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LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE PRÉSENTE SES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS SUR LE RAPPORT DU DANEMARK
10 mai 2002
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CAT
28ème session
10 mai 2002
Après-midi
Il achève son dialogue avec la délégation de l'Arabie saoudite
Le Comité contre la torture a présenté, cet après-midi, ses conclusions et recommandations sur le quatrième rapport périodique du Danemark, examiné les 2 et 3 mai derniers, et a achevé son dialogue avec la délégation de l'Arabie saoudite.
Dans ses conclusions et recommandations sur le Danemark, le Comité félicite ce pays pour le haut degré de respect des droits de l'homme en général et de ses obligations en vertu de la Convention en particulier. Il recommande néanmoins au pays de prendre les dispositions pénales appropriées pour qualifier la torture d'infraction punissable. Il se dit par ailleurs préoccupé par l'absence de procédures appropriées de recours contre les décisions visant à imposer le régime cellulaire strict aux personnes purgeant des peines et recommande que la loi régissant le placement des condamnés en régime cellulaire strict établisse des mécanismes d'examen adéquats concernant les décisions prises dans ce domaine et la durée de la détention en régime cellulaire strict. Le Comité recommande enfin au Danemark de veiller à ce que l'amendement à la loi sur les étrangers – qui signifie que les étrangers auxquels le permis de résidence aura été refusé devront quitter le pays immédiatement après le rejet de leur demande – ne prive pas les étrangers du droit de porter plainte devant le Comité.
La délégation saoudienne, dirigée par M. Abdulwahab A.Attar, a fourni aux experts des compléments d'information sur le rôle de la police religieuse; la législation applicable en matière de détention avant procès; la non-recevabilité des aveux obtenus sous la torture; les conditions carcérales; les châtiments corporels; les exécutions d'homosexuels; l'indépendance du judiciaire et l'accès des travailleurs étrangers à la justice. La délégation s'est déclarée «quelque peu déconcertée» par certaines questions posées avant-hier par les experts qui, semblent indiquer une tentative de détourner la définition de la torture énoncée dans la Convention en ignorant le fait que chaque pays dispose de sa propre constitution et son propre système juridique. Pour le monde islamique, ce sont le Coran et la Sunna qui font office de constitution et ils ne peuvent être modifiés en quelque circonstance que ce soit. L'Arabie saoudite est un pays islamique soumis à la charia et à ce titre, des sanctions spécifiques, y compris la mutilation, la flagellation et la lapidation sont prévues pour certains crimes, a souligné la délégation. Les châtiments corporels sont infligés sous contrôle médical et n'ont jamais occasionné de décès, a-t-elle assuré avant d'affirmer que l'objectif n'est pas de torturer le détenu mais de décourager toute future perpétration d'infractions criminelles.
Le Comité présentera, mercredi 15 mai à 15h30, ses conclusions et recommandations sur le rapport de l'Arabie saoudite.
Lundi matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du troisième rapport périodique de la Fédération de Russie (CAT/C/34/Add.15).
Conclusions et recommandations sur le Danemark
Dans ses conclusions et recommandations sur le quatrième rapport périodique du Danemark, le Comité félicite le pays pour le haut degré de respect des droits de l'homme en général et de ses obligations en vertu de la Convention en particulier, ainsi que pour le rôle actif qu'il joue sur le plan international dans la lutte contre la torture. Le Comité accueille en outre avec satisfaction la recommandation faite par la Commission créée par le Ministère de la justice visant à incorporer les six principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l'homme dans la législation interne danoise et recommande au Danemark de veiller à l'application rapide de cette recommandation. Le Comité recommande en outre au pays de prendre les dispositions pénales appropriées pour qualifier la torture d'infraction punissable, conformément à l'article premier de la Convention.
Le Comité est préoccupé par l'absence de procédures appropriées de recours contre les décisions visant à imposer le régime cellulaire aux personnes purgeant des peines. Il recommande au Danemark de continuer à examiner les effets du régime cellulaire sur les détenus et à suivre les incidences du nouveau projet de loi réduisant le nombre de motifs pouvant conduire au placement en régime cellulaire et sa durée. La loi régissant le placement des condamnés en régime cellulaire devrait établir des mécanismes d'examen adéquats concernant les décisions prises dans ce domaine et la durée de la détention en régime cellulaire. Le Comité recommande enfin au Danemark de veiller à ce que l'amendement à la loi sur les étrangers – qui signifie que les étrangers auxquels le permis de résidence aura été refusé devront quitter le pays immédiatement après le rejet de leur demande – ne prive pas les étrangers du recours effectif prévu à l'article 22 de la Convention concernant les plaintes individuelles déposées devant le Comité.
La délégation danoise a assuré qu'elle ferait part des préoccupations exprimées par le Comité aux autorités danoises pertinentes.
