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Communiqués de presse Organes conventionnels

COMITÉ CONTRE LA TORTURE: RÉPONSES DE LA DÉLÉGATION DE L'UKRAINE AUX QUESTIONS DES EXPERTS

09 Mai 2007

Comité contre la torture

9 mai 2007


Le Comité contre la torture a entendu, cet après-midi, les réponses apportées par la délégation ukrainienne aux questions que lui avaient posées hier matin les experts s'agissant des mesures prises par l'Ukraine pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Dirigée par Mme Valeryia Lutkovska, Vice-Ministre de la justice de l'Ukraine, la délégation a notamment informé le Comité des amendements apportés en 2005 à la législation en ce qui concerne la définition de la torture, laquelle s'entend désormais de l'intention d'infliger des douleurs ou des souffrances physiques ou psychologiques à une personne afin de l'obliger à faire quelque chose contre sa volonté, par exemple afin d'obtenir d'elle des témoignages.

La délégation a également fourni des compléments d'informations s'agissant des questions d'extradition; des droits des étrangers; de la formation dispensée aux agents responsables de l'application des lois; des méthodes de contrôle des foules; de la garde à vue; des visites effectuées dans les lieux de détention; de l'assistance juridique gratuite; ou encore de l'affaire de l'expulsion de onze Ouzbeks.

À cet égard, la délégation a reconnu que, si aucune loi nationale n'a été enfreinte dans cette affaire, «cela ne veut pas dire que l'Ukraine en la matière n'a pas enfreint des normes du droit international», ajoutant qu'il ne faut pas répéter un tel exemple et qu'un projet de loi est en cours d'élaboration pour modifier la législation nationale afin que le droit ukrainien soit conforme au droit international.

Le Comité rendra publiques ses observations finales sur le rapport ukrainien à la fin de la session, le vendredi 18 mai prochain.


Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du quatrième rapport périodique de la Pologne (CAT/C/67/Add.5).



Réponses de la délégation de l'Ukraine

Dirigée par Mme Valeryia Lutkovska, Vice-Ministre de la justice de l'Ukraine, la délégation ukrainienne a notamment fait part des amendements apportés à la législation en 2005 en ce qui concerne la définition de la torture, laquelle s'entend désormais de l'intention d'infliger des douleurs ou des souffrances physiques ou psychologiques à une personne afin de l'obliger à faire quelque chose contre sa volonté, par exemple afin d'obtenir d'elle des témoignages. En janvier 2007, un projet d'amendement a été présenté afin de compléter la définition de la torture en y intégrant l'élément de discrimination; ce projet est en cours d'examen devant le Parlement.

Les apatrides et les étrangers jouissent des mêmes droits que les citoyens ukrainiens sauf pour certains droits, en particulier les droits politiques, a poursuivi la délégation. Ainsi, les étrangers ne peuvent pas servir dans les forces armées et ne peuvent ni voter ni être élus, a-t-elle précisé à titre d'exemple.

La délégation a par ailleurs souligné que seul un tribunal de justice a compétence pour décider d'une détention et doit pour cela publier un mandat d'arrêt. Le délai de la garde à vue est de 72 heures. Dans certains cas, un tribunal peut prolonger la garde à vue jusqu'à dix voire quinze jours s'il ne dispose pas de suffisamment d'éléments pour fonder sa décision, a admis la délégation. Pour autant, dans la pratique, 50% des cas de personnes placées en détention sont renvoyés devant un tribunal dans les 24 heures, a précisé la délégation.

En 2006, les unités spéciales ont arrêté plus de 13 000 personnes, a indiqué la délégation. Néanmoins, les décisions prises à l'encontre de ces personnes ne sont pas différentes de celles prises à l'encontre des personnes arrêtées par d'autres agents responsables de l'application des lois.

La délégation a souligné qu'il existe en Ukraine quatre universités dépendant du Ministère de l'intérieur dans lesquelles les fonctionnaires reçoivent une formation juridique supérieure et peuvent bénéficier d'une formation continue.

En ce qui concerne le contrôle des foules, la délégation a affirmé que l'Ukraine a montré qu'elle savait faire preuve de discipline et d'humanité, comme en témoignent les comportements lors des grands événements politiques qui se sont produits dans le pays.

Au total, 73 cas d'abus d'autorité ont été identifiés en 2006 dans les forces armées, soit 12% de moins qu'en 2005, a indiqué la délégation.

Interrogée sur les plaintes émanant de femmes détenues dans des établissements relevant du Ministère de l'intérieur, la délégation a indiqué que ces trois dernières années, il n'y a eu aucune plainte émanant de femmes détenues se plaignant d'être victimes de violence sexuelle.

Les détenus peuvent se plaindre à tout moment et non pas seulement une fois par mois comme cela a pu être dit, a précisé la délégation.

Depuis 2005, jamais l'unité spéciale qui a été créée pour lutter contre tout acte terroriste qui pourrait se dérouler dans des établissements pénitentiaires n'a eu à intervenir dans un tel contexte. Toute intervention de cette unité spéciale doit être supervisée par les services du Procureur, a souligné la délégation.

