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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE PRÉSENTE SES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS CONCERNANT LE RAPPORT DE L'UKRAINE

21 Novembre 2001



CAT
27ème session
21 novembre 2001
Après-midi





Il poursuit l'examen du rapport d'Israël


Le Comité contre la torture a présenté, cet après-midi, ses conclusions et recommandations concernant le quatrième rapport périodique de l'Ukraine. Il a également entendu les réponses apportées par la délégation israélienne aux questions qui lui avaient été adressées par les experts hier matin. Le Comité présentera ses conclusions et recommandations sur Israël vendredi 23 novembre à 10h30.

Dans ses conclusions et recommandations sur l'Ukraine, le Comité se félicite des efforts déployés par l'État partie pour réformer sa législation, notamment l'adoption du nouveau code pénal, qui contient un article qualifiant la torture en tant que crime spécifique, la mise en place de la nouvelle Cour constitutionnelle, l'adoption d'une nouvelle législation en matière d'immigration et de dispositions relatives à la protection des droits de l'homme. Le Comité exprime toutefois sa préoccupation face aux informations selon lesquelles la torture est toujours pratiquée en Ukraine. Le Comité recommande à l'État partie de prendre les mesures nécessaires afin d'assurer l'indépendance du pouvoir judiciaire et l'inadmissibilité des preuves obtenues sous la torture. Un mécanisme indépendant d'enquête doit être mis en place afin de donner suite à toutes les allégations de torture qui parviennent à l'Ukraine, y compris les allégations reçues de la part d'organisations non gouvernementales nationales et internationales.

La délégation israélienne pour sa part fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, notamment, de la détention administrative, des conditions de détention des mineurs, de la traite des femmes et de l'applicabilité de la Convention. À cet égard, Israël estime que les questions qui lui ont été posées concernant le traitement de la population en Cisjordanie et dans la bande de Gaza ne relèvent pas des dispositions de la Convention.


La délégation a également précisé que dans des circonstances exceptionnelles, lorsque la vie de victimes innocentes est en danger, le recours à la force physique lors des interrogatoires est toléré, sans que cela ne constitue des traitements cruels, inhumains ou dégradants. L'état de nécessité est un principe moral fondamental, au même titre que le principe d'interdiction de la torture, et l'interprétation de la Convention doit permettre la coexistence de ces deux principes, a estimé la délégation.

Demain matin, le Comité se réunira à huis clos afin de discuter de ses observations finales sur les rapports présentés au cours de la présente session. Il se réunira de nouveau en séance publique à 15 heures, pour présenter ses conclusions et observations finales sur les rapports du Bénin et de l'Indonésie.


Adoption de conclusions et recommandations concernant le rapport de l'Ukraine

Dans ses conclusions et recommandations concernant le quatrième rapport périodique de l'Ukraine, le Comité relève que ce rapport n'est pas pleinement conforme aux directives du Comité contre la torture dans la mesure, notamment, où il ne contient pas de détails concernant les suites données aux précédentes recommandations du Comité. Le Comité se félicite toutefois des efforts déployés par l'État partie en vue de réformer sa législation, et accueille notamment avec satisfaction l'adoption du nouveau code pénal, qui contient un article qualifiant la torture en tant que crime spécifique, la mise en place de la nouvelle Cour constitutionnelle, l'adoption d'une nouvelle législation en matière d'immigration et de dispositions relatives à la protection des droits de l'homme.

Par ailleurs, le Comité salue l'adoption de la nouvelle loi sur les réfugiés en juin 2001, bien que l'Ukraine ne soit pas partie à la Convention relative au statut des réfugiés de 1951. Il se félicite également de la nouvelle loi sur la nationalité de janvier 2001, qui offre la possibilité à d'anciens déportés de retourner en Ukraine et d'obtenir la nationalité ukrainienne. L'abolition de la peine de mort, la nomination d'un Commissaire national aux droits de l'homme et la déclaration selon laquelle l'Ukraine reconnaît la compétence du Comité aux termes des articles 21 et 22 de la Convention contre la torture (plaintes) sont autant de mesures qui ont été saluées par le Comité.

Toutefois, le Comité exprime sa préoccupation face aux informations qui relèvent que la torture est toujours pratiquée en Ukraine et que, selon le Commissaire national aux droits de l'homme, plus de 30 % des prisonniers sont victimes de torture. La déportation forcée de quatre membres de l'opposition ouzbèke, qui ont fait l'objet d'un appel urgent de la part du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, a également suscité l'inquiétude du Comité. Par ailleurs, il estime que le fait que des magistrats siègent avec des représentants du Ministère de l'intérieur au Comité de coordination pour la lutte contre le crime est en contradiction avec le principe de séparation des pouvoirs et risque de porter atteinte à l'indépendance du pouvoir judiciaire. Le nombre important d'accusations fondées sur des aveux et surtout le système de promotion des officiers de police inquiètent le Comité car ce mécanisme risque de mener à des mauvais traitements et à des actes de torture afin de forcer les suspects à avouer.