Examen du rapport de l'Arabie saoudite
La délégation de l'Arabie saoudite a déclaré être «quelque peu déconcertée», car certaines des questions posées avant-hier par les experts semblent indiquer une tentative de détourner la définition de la torture énoncée dans la Convention en ignorant le fait que chaque pays dispose de sa propre constitution et de son propre système judiciaire. Pour le monde islamique, ce sont le Coran et la Sunna qui font office de constitution et ils ne peuvent être modifiés en quelque circonstance que ce soit, a précisé la délégation. La délégation a assuré qu'elle allait toutefois s'efforcer de ne pas politiser ces questions.
Interrogée sur le rôle de la police religieuse, la délégation a expliqué qu'il s'agit d'un rôle de conseil visant à protéger la moralité. La police religieuse a notamment le pouvoir d'arrêter une personne en flagrant délit, a précisé la délégation. Elle a indiqué que les membres de cette police sont désignés sur la base de leurs qualifications et de leur moralité.
En ce qui concerne la détention avant procès, sa durée est réglementée par les dispositions pertinentes du Code pénal qui prévoient qu'après un délai maximum de 24 heures, le présumé coupable doit être relâché ou transféré aux services d'enquête pertinents qui peuvent à leur tour le libérer ou prolonger sa détention pour cinq jours maximum, après quoi son cas est renvoyé à d'autres instances qui peuvent décider de prolonger la détention pour 14 jours maximum dans un premier temps puis pour six mois au maximum à compter de la date d'arrestation.
Selon la charia, les aveux obtenus sous la torture ne sont pas acceptables et ne seront donc pas recevables, ce que confirme le Code pénal, a indiqué la délégation.
Interrogée sur les conditions carcérales, la délégation a reconnu l'existence d'un phénomène de surpeuplement carcéral dont l'une des caractéristiques est d'être sensible aux variations saisonnières de l'activité touristique qui influent sur le taux de criminalité. Les violences sexuelles en prison sont considérées comme des crimes, qu'elles soient perpétrées par un prisonnier ou par un agent du personnel pénitentiaire, a par ailleurs indiqué la délégation.
En ce qui concerne les châtiments corporels (ou sanctions corporelles), ils sont infligés sous contrôle médical et n'ont jamais occasionné de décès, a assuré la délégation. L'objectif n'est pas de torturer le détenu mais de décourager toute future infraction criminelle, a-t-elle expliqué.
La délégation a par la suite rappelé que l'Arabie saoudite est un pays islamique soumis à la charia et qu'à ce titre, des sanctions spécifiques, y compris la mutilation, la flagellation et la lapidation sont prévues pour certains crimes. Ces sanctions ne sauraient être abrogées ou remplacées, a souligné la délégation. Dans le Coran, il est dit par exemple que la main de ceux qui volent doit être coupée. Le Coran prévoit également la flagellation et la lapidation pour certains crimes tels, par exemple, que l'adultère, a ajouté la délégation. Il n'y a pas de conflit entre la Convention et la charia, a-t-elle assuré.
En réponse aux allégations reprises par certains experts selon lesquelles des homosexuels auraient été exécutés dans le pays, la délégation a expliqué que les sanctions prises à l'encontre de ces personnes sont dues à des actes d'exploitation sexuelle auxquels elles se sont livrées à l'encontre d'enfants et non à leur orientation sexuelle.
En réponse aux préoccupations exprimées par des experts s'agissant de mauvais traitements infligés à des membres de minorités religieuses, notamment à des Chiites, la délégation a notamment souligné que les sanctions encourues pour tel ou tel crime sont les mêmes pour tous les adeptes des différentes sectes ou religions, y compris pour les Chiites, de sorte qu'il n'existe aucune discrimination de ce point de vue.
La délégation a par ailleurs assuré qu'en Arabie saoudite, l'indépendance du judiciaire est totale et repose sur les préceptes de la charia elle-même. En effet, selon la charia, la loi est la même pour tous et cet axiome ne saurait être respecté sans indépendance du judiciaire, a souligné la délégation. Tout ministre qui s'ingèrerait dans une affaire judiciaire serait passible d'une peine allant de trois à cinq ans d'emprisonnement, a-t-elle ajouté.
En ce qui concerne les recours dont dispose les victimes de la torture, l'architecture des autorités administratives et judiciaires compétentes dans ce domaine (cour de cassation, conseil suprême, tribunaux de police et conseil des doléances) est conforme aux prescriptions de la Convention, a affirmé la délégation.
Interrogée sur l'accès des travailleurs étrangers à la justice, la délégation a indiqué qu'en vertu des règles et statuts nationaux ainsi qu'en vertu de la charia, toute personne résidant en Arabie saoudite, sans discrimination aucune, est en droit de saisir les tribunaux du pays.
Prenant note de l'affirmation de la délégation selon laquelle la loi est la même pour tous, un membre du Comité a souhaité savoir ce que l'on devait entendre par là. Faut-il entendre par là que la justice est la même pour tous les individus, quels que soient leur sexe, leur nationalité ou la minorité à laquelle ils appartiennent, a demandé l'expert?
L'égalité devant la loi islamique est un principe général qui ne souffre aucune exception fondée sur le sexe, la langue ou toute autre considération, a affirmé la délégation.
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