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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA ZAMBIE

08 mai 2008



Comité contre la torture
MATIN
8 mai 2008


Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du deuxième rapport périodique de la Zambie sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, Mme Gertrude Imbwae, secrétaire permanente au Ministère de la justice de la Zambie, a fait valoir que la rédaction du rapport présenté par la Zambie est validée dans le cadre d'un séminaire réunissant des représentants de diverses institutions et associations pertinentes. Elle a souligné que ce processus participatif a également prévalu lors de la préparation de la Zambie à l'examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme auquel se soumet le pays demain, 9 mai, et qu'il est à la base de la Conférence constitutionnelle nationale, chargée de superviser la réforme de la Constitution.

La délégation zambienne était également composée de membres de la Mission permanente de Zambie auprès des Nations Unies à Genève ainsi que de représentants des Ministères de l'éducation, de la justice, des prisons, de la santé, de l'aménagement du territoire, des communautés et des sports et de la jeunesse, de même que de fonctionnaires du Département de l'immigration, du Service de police de Zambie, de l'Autorité des plaintes contre la police et de la Commission nationale des droits de l'homme, notamment.

Le Comité, tout en exprimant à la Zambie son appréciation pour la franchise dont elle faisait preuve pour présenter la situation dans le pays, a émis de nombreuses recommandations visant à palier les lacunes observées. Les experts ont en particulier instamment invité la Zambie à relever l'âge minimum de la responsabilité pénale fixée à 8 ans par la législation zambienne. Ils ont en outre mis l'accent sur les retards importants dans le traitement des plaintes dont fait état le rapport de l'État partie lui-même et se sont inquiétés des conditions déplorables prévalant dans les centres de détention. Les problèmes de conformité entre le droit coutumier et le droit écrit, de violence généralisée à l'égard des femmes et, de manière générale, du manque de moyens alloués aux mécanismes de surveillance, ont également été soulevés.


Demain après-midi, le Comité entendra les réponses de la délégation zambienne aux questions qui lui ont été posées ce matin par les experts. Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de l'ex République yougoslave de Macédoine aux questions posées hier par les membres du Comité.


Présentation du rapport de la Zambie

MME GERTRUDE IMBWAE, secrétaire permanente au Ministère de la justice de la Zambie, a indiqué que la responsabilité du rapport présenté par la Zambie est assumée par le Ministère de la justice et a été validée dans le cadre d'un séminaire réunissant des représentants de diverses institutions et associations pertinentes. Elle a souligné que ce processus participatif a également prévalu lors de la préparation pour l'examen périodique universel u Conseil des droits de l'homme auquel se soumettra la Zambie demain, 9 mai. Ce processus est également à la base de la Conférence constitutionnelle nationale, chargée de superviser la réforme de la Constitution zambienne. Ce processus, a-t-elle ajouté, est une occasion d'associer tous les citoyens de la Zambie à la définition, à la protection et à la sauvegarde de leurs droits.

La Zambie, a poursuivi la représentante, doit relever un grand nombre de défis, ce qui explique les difficultés rencontrées par l'État partie pour garantir la protection effective des droits prévus par la Convention. Elle a assuré le Comité que malgré les difficultés, la Zambie reste pleinement engagée à assurer la promotion et la protection des droits fondamentaux, comme le démontre le chapitre consacré à la gouvernance du Cinquième Plan national de développement.

Le deuxième rapport périodique de la Zambie (CAT/C/ZMB/2) indique qu'il n'y a pas eu de changement par rapport aux mesures législatives dont il est fait état dans son rapport initial. Il relève qu'en Zambie, les actes de torture ne constituent pas encore des infractions au regard du Code pénal. Toutefois, certains actes assimilables à la torture tels que les atteintes à l'intégrité physique et les infractions énoncées dans plusieurs articles du Code pénal sont punissables. En outre, l'adoption de la loi no 16 de 2004 portant modification de la loi sur les prisons vise, notamment, à abroger les dispositions autorisant les châtiments corporels. Ces derniers sont désormais interdits dans toutes les prisons de Zambie. La Zambie a continué à dispenser aux agents de la force publique une formation dans le domaine des droits de l'homme, notamment dans les centres de formation de la police et du personnel de l'administration pénitentiaire. Des programmes de formation dans le domaine des droits de l'homme ont aussi été mis en place par une organisation non gouvernementale, l'Institut des droits de l'homme, de la propriété intellectuelle et du développement (HURID), à l'intention des forces de police. Le rapport reconnaît toutefois un manque de capacités institutionnelles résultant des difficultés économiques auxquelles doit faire face le pays.

