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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE PRÉSENTE SES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS SUR LE CHILI ET LA NOUVELLE-ZÉLANDE

19 Mai 2004

Comité contre la torture
19 mai 2004

Le Comité contre la torture a présenté, cet après-midi, ses conclusions et recommandations sur les rapports du Chili et la Nouvelle-Zélande, examinés entre le 10 et le 12 mai.

Dans ses conclusions et recommandations sur le rapport du Chili, le Comité prend note avec satisfaction de l'incrimination de la torture en droit chilien et de la refonte du Code de procédure pénale, visant notamment à renforcer la protection des détenus. Il se réjouit que le Chili reconnaisse la compétence du Comité pour connaître de plaintes émanant de particuliers et apprécie l'information selon laquelle le Chili a amorcé le processus de ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture. Le Comité prend note de la création d'une Commission nationale sur l'emprisonnement politique et la torture mais exprime sa préoccupation s'agissant de la nature limitée du mandat de la Commission et de son incompétence pour enquêter sur des allégations de cas de torture aux fins d'identification de leurs auteurs. Le Comité exprime en outre sa préoccupation concernant les mauvais traitements imposés par les carabiniers, les forces de police civile et la gendarmerie, et l'absence d'enquêtes indépendantes sur ces faits. Il recommande au Chili d'instituer un système permettant aux victimes d'actes de torture d'obtenir une réparation juste et adéquate et de favoriser leur réhabilitation. Le Comité se dit préoccupé par le manque d'information concernant le respect par l'autorité militaire des dispositions de la Convention. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par les informations selon lesquelles des responsables de l'administration accusés d'implication dans des actes de tortures commis sous la dictature se soient vus attribuer des postes importants dans l'administration actuelle.

S'agissant du rapport de la Nouvelle-Zélande, le Comité se félicite de l'adoption d'une loi relative à l'extradition. Il se réjouit en outre que le centre d'accueil de Mangere s'apparente davantage à une institution «ouverte» qu'à un véritable centre de détention. Le Comité se félicite par ailleurs que les personnes placées en garde à vue puissent bénéficier d'une assistance juridique gratuite dès le début de leur incarcération. Le Comité se dit satisfait des mesures adoptées en vue de renforcer l'efficacité et l'indépendance des procédures de plaintes relatives à des agissements de la police. Le Comité se réjouit en outre de l'intention affirmée par la Nouvelle-Zélande de retirer ses réserves à la Convention contre la torture et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture. Préoccupé par le fait que la législation néo-zélandaise relative à l'extradition ne reprenne pas l'obligation de non-refoulement prévue à l'article 3 de la Convention, il recommande à la Nouvelle-Zélande d'incorporer ce principe dans sa législation. En outre, la Nouvelle-Zélande devrait se pencher sur la mise en place d'une procédure unique de demande d'asile. Le Comité est en outre préoccupé par la procédure conduisant à l'émission d'un «certificat de sécurité», qui permet aux autorités de déporter ou d'expulser une personne considérée comme représentant une menace à la sécurité nationale. Aussi, recommande-t-il à la Nouvelle-Zélande de réviser sa législation en la matière afin d'assurer l'effectivité des recours intentés contre de telles décisions. Le Comité est par ailleurs préoccupé par la durée des placements en cellule d'isolement et leurs conditions.


À la clôture de la session, le vendredi 21 mai à 10 heures, le Comité présentera ses conclusions et recommandations sur le rapport de la Bulgarie, examiné les 17 et 18 mai derniers.