Le Comité recommande à l'Ukraine de prendre des mesures concrètes afin de prévenir les actes de torture et les mauvais traitements sur son territoire. Il recommande en outre que les déclarations reconnaissant la compétence du Comité au titre des articles 21 et 22 de la Convention et le retrait des réserves à l'article 20 de la Convention soient déposées auprès du Secrétaire général des Nations Unies. L'Ukraine doit également s'assurer que l'interrogatoire d'un
détenu ne puisse pas se faire sans l'assistance de l'avocat de son choix. Le Comité recommande en outre à l'Ukraine de prendre les mesures nécessaires afin d'assurer l'indépendance du pouvoir judiciaire et l'inadmissibilité des preuves obtenues sous la torture. Un mécanisme indépendant d'enquête doit être mis en place afin de donner suite à toutes les allégations de torture qui parviennent à l'Ukraine, y compris les allégations reçues de la part d'organisations non gouvernementales nationales et internationales.

Par ailleurs, les conditions de détention doivent être améliorées, et notamment en ce qui concerne l'espace et les sanitaires. Le Comité recommande en outre qu'un système de contrôle indépendant des établissements pénitentiaires, dont les résultats d'enquête doivent pouvoir entraîner des poursuites, soit mis en place. Le Comité recommande que la période de garde à vue, qui est actuellement de 72 heures, soit écourtée. Il demande que des mesures soient prises afin de prévenir et de punir le trafic des femmes et toute autre forme de violence à l'égard des femmes. Il recommande enfin que des moyens plus efficaces soient mis en œuvre pour mettre fin au bizutage et aux mauvais traitements au sein de l'armée.


Suite de l'examen du rapport d'Israël

Répondant aux questions posées hier par les membres du Comité, la délégation israélienne a notamment expliqué qu'aucune circonstance, quelle qu'elle soit, ne peut permettre de déroger au principe d'interdiction de la torture figurant à l'article 2 de la Convention contre la torture. Les méthodes d'interrogatoire auxquelles Israël a recours ne constituent pas des actes de torture car elles n'entraînent pas des souffrances et des douleurs aiguës. Aucun enquêteur n'a autorité pour torturer un suspect lors de son interrogatoire, même lorsque des vies humaines sont en péril, sous peine d'être poursuivi pénalement. La délégation a souligné qu'en dépit des attaques terroristes auxquelles Israël se trouve constamment confronté, les autorités n'ont jamais eu recours à la torture.

La délégation a précisé que dans des circonstances exceptionnelles, lorsque la vie de victimes innocentes est en danger, le recours à la force physique lors des interrogatoires est toléré, sans que cela ne constitue des traitements cruels, inhumains ou dégradants. L'état de nécessité est un principe moral fondamental, au même titre que le principe d'interdiction de la torture, et l'interprétation de la Convention doit permettre la coexistence de ces deux principes, a ajouté la délégation.

La charge de la preuve incombe toujours à l'État. Toutefois, si une personne s'estime victime de la violation d'une disposition de la Convention contre la torture, la charge de la preuve incombe au plaignant, a indiqué la délégation. Par ailleurs, la délégation a noté que plusieurs plaintes qui ont été portées à la connaissance du Comité ne sont jamais parvenues aux autorités israéliennes. En outre, les sept affaires auxquelles certains membres du Comité ont fait référence hier ont fait l'objet d'un examen approfondi et les allégations se sont avérées sans fondement. Une enquête pénale a en outre établi que les allégations selon lesquelles un détenu, qui est impliqué dans l'enlèvement d'un Israélien toujours privé de liberté à l'heure actuelle, aurait été maltraité et violé pendant sa détention étaient sans fondement. La délégation a d'ailleurs demandé au Comité de ne pas examiner ce cas avant que le détenu concerné n'ait épuisé toutes les voies de recours internes.

En ce qui concerne le jeune mineur de 16 ans dont la plainte pour mauvais traitements n'a pas été prise en considération en raison du manque de preuves médicales, la délégation a indiqué que le jeune homme a été conduit à l'hôpital dès sa sortie du commissariat et non six mois après, comme indiqué hier par un membre du Comité. Par ailleurs, s'agissant de la rédaction en hébreu des documents relatifs à la garde à vue et à l'arrestation, la délégation a indiqué que ces documents étaient toujours traduits dans une langue comprise par le suspect.