Le rapport reconnaît par ailleurs que la loi sur l'immigration et l'expulsion a été conçue pour lutter contre l'entrée d'immigrants indésirables et faciliter leur expulsion, et ne prend guère en considération les différents droits de l'homme. Il admet aussi que les tribunaux du pays continuent de prendre en considération les preuves indirectes. Dans la pratique, toutefois, les aveux ne sont pris en considération que si les fonctionnaires de police ont pu recueillir d'autres preuves indépendantes. De ce fait, il est peu probable que des aveux soient extorqués aux suspects. S'agissant des mesures prises contre des personnes accusées d'actes de torture et autres traitements inhumains ou dégradants, le rapport indique qu'une commission d'enquête a été constituée en 1998 et que trois responsables de la police de différents grades ont été licenciés et 22 fonctionnaires ont fait l'objet d'une rétrogradation, d'une confiscation de salaire ou d'une réaffectation dans un bureau de moindre importance.

L'État partie reconnaît, par ailleurs, que la plupart des personnes placées sous sa juridiction sont toujours très mal informées de leurs droits et ne sont donc pas en mesure de porter plainte devant les autorités compétentes ou de saisir la justice. Il présente en outre un récapitulatif des plaintes reçues par la Commission des droits de l'homme s'agissant de violations des droits de l'homme commises par des agents de la force publique. La Zambie explique que les retards constatés dans l'ouverture d'enquêtes sur les allégations de torture et d'actions judiciaires contre des suspects ne sont pas intentionnels. Ils s'expliquent par d'importantes difficultés financières et techniques auxquelles l'État partie doit faire face. Certaines de ces difficultés tiennent au fait que seul un petit nombre de fonctionnaires ont reçu une formation dans le domaine des droits de l'homme et bénéficient d'une expérience dans la conduite d'une enquête.

Examen du rapport

M. FERNANDO MARIÑO MENÉNDEZ, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Zambie, a relevé que le pays se trouve encore dans une situation de sous-développement et que les difficultés auxquels il est confronté pour mettre en œuvre ses obligations sont renforcées par la coexistence des innombrables groupes ethniques qui forment sa population suite à la décolonisation, ainsi que par l'afflux d'immigrants de pays voisins que la Zambie a généreusement accueilli par le passé.

Soulignant le fait que la Convention n'a pas été reprise et développée dans la législation pénale, M. Mariño Menéndes a encore noté que la réforme pénale dont il est question dans le rapport n'a pas l'air de progresser. Ce n'est qu'en spécifiant un délit de torture en tant que tel que l'État peut assumer pleinement ses obligations en regard de la Convention, a-t-il souligné, demandant à la Zambie s'il est arrivé qu'un tribunal ait admis une plainte fondée sur une disposition de la Convention.

En ce qui concerne les garanties qui doivent être mises en œuvre par l'État partie pour prévenir la torture, l'expert a souhaité savoir qui détient le pouvoir d'arrêter un suspect présumé. Est-ce que ce sont les forces de police? Doit-il y avoir un mandat d'arrestation ou n'est-ce pas le cas?

