Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ACHÈVE SA VINGT-NEUVIÈME SESSION

22 Novembre 2002



CAT
29ème session
22 novembre 2002



Il a adopté des conclusions et recommandations
sur les rapports présentés par cinq pays :
Espagne, Égypte, Estonie, Chypre et Venezuela



Le Comité contre la torture a achevé sa vingt-neuvième session qui se déroulait, depuis le 11 novembre dernier, au Palais des Nations, à Genève. Au cours de cette session, il a adopté des conclusions et recommandations sur les rapports présentés par cinq pays au titre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s'agit des rapports de l'Espagne, de l'Égypte, de l'Estonie, de Chypre et du Venezuela.
S'agissant de l'Espagne, le Comité a accueilli avec satisfaction l'adoption de mesures diverses pour garantir la protection des droits des détenus, l'assistance offerte aux demandeurs d'asile, les améliorations du système pénitencier. Il a déclaré reconnaître à l'Espagne le droit de protéger ses citoyens des actes de violence et de terrorisme et fait observé que la réaction légitime de l'État doit être compatible avec les dispositions de la Convention. Il a relevé des informations révélant la persistance de cas de torture et de mauvais traitements de la part des forces de sécurité de l'État. Il s'est dit particulièrement préoccupé des plaintes pour mauvais traitements contre des immigrés apparemment fondés sur le racisme ou la xénophobie et a recommandé à l'Espagne de continuer de prendre des mesures pour éviter les incidents racistes et xénophobes.
Le Comité a noté avec satisfaction la promulgation par l'Égypte d'une loi abolissant la flagellation en tant que sanction disciplinaire applicable aux détenus, ainsi que le rejet par les tribunaux égyptiens des témoignages obtenus sous la contrainte. Il est néanmoins préoccupé par la persistance du phénomène de la torture et des mauvais traitements infligés à des détenus ainsi que des abus dont seraient victimes les mineurs en détention.. Le Comité a recommandé à l'Égypte d'adopter des mesures pour que l'inspection obligatoire des lieux officiels de détention soit effectuée, de supprimer toute forme de détention administrative, et d'abolir la détention au secret. Le Comité a souligné qu'il n'ignorait pas les difficultés que rencontre l'Égypte dans sa lutte contre le terrorisme, mais rappelle qu'aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, ne peut être invoquée pour justifier la torture.
En ce qui concerne l'Estonie, le Comité s'est félicité de la création d'un poste de Chancelier juridique servant aussi de médiateur ainsi que de l'abolition de la peine de mort, de l'amélioration des conditions de détention, et de la qualification de la torture en tant que crime. Le Comité a cependant noté que des cas isolés de mauvais traitements par des agents de l'État persistent dans des établissements de la police. Le Comité est en outre préoccupé de la détention dans des centres d'expulsion, pour des périodes parfois très longues, d'immigrés clandestins et de demandeurs d'asile déboutés. Il est aussi préoccupé de la sur-représentation des ressortissants russes et apatrides dans la population carcérale.
Au sujet de Chypre, le Comité a accueilli avec satisfaction les développements législatifs, administratifs et institutionnels qui ont eu lieu depuis la présentation du dernier rapport, notamment la ratification de la loi instituant la torture comme délit pénal et la disposition relative à la présomption de mauvais traitement s'il est établi par un examen médical que la personne détenue porte des blessures qui n'étaient pas présentes au moment de l'arrestation. Le Comité a seulement noté, au titre des sujets de préoccupation, que malgré une tendance généralement positive en ce qui concerne le traitement des personnes détenues par la police, il y a encore des cas de mauvais traitement et recommande aux autorités de rester vigilantes.
Le Comité a félicité le Venezuela pour l'entrée en vigueur de la Constitution de 1999 qui représente un progrès dans le domaine des droits de l'homme. Il est toutefois préoccupé des nombreuses informations faisant état de torture et de mauvais traitement, d'abus de pouvoir et d'actes arbitraires perpétrés par les membres des forces de sécurité de l'État, et des menaces contre des minorités sexuelles et des activistes transsexuels. Le Comité a souligné l'importance particulière de la création, avec statut constitutionnel, du bureau de l'Ombudsman en tant qu'organe indépendant responsable de la promotion et de la surveillance de l'application des droits de l'homme.
Le Comité contre la torture tiendra sa prochaine session à Genève, du 28 avril au 23 mai 2003, afin d'examiner les rapports des pays suivants: Belgique, Moldova, Slovénie, Azerbaïdjan, Islande et Cambodge. Le rapport de la Croatie serait examiné si l'un de ces pays n'était pas en mesure de présenter son rapport à la date prévue.