Un membre du Comité ayant fait référence aux sept policiers suspectés d'avoir brutalisé et infligé des mauvais traitements à un détenu accusé du meurtre brutal de deux policiers dans un commissariat de police, la délégation a indiqué que la colère des policiers était compréhensible étant donné l'atrocité du crime. Toutefois, s'il s'avère que ces policiers se sont rendus coupables de mauvais traitements à l'encontre de ce détenu, ils seront pénalement sanctionnés.

Plusieurs experts s'étant interrogés sur le rôle des médecins lors des interrogatoires, la délégation a indiqué que les médecins ne participent en aucun cas à l'interrogatoire. Ils ne font pas partie de l'Agence de sécurité israélienne, mais fournissent des soins de santé en cas de besoin.

La délégation a expliqué que, pour des raisons de sécurité, les enquêteurs ne déclinent pas leur véritable identité aux personnes interrogées. Ils utilisent des surnoms dont ils informent les suspects, qui peuvent ainsi les identifier dans le cadre d'une plainte.

Les personnes détenues au secret peuvent bénéficier de l'assistance d'un avocat, a indiqué la délégation, mais cette assistance est soumise à certaines conditions depuis que des informations transmises par des avocats de l'intérieur de la prison vers l'extérieur ont été liées à des attaques terroristes. Par ailleurs, les familles de personnes détenues au secret sont toujours informées de cette détention, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne les conditions de détention des mineurs de moins de 18 ans, la délégation a indiqué que, quelle que soit l'origine des mineurs, palestinienne ou israélienne, ceux-ci sont toujours détenus séparément des adultes. Par ailleurs, ils ont le droit de recevoir des visites, a ajouté la délégation.

La délégation a souligné que de nombreuses allégations mentionnées dans des «rapports» adressées au Comité par des organisations non gouvernementales ne concernent pas la Convention contre la torture. Israël estime en effet que la Convention s'applique aux détenus et autres personnes privées de liberté. La délégation s'est interrogée sur les raisons pour lesquelles le Comité interprète différemment les dispositions de la Convention lorsqu'il est question d'Israël mais pas lors de l'examen des rapports d'autres États parties.

L'application territoriale de la Convention a également suscité de longues explications de la part de la délégation. Le pays estime en effet que les dispositions de la Convention contre la torture ne s'appliquent pas à la situation en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Par ailleurs, étant donné le statut particulier de ces territoires et le transfert de certaines compétences aux autorités palestiniennes, Israël ne peut être tenu pour responsable de la situation dans ces zones. Le Comité n'est donc pas habilité à examiner la situation en Cisjordanie et à Gaza, a conclu la délégation.

En réponse aux préoccupations des experts concernant l'incidence des bouclages des territoires sur l'accès aux soins de santé pour les Palestiniens, la délégation a assuré que les soldats aux postes de frontières manifestent une certaine souplesse s'agissant des questions d'ordre humanitaire, notamment à l'égard des femmes enceintes.

En ce qui concerne les destructions de maisons auxquelles de nombreux membres du Comité ont fait référence hier, la délégation a estimé que le Comité n'avait pas compétence pour examiner ces cas.

S'agissant de la détention administrative, la délégation a expliqué qu'elle était utilisée avec modération et que les autorités y ont eu de moins en moins recours ces dernières années. Actuellement, seules 34 personnes font l'objet d'une détention administrative.

En ce qui concerne la personne d'origine libanaise détenue administrativement depuis plus de 12 ans, la délégation a indiqué que cette personne continue de représenter une menace pour Israël, qui ne cesse de faire l'objet d'attaques à ses frontières avec le Liban. La délégation a indiqué que ce détenu bénéficie des mêmes droits que tous les autres prisonniers, comme le droit à l'assistance d'un avocat et à la visite régulière d'un médecin.

En réponse aux préoccupations des experts concernant la traite des femmes, la délégation a souligné que le fait de vendre des personnes à des fins de prostitution est rigoureusement interdit par la loi. Elle a souligné que le nombre d'enquêtes liées à la traite des personnes a considérablement augmenté ces dernières années. Au lieu d'être renvoyées directement dans leur pays d'origine, les victimes de ces réseaux sont pris en main afin qu'elles témoignent lors des procès. Un comité interministériel a été mis en place afin d'enquêter et de rédiger un rapport sur la traite des femmes, rapport qui devrait bientôt être rendu public.





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