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LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DU HONDURAS
06 mai 2009
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Comité contre la torture
6 mai 2009
Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du rapport initial du Honduras sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Présentant le rapport hondurien, M. Hugo Adalberto Suazo Ortiz, Sous-Secrétaire à la sécurité et l'investigation au Secrétariat d'État chargé de la sécurité, a fait valoir que ce rapport initial avait été élaboré dans le cadre d'un processus participatif. Il a ensuite attiré l'attention sur la ratification, en 2006, du Protocole facultatif sur la prévention de la torture et la promulgation récente de la loi sur le mécanisme national de prévention de la torture. Par ailleurs, grâce au nouveau code de procédure pénale, des juges d'application des peines sont chargés de veiller à la bonne application des normes visant le système pénitentiaire. Le chef de la délégation hondurienne a également indiqué que la nouvelle loi sur la police nationale renforce le contrôle interne de la police par le biais d'un organe qui dispose d'une indépendance technique et budgétaire. Il a, enfin, informé le Comité de l'entrée en vigueur de nouvelles ordonnances sanctionnant sévèrement les policiers qui se rendraient coupables d'actes de tortures.
L'importante délégation du Honduras était composée de représentants des Ministères de la justice, de la défense, des affaires extérieures, et des enfants et la famille, ainsi que de la Commission nationale des droits de l'homme et du système pénitentiaire hondurien.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Honduras, M. Claudio Grossman, a pris acte avec satisfaction de la ratification par le Honduras du Protocole facultatif à la Convention contre la torture, qui prévoit des mécanismes de prévention de la torture. Les visites inopinées du Ministère public dans les centres pénitentiaires constituent une avancée tout à fait louable, a notamment estimé le rapporteur. Notant avec appréciation que le Honduras reconnaît la persistance de l'impunité, le rapporteur a souhaité connaître les mesures que le Honduras entendait prendre pour lutter contre ce phénomène. Le Honduras fait état dans son rapport d'une forte volonté de changement et d'une grande indépendance des organisations non gouvernementales, a relevé la corapporteuse, Mme Nora Sveaass, attirant l'attention sur de nombreuses informations parvenues au Comité qui mentionnent des violences commises contre les défenseurs des droits de l'homme. S'agissant de la surpopulation carcérale et de ses conséquences, Mme Sveaass a fait état de violences entre prisonniers, qui incluraient des viols et des meurtres. Le Comité a reçu des informations établissant que sept personnes sur dix seraient victimes de violence en prison, a affirmé l'experte.
D'autres experts ont pris la parole sur des sujets tels que l'autonomie des enquêtes pratiquées par les médecins légistes, la traite des enfants et des femmes, la corruption au sein de la police et la persistance d'actes de torture de même que de l'impunité. Les experts ont également demandé des explications à la délégation hondurienne s'agissant de nombreux cas de disparitions non élucidés, d'allégations d'assassinats de journalistes et de militants des droits de l'homme et d'exécutions extrajudiciaires d'enfants des rues. Un expert a relevé à cet égard que le Président du Honduras aurait affirmé que le pays était en proie à des menaces contre sa démocratie et sa stabilité du fait des maras, ces bandes de délinquants juvéniles. Le Honduras a le niveau de violence le plus élevé d'Amérique latine, a relevé cet expert. Il a aussi été relevé que 7235 Honduriens ont été assassinés et il y a lieu de penser que ces chiffres sont bien inférieurs à la réalité. Au vu de ces chiffres, il semble que la violence sociale au Honduras mérite d'être particulièrement étudiée, a-t-il été dit.
Le Comité entendra demain matin les réponses du Honduras aux questions des experts. Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la délégation israélienne aux questions posées hier par les experts.
Présentation du rapport du Honduras
M. HUGO ADALBERTO SUAZO ORTIZ, Sous-secrétaire à la sécurité et l'investigation du Secrétariat d'État chargé de la sécurité, a indiqué que le présent rapport avait été élaboré dans le cadre d'un processus participatif et présentait les mesures législatives, administratives et judiciaires adoptées par le Honduras pour se conformer à ses obligations en vertu de la Convention.