Conclusions et recommandations adoptées au cours de la session
Dans ses conclusions et recommandations sur l'Espagne, le Comité accueille avec satisfaction le fait que la Convention fasse partie intégrante de l'ordre juridique interne et que le Code pénal de 1996 soit, en termes généraux, conforme à l'article 1er de la Convention sur la définition de la torture, l'adoption de mesures diverses pour garantir la protection des droits des détenus, les efforts de formation des fonctionnaires de police; les nouvelles garanties fournies dans l'assistance des demandeurs d'asile et les progrès dans l'amélioration du système pénitencier. Au titre des motifs de préoccupation, le Comité note la contradiction entre les déclarations de l'Espagne selon lesquelles il n'y a pas d'actes de torture ni de mauvais traitements, sauf dans certains cas très isolés, et les informations révélant la persistance de cas de torture et de mauvais traitements de la part des forces de sécurité de l'État. Le Comité est particulièrement préoccupé des plaintes pour mauvais traitements contre des immigrés, notamment des abus sexuels et des viols, apparemment fondés sur le racisme ou la xénophobie et recommande à l'Espagne de continuer de prendre des mesures pour éviter les incidents racistes et xénophobes.
Le Comité est vivement préoccupé par le maintien au secret pendant une période pouvant aller jusqu'à cinq jours pour certains délits graves. Il invite donc l'Espagne à envisager des mesures de précaution, notamment en procédant à des enregistrements vidéo lors des interrogatoires et de procéder à un examen médical à la fois par un médecin légiste et par un médecin ayant la confiance du détenu. Le Comité exprime sa préoccupation s'agissant de la durée excessive des enquêtes judiciaires concernant les plaintes pour torture et rappelle à l'Espagne son obligation de mener immédiatement des enquêtes impartiales afin de juger les auteurs présumés. Le Comité a aussi exprimé sa préoccupation s'agissant de cas de mauvais traitement lors d'expulsions, notamment de mineurs non accompagnés, ainsi que des conditions difficiles de détention de certaines catégories de prisonniers.
En ce qui concerne l'Égypte, le Comité a noté avec satisfaction la promulgation d'une loi abolissant la flagellation en tant que sanction disciplinaire applicable aux détenus et la réglementation de la procédure à suivre pour les inspections inopinées, que le parquet à l'obligation d'effectuer dans les lieux de détention. Il a également accueilli avec satisfaction les décisions adoptées par les tribunaux égyptiens visant à considérer comme non recevables en tant que preuves les témoignages obtenus sous la contrainte, ainsi que les efforts déployés par pour accorder une plus large place à la formation aux droits de l'homme des responsables de l'application de la loi et des agents de la fonction publique. Il a aussi salué les mesures prises par l'Égypte pour mettre sur pied une commission nationale des droits de l'homme. Le Comité a souligné qu'il n'ignore pas les difficultés que rencontre l'Égypte dans sa lutte contre le terrorisme, mais rappelle qu'aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, ne peut être invoquée pour justifier la torture.
Le Comité a recommandé à l'Égypte de reconsidérer le maintien de l'état d'urgence en vigueur depuis 1981 et d'instaurer un recours contre les décisions des tribunaux militaires dans les affaires de terrorisme. Le Comité s'est déclaré préoccupé par les nombreuses plaintes reçues concernant la persistance du phénomène de la torture et des mauvais traitements infligés à des détenus, notamment dans les locaux administratifs placés sous le contrôle des Services de renseignements de la Sécurité d'État (SSI), dont la perpétration serait encouragée par l'absence de toute inspection obligatoire de ces locaux . Il a recommandé à l'Égypte de supprimer toute forme de détention administrative et d'abolir la détention au secret. Le Comité est en outre préoccupé des nombreuses informations concernant les abus dont seraient victimes les mineurs en détention et les plaintes reçues concernant les mauvais traitements infligés à des hommes en raison de leurs penchants homosexuels réels ou présumés. Le Comité est préoccupé des plaintes relatives à des expulsions forcées et à la destruction de logements de façon violente par les autorités sans toutes les garanties juridiques appropriées. Il a recommandé l'application de règles précises pour accorder pleine réparation aux victimes de mauvais traitements et torture, sans différence injustifiée entre les indemnisations accordées. Le Comité a enfin recommandé à l'Égypte d'autoriser la visite sur son territoire du Rapporteur spécial sur la question de la torture.
S'agissant de l'Estonie, le Comité a salué la création d'un poste de Chancelier juridique qui joue aussi un rôle de médiateur; l'abolition de la peine de mort en 1998; l'entrée en vigueur d'un nouveau code pénal qui définit la torture comme un crime et améliore les possibilités de réinsertion des détenus; l'amélioration des conditions de détention et le libre accès aux cellules par le Chancelier juridique et le bureau de protection de la santé.
