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Communiqués de presse Organes conventionnels

L'ESTONIE PRÉSENTE SON RAPPORT INITIAL AU COMITÉ CONTRE LA TORTURE

14 Novembre 2002



CAT
29ème session
14 novembre 2002
Matin



Le Comité contre la torture a commencé ce matin l'examen du rapport initial de l'Estonie sur les mesures prises par cet État partie pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L'attention du Comité s'est portée, en particulier, sur la durée de la détention avant procès, les conditions de détention et le traitement des détenus.
Le chef de la délégation estonienne, Mme Marina Kaljurand, Sous-secrétaire adjointe au Ministère des affaires étrangères, a présenté le rapport de son pays en attirant l'attention en particulier sur la réforme du droit pénal engagées en septembre dernier qui vise à renforcer la prévention contre la torture. Elle a également fourni des précisions sur la réforme des prisons et les mesures prises pour favoriser l'accès à l'information.
La délégation estonienne est également composée du représentant permanent de l'Estonie auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, M. Clyde Kull; ainsi que de M. Mai Hion, Directeur de la Division des droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères; M. Rasmus Luni, Assistant du Secretaire adjoint permanent du Ministère; M. Ülle Raig, conseiller jurdique du Département de droit pénal du Ministère de la justice; et M. Kirke Kraav, de la Mission permanente d'Estonie.
Le rapporteur du Comité pour le rapport de l'Estonie, M. Peter Thomas Burns, Président du Comité, a souhaité avoir des précisions sur le fonctionnement du nouveau système pénal, la nature du système judiciaire et l'indépendance du pouvoir judiciaire, ainsi que sur le statut et l'incorporation de la Convention dans le droit national. Il a noté le manque de précision et de clarté dans la définition de la torture et dans l'application des dispositions de la Convention. La co-rapporteuse, Mme Felice Gaer a posé des questions sur les conditions de vie en milieu carcéral et le traitement des prisonniers.
La délégation estonienne fournira des réponses aux questions posées par les experts demain après-midi, à 15h30.
Le Comité se réunira cet après-midi à 14h30, afin d'entendre les réponses de la délégation égyptienne aux questions qui lui ont été posées hier matin.