En revanche, une unité spéciale du service d'application des peines a dû intervenir lors d'une émeute dans un établissement pénitentiaire du pays, a ajouté la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que c'est un décret du Ministère de l'intérieur qui réglemente les activités des groupes mobiles - composés de représentants des organisations de protection des droits de l'homme et de membres de divers départements ministériels - constituant une police des polices dont le mandat est un mandat de surveillance et non de sanction. Ces deux dernières années, ces groupes se sont rendus dans plus de 90 établissements de détention préventive, soit un sixième des lieux de ce type existant dans le pays, a précisé la délégation.

Pour ce qui est de l'extradition, la délégation a tout d'abord rappelé que tout accord international ratifié par l'Ukraine est intégré dans l'ordre juridique interne; tel est donc le cas de la Convention européenne des droits de l'homme qui, comme chacun sait, contient des dispositions pertinentes concernant l'extradition. Une personne peut interjeter appel de la décision d'extradition la concernant devant la Cour d'appel et la Cour de cassation et cet appel est suspensif de la procédure d'extradition, a précisé la délégation.


Questions supplémentaires des membres du Comité

MME FELICE GAER, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport ukrainien, a souhaité savoir ce qui n'a pas fonctionné dans le système s'agissant de l'affaire des onze Ouzbeks qu'elle a mentionnée dans son intervention d'hier matin.

Mme Gaer a par ailleurs souhaité en savoir davantage sur les agents qui composent les unités spéciales.

La rapporteuse a déploré le manque d'informations fournies par la délégation s'agissant de la surpopulation carcérale et des questions du sida et de la tuberculose. Comment les autorités ukrainiennes qualifieraient-elles les progrès réalisés dans ces domaines, a-t-elle demandé? Qu'en est-il du nombre de cas de tuberculose et de sida en prison et qu'en est-il de l'espacement entre les lits des détenus en tant que mesure visant à prévenir la propagation de la tuberculose?

Mme Gaer a toutefois félicité l'Ukraine pour les grands progrès qu'elle a déjà réalisés dans bon nombre de domaines.

M. ALEXANDER KOVALEV, corapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport ukrainien, a jugé honnêtes et détaillées les informations fournies par la délégation.

M. Kovalev a toutefois souligné la nécessité pour les personnes chargées d'exercer le contrôle des foules d'être dûment formées afin d'avoir un impact tranquillisant et apaisant sur la foule; ces personnes doivent être formées à s'adresser à la foule et à dialoguer avec elle.


Après avoir évoqué le cas d'une personne qui a été soumise à des actes relevant de la Convention durant la période des 72 premières heures ayant suivi son arrestation, un membre du Comité a relevé que les autorités ukrainiennes semblent avoir pris conscience de la nécessité pour le juge de jouer un rôle dans la procédure au cours de cette période.

Sur quels critères des affaires pénales sont-elles traitées par le biais de la détention administrative, a demandé un expert? Ce type de détention administrative est-il légal?

Renseignements complémentaires de la délégation ukrainienne

En ce qui concerne l'affaire de l'expulsion des onze Ouzbeks, la délégation a précisé que l'Ukraine n'avait pas reçu de demande d'extradition de l'Ouzbékistan concernant ces personnes. Le fait est que ces personnes se trouvaient en situation irrégulière sur le territoire ukrainien, a expliqué la délégation. Compte tenu des informations parvenues aux autorités ukrainiennes selon lesquelles ces personnes appartenaient à des organisations terroristes, le statut de réfugié leur a été refusé et ces onze personnes se sont vu signifier les décisions d'expulsion les concernant. Toutes ces personnes ont indiqué qu'elles ne contestaient pas la décision, a souligné la délégation. Elles ont alors été renvoyées en Ouzbékistan par avion et sont maintenant jugées en Ouzbékistan pour différents chefs d'accusation pénale sans rapport avec le terrorisme. D'après le Procureur ukrainien, il n'y a pas eu infraction de la législation nationale, a rappelé la délégation. Pour autant, cela ne veut pas dire que l'Ukraine en la matière n'a pas enfreint des normes du droit international, a-t-elle poursuivi. Il convient d'en tirer deux conclusions: premièrement, qu'il ne faut pas répéter un tel exemple et, deuxièmement, qu'il faut modifier la législation nationale afin que le droit ukrainien soit conforme au droit international. Or, un projet de loi est précisément en cours d'élaboration à cette fin, a indiqué la délégation.

La délégation a reconnu l'existence d'un problème en Ukraine du fait qu'un avocat qui travaille normalement touche des honoraires élevés, ce qui n'est pas le cas s'il travaille gratuitement dans le cadre de l'assistance juridique gratuite. Les avocats sont donc réticents à travailler gratuitement en étant commis d'office. Toutefois, un avocat commis d'office peut être sanctionné et rayé du barreau s'il refuse de se soumettre à cette offre gracieuse de service dans le cadre de l'assistance juridique gratuite, a souligné la délégation, reconnaissant néanmoins qu'on peut s'interroger, dans de telles circonstances, sur la qualité de cette aide gratuite.

La délégation a par ailleurs fait part de l'intention des autorités ukrainiennes de mettre les installations de détention préventive et provisoire aux normes de l'Union européenne.

En ce qui concerne la détention administrative, la délégation a notamment fait état de l'existence, devant le Parlement, d'un projet visant à permettre à une personne d'engager un recours en cas de détention administrative, ce qui n'était pas le cas jusqu'ici.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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