Le chef de la délégation a notamment attiré l'attention sur la ratification, en 2006, du Protocole facultatif sur la prévention de la torture et la promulgation de la loi sur le mécanisme national contre la torture, approuvée en 2008 et qui établit un mécanisme de prévention indépendant de la torture. Par ailleurs, grâce au nouveau code de procédure pénale, des juges d'application des peines sont chargés de veiller à la bonne application des normes visant le système pénitentiaire. M. Suazo Ortiz a encore indiqué que la nouvelle loi sur la police nationale renforce le contrôle interne de la police par le biais d'un organe qui dispose d'une indépendance administrative et budgétaire.
Deux nouveaux programmes de formation sur les droits des personnes détenues ont été élaborés, a ajouté M. Suazo Ortiz, et des campagnes sous forme d'affiches ont été mises en place pour informer les personnes détenues de leurs droits. En outre, le ministère public organise des visites inopinées dans les lieux de détention, par le biais du Centre de prévention de la torture. Des formations sur les droits de détenus ont aussi été organisées, en collaboration avec une organisation non gouvernementale, à l'intention des policiers et des défenseurs publics. Le chef de la délégation hondurienne a aussi fait état d'une campagne de sensibilisation de la population aux dispositions prévues par le Protocole facultatif. Il a, enfin, indiqué l'entrée en vigueur de nouvelles ordonnances sanctionnant sévèrement les policiers auteurs d'actes de tortures.
Le rapport initial du Honduras (CAT/C/HND/1) rappelle que le Honduras a signé la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en 1984 et l'a ratifiée en 1996. Il ajoute que le pays a créé des institutions ayant des objectifs et des attributions divers pour assurer la promotion et la défense des droits de l'homme. Des groupes, fondations, chaires universitaires, commissions régionales et institutions officielles ont également été institués. En outre, des organisations non gouvernementales travaillent dans le pays en jouissant d'une totale liberté d'action, du respect et de la considération de l'État et de ses autorités. Dans le domaine législatif, des changements notables ont permis d'accroître la protection des droits de l'homme, avec la création d'institutions comme le ministère public et le Commissaire national aux droits de l'homme, avec la séparation de la police nationale des forces armées et son rattachement au Secrétariat d'État à la sécurité. En outre, un nouveau Code de procédure pénale, conçu de façon à garantir les droits de la victime comme ceux de l'inculpé, est entré en application en 2002. Le rapport indique également que les instruments internationaux ratifiés par le Honduras font partie du droit interne et en cas de conflit entre la disposition de la loi nationale et la norme de l'instrument international, c'est cette dernière qui l'emporte. La Constitution hondurienne contient des normes qui constituent des mesures effectives pour empêcher la pratique de la torture. Elle dispose ainsi en son article 88 qu'aucune violence ou contrainte d'aucune sorte ne sera exercée pour obliger quelqu'un à faire une déclaration. Pour éviter que les forces de police n'essaient d'obtenir des aveux d'une personne privée de liberté, seule la déclaration faite devant le juge compétent a valeur de preuve.
Au chapitre des institutions ayant compétence et juridiction pour les questions visées dans la Convention, le rapport mentionne la fonction de Commissaire national aux droits de l'homme (médiateur). Celui-ci est habilité à s'adresser directement à tout agent de l'administration publique, aux organismes ou institutions de tous ordres et à leurs membres, lesquels sont tenus de répondre aux demandes qui leur sont adressées. Dans l'exercice de ses fonctions, le Commissaire national aux droits de l'homme et ses délégations ont librement accès à tous les bâtiments civils et militaires et à tous les centres de détention, de réclusion ou de placement, et cet accès ne peut en aucun cas lui être refusé.
La Constitution reconnaît par ailleurs aux tribunaux militaires la compétence spéciale pour juger les délits et fautes commis par les militaires, et dispose qu'en aucun cas la compétence des juridictions militaires ne peut être étendue à des individus qui ne sont pas en service actif dans les forces armées. En ce qui concerne l'existence de faits de torture dans les forces armées, le rapport rappelle que depuis 1994, le service militaire obligatoire n'existe plus et a été remplacé par un service militaire volontaire, éducatif et humaniste qui a conservé le professionnalisme de la carrière militaire, et s'exécute dans le strict respect des droits de l'homme. Depuis cette date, il y a eu quelques cas d'usage excessif de la force par un supérieur à l'égard d'un subordonné, indique le rapport; ces affaires ont immédiatement été renvoyées aux tribunaux militaires de première instance. D'après les statistiques pour la période allant de 2003 au mois de juillet 2007, communiquées par l'administration judiciaire, sept affaires de délit de torture ont été enregistrées, dont quatre ont abouti à un non-lieu. Sur les trois affaires restantes, deux ont abouti à une condamnation et une est toujours en cours.
