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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DU DANEMARK

02 Mai 2002



CAT
28ème session
2 mai 2002
Matin



Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du quatrième rapport périodique du Danemark sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Présentant ce rapport, l'Ambassadeur Tyge Lehmann, du Ministère des affaires étrangères du Danemark, a notamment indiqué qu'en vertu du régime juridique en vigueur au Danemark, la Convention contre la torture peut être invoquée devant les tribunaux danois. Néanmoins, un rapport demandé par le Ministère de la justice a recommandé l'incorporation directe dans le droit interne des six principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l'homme. Mais il est encore trop tôt pour dire précisément quand un projet de loi à cet effet sera présenté au Parlement.
La délégation danoise est également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la justice, du Ministère de l'intégration, ainsi que du Département des prisons et de la probation.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport danois, M. Sayed Kassem el Masry, a notamment rappelé l'obligation du Danemark de poursuivre toute personne contre laquelle existent des allégations de torture et a souligné à cet égard que certains groupes avaient demandé au Gouvernement danois d'engager des poursuites, pour actes de torture, contre M. Carmi Gillon s'il venait à être nommé ambassadeur d'Israël au Danemark.
Le co-rapporteur du Comité pour l'examen du rapport danois, M. Guibril Camara, a notamment demandé s'il n'était pas possible d'assurer une meilleure représentation, au sein de la police, des jeunes appartenant à des minorités.
Le Comité entendra demain après-midi, à 15 heures, les réponses de la délégation danoise aux questions soulevées ce matin par les experts. Cet après-midi, à 15 heures, il entendra les réponses de la délégation ouzbèke aux questions qui lui ont été posées hier matin par les membres du Comité.

Présentation du rapport du Danemark
Présentant le rapport de son pays, l'Ambassadeur TYGE LEHMANN, du Ministère des affaires étrangères du Danemark, a souligné que son pays accorde une grande importance à la coopération avec le Comité contre la torture et qu'il en va de même pour la coopération avec le Comité européen pour la prévention de la torture. Le Danemark a été, il y a douze ans, le premier pays à être visité par le Comité européen, a-t-il rappelé. Il a précisé qu'il y a trois mois, le Danemark a reçu la troisième visite régulière de ce Comité européen. Le rapport émanant de cette visite n'a pas encore été transmis au pays, ce qui n'a pas empêché le Danemark d'appliquer certaines des recommandations faites par la délégation européenne avant même que celle-ci ne quitte Copenhague.
M. Lehmann a indiqué que le Danemark appuie la proposition visant à ce qu'un sous-comité du Comité contre la torture se voie confier une compétence similaire à celle du Comité européen, lui permettant d'effectuer des visites ex oficio (de par sa propre autorité) sur les lieux de détention. À cet égard, il convient de se réjouir que la Commission des droits de l'homme de l'ONU ait pu adopter la résolution présentée par le Costa Rica concernant le projet de protocole facultatif se rapportant à la Convention. Il est toutefois décevant, voire désolant que la Commission n'ait pas été en mesure d'adopter cette résolution par consensus, a estimé M. Lehmann, avant d'ajouter que le parcours que va suivre cette résolution au Conseil économique et social ainsi qu'à l'Assemblée générale ne va pas être aisé. M. Lehmann a toutefois assuré que son pays, lorsqu'il assumera la présidence de l'Union européenne, n'épargnera aucun effort pour assurer l'adoption de cet important instrument.
Au fil des ans, le Comité contre la torture a exprimé une certaine préoccupation quant à la position de la Convention au regard du droit interne danois, a poursuivi M. Lehmann. À cet égard, a-t-il indiqué, un comité mis en place par le Ministère de la justice s'est récemment penché sur la question de l'incorporation directe dans le droit interne des six principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l'homme. La conclusion de ce comité est claire, a souligné M. Lehmann : il ne fait aucun doute qu'en vertu du régime juridique actuellement en vigueur au Danemark, la Convention contre la torture peut être invoquée devant les tribunaux danois qui ont d'ailleurs la compétence d'en appliquer les dispositions ex oficio. Le comité a néanmoins recommandé, pour un certain nombre de raisons, que la Convention soit officiellement incorporée au droit interne danois. À ce stade, il est encore trop tôt pour dire précisément quand un projet de loi à cet effet sera présenté au Parlement, a indiqué M. Lehmann.
S'agissant des victimes de la torture, le représentant danois a indiqué que, sur recommandation d'un groupe de travail mis en place par le Ministère de la santé, il a été décidé qu'à l'avenir, les autorités régionales devront offrir un traitement pluridisciplinaire (thérapie de groupe, physiothérapie, assistance médicale, conseils sociaux et soins infirmiers) aux personnes vivant dans le pays et souffrant des conséquences de la torture.
Le quatrième rapport périodique du Danemark (CAT/C/55/Add.2) indique qu'en vertu de la loi sur les étrangers, ceux-ci reçoivent un permis de séjour s'ils sont couverts par la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés. La Commission de recours des réfugiés, qui est l'instance responsable de la décision finale en seconde instance sur les demandes d'asile, a déclaré qu'un permis de séjour accordé en application de la loi sur les étrangers était accordé notamment si la personne risque d'être soumise à la torture et si on estime que la persécution est couverte par la Convention de 1951. Selon la loi sur les étrangers, un permis de séjour est accordé aux étrangers qui ne sont pas couverts par la Convention de 1951 mais qui, pour des raisons similaires à celles qui figurent dans la Convention ou pour d'autres raisons impérieuses entraînant une crainte justifiée d'être persécuté ou de subir des mauvais traitements similaires, ne peuvent pas être obligés de retourner dans leur pays d'origine. Lorsqu'elle étudie l'octroi d'un permis de séjour, la Commission de recours des réfugiés accorde aussi une attention particulière à la nature des actes de torture, y compris l'ampleur, la gravité, la fréquence et l'époque des sévices, en relation avec le départ du demandeur. Des actes de torture subis dans un lointain passé ne sont en principe pas considérés comme un motif d'asile. La Commission a ainsi, dans certains cas, refusé d'accorder l'asile à un demandeur d'asile qui avait subi des actes de torture 7 à 8 ans avant sa demande d'asile.
Le rapport indique que les plaintes concernant l'emploi de la force par le personnel des prisons sont examinées en premier lieu par les institutions de détention elles-mêmes; leurs décisions peuvent ensuite faire l'objet d'un recours auprès de la Direction des prisons et de la liberté surveillée, qui rend une décision en deuxième instance. L'administration pénitentiaire peut en outre décider qu'un détenu peut être mis au secret pendant un certain temps. Cette mesure peut être prononcée par exemple pour prévenir la fuite lou des activités criminelles, ou encore parce qu'il serait injustifiable de laisser le détenu au contact des autres détenus. L'emprisonnement cellulaire n'est pas une sanction disciplinaire mais une mesure de prévention orientée vers l'avenir. Le détenu est alors gardé à l'écart dans une cellule individuelle dans une unité spéciale de la prison ou dans sa propre cellule. En 1999, l'administration pénitentiaire a prononcé 733 décisions d'emprisonnement cellulaire. Cette année-là, 60% des placements ont duré moins de sept jour et dans 66 cas, l'isolement a duré plus de 28 jours (avec une moyenne de 46 jours pour ces 66 cas). Le recours au placement en régime cellulaire pour refus de travailler est aujourd'hui beaucoup plus rare que par le passé, souligne le rapport.

