Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTEND LES RÉPONSES DE LA DÉLÉGATION DU HONDURAS

07 Mai 2009



Comité contre la torture


7 mai 2009



Le Comité contre la torture a entendu, ce matin, les réponses de la délégation du Honduras aux questions que lui ont été adressées hier les membres du Comité. Le Honduras est le dernier pays examiné dans le cadre de cette session. Le Comité présentera, le vendredi 15 mai, ses conclusions sur les sept pays examinés depuis le 27 avril.

La délégation, dirigée par M. Hugo Adalberto Suazo Ortiz, Sous-Secrétaire à la sécurité et l'investigation au Secrétariat d'État chargé de la sécurité, a notamment reconnu une certaine imprécision dans le droit interne s'agissant de la définition de la torture, qui ne met pas suffisamment l'accent sur la gravité du délit. Elle a précisé que la peine maximale prévue pour de tels actes était de 10 ans mais peut aller jusqu'à 15 ans si le délit de torture est associé à un homicide. La délégation a d'autre part indiqué que 49% des détenus sont des personnes qui n'ont pas encore été condamnées, mais a fait valoir que ces chiffres ont considérablement baissé depuis l'introduction en 2002 d'un nouveau code de procédure pénale. Elle a aussi indiqué que les inspections dans les lieux de détention ont permis d'identifier et de mettre fin à une vague de détentions extrajudiciaires. Répondant aux questions sur la vague récente de morts violentes de femmes, la délégation a indiqué qu'un service spécial a été créé pour enquêter sur ces violences, précisant que toutes les affaires faisaient objet d'enquêtes. Une commission d'enquête a en outre été créée pour enquêter sur les meurtres d'enfants, a aussi fait valoir la délégation. Des modifications dans les règles de détention des mineurs ont également été introduites.

Le Honduras a renforcé l'état de droit après une longue période d'«obscurantisme institutionnalisé» a conclu le chef de la délégation, indiquant que les institutions républicaines s'améliorent de jour en jour dans le pays. Ce n'est pas le fait du seul effort gouvernemental, mais de toute la société du Honduras qui a compris que ce n'est que grâce à un renforcement démocratique que l'on peut assurer un meilleur développement du pays, a-t-il déclaré.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Honduras, M. Claudio Grossman, qui est également le Président du Comité, a salué le fait que le Honduras n'applique pas la peine de mort. Il a par ailleurs formulé l'espoir que le processus de réforme pénale entrepris par le pays entraînera, entre autres, à une réduction des détentions provisoires. Ce processus permettra aussi d'améliorer la sécurité des citoyens. La lutte contre l'impunité reste centrale, comme la délégation en a convenu elle-même. À cet égard, M. Grossman a souligné l'importance de la question des disparitions, relevant que le Honduras est l'unique pays de la région qui n'ait pas mis en œuvre de commission de vérité et réconciliation. Se référant à des meurtres de militants des droits de l'homme, il a relevé que plusieurs affaires n'ont pas été élucidées et continueront d'intéresser le Comité. La corapporteuse, Mme Nora Sveaass, s'est félicitée que le Honduras soit l'un des 10 pays ayant ratifié la Convention interaméricaine contre les disparitions forcées. À ce propos, et mentionnant les activités passées du bataillon 316 de triste réputation, l'experte a demandé des précisions sur l'enquête qui avait été menée contre les membres de ce bataillon. D'autres experts ont encore soulevé des questions sur la traite des femmes, sur les garanties dont disposent les personnes privées de liberté, sur la protection des enfants et des jeunes et sur la détention provisoire. À cet égard, une experte a souligné que la détention provisoire est une procédure dans laquelle il incombe à l'État d'amener la preuve de l'infraction. Le Honduras a été instamment invité à revoir cette procédure et son application.


Les observations finales du Comité sur le rapport du Honduras seront rendues publiques à la fin de la session, le 15 mai prochain. Cet après-midi, à 15 heures, le Comité portera son attention sur des questions d'organisation des travaux et ses méthodes de travail s'agissant de la présentation de rapports par les États parties (article 19 de la Convention) et de l'examen de plaintes reçues en vertu de sa procédure confidentielle prévue à l'article 22.


