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Communiqués de presse Organes conventionnels

COMITÉ CONTRE LA TORTURE: RÉPONSES DE LA DÉLÉGATION DE LA POLOGNE AUX QUESTIONS DES EXPERTS

11 Mai 2007

Comité contre la torture

11 mai 2007


Le Comité contre la torture a entendu, cet après-midi, les réponses apportées par la délégation polonaise aux questions que lui avaient posées hier matin les experts s'agissant des mesures prises par la Pologne pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

La délégation polonaise, dirigée par M. Andrzej Duda, Sous-Secrétaire d'État au Ministère de la justice de la Pologne, a notamment assuré, en réponse aux allégations sur des centres de détention secrets qui auraient été utilisés pour détenir des étrangers soupçonnés d'activités terroristes en Pologne, que de tels centres n'ont jamais existé et qu'il n'y a pas en Pologne de personnes détenues en dehors de la loi. En outre, a poursuivi la délégation, la Pologne ne procède pas à des restitutions extraordinaires de personnes soupçonnées d'activités terroristes. Elle coopère à la lutte contre le terrorisme dans le strict respect des procédures juridiques existantes, a insisté la délégation.

La délégation polonaise a également fourni des compléments d'informations s'agissant, entre autres, des procédures applicables aux étrangers qui arrivent en Pologne; des procédures applicables en matière de fouilles; des programmes de formation à l'intention des personnels pénitentiaires et des forces de l'ordre; des mesures prises afin de remédier à la surpopulation carcérale; des mesures de coercition autorisés dans les institutions pénitentiaires; de la définition de la torture dans la législation polonaise; de l'âge minimum de la responsabilité pénale; ou encore de la durée de la détention provisoire. À cet égard, la délégation a expliqué que cette détention ne dépasse généralement pas trois mois mais que, dans des cas exceptionnels, elle peut être prolongée à douze mois et, en tout état de cause, la durée maximale est de deux ans, après quoi seule une décision d'un tribunal de haute instance sur la base de circonstances exceptionnelles peut permettre une prolongation.

Le Comité rendra publiques, à la clôture de la session le vendredi 18 mai prochain, ses observations finales sur l'ensemble des rapports examinés au cours de la session, dont celui de la Pologne était le dernier au programme.

Le Comité pourrait tenir une séance publique lundi afin de préparer la réunion avec les États parties qui se tiendra le lendemain, mardi 15 mai, à 10 heures.

Réponses de la délégation de la Pologne

La délégation polonaise, dirigée par M. Andrzej Duda, Sous-Secrétaire d'État au Ministère de la justice de la Pologne, a notamment reconnu que la Cour européenne des droits de l'homme a constaté un certain nombre de vides juridiques dans le système concernant les motifs de détention d'un étranger, notamment dans les aéroports polonais, a reconnu la délégation. Selon la réglementation actuelle, suite à une décision d'un tribunal polonais et bien qu'aucun délai officiel ne soit fixé dans les textes, le délai maximum de séjour d'un étranger dans un centre de détention est fixé à un an, a précisé la délégation.

Les étrangers qui bénéficient d'un permis de séjour de tolérance jouissent des droits inaliénables qui leur permettent de vivre en Pologne de manière autonome, y compris le droit aux prestations sociales et à l'assurance médicale, a poursuivi la délégation. Certes, l'institution de ce séjour de tolérance n'est pas idéale et c'est pourquoi le pays est en train de prendre des mesures pour intégrer le système de la protection subsidiaire, conformément à la législation européenne. Ce système s'appliquera donc à la grande majorité des personnes qui jouissent actuellement en Pologne d'un permis de séjour de tolérance, a fait valoir la délégation.

S'agissant des crimes de haine, la délégation a notamment indiqué qu'en 2006, la Pologne a adhéré au programme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour la lutte contre les crimes de haine.

En 2005, a par ailleurs rappelé la délégation, de nouveaux programmes de formation ont été lancés à l'intention de tous les personnels pénitentiaires, civils ou non. La question des droits de l'homme et de l'interdiction de la torture est également abordée dans tous les programmes de formation destinés aux forces de l'ordre, a-t-elle ajouté. En outre, un système de coordonnateurs policiers pour les droits de l'homme a été mis en place.