Conclusions et recommandations sur le rapport du Chili

Le Comité, dans ses conclusions et recommandations sur le rapport du Chili, prend note avec satisfaction de l'incrimination de la torture en droit chilien et de la refonte du Code de procédure pénale, visant notamment à renforcer la protection des détenus. Le Comité recommande toutefois au Chili d'adopter une définition de la torture conforme à l'article 1er de la Convention et de s'assurer en outre que toutes les formes de torture sont envisagées. Le Comité prend également note avec satisfaction de l'abrogation des dispositions qui permettaient l'arrestation de citoyens sans cause sérieuse et de la réduction de la limitation de la durée de la garde à vue à 24 heures. En outre, le Comité prend note de l'institution d'une Commission nationale sur l'emprisonnement politique et la torture et de l'assurance donnée par le Chili que cette institution pourra disposer du temps nécessaire pour mener à bien sa mission. Le Comité se félicite par ailleurs de l'assurance donnée par la délégation chilienne que tout témoignage obtenu sous la torture est jugé irrecevable devant les tribunaux. Le Comité se félicite en outre que les organisations non gouvernementales soient autorisées à visiter les lieux de détention. Il se réjouit que le Chili ait fait les déclarations des articles 21 et 22 de la Convention par lesquelles il reconnaît la compétence du Comité pour connaître de plaintes émanant d'États parties et de particuliers et apprécie l'information selon laquelle le Chili a amorcé le processus de ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, portant sur un mécanisme de visites préventives sur les lieux de détention.

Le Comité, conscient que les dispositions constitutionnelles chiliennes sont le fruit d'un compromis politique ayant favorisé le passage de la dictature militaire à la démocratie, insiste sur le fait que les contraintes politiques internes ne sauraient servir de justification au non-respect par le Chili de ses obligations au titre de la Convention. Il exprime sa préoccupation concernant les mauvais traitements imposés par les carabiniers, les forces de police civile et la gendarmerie, et concernant l'absence d'enquêtes indépendantes sur ces faits. Aussi, le Comité recommande-t-il au Chili d'adopter les mesures permettant que des enquêtes impartiales, complètes et rapides soient menées sur toutes les allégations de torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants et que la poursuite de leurs auteurs soit assurée. Le Comité recommande également au Chili d'instituer un système permettant aux victimes d'actes de torture d'obtenir une réparation juste et adéquate de leur dommage et de favoriser leur réhabilitation. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par le fait que certaines dispositions constitutionnelles menacent la pleine jouissance des droits de l'homme fondamentaux, particulièrement la loi d'amnistie, et recommande au Chili de procéder à son abrogation. Il est en outre préoccupé par le fait que la définition de la torture ne soit pas pleinement compatible avec l'article 1er de la Convention. Par ailleurs, le Comité est préoccupé par le fait que les Carabiniers chiliens et les membres de la Police de Sûreté soient toujours placés sous la responsabilité du Ministère de la défense et recommande au Chili de les transférer sous la tutelle du Ministère de l'intérieur.

Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par les informations selon lesquelles des responsables de l'administration accusés d'implication dans des actes de tortures commis sous la dictature se soient vus attribuer des postes importants dans l'administration actuelle. Le Comité exprime en outre sa préoccupation face à l'absence de dispositions internes interdisant de façon expresse l'extradition ou le refoulement d'étrangers vers des pays où existent des risques réels d'exposition à la torture et de l'absence de règles en droit chilien assurant l'application des articles 5, 6, 7 et 8 de la Convention. Le Comité recommande au Chili l'adoption d'une législation spécifique interdisant l'extradition ou l'expulsion d'étrangers vers des pays tiers où existe un risque réel de torture. Le Comité est également préoccupé par la nature limitée du mandat confié à la Commission nationale sur l'emprisonnement politique et la torture, particulièrement en ce qui concerne le peu de temps qui lui a été alloué pour accomplir sa mission et eu égard au fait que cette institution n'est pas compétente pour enquêter sur des allégations de torture afin d'en identifier les auteurs. Par ailleurs, le Comité est préoccupé par la surpopulation carcérale et autres conditions de détention inadéquates dans les établissements pénitentiaires chiliens et de l'absence de contrôle systématique de ces lieux. Il recommande notamment au Chili d'améliorer les conditions de détention pour en assurer la conformité avec les normes internationales en la matière et d'adopter des mesures urgentes pour remédier au phénomène de surpopulation carcérale. Préoccupé par le fait que le nouveau code pénal n'entrera en vigueur dans la région métropolitaine qu'en 2005, le Comité demande au Chili d'en assurer la mise en œuvre dans cette région le plus rapidement possible. Le Comité se dit enfin préoccupé par le manque d'information concernant le respect par l'autorité militaire des dispositions de la Convention.