Le rapporteur a aussi voulu connaître la durée maximale de détention avant jugement, indiquant qu'il semble qu'il y a dans la pratique du pays des cas de détention préventive se prolongeant jusqu'à quatre ans. Existe-t-il à cet égard des normes du code de procédure pénale ou un code de bonnes pratiques, s'est demandé M. Mariño Menéndes. Qui contrôle ce que fait la police dans le cas de personnes dont la détention se prolonge? Il a par ailleurs voulu savoir si l'autorité chargée des plaintes reçues pour des actes commis par la police fait un travail réellement efficace? Il a souhaité obtenir des précisions s'agissant de la différence et des répartitions des tâches respectives de l'Autorité des plaintes contre le système judiciaire (Judicial Complaints' Authority) et de l'Autorité des plaintes contre la police (Police Complaints' Authority), de même que du rôle joué par le ministère public à l'égard des ces deux institutions.

L'expert a souligné l'importance du maintien d'un registre des personnes détenues, qui fait défaut en Zambie. Qui s'occupe de l'inspection des prisons, a-t-il encore demandé? Il a par ailleurs estimé qu'il fallait améliorer le financement de la Commission nationale des droits de l'homme.

Des explications ont encore été demandées à la Zambie s'agissant de la législation carcérale qui prévoit que la privation de nourriture peut être utilisée comme une punition, de même que s'agissant de l'âge de la responsabilité pénale, actuellement fixé à huit ans.

L'expert a aussi souligné l'ambiguïté des politiques de la Zambie s'agissant de la peine de mort. Bien qu'un moratoire ait été décrété, plus de 200 personnes seraient en attente d'exécution dont une au moins depuis plus de 27 ans.

Le droit à un avocat semble être prévu par la loi sur l'aide judiciaire (Legal Aid Act), a noté l'expert. Les personnes arrêtées ont-elle la possibilité d'accéder à des soins médicaux et d'avertir leur famille?

Le droit zambien admet le droit coutumier et ses pratiques tout en le subordonnant au droit étatique, a observé le rapporteur, quelle voie de recours existe-t-il à l'égard des décisions prises dans le cadre des tribunaux coutumiers? Comment l'État partie protège-t-il les individus s'agissant de problèmes relatifs à la structure familiale et en particulier à la violence au sein des foyers.

Se référant à l'intention exprimée par le Gouvernement zambien de renforcer les contrôles d'immigration, l'expert s'est inquiété du respect, dans ce contexte, du principe de non-refoulement. Notant qu'il est prévu d'octroyer des permis de séjour aux immigrés clandestins, il a souhaité savoir comment ces permis seront délivrés. L'État zambien a-t-il une juridiction claire, s'agissant des droits des étrangers?

Il semble qu'il y ait une sanction pénale de l'homosexualité, a relevé M. Mariño Menéndes; comment la Zambie punit-elle l'homosexualité?

Le rapporteur a, enfin, demandé si l'État partie envisage de ratifier un certain nombre d'instruments auxquels il n'est pas encore partie, notamment le Protocole facultatif pour la prévention de la torture, la Convention contre le génocide et le Statut de la Cour pénale internationale. Il a aussi recommandé que la Zambie accepte l'article 21 et 22 qui prévoient la possibilité pour le Comité d'examiner des plaintes, insistant sur l'importance de ces mécanismes de contrôle.

M. ALEXANDRE KOVALEV, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Zambie, s'est penché sur les obligations de l'État partie en matière de formation. Quelles sont les instructions et dispositions prises à l'égard du personnel de police s'agissant, notamment, des méthodes d'interrogatoire, a-t-il souhaité savoir. La Zambie peut-elle mentionner des mesures concrètes s'agissant de la formation du personnel médical en milieu carcéral? Les mauvais traitements sont-ils clairement définis et interdits? Il a aussi demandé à la Zambie de s'expliquer s'agissant d'allégations de mauvais traitements par la police lors d'interrogatoires. Il a aussi constaté que la police zambienne ne fonde pas ses décisions sur des preuves et ne collabore pas avec des autorités judiciaires indépendantes.