Présentation du rapport initial de l'Estonie
MME MARINA KALJURAND, Sous-secrétaire adjoint au Ministère des affaires étrangères de l'Estonie, a déclaré que des améliorations ont été apportées dans l'application de la législation sur la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle a souligné l'engagement de son pays à faire preuve de la plus grande transparence dans la diffusion de l'information, notamment en publiant le rapport du pays sur un site internet. Cela s'est fait dans le cadre d'une loi de 2001 sur l'information visant à garantir au public l'accès à toute information publique.
Mme Kaljurand a indiqué que le pays s'est engagé, en septembre 2002, dans une réforme du droit pénal visant en particulier à remplacer le code pénal estonien, et dont l'objectif est de mettre en place un système judiciaire souple, respectueux de l'individu et indépendant. Selon le chef de la délégation, ce nouveau code pénal offre un cadre juridique pour prendre des mesures contre les actes de torture ou autres traitements dégradants.
En ce qui concerne la réforme des prisons, le changement le plus important a été l'adoption d'une nouvelle loi sur les prisons entrée en vigueur le 1er janvier 2000 et qui se fonde sur des recommandations du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe. Le chef de la délégation a signalé que le nombre de prisonniers restait stable depuis 1997 et se situait autour de 4775 détenus, dont 3720 condamnés. Parmi ces condamnés, 3049 sont des adultes hommes et 136 des femmes, 83 des délinquants juvéniles masculins et 2 des délinquants juvéniles féminins. Elle a ajouté que les conditions de vie s'étaient améliorées et qu'une nouvelle prison est sur le point d'entrer en activité avec une capacité de 900 détenus. Elle a rappelé que «l'Industrie estonienne des prisons» a été créée afin de permettre aux prisonniers de travailler dans les prisons, permettant ainsi une socialisation des détenus. Elle a ajouté que le grand défi qui se posait à l'Estonie en la matière était le développement des services professionnels des prisons.
Le rapport initial de l'Estonie (CAT/C/16/Add.9) indique que la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est entrée en vigueur en Estonie le 20 novembre 1991. Le rapport mentionne la réforme du droit pénal, acte majeur dans l'élaboration du cadre juridique général du pays, commencée en 1995 sur l'initiative du Ministère de la justice. À cet égard, le nouveau code de procédure pénale constitue l'un des textes les plus importants du projet de législation en cours d'élaboration dans le cadre des réformes du droit pénal. Dans le cadre de la réforme du droit pénal, plusieurs projets de loi importants ont déjà été adoptés, notamment la loi sur le contrôle de la libération conditionnelle, la loi relative à l'indemnisation par l'État de victimes de crimes et la loi relative à l'emprisonnement.
En 1993, le Riigikogu (Parlement) a ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les protocoles s'y rapportant, à l'exception du Protocole No 6 qu'il a ratifié en 1998. La peine de mort a été abolie le 3 mai 1998 et remplacée par une peine d'emprisonnement à vie; la dernière exécution a eu lieu le 11 septembre 1991.
Enfin, le rapport souligne que la Constitution de l'Estonie fixe le cadre juridique de l'incorporation du droit international à la législation nationale ainsi que les dispositions fondamentales relatives à la protection contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Examen du rapport
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Estonie, M. PETER THOMAS BURNS, a notamment souhaité obtenir des éclaircissements sur le fonctionnement du nouveau système pénal mis en place dans le pays. M. Burns a souhaité savoir combien de temps une personne peut être détenue avant d'être présentée devant un juge, quelle est la nature de la détention initiale, si une personne peut être détenue au secret et enfin si l'Estonie applique la doctrine de l'habeas corpus.
Sur la nature du système judiciaire et l'indépendance du pouvoir judiciaire, le rapporteur a voulu savoir comment sont nommés ou révoqués les juges. M. Burns s'est en outre interrogé sur l'incorporation du droit international à la législation nationale : quel est le statut de la Convention dans le droit interne?
M. Burns a noté qu'il n'y a pas, dans le rapport de l'Estonie, d'indications sur la définition de la torture. Il a exhorté la délégation à incorporer directement dans le Code pénal la définition figurant à l'article premier de la Convention. Il s'est inquiété des risques de mauvais traitements dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou pendant l'application d'un régime d'exception. Il a demandé si, dans certaines circonstances, les ordres d'un supérieur peuvent être invoqués pour justifier la torture.
S'agissant du statut des étrangers, M. Burns a félicité l'Estonie pour les mesures qui ont été prises concernant le statut et la protection des étrangers, qui vont au-delà des prescriptions de la Convention. Il a néanmoins souhaité savoir s'il existait un risque d'expulsion d'un étranger s'il risque d'être victime d'actes de torture en retournant dans son pays.
M. Burns a souligné que l'Estonie n'a pas fait de déclaration reconnaissant la compétence universelle pour des actes de torture commis sur son territoire. Il a néanmoins noté que les procédures d'extradition nationales contiennent des dispositions concernant l'extradition des auteurs d'actes de torture.
Le rapporteur s'est interrogé sur la formation du personnel médical et de la police en matière de torture. Il a mentionné des allégations émanant d'organisations non gouvernementales faisant état de mauvais traitements à l'encontre de prisonniers par des membres des forces de sécurité ou par d'autres prisonniers à l'instigation du personnel de sécurité. Le rapporteur a souhaité entendre les commentaires de la délégation sur ces allégations.
La co-rapporteuse pour l'examen du rapport estonien, Mme Felice Gaer, a demandé, concernant le processus de perfectionnement du personnel en matière de droits de l'homme, si des efforts de sensibilisation sont faits concernant les obligations de la Convention. Elle a aussi voulu savoir si le service militaire est obligatoire et si les membres des forces armées sont eux aussi sensibilisés aux dispositions de la Convention.
Mme Gaer s'est interrogée sur la question de la détention préventive et de sa durée, ainsi que sur la détention de mineurs. Elle a demandé si les organisations non gouvernementales pourraient visiter des prisons et a souhaité obtenir plus de renseignements sur des plaintes déposées par des prisonniers auprès d'organisations non gouvernementales. Elle a aussi souhaité des informations sur les mécanismes de plainte et le traitement des plaintes en milieu carcéral, leur nature et leur suivi par la justice. Elle a demandé si l'Estonie suit une procédure visant à garantir l'anonymat en cas de plaintes. Elle a également souhaité savoir si des personnes responsables d'actes de torture ont été arrêtées.
La co-rapporteuse souhaiterait des précisions sur les mesures prises par le Gouvernement pour la réhabilitation et l'indemnisation des victimes de la torture. Elle a ensuite posé une série de questions sur les mauvais traitements en milieu carcéral et a souhaité obtenir des statistiques plus précises sur la population carcérale. Mme Gaer a en outre voulu connaître le nombre d'étrangers en situation irrégulière qui sont en détention, ainsi que leur statut pénal. Elle a souhaité avoir des précisions sur le traitement des demandeurs d'asile et sur l'existence de statuts et de catégories différentes d'étrangers.
Mme Gaer a demandé de plus amples renseignements sur les détenus mineurs et sur les cas de harcèlement dans l'armée. Pour conclure, Mme Gaer a voulu savoir si, au regard des graves problèmes que le pays a connu ces 60 dernières années, l'Estonie a engagé une procédure visant à reconnaître une compétence universelle pour les crimes du passé.
Un autre membre du Comité a posé des questions sur les conditions de détention dans les institutions pénitentiaires estoniennes et dans les maisons d'arrêt de la police, notamment s'agissant des problèmes d'hygiène de base, de l'absence d'exercice, du régime alimentaire insuffisant. Il a voulu savoir quelle était la procédure prévue dans les lieux de détention si un médecin constate des mauvais traitements.
Un expert a voulu davantage de précisions sur la procédure d'expulsion des enfants et sur la durée de détention des personnes faisant l'objet d'une décision d'expulsion.



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