Examen du rapport
Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Honduras, M. CLAUDIO GROSSMAN, Président du Comité, a pris acte avec satisfaction de la ratification par le Honduras du Protocole facultatif à la Convention contre la torture (qui prévoit des mécanismes de prévention de la torture).
Se référant à l'information fournie par la délégation sur l'introduction de juges d'application des peines, M. Grossman a souhaité savoir s'il est prévu que ces juges soient formés et aient une connaissance détaillée des dispositions du Protocole facultatif. Comment se déroulera la formation en matière des droits de l'homme qu'il est prévu de dispenser aux fonctionnaires de l'État, et quels fonctionnaires vont en bénéficier, a encore voulu savoir le rapporteur. La société civile est-elle appelée à participer? Qu'en est-il des universités?
Les visites inopinées du Ministère public dans les centres pénitentiaires constituent une avancée tout à fait louable, a déclaré l'expert en demandant à la délégation des précisions sur la fréquence des visites, les recommandations qui en découlent, de même que le suivi de ces recommandations. Combien de plaintes ont été déposées pour des actes de violence commis à l'encontre de détenus, a encore demandé M. Grossman.
M. Grossman, notant que la sanction pénale est généralement prononcée en fonction de la gravité du délit, a demandé comment le droit interne du Honduras évalue la souffrance des victimes.
S'agissant de la détention préventive, l'expert a souligné qu'il convenait de ne pas oublier la présomption d'innocence, mentionnant à cet égard des chiffres montrant que deux tiers de la population carcérale sont en détention préventive. Comment l'État analyse-t-il cet état de fait? La détention préventive semble par ailleurs toucher les couches les plus pauvres de la société, a remarqué M. Grossman. Une aide juridique gratuite est-elle prévue pour les indigents ?
L'expert a relevé une contradiction entre l'interdiction de la détention au secret formulée par la loi et son application. La détention judiciaire en prévision d'une instruction donne-t-elle les moyens au prévenu d'avoir accès à un avocat, a demandé l'expert.
M. Grossman, notant avec appréciation que l'État partie reconnaît la prévalence de l'impunité dans le pays, a demandé quelles sont les mesures à court terme que le Honduras envisage de prendre pour lutter contre ce problème. Il a demandé si le pays envisageait d'adopter une loi visant à protéger ceux qui portent plainte. L'expert a évoqué également le cas de 180 cas de disparitions non élucidées, indiquant que rien n'avait été entrepris à ce jour, ni en termes d'identification des responsables, ni en termes d'indemnisation et de réparation des victimes.
S'agissant des procédures d'enquête, il a été demandé au Honduras qui était chargé de mener les enquêtes en cas de plainte pour acte de torture, et si la police pouvait enquêter sur les activités commises par des fonctionnaires d'État.
Se référant à l'invocation de l'état d'exception, M. Grossman a demandé s'il était possible dans cette situation d'intenter une procédure en habeas corpus et si les voies de recours étaient ouvertes. Le Président a aussi voulu savoir si le respect de l'ordre d'un supérieur pouvait être invoqué pour atténuer la responsabilité pénale, ou même la lever.
Le rapporteur a souhaité connaître l'autorité était chargée de statuer en matière d'expulsion. Il a aussi voulu savoir, s'agissant des résidents permanents, si le fait d'avoir commis un délit pouvait entraîner leur expulsion.
M. Grossman a aussi été demandé au Honduras s'il avait l'intention d'inscrire dans la loi l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité.
L'expert a encore soulevé le problème de la violence contre les bandes de jeunes délinquants - maras -, faisant état d'allégations d'exécutions extrajudiciaires commises contre ces jeunes.
Le Comité, a enfin indiqué son Président, a eu connaissance de plaintes déposées pour des fouilles intimes de détenues pratiqués par un personnel non autorisé. Si cela est avéré, cela s'assimile à un traitement inhumain, cruel ou dégradant, a-t-il souligné.
