Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE L'EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE

07 Mai 2008



Comité contre la torture MATIN

7 mai 2008



Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du rapport périodique de l'ex-République yougoslave de Macédoine sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, M. Mahajlo Manevsky, Ministre macédonien de la justice, a relevé que les recommandations du Comité, de même que celles du Comité pour la prévention de la torture, ont contribué de manière précieuse à réformer les politiques de son pays s'agissant de la prévention et de l'élimination de la torture. Il a fait état des réformes qui ont été entreprises depuis la présentation du premier rapport, notamment dans les domaines de la justice, des procédures et des mesures de protection contre la traite des êtres humains. La stratégie visant la prévention de la violence domestique a été mise en œuvre, a en outre indiqué M. Manevsky.

La délégation macédonienne était également composée de collaborateurs et représentants des Ministères de la justice, des affaires étrangères, de l'intérieur et du travail et des affaires sociales.

Les membres du Comité ont posé de nombreuses questions s'agissant des mesures prises par l'ex-République yougoslave de Macédoine pour lutter contre les violences commises contre les enfants, en particulier les enfants en conflit avec la loi. Il a été demandé à la délégation si le Gouvernement considérait admissible qu'un enfant puisse être puni d'une peine allant jusqu'à cinq ans d'incarcération alors que des peines nettement plus légères étaient prévues pour les policiers trouvés coupables de mauvais traitements. D'autres questions ont notamment porté sur l'absence de surveillance exercée sur les moyens coercitifs que la police macédonienne est autorisée à employer, sur la traite d'êtres humains et les violences sexuelles subies par les femmes, sur les brutalités policières à l'égard des populations vulnérables, notamment des Roms. Le Comité a aussi demandé des explications s'agissant de l'affaire Khaled El Masri, ce citoyen allemand remis par les autorités macédoniennes aux services secrets américains et soumis à la torture pendant sa détention en Afghanistan.


Le Comité entendra demain, jeudi 8 mai, les réponses de la délégation de l'ex-République yougoslave de Macédoine aux questions posées ce matin. Cet après-midi, à partir de 15 heures, il entendra les réponses de la délégation de l'Indonésie qui avait présenté son rapport hier matin.


Présentation du rapport

M. MAHAJLO MANEVSKY, Ministre de la justice de l'ex-République yougoslave de Macédoine, a relevé que les recommandations du Comité, de même que celles du Comité européen pour la prévention de la torture, ont contribué de manière précieuse à réformer les politiques de son pays s'agissant de la prévention et de l'élimination de la torture.

M. Manevsky a fait état des réformes qui ont été entreprises depuis la présentation du rapport initial de son pays, notamment dans les domaines de la justice, des procédures et des mesures de protection contre la traite des êtres humains. Le Ministre a indiqué qu'entre 2004 et 2006, 40 personnes ont été mises en examen pour des actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, parmi lesquelles 18 ont été condamnées.

Une stratégie visant la prévention de la violence domestique a été mise en œuvre, a en outre indiqué M. Manevsky, citant diverses mesures prises par le Gouvernement, notamment la mise en place d'un numéro vert, l'ouverture de centres d'accueils pour les victimes et une intense collaboration avec les organisations non gouvernementales actives dans ce domaine.

Le Ministre macédonien a aussi fait état de l'adoption d'une nouvelle loi sur les tribunaux pour enfants. Des mesures ont été mises en œuvre en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF). En outre, la notion d'enfants victimes a été introduite dans la loi.

S'agissant de la formation des agents publics, l'ex-République yougoslave de Macédoine a organisé des séminaires comportant une sensibilisation aux droits de l'homme à l'intention des juges. Le Gouvernement s'est aussi engagé à modifier le système pénitentiaire afin de répondre aux exigences des normes européennes. Le Ministre a indiqué que 14 millions d'euros ont ainsi été alloués pour la construction et la réhabilitation des prisons.

M. Manevsky a informé les membres du Comité qu'au début de 2008, le Code pénal a été amendé pour renforcer la protection des personnes contre le trafic d'êtres humains, le terrorisme, la pornographie enfantine, de même que l'exploitation sexuelle des enfants, qui a fait l'objet d'une disposition distincte.