Le Code de procédure pénale prévoit le droit de toute personne détenue de prendre contact et de s'entretenir avec son avocat, a par ailleurs souligné la délégation.

Les procédures applicables en matière de fouilles sont énoncés dans le Code de procédure pénale qui stipule que, dans toute la mesure du possible, la fouille doit être réalisée par une personne du même sexe. Dans le cadre de certaines fouilles qui doivent absolument être opérées sans délai – afin d'éviter la destruction de preuves, par exemple – il est possible de déroger à cette règle.

Afin de remédier à la surpopulation carcérale, a indiqué la délégation, la Pologne a adopté, en février 2006, un programme visant la mise à disposition de 17 000 nouvelles places par le biais, en particulier, de la construction de pavillons nouveaux dans les établissements déjà existants et de l'adaptation des bâtiments existants. Grâce aux mesures qui ont été prises en ce sens, 4000 places nouvelles ont déjà été dégagées, a précisé la délégation.

Les mesures de coercition de la part du personnel pénitentiaire ne sont autorisées que lorsque cela est nécessaire pour prévenir des attaques ou des émeutes dans les établissements pénitentiaires ou encore pour empêcher la fuite d'un prisonnier. Le nombre de cas où la coercition directe a été appliquée dans ces contextes a diminué, passant de plus de 2000 à 1200, a indiqué la délégation.

En Pologne, aucune entrave autre que les menottes (aux poignets voire aux jambes pour les personnes les plus agressives ou dangereuses) n'est jamais utilisée, a assuré la délégation.

S'agissant des allégations relatives à l'existence en Pologne de centres de détention secrets qui auraient été utilisés pour détenir des étrangers soupçonnés d'activités terroristes, la délégation a assuré qu'il n'y a jamais eu de tels centres de détention en Pologne, pas plus qu'il n'y a en Pologne de personnes détenues en dehors de la loi. En outre, a poursuivi la délégation, la Pologne ne procède pas à des restitutions extraordinaires de personnes soupçonnées d'activités terroristes. La Pologne coopère à la lutte contre le terrorisme, mais dans le strict respect des procédures juridiques existantes, a insisté la délégation.

Rappelant que l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe ainsi que le Parlement européen ont enquêté sur ces questions, la délégation a indiqué que la Pologne a invité M. Dick Marty (ndlr: rapporteur de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe) à visiter un centre des services secrets polonais au sujet duquel il a soulevé un certain nombre de questions. Or, jusqu'à présent, a souligné la délégation, M. Marty n'a pas donné suite à cette invitation.

En ce qui concerne le manque de définition de la torture dans la législation polonaise, la délégation a souligné que cela s'explique par le fait qu'en vertu de l'article 40 de la Constitution, les accords ratifiés par la Pologne font partie du droit interne et ont prévalence sur la législation nationale. C'est pourquoi il n'est pas prévu d'apporter une quelconque modification au Code pénal au sujet de la définition de la torture.

En réponse à d'autres questions, la délégation a expliqué que les crimes fiscaux sont poursuivis en vertu du Code pénal, qui les définit comme un acte consistant à violer les dispositions douanières en matière de devises ou les lois relatives aux taux de change ou encore les dispositions relatives à la loterie.

Un projet de loi sur l'assistance juridique gratuite a été soumis au Parlement polonais en octobre 2005, a par ailleurs indiqué la délégation. Le Ministère de la justice a par la suite demandé au porte-parole du Parlement de reporter l'examen du projet de loi jusqu'à ce que certaines questions aient été éclaircies. Le Ministère a ensuite soumis un projet d'amendement au projet de loi.

La délégation a par ailleurs indiqué que la Pologne a refusé l'extradition de deux Turcs suite à des informations fournies par Amnesty International.

En Pologne, la détention provisoire ne dépasse généralement pas trois mois, a indiqué la délégation. Mais dans des cas exceptionnels, cette durée peut être prolongée à douze mois. En tout état de cause, la durée maximale est de deux ans, a poursuivi la délégation. Au-delà de cette durée de deux ans, la détention provisoire ne peut être prolongée que par une décision d'un tribunal de haute instance et cela exige des circonstances exceptionnelles laissant apparaître que la procédure ne peut aboutir dans le laps de temps imparti.