MME NORA SVEAASS, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Honduras, a souhaité savoir quelle était la situation s'agissant de la mise en œuvre des mécanismes de prévention au Honduras. Ce pays fait état d'une forte volonté de changement et d'une grande indépendance des organisations non gouvernementales, a rappelé Mme Sveaass, mais de nombreuses allégations mentionnent des violences commises contre les défenseurs des droits de l'homme. Elle a cité à cet égard l'exemple de l'Association des familles de disparus dont les bureaux auraient fait l'objet d'inspections inacceptables et de membres de cette association ayant été contraints de quitter le pays en raison de menaces.
L'experte s'est aussi penchée sur la formation des fonctionnaires de l'État. Elle a relevé que l'écart entre la théorie et la pratique, en matière de droits de l'homme, peut être réduit par le biais d'une bonne formation. Elle a souhaité connaître, à cet égard, les effets de la formation dispensée aux fonctionnaires de l'État hondurien, et si cette formation avait fait l'objet d'une évaluation et d'un suivi. La formation porte-t-elle spécifiquement sur la torture et sur les moyens de déceler les signes de torture, a-t-elle demandé.
Revenant sur la situation prévalant dans le domaine pénitentiaire, la corapporteuse a demandé comment étaient appliquées les normes minimales de traitement des prisonniers. S'agissant de la surpopulation carcérale et de ses conséquences, Mme Sveaass a fait état de violences entre prisonniers, qui incluraient des viols et des meurtres. Quelles sont les mesures prises par le Honduras pour faire face à cette situation? Le Comité a reçu des informations établissant que sept personnes sur dix seraient victimes de violence en prison, a déclaré l'experte.
S'agissant des plaintes qui ont été reçues entre 2003 et 2006 et dont le Honduras fait état dans son rapport, l'experte a souhaité en savoir plus sur le profil des personnes condamnées et celui des victimes. Une chose est de savoir que des plaintes ont été reçues, une autre est de savoir ce qui a été fait en conséquence en matière d'enquête et de suivi, a-t-elle dit. Elle a insisté encore sur le recours, la réhabilitation et l'indemnisation des victimes de torture, demandant au Honduras de fournir des informations chiffrées sur ce plan.
La corapporteuse est revenue également sur le problème des disparitions dont font état les rapports de plusieurs organisations non gouvernementales et s'est dite alarmée par les informations qui y figurent. Comment l'État partie a-t-il réagi à la lecture de ces rapports. Elle a aussi mentionné des informations qui indiqueraient que des personnes travaillant dans le domaine du droit à la terre ont disparu après avoir été détenus par la police en 2007 et 2008.
Il semblerait aussi qu'il y ait beaucoup de cas de meurtres de mineurs, dont fait état notamment l'association Casa Alianza. Ces meurtres sont-ils le fait d'une volonté d'épuration sociale? Que fait concrètement l'État partie pour remédier à ces pratiques extrêmement graves, a demandé l'experte.
Mme Sveaass a aussi demandé à la délégation du Honduras de fournir des informations d'actualité sur la situation s'agissant de la discrimination contre les femmes.
D'autres experts ont pris la parole sur des sujets tels que l'autonomie des enquêtes pratiquées par les médecins légistes, la traite des enfants et des femmes, la corruption prévalant au sein de la police et la persistance d'actes de torture de même que de l'impunité. Les experts ont également demandé des explications à la délégation hondurienne s'agissant de l'invocation de la sécurité nationale et de l'ordre public pour procéder au renvoi d'un demandeur d'asile, des allégations de violences et de meurtres de journalistes et militants des droits de l'homme, d'exécutions extrajudiciaires d'enfants des rues.
Un expert a relevé que le Président du Honduras aurait affirmé que le pays est en proie à des menaces contre la démocratie et la stabilité du fait des maras, ces bandes de jeunes délinquants. Le Honduras a le niveau de violence le plus élevé d'Amérique latine, a-t-il encore dit, avec 47 meurtres pour 100 000 habitants. Il a aussi relevé que 7235 Honduriens auraient été assassinés avec violence et il y en a sans doute un millier de plus. Au vu de ces chiffres, il semble que la violence sociale mérite d'être particulièrement étudiée, a déclaré l'expert. Quelles sont les causes endogènes et exogènes de cette violence, mis à part les problèmes relatifs au trafic de drogue dont le Comité est conscient, a-t-il demandé? Il a par ailleurs mis en évidence le degré élevé de violences commises contre des femmes.
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