La priorité de l'ex-République yougoslave de Macédoine pour les années à venir, a ajouté M. Manevsky, sera de mettre en application les nouvelles loi qui ont été élaborées afin de garantir un système judiciaire indépendant et un accès impartial à la justice pour tous les citoyens.

En fin de séance, le Ministre de la justice de la République de Macédoine a confirmé que la Constitution de son pays interdisait toute forme de torture et de traitement inhumain. Il a indiqué qu'une partie des réponses aux questions posées par les membres du Comité étaient liées aux derniers développements intervenus en Macédoine et figuraient dans le rapport de la Macédoine. D'autres précisions seraient apportées par la délégation demain après-midi.

Le deuxième rapport périodique de l'ex-République yougoslave de Macédoine (CAT/C/MKD/2) relève qu'au cours du processus de mise en conformité de la législation pénale du pays avec les normes de l'Union européenne, un accent particulier a été mis sur l'application des recommandations du Comité contre la torture. Avec les modifications dont a fait l'objet le Code pénal en mars 2004, un changement fondamental a été apporté, entre autres, à la qualification et au contenu de l'infraction visée à l'article 142. Un aspect important de la réforme de la législation pénale a consisté à ériger en infraction la violence dans la famille. Le rapport reconnaît par ailleurs que, compte tenu de la norme des 9 m3 par détenu, certains établissements pénitentiaires, cités dans le rapport, sont surpeuplés. Au total il y a 69 détenus de trop, le surpeuplement s'expliquant par le fait qu'il y a moins de mètres cubes par détenu que ne le prévoient les normes. Le rapport note encore que Conformément à la législation en vigueur, les mineurs peuvent être condamnés à une peine d'emprisonnement dans un établissement pour mineurs d'une durée maximale de dix ans. Les mineurs de sexe masculin exécutent leur peine dans des établissements qui leur sont réservés.

Le rapport indique qu'en vertu de la loi sur le Médiateur, le bureau du Médiateur est un organe indépendant et autonome, chargé de surveiller la situation s'agissant du respect et de la protection des droits constitutionnels et autres des personnes se trouvant dans des institutions où leur liberté est restreinte, en particulier des personnes en garde à vue et en détention provisoire et des personnes exécutant une peine de prison ou placées dans des établissements de correction. Les visites et inspections du Médiateur peuvent être effectuées en tout temps, sans préavis ou autorisation préalable. Le Médiateur peut s'entretenir en privé avec les personnes placées dans les établissements susmentionnés, ainsi que recevoir des plaintes de la part des personnes privées de leur liberté sous pli scellé et y répondre en toute confidentialité. Le rapport dit que la protection contre les arrestations arbitraires et, plus particulièrement, la privation arbitraire de la vie des détenus par suite de l'emploi de la force par les membres de la police et des services de sécurité dans l'exercice de leurs fonctions est garantie dans la législation au moyen des dispositions régissant les conditions d'emploi des armes à feu. Toutefois, avec l'adoption de la loi sur la police, ces dispositions de la loi sur les affaires intérieures, ainsi que le décret sur l'utilisation des moyens de coercition et des armes à feu deviendront caducs. Le rapport fait aussi état des mesures mises en œuvre par l'établissement spécialisé de Demir Kapija en application des instructions du Ministère du travail et de la politique sociale.

Dans le cadre de la formation complémentaire et continue de la police au Ministère de l'intérieur et dans le contexte du programme de formation de la police, l'accent est mis sur le respect et la protection des droits de l'homme dans l'exécution des tâches de police. Le rapport apporte également des données et des chiffres sur les plaintes instruites contre des fonctionnaires ayant fait usage de la force physique. Afin de mettre en œuvre l'une des plus importantes recommandations du Comité européen de prévention de la torture (CPT), le Gouvernement a établi que les mauvais traitements infligés aux personnes en garde à vue ou en détention par des membres des organes chargés de l'application des lois étaient contraires aux valeurs fondamentales d'une société démocratique, aux droits de l'homme et à l'état de droit, que de tels actes ne seraient pas tolérés et que leurs auteurs seraient condamnés aux peines sévères prévues par la loi.

