Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

CHYPRE PRÉSENTE SON RAPPORT PÉRIODIQUE AU COMITÉ CONTRE LA TORTURE

15 novembre 2002



CAT
29ème session
15 novembre 2002
Matin



Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du troisième rapport périodique de Chypre sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
M. Lazaros Savvides, Directeur général du Ministère chypriote de la justice et de l'ordre public, a rappelé que Chypre était particulièrement sensible au respect des droits de l'homme du fait que les droits du peuple chypriote ont été et sont encore l'objet de violations flagrantes de la part des forces d'invasion qui occupent la partie septentrionale de l'île. Présentant le rapport de son pays, M. Savvides a notamment fourni des renseignements complémentaires concernant l'examen et la gestion des plaintes contre la police pour mauvais traitements.
Le chef de la délégation a assuré les membres du Comité que Chypre était entièrement disposée coopérer avec l'autre communauté dans le cadre du règlement du problème chypriote, faisant allusion à la réponse qui doit être apportée la semaine prochaine au Secrétaire général des Nations Unies.
La délégation est également composée de M. Alexandros N. Vikis, Représentant permanent de Chypre auprès de l'Office des Nations Unies à Genève; M. Costas Hadjipavlou, Administrateur en chef du Ministère de la justice et de l'ordre public; M. Theano Mavromoustaki, Conseil du Bureau juridique de la République de Chypre; ainsi que de membres de la Mission de Chypre à Genève.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, M. M. Sayed Kassem El Masry, a salué les initiatives prises par Chypre et les nouvelles mesures progressistes touchant à l'application des dispositions de la Convention. Il a toutefois exprimé des préoccupations s'agissant d'allégations selon lesquelles des personnes détenues en attente d'expulsion auraient été battues ou menacées. Il a aussi souhaité des informations sur deux détenus chypriotes turcs qui ont porté plainte pour mauvais traitements. Le co-rapporteur pour l'examen du rapport de Chypre, M. Yu Mengjia, a également salué le rapport chypriote, à l'instar de plusieurs membres du Comité, certains estimant que «ce pays est proche de la perfection et exemplaire en matière de respect des droits de l'homme».
Le Président du Comité s'est montré particulièrement impressionné par certaines dispositions extrêmement novatrices dans la législation nationale et qui vont au-delà de la jurisprudence de la Convention, notamment l'introduction du projet de loi qui criminalise des actes non seulement de torture, mais aussi de traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Le Comité entendra lundi, à 15h30, les réponses de la délégation chypriote aux questions qui lui ont été posées ce matin par les experts.
Le Comité se réunira en séance publique cette après-midi afin d'entendre la délégation de l'Estonie qui répondra aux questions posées hier par les experts.

Présentation du rapport de Chypre
Le chef de la délégation chypriote, M. LAZAROS SAVVIDES, Directeur général du Ministère de la justice et de l'ordre public de Chypre, a souligné l'importante évolution législative entreprise à Chypre ces dernières années. Il a insisté sur le rôle de la police dans la prévention et la détection de crimes, et a souligné la vocation primordiale de la formation initiale des policiers à l'utilisation des techniques modernes d'enquête, notamment s'agissant du comportement des policiers à l'égard des suspects et du respect des droits du suspect.
M. Savvides a rappelé que les plaintes pour mauvais traitement pouvaient désormais être adressées à l'Institution nationale pour la protection des droits de l'homme. À cet égard, il a signalé qu'au cours de la période 1998-2001, 51 plaintes ont été portées contre des membres de la police suspectés dans des affaires criminelles, dont seulement 35 impliquaient des mauvais traitements physiques.
M. Savvides a aussi évoqué la nouvelle loi qui concerne les enquêtes pénales, en signalant que c'était le Procureur qui ordonne désormais ces enquêtes en désignant des enquêteurs pour des crimes commis par des membres de la police. Le résultat des investigations pourra alors déboucher sur des poursuites pénales.
Le chef de la délégation a ajouté que les prisons avaient une capacité actuelle de 62 cellules individuelles mais qu'après rénovation de certaines ailes de la prison, plus de 100 cellules individuelles seront disponibles en 2003, réduisant ainsi le problème du surpeuplement des prisons.
En conclusion, M. Savvides a attitré l'attention sur la création, en 1999, d'un programme de formation pour les juges de première instance dans divers domaines du droit et dans des matières propres à améliorer l'administration de la justice.
Le troisième rapport de Chypre (CAT/C/54/Add.2) précise les principales mesures qui ont été prises depuis l'examen du deuxième rapport périodique dans l'application des dispositions de la Convention. Le rapport traite de la promulgation de la Loi de 1997 sur le traitement psychiatrique, qui stipule que le malade mental n'est plus traité comme un criminel mais comme n'importe quelle autre personne, sauf dans la mesure ou il est nécessaire de le soumettre à un traitement obligatoire parce que son état le rend dangereux pour lui-même ou pour autrui. Il ajoute que le traitement psychiatrique est offert sur une base volontaire sauf dans les cas de danger : il est alors obligatoire. Le rapport traite aussi de la modification du Code de procédure pénale concernant l'incapacité de plaider sa cause. L'article 70 du Code pénal établissait la procédure suivie lorsque l'accusé n'était pas capable de suivre les débats devant le tribunal en raison d'un état de démence. Selon la nouvelle loi, il n'y a pas d'expertise mentale si l'accusé est incapable de suivre les débats en raison d'un état de démence, sauf si le tribunal considère qu'il y a un commencement de preuve contre l'accusé. Dans le cas contraire, il ordonne sa mise en liberté.
Le rapport souligne que la peine de mort a été abolie pour tous les crimes sauf celui de trahison en temps de guerre. Une loi a été adoptée sur l'octroi de l'asile politique aux réfugiés, qui régit la procédure d'octroi d'asile, les droits et obligations des réfugiés à qui l'asile est octroyé, et qui prévoit la création d'un service des réfugiées ayant compétence pour recevoir et examiner les demandes de reconnaissance du statut de réfugié, et pour statuer sur ces demandes.
Le rapport mentionne la promulgation d'une nouvelle loi sur la répression de la traite des personnes et de l'exploitation sexuelle. Il est stipulé dans cette loi que tout acte qui peut être qualifié de traite des êtres humains constitue un délit puni d'un emprisonnement de 10 ans ou d'une amende de 15 000 livres d'amende.
Les plaintes contre la police pour mauvais traitements et la désignation d'enquêteurs spéciaux par le procureur général sont aussi traités dans le rapport. Il est également souligné que des d'efforts sérieux et concrets ont été faits pour modifier les attitudes dans le cadre des interrogatoires. Le rapport traite enfin de la promulgation d'une nouvelle loi pour la prévention de la violence domestique.