Le Comité recommande par ailleurs au Chili de mettre fin à la pratique consistant à obtenir des informations, à des fins de poursuites, de femmes recherchant une aide médicale d'urgence à la suite d'avortements prohibés. Le Chili, conformément aux principes directeurs de l'Organisation mondiale de la santé, devrait assurer la prise en charge immédiate des personnes à la recherche de soins urgents. Il recommande au Chili de fournir des informations mises à jour concernant le statut de poursuites engagées contre les auteurs de crimes commis par le passé et impliquant la torture, notamment les cas connus sous les noms de la «Caravane de la mort», l'«Opération Cóndor» et la «colonie Dignidad».


Conclusions et recommandations sur le rapport de la Nouvelle-Zélande

Dans ses conclusions et recommandations sur le rapport de la Nouvelle-Zélande, le Comité se félicite de l'adoption en 1999 d'une loi relative à l'extradition et se réjouit de la coopération de la Nouvelle-Zélande avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en vue de se conformer à ses recommandations. Le Comité se félicite en outre du fait que le centre d'accueil de Mangere s'apparente davantage à une institution ouverte qu'à un centre de détention. Le Comité se félicite que les personnes placées en garde à vue puissent bénéficier d'une assistance juridique gratuite dès le début de l'arrestation. Le Comité se félicite des progrès réalisés par la Nouvelle-Zélande dans les domaines législatif et administratif afin d'assurer un meilleur respect de la Convention. En outre, le Comité se dit satisfait des mesures adoptées en vue de renforcer l'efficacité et l'indépendance des procédures de plaintes relatives à des agissements de la police. Le Comité se réjouit en outre de la définition en cours d'un plan national des droits de l'homme par la Commission des droits de l'homme et de l 'intention affirmée par la Nouvelle-Zélande de retirer ses réserves à la Convention contre la torture et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, et portant sur un mécanisme de visites préventives sur les lieux de détention.

Le Comité se dit préoccupé par le fait que la législation néo-zélandaise relative à l'extradition ne reprenne pas l'obligation de non-refoulement prévue à l'article 3 de la Convention. Aussi, recommande-t-il à la Nouvelle-Zélande d'incorporer le principe de non-refoulement dans sa législation. En outre, la Nouvelle-Zélande devrait se pencher sur la mise en place d'une procédure unique de demande d'asile. Le Comité est par ailleurs préoccupé par le fait que des demandeurs d'asile soient détenus dans des établissements pénitentiaires, sans être séparés des autres détenus. Le Comité est en outre préoccupé par la procédure conduisant à l'émission d'un «certificat de sécurité», susceptible de conduire à un manquement à l'article 3 de la Convention en ce qu'il permet aux autorités de déporter une personne considérée comme représentant une menace à la sécurité nationale. Aussi, le Comité recommande à la Nouvelle-Zélande de réviser sa législation en la matière afin d'assurer l'effectivité des recours intentés contre des décisions de refoulement ou d'expulsion d'une personne, prononcés dans ces cas. Le Comité est par ailleurs préoccupé par le fait que la durée des placements en cellule d'isolement et leurs conditions puissent conduire, dans certaines circonstances, à des actes interdits par l'article 16 de la Convention. Le Comité est en outre préoccupé par l'âge de la responsabilité pénale des mineurs et par le fait qu'ils ne soient pas séparés des détenus adultes. Enfin, le Comité est préoccupé par les informations émanant de l'ombudsman selon lesquelles il y aurait des réticences à enquêter rapidement les allégations faisant état de violences commises contre des prisonniers par le personnel pénitentiaire et sur la nature impartiale et crédible des enquêtes. Il recommande à la Nouvelle-Zélande de le tenir informé des résultats des mesures prises pour donner suite aux préoccupations de l'ombudsman.

Par ailleurs, le Comité recommande à la Nouvelle-Zélande de s'assurer que la lutte contre le terrorisme n'entraîne pas de violations de la Convention et ne fasse pas peser un fardeau injuste sur les demandeurs d'asile. La Nouvelle-Zélande devrait en outre instituer une durée limite à la détention et aux restrictions des droits des demandeurs d'asile. Le Comité recommande à la Nouvelle-Zélande de mener une enquête sur les événements qui ont conduit à la décision de la Haute Cour dans l'affaire Taunoa.



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