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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE L'INDONÉSIE

16 Novembre 2001



CAT
27ème session
16 novembre 2001
Matin





Le Comité pose des questions à la délégation concernant notamment le comportement des forces de l'ordre et la situation relative à la lutte contre l'impunité


Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du rapport initial de l'Indonésie sur les mesures prises par ce pays pour appliquer les dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, Mme Lucia H. Rustam, Conseillère à la Mission permanente de l'Indonésie auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a indiqué que la ratification par l'Indonésie de plusieurs instruments internationaux de protection des droits de l'homme, dont la Convention contre la torture en octobre 1998, a encouragé le développement d'un arsenal juridique national garantissant la protection des droits du citoyen. La création de la Commission nationale des droits de l'homme en 1993 en est une parfaite illustration, de même que l'adoption du plan national d'action relatif aux droits de l'homme 1998-2003.

La délégation indonésienne est également composée de M. Mohammad Anshor, du Directorat pour les Organisations internationales auprès du Ministère des affaires étrangères.

Mme Felice Gaer, rapporteuse du Comité chargée de l'examen du rapport de l'Indonésie, s'est félicitée des progrès enregistrés par l'Indonésie, et notamment de la séparation de la police nationale et de l'armée en deux corps distincts, de la tenue d'élections démocratiques et des excuses formulées par le pays concernant le Timor oriental. Elle a toutefois fait état d'allégations selon lesquelles des étudiants auraient été détenus, brutalisés et même tués. Il semblerait en outre que le personnel militaire bénéficie d'une certaine impunité alors que des allégations selon lesquelles plusieurs membres des forces armées se seraient rendus coupable de torture et de mauvais traitements sont parvenues au Comité. Elle a souhaité savoir si des poursuites ont été engagées à l'encontre de membres de l'armée et de groupes paramilitaires qui se seraient rendus coupables d'atrocités au Timor oriental.


M. Yu Mengja, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Indonésie, a souligné que l'Indonésie est en pleine transition et doit améliorer les conditions socioéconomiques tout en maintenant l'unité du pays. Il a fait valoir que le développement du pays et les progrès sociaux ne pourront être réalisés que par le biais du respect des droits de l'homme et de l'élimination de la torture.

Le Comité poursuivra l'examen du rapport de l'Indonésie lundi 19 novembre, à 15 heures. Il entendra alors les réponses de la délégation indonésienne aux questions qui lui ont été adressées ce matin. Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la délégation du Bénin aux questions posées par le Comité hier matin.


Présentation du rapport

Le rapport initial de l'Indonésie (CAT/C/47/Add.3), en date du 16 juillet 2001, indique que la Constitution de l'Indonésie énonce les idéaux et les objectifs pour lesquels l'indépendance a été proclamée le 17 août 1945 et qui ont toujours été défendus par la suite. Le 20 août 2000, l'Assemblée consultative du peuple a approuvé le deuxième amendement à la Constitution, qui ajoute un nouveau chapitre consacré aux droits de l'homme. La Constitution n'interdit pas expressément la torture mais selon l'idéologie de l'État (Pancasila) énoncée dans le préambule de la Constitution, et en particulier selon le deuxième principe (une humanité juste et morale), aucune forme de torture n'est acceptable. En outre, le code pénal stipule que tout agent de l'État qui, dans le cadre d'une enquête, fait usage de coercition pour contraindre quelqu'un à avouer ou pour persuader quelqu'un de donner des renseignements encourt un emprisonnement pouvant atteindre quatre ans.