Le corapporteur a, en outre, fait état d'une surpopulation carcérale aiguë, conduisant notamment à la propagation de maladies, à l'insuffisance alimentaire et à la malnutrition, et à des conditions sanitaires déplorables. Ces conditions de détention peuvent, selon lui, être assimilées à de la torture. Une Commission d'inspection des prisons a constaté qu'en 2006, il y avait 14 gardiens pour plus de 400 prisonniers, a relevé M. Kovalev, qui a souligné que de telles conditions favorisent un comportement brutal à l'égard des prisonniers. Tout en reconnaissant que des améliorations ont été apportée aux infrastructures de certaines prisons, il a souligné les lacunes prévalant quant aux conditions de détention des femmes et des mineurs.

Que prévoit de faire l'État zambien pour prévenir les mauvais traitements, étant donné que la Zambie a admis qu'il était nécessaire d'interdire les châtiments corporels, a demandé le corapporteur. De quelle manière les victimes peuvent-elle déposer plainte. Un dédommagement des victimes est-il prévu, a-t-il encore souhaité savoir.

Une experte, saluant par ailleurs la franchise de la Zambie pour présenter la situation dans le pays, a attiré l'attention sur les dérogations aux principes de la Convention prévues par la législation de l'État partie. Elle a aussi relevé la réserve émise par la Zambie à l'égard de la Convention relative au statut des réfugiés. S'agissant de la hiérarchie des normes dans l'ordre juridique zambien, l'experte a relevé un hiatus entre le droit écrit et le droit coutumier et souligné la nécessité d'assurer que le droit écrit ait la primauté. Qu'en est-t-il de la diligence des autorités à mener des enquêtes concernant en particulier les plaintes qui pourraient être déposées pour mauvais traitements, a aussi demandé l'experte. Elle a enfin souligné qu'il y a un problème de définition de l'enfant; celle-ci diffère selon qu'elle soit abordée par la Constitution, le droit coutumier ou l'application de la loi pénale.

Une autre experte a évoqué le problème des enfants des rues et souhaité connaître les stratégies prévues par l'institution nationale en charge de la protection des enfants pour y remédier.

Un expert a relevé la contradiction existant entre le fait que les châtiments corporels sont interdits mais néanmoins prévus au chapitre des peines.

Quelles dispositions l'État partie prévoit-il de prendre pour lutter contre la violence généralisée contre les femmes, a demandé une experte. Comment l'État partie s'est-il efforcé de dissiper la croyance selon laquelle le fait d'avoir des relations sexuelles avec une vierge peut guérir du sida? Un rapport de Human Rights Watch fait état des problèmes rencontrés par les femmes atteintes de sida pour bénéficier d'un traitement, a-t-elle dit, quelles explications la Zambie peut-elle apporter à ce sujet?

Évoquant les problèmes relatifs aux retards dans le traitement des plaintes, aux conditions de détention et aux prérogatives des policiers aux dépens de la justice, un expert a recommandé à l'État partie de déployer d'avantages d'efforts en vue de renforcer la prévention. Compte tenu du manque de moyens et de personnel qualifié, a-t-il dit, la Zambie devrait insister sur les mécanismes de prévention en renforçant, par exemple, le rôle des avocats qui pourraient intervenir dès l'enquête préliminaire.

Y a-t-il une législation qui criminalise la violence sexuelle, a encore demandé une experte, préconisant la mise en œuvre de mesures préventives pour répondre à ce problème.

Un expert a estimé qu'il serait injuste de dire que la Zambie approuve l'impunité puisqu'il n'y a pas de définition claire de la torture. Cela découle une série de problèmes, notamment le fait que les sanctions imposées aux tortionnaires sont plus légères que celles imposées à d'autres délits. L'expert, tout en reconnaissant que les efforts attendus par le Comité doivent tenir compte des ressources du pays, a estimé que des normes minimales s'agissant de la situation dans les prisons doivent être appliquées par tous les pays, y compris les pays en développement.

Le Président du Comité, M. Claudio Grossman, a finalement insisté sur le fait que la loi être claire et doit être une source d'inspiration pour tous les acteurs du pays. Il est donc important que la torture soit bien définie dans la Constitution, a-t-il recommandé. L'expert a aussi recommandé une récolte de données plus systématique, soulignant l'importance de ces éléments pour le Comité.

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