Observations et questions des membres du Comité

M. LUIS GALLEGOS CHIRIBOGA, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine, a déclaré que le Comité est conscient des changements importants qui ont été introduits en Macédoine et dans les pays de la région au cours de ces dernières années. Il s'est attaché en premier lieu aux droits des personnes détenues dans les cellules de police et en particulier au droit de disposer d'un traitement médical si nécessaire, d'un avocat et d'informer sa famille. Il s'est interrogé aussi sur le bon fonctionnement du bureau du Procureur, demandant si celui-ci enquête bien sur les cas de mauvais traitements. Il a insisté, à cet égard, sur la nécessité que l'impunité soit combattue par tous les moyens possibles. Il a mis l'accent aussi sur les nouvelles caractéristiques de la nouvelle loi sur la police, faisant état de préoccupations portant, notamment, sur l'absence d'un système de surveillance indépendant. Il a demandé des explications s'agissant de l'argument d'obéissance à un supérieur avancé par l'ex-République yougoslave de Macédoine et demandé également plus de renseignements sur les dispositions d'amnistie.

Le rapporteur s'est aussi intéressé au droit d'asile, demandant si un recours contre un ordre d'expulsion avait un effet suspensif. Il a évoqué le cas de Khaled El Masri et demandé si ce citoyen allemand, remis par les autorités de l'ex-République yougoslave de Macédoine à la CIA et soumis à la torture en Afghanistan, pourrait obtenir réparation auprès du pays l'ayant livré aux services secrets américains. Il s'est étonné, par ailleurs, de ce que l'article 142 du Code pénal prévoie, s'agissant de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, des peines de 1 à 5 ans alors que pour la traite d'êtres humains, les peines peuvent aller jusqu'à 10 ans.

Le rapporteur a par ailleurs demandé un éclaircissement sur le fait qu'un mineur peut être appréhendé par des personnes en uniforme, dans des véhicules non identifiés.

M. Gallegos a souhaité savoir comment l'État partie luttait contre les violences sexuelles contre les détenues et les détenus.

MME NORA SVEAASS, corapporteuse pour l'examen de ce rapport, a pris acte des mesures importantes prises par l'État partie dans le domaine de la formation et a demandé si la formation à l'intention de la police contient des éléments sur la violence contre les enfants et contre les femmes et sur l'impact psychologique de cette violence. Elle a fait état d'allégations de violence contre les femmes qui restent impunies.

La corapporteuse a aussi demandé quelle était la formation prévue pour les douaniers et quelle est la démarche appliquée face aux demandeurs d'asile. Quelles sont les obligations des garde-frontières? Comment le personnel de santé est-il formé pour déceler des traces de torture, a-t-elle par ailleurs voulu savoir.

Se fondant sur les informations émanant d'organisations non gouvernementales faisant état de surpopulation dans les centres de détention, en particulier à Skopje, elle a voulu savoir quand il était prévu d'adapter l'infrastructure des prisons pour palier ce problème.

Des questions ont également été posées sur les conditions de détention des enfants et des femmes, sur les violences commises contre les mineurs, sur les conditions sanitaires des détenus mineurs, notamment. Plusieurs cas de femmes détenues, obligées de fournir des faveurs sexuelles en échange de certaines décisions, ont été mentionnés; cela est-il véridique, a demandé la corapporteuse ?

Mme Sveaass s'est encore intéressée aux normes de contrôle sur les actes de brutalité policière pratiqués, en particulier, à l'encontre des Roms. Le code d'éthique de la police est-il suffisamment diffusé dans la police et la société civile? Elle a évoqué aussi la mort récente d'un jeune garçon à la suite de l'appréhension par l'unité spéciale de police Alpha, relevant que le procureur n'a pas jugé nécessaire qu'une enquête soit menée sur ce cas. Quelle est l'explication fournie à ce sujet par l'État partie, a-t-elle demandé.