Le rapport indique que le Gouvernement indonésien fait une place de plus en plus grande à la protection des droits de l'homme. Cette préoccupation s'est traduite concrètement par l'élaboration du plan national d'action relatif aux droits de l'homme 1998-2003, officiellement lancé le 25 juin 1998, exactement cinq ans après l'adoption de la Déclaration et du Programme d'action de Vienne. Conformément à ce plan d'action, le gouvernement a pris des mesures afin de renforcer son action tendant à se doter d'un arsenal législatif propre à assurer de bonnes garanties de procédures. En coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, le gouvernement indonésien a l'intention de mettre en place un enseignement des droits de l'homme à l'intention des responsables de l'application de la loi et du personnel militaire . L'amélioration de l'enseignement des règles minima pour le traitement des détenus est également en projet. En ce qui concerne les mesures répressives à l'encontre du personnel de sécurité qui viole les droits fondamentaux de l'homme, le rapport indique que 23 soldats indonésiens ont été condamnés à des peines de prison allant de un à quatre ans et radiés des cadres parce qu'ils avaient été reconnus coupables d'avoir torturé des prisonniers dans la province d'Aceh en janvier 1999.


Présentant le rapport de l'Indonésie, Mme Lucia H. Rustam, Conseillère à la Mission permanente de l'Indonésie auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a indiqué que l'Indonésie a concrétisé son désir d'autodétermination, qui a été étouffé par des siècles de colonisation, en proclamant son indépendance en 1945. Outre la Constitution de 1945, l'engagement de l'État en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme est reflété par la Pancasila, qui englobe les cinq principes philosophiques constituant les piliers de l'État.

La ratification par l'Indonésie de plusieurs instruments internationaux de protection des droits de l'homme, dont la Convention contre la torture en octobre 1998, a encouragé le développement d'un arsenal juridique national garantissant la protection des droits du citoyen. La mise en place de la Commission nationale des droits de l'homme en 1993 en est une parfaite illustration, de même que l'adoption du plan national d'action relatif aux droits de l'homme 1998-2003. Ce plan d'action comporte quatre objectifs principaux que sont la préparation de la ratification des instruments de défense des droits de l'homme, la diffusion d'une information et d'une éducation sur les droits de l'homme, la mise en œuvre de mesures sur des questions prioritaires relatives aux droits de l'homme et l'application des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ratifiés par l'Indonésie.

Un second amendement à la Constitution incorporant un nouveau chapitre consacré aux droits de l'homme a été récemment adopté, a indiqué Mme Rustam. Ces nouvelles dispositions garantissent, entre autres, le droit à la vie et le droit de ne pas être soumis à des tortures ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. En outre, des tribunaux des droits de l'homme ont été mis en place en l'an 2000 afin que les violations flagrantes des droits fondamentaux soient jugées plus efficacement. Une Commission pour la vérité et la réconciliation a également été crée, et ce dans le but de procéder à un nouvel examen des cas de violations ayant eu un impact significatif sur la nation. Par ailleurs, tout acte de torture commis par un membre de l'armée indonésienne (TNI) est du ressort de la police militaire, des procureurs militaires et des juges des juridictions militaires, a ajouté Mme Rustam.

Le Gouvernement indonésien est déterminé à combattre l'impunité pour tous les cas de violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a déclaré Mme Rustam. À cet égard, plusieurs condamnations ont déjà été prononcées à l'encontre de soldats, de hauts fonctionnaires et de membres de gouvernements précédents qui se sont rendus coupables de violations des droits de l'homme. Néanmoins, des considérations financières et géographiques (l'archipel indonésien étant très vaste) entravent la volonté du Gouvernement indonésien et ralentissent la mise en place du cadre de protection des droits de l'homme, a ajouté Mme Rustam.


Examen du rapport

La rapporteuse du Comité chargée de l'examen du rapport de l'Indonésie, Mme Felice Gaer, a regretté que le pays n'ait pas fait les déclarations au titre des articles 21 et 22 de la Convention, concernant les communications émanant de particuliers et d'États. Toutefois, elle s'est félicitée des progrès enregistrés par l'Indonésie, et notamment de la séparation de la police nationale et de l'armée, en deux corps distincts, de la tenue d'élections démocratiques et des excuses formulées au sujet du Timor oriental.

La rapporteuse a attiré l'attention du Comité sur le fait que la législation indonésienne ne définit pas expressément la torture et elle s'est interrogée sur l'efficacité de la protection contre la torture accordée par la Constitution. À cet égard, Mme Gaer a souhaité connaître la date d'entrée en vigueur du projet de code pénal et si ce code contiendra une définition précise de la torture ainsi qu'une loi spécifique la condamnant. Par ailleurs, la rapporteuse s'est inquiétée qu'aucun juge n'a encore été nommé auprès des tribunaux des droits de l'homme, qui sont pourtant censés entrer en fonction d'ici le mois de décembre prochain.