Réponses de la délégation du Honduras

La délégation, dirigée par M. Hugo Adalberto Suazo Ortiz, Sous-Secrétaire à la sécurité et l'investigation au Secrétariat d'État chargé de la sécurité, a apporté des précisions au Comité s'agissant de la définition de la torture dans le droit interne. Elle a reconnu qu'il demeure dans la loi une imprécision du fait que le législateur n'a pas suffisamment insisté sur la gravité de ce délit. La peine maximale prévue pour de tels actes est de 10 ans mais peut aller jusqu'à 15 ans si le délit de torture est associé à un homicide, a précisé la délégation hondurienne.

La délégation a également indiqué qu'avec l'entrée en vigueur en 2002 d'un nouveau code de procédure pénale, les droits de l'accusé et le droit à un juste procès sont garantis. La loi prévoit que les juges sont chargés de vérifier la légalité de l'exécution des peines et le respect des droits fondamentaux des prévenus.

À une question portant sur la disposition de la Convention qui prévoit que l'ordre d'un supérieur ne peut être invoqué pour justifier un acte de torture, la délégation a affirmé que la loi sur la police interdit expressément l'exécution d'ordres illégaux entrant en conflit avec les obligations internationales de l'État partie.

La délégation a indiqué que la durée limite maximale de la détention provisoire était de 2 ans, et qu'exceptionnellement, un prolongement de 6 mois peut être autorisé par la Cour suprême de justice. La détention préventive, a expliqué une délégation, est considérée par la loi comme une mesure provisoire pour éviter la disparition d'une personne soupçonnée de crime, mais le prévenu doit être présenté devant un juge dans un délai de 24 heures. La délégation a précisé que la détention provisoire pour enquête ne peut dépasser 6 jours. Le nouveau code pénal supprime toutefois cette notion de «détention provisoire pour enquête»; il n'est plus question d'instruire mais d'une détention judiciaire seulement, a dit la délégation.

À ce jour, 10 700 personnes sont détenues et parmi celles-ci 51% ont été condamnées et 49% sont en détention provisoire. Les chiffres ont considérablement baissé avec l'introduction du nouveau code, a fait valoir la délégation. Celle-ci a aussi indiqué que la loi prévoyait que l'État doit assister les personnes indigentes et a l'obligation d'offrir un avocat commis d'office à qui ne peut se permettre les services d'un avocat privé.

Répondant à des questions sur les dispositions relatives aux états d'exception, la délégation a reconnu que la possibilité de suspension de certains droits est prévue dans des circonstances bien précises. Elle a précisé que dans aucun cas la Constitution n'autorise de suspendre la garantie de l'habeas corpus.

La délégation a aussi expliqué comment se déroulent les inspections dans les lieux de détention. Ces visites, a indiqué la délégation, ont notamment permis d'identifier et de mettre fin à une vague de détentions extrajudiciaires. Pour ce qui est du service téléphonique d'urgence pour plainte et demande d'information, il traite en moyenne 125 appels par an. Le personnel bénévole qui répond à ces appels téléphoniques a reçu une formation en bonne et due forme, a assuré la délégation, affirmant que le service fonctionne bien. Le Honduras a pris à son compte les pratiques fixées en droit international, et ce sont ces pratiques que nous poursuivons pour les personnes qui dénoncent les crimes, a poursuivi la délégation, affirmant que l'État est tenu d'assurer la protection de ces personnes. La mise en œuvre de la loi requiert toutefois d'importantes ressources et il est possible que la loi ne soit pas suffisamment appliquée, a admis la délégation.

Se référant à la question des experts sur les morts violentes de femmes, la délégation a indiqué qu'un service spécial, composé de 27 juges, a été créé pour enquêter sur ces cas précis et que toutes les affaires sont poursuivies. Une loi est par ailleurs en projet qui fixe un cadre légal aux activités de ce service.

S'agissant de savoir si le Honduras prévoit l'imprescriptibilité des crimes les plus graves, la délégation a assuré que ce principe est bel et bien appliqué pour les actes de torture.