Examen du rapport par les membres du Comité
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, M. SAYED KASSEM EL MASRY, s'est déclaré extrêmement satisfait du rapport présenté et a salué les initiatives prises par Chypre ainsi que les nouvelles mesures progressistes touchant à l'application des dispositions de la Convention, notamment concernant les nouveaux projets de loi, telle la loi sur les traitements psychiatriques ou la loi sur les étrangers. Il a souligné à cet égard qu'en vertu de la loi sur les étrangers, une personne qui est en attente d'expulsion ne peut pas être détenue pendant plus de huit jours.
M. Sayed Kassem El Masry a ajouté avec satisfaction qu'il n'y avait pas mention de cas de prisonniers politiques et qu'il n'existait pas d'informations sur des cas d'actes de torture à Chypre. Il a toutefois évoqué le cas de 150 personnes d'Afrique et du Moyen-Orient qui ont été détenues en juin 1998 en attente d'une expulsion. Quatre de ces personnes ont déclaré avoir été battues, et une autre menacée d'être passée à tabac si elle portait plainte pour mauvais traitements. Le rapporteur a demandé des informations sur le résultat des enquêtes menées sur ces cas.
Le rapporteur a également souhaité des informations sur le résultat des enquêtes disciplinaires qui ont été menées suite à la plainte pour mauvais traitements déposée deux détenus chypriotes turcs.
Le rapporteur a par ailleurs posé des questions sur l'âge de la responsabilité pénale, le recours aux châtiments corporels, les dispositions sur le recours à la force par les services de maintien de l'ordre, les conditions d'isolement d'un prisonnier et les cas d'isolement cellulaire sans procédure disciplinaire préalable.
M. El Masry a soulevé une série de questions sur les droits du détenu, le placement en détention préventive, le droit de bénéficier des services d'un avocat et sur les conditions d'obtention du droit d'asile.
Le co-rapporteur pour l'examen du rapport de Chypre, M. YU MENGJIA a également salué le rapport chypriote et a demandé de plus amples renseignements sur un groupe de chypriotes turcs qui auraient été victimes d'actes de torture.
Un autre membre du Comité a proposé à Chypre de dispenser une formation aux médecins pour leur permettre de constater des actes de torture. Il s'est interrogé sur la formation des médecins en prison et sur le droit, pour une personne en garde à vue, de voir un médecin de son choix. Il a demandé s'il existait un registre des prisons afin de connaître le nombre de personnes incarcérées.
Un expert a demandé des précisions sur la situation des étrangers, leur nombre et celui des réfugiés. Il a aussi souhaité savoir si l'article de la Convention sur le non-refoulement de personnes risquant d'être soumises à la torture est directement applicable par les tribunaux.
Un membre du Comité a demandé un complément d'information sur la violence dans les familles, ainsi que sur la traite des personnes. Il a ensuite évoqué la question de la violence dans les prisons et s'est enquis de l'existence d'une procédure concernant la fouille dans les prisons et son application. L'expert a relevé des cas d'agression contre des Roms. S'agissant des réfugiés et demandeurs d'asile, il a souhaité savoir quelles dispositions ont été prises pour venir en aide à ceux qui ont été victimes de la torture. Enfin, il a demandé des précisions sur le taux de criminalité dans le pays.
Le Président du Comité s'est montré particulièrement impressionné par certaines dispositions extrêmement novatrices dans la législation nationale et qui vont au-delà de la jurisprudence de la Convention. Il s'agit notamment de l'introduction du projet de loi qui inscrit au pénal des actes non seulement de torture, mais aussi de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il y est spécifié que les autorités de police doivent répondre, et sont responsables, de faits concernant toute personne victime de blessures qui n'existaient pas avant son arrivée dans les locaux de la police.



* *** *

VOIR CETTE PAGE EN :