L'experte a encore demandé des informations supplémentaires sur les accusations et plaintes déposées, notant que les informations reçues par le Comité font état de procédures longues et prolongées et d'enquêtes bâclées. Des cas de violence contre des femmes, des enfants et des personnes d'origine rom ont été signalés, a-t-elle encore relevé, en demandant ce qu'il en était.

Mme Sveaass a aussi mentionné des disparitions de citoyens macédoniens et de citoyens d'origine albanaise au cours de la période de conflit; l'ex-République yougoslave de Macédoine a-t-elle mené des enquêtes à cet égard ?

La corapporteuse a aussi souhaité obtenir des précisions sur les chiffres portant sur des réparations et sur les motifs de ces réparations. Elle a aussi estimé que les réponses fournies par l'État partie sur l'extorsion d'informations sous la torture sont insuffisamment claires, et demandé des précisions.

Mme Sveaass s'est dite frappée par le nombre de cas de violence domestique dénoncés. Ces problèmes ne semblent pas être signalés par les victimes. Ceci constitue certes un problème universel, a relevé la corapporteuse, tout en recommandant à l'État partie de prendre des dispositions pour encourager les femmes à porter plainte.

Un autre expert a relevé des délais excessifs s'agissant des situations de détention avant la mise en accusation et des procédures «sommaires». Quelle est la valeur ajoutée des réformes opérées s'agissant du pouvoir judiciaire, a encore demandé l'expert. Qui contrôle les critères d'utilisation des moyens coercitifs et matériels que la police est autorisée à employer?

L'expert a rappelé que le Comité pour les droits de l'enfant a recommandé à l'État partie de se mettre au diapason avec les normes européennes, et il a demandé si, dans ce contexte, il était admissible qu'un enfant soit sanctionné d'une peine allant jusqu'à cinq ans d'incarcération. Elle a souligné la disproportion de cette mesure en regard des peines légères réservées à un policier trouvé coupable de mauvais traitement.

D'autres experts, revenant sur des questions déjà posées, ont demandé des précisions, notamment, sur les moyens mis en œuvre par l'État partie pour lutter contre la traite des êtres humains et, en particulier, des enfants. S'agissant de l'affaire El Masri, et de la collaboration de l'ex-République yougoslave de Macédoine avec les États-Unis, un expert s'est demandé s'il n'y avait pas lieu pour le pays de modifier ses dispositions de manière à ce qu'elles soient conformes aux politiques européennes, puisqu'en matière de coopération avec la Cour pénale internationale, il y a une approche différente entre l'Union européenne et les États-Unis. Est-ce qu'un étranger peut recourir contre une décision adoptée en procédure administrative accélérée? Des explications ont été demandées s'agissant de l'utilisation d'armes à feu par les forces de police contre une personne, sans avertissement. Observant que plus de la moitié des personnes accusées de torture ont été relaxées, un expert s'est demandé à quoi cela était dû. Les avocats macédoniens exercent-ils leur profession de manière libérale ou sont-ils des agents de l'État, a-t-il encore été demandé. Une autre question a porté sur les violences domestiques à l'encontre des enfants et sur le mariage forcé de jeunes filles mineures.

Les personnes qui ne peuvent payer un avocat peuvent-elles bénéficier d'une aide juridique ? L'État partie a-t-elle l'intention de ratifier la Convention sur les droits de l'homme des travailleurs migrants? Les organisations non gouvernementales de femmes peuvent-elles agir librement dans tous les contextes ethniques et religieux? Est-ce qu'un plaignant a la possibilité qu'une procédure judiciaire soit déclenchée, nonobstant l'absence de réaction du parquet, a-t-il encore été demandé.

Le président du Comité a souhaité savoir si les autorités macédoniennes possédaient les ressources nécessaires pour instruire les centaines de cas relatifs à la traite d'êtres humains.

Y a-t-il un registre central sur les hospitalisations forcées dans les cliniques psychiatriques, une assistance juridique est-elle prévue, a-t-il en outre été demandé? Des mesures sont-elles prévues pour permettre aux patients de prendre des décisions volontairement a finalement demandé une experte.

____________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

VOIR CETTE PAGE EN :