Pour ce qui concerne les réparations prévues pour les victimes de disparitions forcées, la délégation a informé le Comité que 30 affaires s'étaient soldées par des indemnisations et qu'un fonds d'indemnisation a par ailleurs été créé pour les victimes. La délégation a précisé que le Honduras n'a pas ratifié la Convention interaméricaine sur les disparitions forcées mais qu'il était prévu d'inscrire les dispositions de cette Convention dans la Constitution et d'inscrire ce crime dans la loi comme un délit permanent.

Pour ce qui est des décès survenus dans les centres de détention, la délégation a estimé qu'il y avait eu certains progrès et a cité l'exemple de l'arrestation de fonctionnaires ayant participé à quelque 600 meurtres. La création d'un Institut professionnel pénitentiaire chargé de la gestion des centres pénitentiaires est actuellement à l'examen, a indiqué la délégation, ajoutant que le Honduras a pris conscience que les lieux de détention ne devaient pas rester sous l'égide du Ministère de la sécurité nationale. Se référant aux questions des experts portant sur des allégations de viols et torture de prisonniers, la délégation a reconnu qu'une meilleure formation devait être assurée aux fonctionnaires pour garantir le respect des droits de l'homme des personnes détenues.

Face aux observations présentées par divers comités en ce qui concerne les disparitions forcées qui se sont longtemps produites dans le pays, la délégation a indiqué que le Président de la République avait pris acte des informations reçues et donné des instructions pour que les recommandations de ces instances soient suivies d'effets; le Honduras s'y prépare, a insisté la délégation.

S'agissant des assassinats extrajudiciaires de défenseurs du droit à la terre, la délégation a expliqué que les difficultés à poursuivre les coupables sont dus au fait que des policiers sont chargés d'enquêter sur des agents publics et que le Gouvernement a bien identifié ce conflit comme étant un problème qu'il doit résoudre. Pour ce qui est des assassinats politiques, la délégation a dit que le Procureur n'a pas pour mission de poursuivre des agents de l'État, mais que ces affaires font l'objet de surveillance de la part d'un organisme spécialisé.

La délégation s'est également exprimée sur les questions liées au système pénitentiaire hondurien. S'agissant des allégations faisant état de 400 morts dans les prisons et de l'introduction d'armes dans les centres pénitentiaires, la délégation a indiqué que des vérifications plus étroites sont maintenant pratiquées.

Répondant à des questions sur les femmes détenues, la délégation a notamment assuré que, conformément à la loi, les fouilles au corps portant atteinte à la pudeur doivent être pratiquées par un médecin.

À l'heure actuelle, il y a 1050 policiers formés qui travaillent dans les prisons, a poursuivi la délégation hondurienne. Ces policiers sont supervisés par leurs directeurs qui sont chargés de l'inspection de leurs activités, a indiqué la délégation. Les prisons ne disposent pas actuellement d'hôpitaux mais seulement de pavillons ambulatoires. En mars 2009, les instances gouvernementales et non gouvernementales ont élaboré un programme à l'intention des détenus atteints dans leur santé mentale, a encore indiqué la délégation.

Pour ce qui est des questions portant sur les enfants et les jeunes en conflit avec la loi, la délégation a notamment assuré que le port du tatouage n'était plus un motif de détention. Une commission d'enquête a en outre été créée pour enquêter sur les meurtres d'enfants, a aussi fait valoir la délégation. Des modifications dans les règles de détention des mineurs ont également été introduites. En 2008, il n'y a eu ni décès ni d'incidents d'envahissement dans ces centres, grâce en partie à la fermeture de deux centres où des problèmes avaient été identifiés.

Il a aussi été dit que le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes a été soumis au Parlement en 2007, et que sa ratification est à l'examen. La délégation a aussi signalé que l'Institut national de la femme était chargé en particulier de surveiller la mise en œuvre et l'application des normes internationales, et en particulier la diffusion des informations prévues par ces dispositions. Elle a aussi signalé que la création d'un Institut pour la parité ouvre de nouvelles perspectives à l'application de certaines lois et en particulier celles relatives à la violence conjugale. La délégation a aussi fait état d'avancements dans le domaine de la sensibilisation du public aux diverses questions relatives aux droits des femmes et à la traite des femmes en particulier. Nous faisons des efforts pour que les problèmes structurels obtiennent des solutions structurelles, a assuré la délégation.