Examen du rapport du Danemark
Au titre des faits récents intervenus depuis la présentation du quatrième rapport périodique du Danemark, la délégation a indiqué que récemment, le Parlement danois a approuvé une loi portant adoption du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Les dispositions législatives concernant les droits des détenus ont en outre été modifiées. À titre d'exemple, lorsqu'un détenu ne comprend pas la langue danoise, un interprète doit désormais lui être fourni afin qu'il puisse être informé de ses droits.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport danois, M. Sayed Kassem el Masry a souligné qu'il n'existe aucun problème majeur à signaler entre ce Comité et le Danemark. M. el Masry a par ailleurs salué le travail remarquable qu'effectue le centre danois de réhabilitation des victimes de la torture. L'expert a dit espérer que le problème de l'incorporation de la Convention contre la torture dans le droit interne danois relèvera bientôt du passé, en tout cas dès que la recommandation du comité d'incorporation aura été appliquée, ce qui devrait en outre permettre de régler aussi le problème de la définition de la torture. M. el Masry s'est par ailleurs enquis de la teneur du débat sur les questions d'asile actuellement engagé dans le pays.
Au sujet de la nomination de M. Carmi Gillon comme ambassadeur d'Israël au Danemark, M. el Masry a rappelé que certains groupes ont demandé au Gouvernement danois d'engager des poursuites contre cette personne pour actes de torture au cas où l'ambassadeur serait effectivement nommé au Danemark. M. Gillon a notamment été responsable des interrogatoires de centaines de Palestiniens dont un grand nombre ont été soumis à la torture, comme le reconnaît l'intéressé lui-même dans sa biographie. Le Danemark a obligation de poursuivre toute personne contre laquelle existent des allégations selon lesquelles elle se serait livrée à des actes de torture, a rappelé M. el Masry.
Le co-rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Danemark, M. Guibril Camara, a notamment attiré l'attention du Comité sur le cas d'un ressortissant péruvien qui a subi une fracture du bras alors qu'il se trouvait en détention (cas mentionné au paragraphe 43 du rapport). M. Camara a relevé que le rapport fait référence à la manière dont la consommation d'alcool peut influencer le seuil de la douleur. Cette affaire a-t-elle connu un développement sur le plan judiciaire ou disciplinaire, a demandé l'expert ?
Eu égard à la composition ethnique de la police, M. Camara s'est par ailleurs demandé s'il ne pas possible d'envisager, en matière de recrutement de la police, une discrimination positive en faveur des jeunes appartenant à des minorités.
Un autre membre du Comité s'est demandé comment le Danemark s'y prend pour concilier le droit à la défense et l'isolement cellulaire, notamment dans le contexte de la détention préventive.



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