Le Comité a noté que des cas isolés de mauvais traitements par des agents de l'État persistent dans des établissements de détention de la police et a recommandé l'élaboration d'un Code de bonne conduite à l'intention des fonctionnaires de police, d'investigation et de tout autre personnel ayant la garde de détenus, et d'assurer une formation poussée du personnel responsable des centres de détention et psychiatriques, allant de pair avec une surveillance étroite de la violence entre détenus. Le Comité est en outre préoccupé de la détention dans des centres d'expulsion, pour des périodes parfois très longues, d'immigrés clandestins et de demandeurs d'asile déboutés, et a recommandé d'introduire des délais maximums de détention. Il est aussi préoccupé de la sur-représentation des ressortissants russes et apatrides dans la population carcérale et a recommandé à l'Estonie de fournir un rapport sur cette question. Enfin, le Comité a recommandé à l'Estonie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations sur les mesures visant à assurer l'impartialité et objectivité des enquêtes sur des plaintes contre mauvais traitement ainsi que des données statistiques concernant les plaintes de torture et de mauvais traitement qui sont le fait d'agents de l'État et les résultats des mesures disciplinaires prononcées dans ces cas.
En ce qui concerne Chypre, le Comité a noté avec satisfaction qu'il n'y a pas de cas rapportés d'actes de torture sur des prisonniers. Il a accueilli avec satisfaction les développements législatifs, administratifs et institutionnels qui ont eu lieu depuis la présentation du dernier rapport, notamment la ratification de la loi instituant la torture comme délit pénal et la disposition relative à la présomption de mauvais traitement s'il est établi par un examen médical que la personne détenue porte des blessures qui n'étaient pas présentes au moment de l'arrestation. Le Comité a également salué l'adoption par le Parlement de la loi sur la protection des témoins qui garantit l'anonymat ainsi que la loi sur la prévention de la violence domestique; l'entrée en vigueur en 2000 d'une loi sur l'élimination de la traite des personnes et de l'exploitation sexuelle des enfants; l'abolition de la peine de mort; la loi sur les étrangers et l'immigration qui offre plus de protection aux demandeurs du statut de réfugié. Le Comité a noté avec satisfaction la promulgation d'une loi garantissait l'indemnisation adéquate des victimes ainsi que la décision du Conseil des ministres d'autoriser le Procureur général à nommer des enquêteurs dans les cas d'allégations de comportements criminels de la part de la police.
Le Comité a noté que, malgré une tendance généralement positive en ce qui concerne le traitement des personnes détenues par la police, il y a encore des cas de mauvais traitement qui exigent des autorités de rester vigilantes. Le Comité a félicité Chypre des efforts accomplis pour assurer l'application effective de la Convention et l'encourage à les poursuivre.
Le Comité a félicité le Venezuela pour l'entrée en vigueur, le 30 décembre 1999, de la nouvelle Constitution, jugeant positivement notamment le fait qu'elle impose à l'État l'obligation de procéder à des enquêtes et punir les violations des droits de l'homme. Le Comité s'est félicité que la nouvelle Constitution impose à l'État de procéder à une indemnisation totale des victimes de violation des droits de l'homme et d'accorder aux victimes de mauvais traitements ou de torture, pratiqués ou tolérés par les agents de l'État, le droit à une réhabilitation; qu'elle garantit aux personnes en garde à vue lors des procédures d'arrestation, un jugement préalable de la cour visant à les présenter devant un tribunal dans les 48 heures; qu'elle reconnaît des mesures de protection aux détenus, tel le droit à un avocat dès le premier jour de la garde à vue et l'interdiction d'obtenir des aveux sous la torture. Il a salué le fait que la Constitution prévoit que les extraditions doivent être accordées dans les cas de personnes accusées de violation des droits de l'homme. Le Comité attache une importance particulière à la création du bureau de l'Ombudsman en tant qu'organe indépendant responsable de la promotion et de la surveillance de l'application des droits de l'homme. Le Comité a noté avec satisfaction les nouvelles mesures législatives visant à mieux garantir la protection des droits de l'homme, telles les lois organiques sur l'état d'exception, sur les réfugiés et sur les demandeurs d'asile.
Le Comité a exprimé sa préoccupation devant les nombreuses informations faisant état de torture et de mauvais traitement, d'abus de pouvoir et d'actes arbitraires perpétrés par les membres des forces de sécurité de l'État; ainsi que les informations sur des abus de pouvoir et l'utilisation abusive de la force comme moyen de contrôle, notamment lors de manifestations; et d'informations concernant des menaces contre des personnes s'étant plaintes de mauvais traitements de la part de fonctionnaires de l'État; de l'absence d'enquêtes promptes et impartiales sur les cas de mauvais traitements et de procédures pour d'indemnisation de victimes d'actes de torture; et de la persistance de violence interne dans les prisons. Il s'est dit préoccupé d'informations sur des persécutions et menaces contre des minorités sexuelles et des activistes transsexuels, en particulier à Carabobo. Le Comité a recommandé au Venezuela l'adoption de mesures pour mener des enquêtes immédiates et impartiales, ainsi que l'adoption de mesures visant à indemniser les victimes de la torture. Il lui a recommandé de poursuivre ses activités de promotion et de défense des droits de l'homme et d'améliorer les conditions de détention dans les prisons.



* *** *

VOIR CETTE PAGE EN :