Mme Gaer a déclaré que l'existence d'un fichier central répertoriant le casier judiciaire et médical des détenus a attiré son attention, de même que la question du respect du droit à l'assistance d'un avocat ou à l'intervention d'un médecin pendant la garde à vue. En effet, aucune disposition du code pénal ne contraint les autorités policières à fournir une telle assistance. Par ailleurs, Mme Gaer a souhaité de plus amples informations sur la distinction entre les tribunaux militaires et les tribunaux civils, ainsi que sur les critères qui qualifient une affaire civile d'une affaire militaire.

Des allégations selon lesquelles des étudiants auraient été détenus, brutalisés et tués étant parvenues au Comité, la rapporteuse a souhaité connaître les résultats des enquêtes menées à la suite de ces incidents. Elle a également demandé à la délégation des statistiques sur le nombre de plaintes déposées pour torture ou mauvais traitement ainsi que la suite qui leur a été donnée.

La rapporteuse a souhaité de plus amples informations sur un projet de réforme de la police. Elle a souligné la nécessité d'instaurer un climat de confiance avec la population, qui est notamment indispensable dans les cas de violences sexuelles qui supposent une certaine confidentialité. À cet égard, Mme Gaer a émis des préoccupations s'agissant de la définition trop restrictive du viol et des violences sexuelles, qui sont également une forme de torture comme le précise l'organisation non gouvernementale OMCT dans son rapport ainsi que le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur la violence à l'égard des femmes.

Le rapport ne faisant aucune mention d'une législation ayant trait aux demandeurs d'asile et aux réfugiés, la rapporteuse a souhaité savoir si une personne risquant d'être torturée ou maltraitée dans son pays d'origine pouvait néanmoins être refoulée par l'Indonésie.

Aucune mention n'est faite dans le rapport sur la situation des droits de l'homme dans les régions qui connaissent des conflits armés, a fait remarquer Mme Gaer. En outre, il semble que le personnel militaire bénéficie d'une certaine impunité alors que des allégations selon lesquelles plusieurs membres des forces armées se seraient rendus coupable de torture et de mauvais traitements sont parvenues au Comité. Par ailleurs, Mme Gaer s'est interrogée sur les raisons pour lesquelles aucun Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme ne s'est rendu dans les régions de la Papouasie et des Molluques.

Enfin, Mme Gaer a souhaité savoir si des poursuites ont été engagées à l'encontre de membres de l'armée et des groupes paramilitaires ui se sont rendus coupables d'atrocités au Timor oriental. Elle a interrogé la délégation sur les intentions du gouvernement s'agissant de l'extradition de ces personnes afin qu'ils soient jugés au Timor oriental, ainsi que sur le manque de coopération entre le Gouvernement indonésien et la force de maintien de la paix des Nations Unies présente au Timor oriental (UNTAET).

M. Yu Mengja, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Indonésie, a souligné que l'Indonésie était en pleine transition et devait améliorer les conditions socio-économiques tout en maintenant l'unité du pays. Il a fait observer que le développement du pays et les progrès sociaux ne pourront être réalisés que par le biais du respect des droits de l'homme et de l'élimination de la torture. M. Yu a souhaité que la délégation lui fournisse des exemples pour illustrer des sanctions prononcées à l'encontre de fonctionnaires qui se sont rendus coupable d'actes de torture. Il s'est interrogé sur l'existence d'enquêtes impartiales qui interviendraient immédiatement à la suite de plaintes pour torture.

Un membre du Comité a fait valoir que les ONG devraient pouvoir avoir accès aux centres de détention, ce qui permettrait d'améliorer les conditions de détention dans le pays. La torture ayant généralement lieu au cours de la garde a vue, un expert a souligné l'importance de limiter l'application de cette procédure.



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