans le pays.
La délégation sénégalaise a ensuite répondu aux questions posées par les experts s'agissant du fonctionnement du Guichet des droits de l'homme. Elle a souligné que la population attendait avec impatience la création de cette institution, promise par M. Abdoulaye Wade lors de la campagne présidentielle. Depuis sa création, cette institution a reçu plus de 1700 réclamations. La saisine se fait par lettre simple. Le «Guichet», a expliqué la délégation, a vocation à instruire toutes les allégations de violation des droits de l'homme tant en ce qui concerne les personnes physiques que morales.
S'agissant de l'égalité entre les femmes et les hommes, la délégation a reconnu qu'une chose est de consacrer l'égalité de tous les êtres en droit, une autre de constater cette égalité dans les esprits et dans la pratique. Toutefois, l'accès accru de femmes à des postes clés montrent qu'il ne s'agit plus d'un «gadget». Nombre de femmes sont encore réduites au silence notamment dans les zones rurales. Mais des programmes sont menées conjointement par le gouvernement, des associations et des ONG en vue d'alléger les travaux domestiques qui incombent traditionnellement aux femmes.
La délégation sénégalaise a affirmé que l'on constate un dépérissement du système des castes au Sénégal. Le problème au niveau normatif est réglée, mais il y a en effet tout un travail d'éducation qui reste encore à effectuer pour faire entrer dans les esprits cette nouvelle donne : ce qui était valable dans l'Afrique post-coloniale ne peut plus être le moteur de l'Afrique du XXIe siècle. Ces nouveaux principes fondés sur l'égalité commencent à faire leur chemin dans les esprits. Les enfermements du passé sont en train d'être, peu à peu, pulvérisés. Le système des castes est donc en voie d'essoufflement.
Tout en se félicitant de la mise en place d'un nombre important d'institutions relatives à la protection des droits de l'homme, un expert a toutefois fait part de son inquiétude. Il ne faudrait pas, a-t-il affirmé, que ces institutions fassent «écran». En effet, a-t-il déclaré, ce n'est que devant un tribunal qu'une victime d'atteinte à ses droits est réellement en mesure d'obtenir réparation.
M. Nourredine Amir, Rapporteur du Comité pour le rapport du Sénégal, a salué la conviction, la foi avec laquelle le Sénégal se saisit des questions relatives aux droits de l'homme. Il s'est réjoui de l'intention affirmée par la délégation d'inviter le Gouvernement sénégalais à se pencher sur la question de la ratification des Conventions internationales de 1954 et de 1961 relatives au statut des apatrides et à la réduction des cas d'apatridie. Le rapporteur a ensuite souligné que l'aide internationale devrait être à la hauteur des efforts déployés par le Sénégal pour promouvoir les droits de l'homme dans le pays. Il a notamment insisté sur la nécessité d'accompagner financièrement toutes les mesures prises par le Sénégal dans le domaine de l'éducation et de la lutte contre l'analphabétisme. Enfin, le Rapporteur a salué la clarté et la concision avec lesquelles la délégation sénégalaise a bien voulu répondre aux questions soulevées par le Comité.



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