Le principe de la présomption d'innocence est totalement respecté, a par ailleurs assuré la délégation.

La délégation a indiqué qu'en vertu du Code pénal, la responsabilité pénale des mineurs n'est engagée qu'à partir de l'âge de 17 ans. Dans certains cas particuliers, tels les homicides ou les attaques terroristes, l'âge minimum de responsabilité pénale peut être abaissé à 15 ans, a ajouté la délégation. Les délinquants plus jeunes ne font pas l'objet de sanctions pénales mais de mesures éducatives comme le placement en centre spécialisé, a ajouté la délégation. La délégation a toutefois souligné qu'un nouveau code de justice juvénile est en cours d'élaboration.

Questions supplémentaires des membres du Comité

M. CLAUDIO GROSSMAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport polonais, a notamment souhaité savoir si les étrangers qui arrivent en Pologne bénéficient d'une protection en matière de santé indépendamment d'une éventuelle souscription à une assurance santé ou s'il doivent souscrire à une assurance pour être protégés.

M. Grossman s'est par ailleurs dit impressionné par les mesures prises par la Pologne en matière de formation des différents personnels aux droits de l'homme et à l'interdiction de la torture. Il a notamment salué la désignation de coordonnateurs policiers pour les droits de l'homme.

Revenant sur la question de l'accès à un avocat, M. Grossman s'est fait l'écho d'informations émanant d'organisations non gouvernementales selon lesquelles l'assistance juridique n'est obligatoire que lorsque l'accusé encourt une sanction supérieure à trois années d'emprisonnement.

Est-il possible qu'un délinquant juvénile interpellé soit amené à signer un document quelconque sans bénéficier de l'assistance d'un avocat, a par ailleurs demandé M. Grossman ?

Le rapporteur a pris note du fait que la délégation polonaise réfute toute allégation concernant l'existence passée ou présente de centres de détention secrets en Pologne. Il a également pris note de l'affirmation de la délégation selon laquelle la Pologne n'a procédé à aucune restitution extraordinaire.

M. LUIS GALLEGOS CHIRIBOGA, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport polonais, a indiqué qu'il avait été surpris qu'aucune organisation non gouvernementale polonaise n'ait participé à la réunion prévue en début de session en prévision de l'examen du rapport de la Pologne. Aussi, a-t-il insisté sur l'importance que revêt la participation de la société civile, notamment pour ce qui est de contribuer à l'évolution du droit.

Le corapporteur a par ailleurs insisté sur l'importance qu'il y a à disposer de textes législatifs garantissant qu'il n'y aura pas d'impunité.

Quant à la question des migrants et des réfugiés, l'Europe ferait bien de traiter la question en tenant compte non seulement de ses aspects sociaux mais aussi des aspects liés à la politique étrangère et à la manière dont le traitement de ces questions influe sur les relations entre pays. Il faut veiller à ne pas traiter les migrants comme des criminels, a insisté M. Gallegos Chiriboga.

Un autre membre du Comité a souhaité obtenir des informations sur les poursuites engagées contre des militaires pour les incidents de bizutage qui se poursuivent en Pologne.


Renseignements complémentaires fournis par la délégation

En ce qui concerne l'assistance judiciaire gratuite, la délégation a rappelé que la procédure pénale polonaise contient des dispositions concernant la présence obligatoire d'un avocat et d'autres dispositions concernant la commission d'office d'un avocat.

Revenant sur l'administration de la justice juvénile, la délégation polonaise a indiqué que la police est tenue de notifier la détention d'un mineur à ses parents ou tuteurs et ne peut maintenir ce mineur en détention plus de 24 heures. Au-delà de ce délai, c'est aux tribunaux familiaux qu'incombe toute décision concernant des mineurs en conflit avec la loi. Il est donc impossible de voir un mineur détenu plus de 24 heures dans un poste de police, a insisté la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué ne pas disposer de statistiques concernant des mises en accusation ou sentences prononcées par des tribunaux pour crimes de haine.
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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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