S'agissant du mécanisme national de prévention, la délégation a indiqué que ce mécanisme est sur le point d'être mis sur pied. Le Président de la République a affirmé qu'il souhaitait de doter ce mécanisme d'un budget qui lui permettra de fonctionner, a dit la délégation tout en ajoutant que ce bon fonctionnement dépendait des moyens dont disposerait l'État.

La pauvreté, le faible niveau d'éducation, la criminalité, les enlèvements, les vols de véhicules, le trafic des stupéfiants sont autant de raisons qui expliquent la prévalence de la violence au Honduras, a expliqué la délégation en réponse à une question sur les causes endogènes et exogènes des violences observées dans le pays.

D'autres explications ont été fournies par la délégation sur la formation des agents de l'ordre, sur la protection des défenseurs des droits de l'homme, et sur le contrôle pratiqué sur les entreprises de sécurité privées.


Complément d'examen

M. CLAUDIO GROSSMAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Honduras, a relevé que le Honduras n'appliquait pas la peine de mort et que cela mérite d'être souligné par le Comité. Il a formulé l'espoir que le processus de réforme pénale amène, entre autre, à la réduction des détentions provisoires. Cela permettra aussi de favoriser la sécurité des citoyens. La lutte contre l'impunité reste centrale, comme la délégation en a convenu elle-même. À cet égard, M. Grossman a souligné l'importance de la question des disparitions, relevant que le Honduras est l'unique pays de la région qui n'ait pas mis en œuvre de processus de vérité et réconciliation. Cette question continuera donc d'être observée avec attention par la communauté internationale, a-t-il déclaré.

Se référant à l'assassinat de militants des droits de l'homme, le rapporteur a estimé que plusieurs affaires n'ont pas été élucidées et continueraient donc à intéresser le Comité.

MME NORA SVEAASS, corapporteuse pour l'examen du rapport du Honduras, s'est félicitée que le Honduras soit l'un des dix pays ayant ratifié la Convention contre les disparitions forcées. À ce propos, et mentionnant les activités passées du «bataillon 316» de triste réputation pour s'être rendu coupable de nombreux assassinats et de graves actes de torture, l'experte a demandé des précisions sur l'enquête qui avait été menée contre les membres de ce bataillon. Ceux-ci sont certes âgés aujourd'hui, a-t-elle déclaré, mais il est essentiel de lutter contre l'impunité. L'experte s'est dite préoccupée également de ce des militaires interviennent régulièrement au Honduras dans des situations de la vie civile, faisant état d'une militarisation d'activités qui devraient être du ressort de la police.


D'autres experts ont encore soulevé des questions sur la traite des femmes, sur les garanties offertes aux personnes privées de liberté, sur la protection des enfants et des jeunes et sur la détention provisoire. À cet égard, une experte a souligné que la détention provisoire était une procédure dans laquelle c'est l'État qui doit assumer la responsabilité d'apporter la preuve de l'infraction. Le Honduras a été instamment invité à revoir cette procédure et son application.


Réponses complémentaires

La délégation a insisté encore sur les efforts importants entrepris par le Honduras pour lutter contre la violence qui touche les femmes. Le Gouvernement s'efforce, dans la mesure du possible, de s'atteler à ce problème qui est dû aux difficultés structurelles de tout un système et que l'ont retrouve dans d'autres pays du monde, a déclaré une représentante hondurienne, qui a insisté sur la nécessité d'éduquer dans ce domaine. La torture est en réalité un phénomène qui met en évidence le manque d'éducation, a-t-elle ajouté.

Le Honduras a renforcé l'état de droit après une longue période d'obscurantisme institutionnalisé, a conclu le chef de la délégation, indiquant que les institutions républicaines s'améliorent de jour en jour dans le pays. Ce n'est pas le fait du seul effort gouvernemental, mais de toute la société du Honduras qui a compris que ce n'est que grâce à un renforcement démocratique que l'on peut assurer un meilleur développement du pays, a-t-il déclaré.


__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

VOIR CETTE PAGE EN :