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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ ACHÈVE SON DIALOGUE AVEC LA DÉLÉGATION DU MALI ET ADOPTE UNE RECOMMANDATION GÉNÉRALE SUR LA QUESTION DE L'ASCENDANCE

21 août 2002



CERD
61ème session
21 août 2002
Matin


Il conclu l'examen d'un projet d'observations
finales sur le Canada



Le Comité pour l'élimination raciale a achevé, ce matin, l'examen du rapport du Mali en entendant la présentation d'observations préliminaires sur ce rapport. Le Comité a en outre examiné des observations finales sur le rapport du Canada, examiné en début de session, et adopté une recommandation générale sur la discrimination fondée sur l'ascendance.
M. Régis de Gouttes, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mali, a salué la reprise du dialogue avec cet État partie après 15 ans. Il s'est félicité que le rapport contienne un grand nombre d'informations très utiles, s'agissant notamment de la composition ethnique du pays, de la situation dans le nord du pays, plus généralement de la situation socioéconomique, et du cadre institutionnel relatif aux droits de l'homme. Toutefois, le rapporteur a demandé à la délégation d'apporter dans son prochain rapport des informations concernant notamment l'application des textes qui incriminent la discrimination raciale, les plaintes et poursuites judiciaires dans ce domaine, la situation des enfants victimes d'exploitation et la situation des femmes, notamment.
Le Comité examinera ultérieurement des observations finales et recommandations sur le rapport du Mali, afin de les adopter formellement à la fin de la session, le vendredi 23 août 2002.
Répondant, en début de séance, aux questions posées par les experts, M. Sinaly Coulibaly, Représentant permanent du Mali auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a notamment expliqué qu'il faut distinguer le système des castes au Mali de celui que l'on peut trouver ailleurs dans le monde. Les castes au Mali sont le plus souvent fondées sur la profession et non sur les croyances religieuses et ne sont pas à l'origine de pratiques sociales discriminatoires, a affirmé le représentant.
Le Comité a ensuite conclu l'examen et procédé à l'adoption d'une recommandation générale sur la discrimination fondée sur l'ascendance, faisant suite au débat organisé sur ce thème les 8 et 9 août derniers. Dans ce texte, le Comité recommande aux États d'envisager d'interdire explicitement la discrimination fondée sur l'ascendance et de prendre des mesures spéciales en faveur des groupes et communautés victimes de ce type de discrimination afin qu'ils puissent jouir de leurs droits de l'homme et de leurs libertés fondamentales, particulièrement en ce qui concerne l'accès aux fonctions publiques, à l'emploi et à l'éducation. Le Comité recommande notamment aux États parties de retirer de tous les livres scolaires les discours véhiculant une image stéréotypée ou dégradante des communautés fondées sur l'ascendance et de les remplacer par des messages sur la dignité inhérente à chaque être humain et à l'égalité de tous devant les droits de l'homme.
Le Comité a par ailleurs conclu l'examen d'un projet d'observations finales sur le rapport présenté les 5 et 6 août derniers par le Canada. Par ce texte, dont certains paragraphes ont été examinés le 19 août, le Comité noterait avec satisfaction le ferme engagement dont fait preuve le Canada à l'égard de la promotion des droits de l'homme. Il noterait en outre le rôle central joué par la loi sur le multiculturalisme et noterait également avec satisfaction la Déclaration de réconciliation faite par le gouvernement fédéral, par lequel le Canada exprime ses plus vifs regrets pour les injustices commises à l'encontre des autochtones. Par ce texte, le Comité noterait toutefois avec préoccupation que les politiques actuelles en matière d'immigration peuvent avoir des effets discriminatoires sur les personnes en provenance des pays les plus pauvres. Le Comité exprimerait dans ces observations sa préoccupation quant aux allégations d'exclusion du système scolaire, dans certaines provinces, d'enfants de migrants sans statut en espérant qu'il sera remédié à cette situation.
Les experts suivants ont également pris la parole au cours de la séance : M. Patrick Thornberry, M. Mahmoud Aboul-Nasr, M. Raghavan Vasudevan Pillai, M. Marc Bossuyt, M. Agha Shahi, M. Nourredine Amir, M. Mohamed Aly Thiam. M. Linoos Alexander Sicilianos, M. José Augusto Lindgren Alves, M. Yuri A. Reshetov, M. Kurt Nerndl, M. Morten Kjaerum, Mme Patricia Nozipho January-Bardill, M. Luis Valencia Rodríguez, M. Mario Jorge Yutzis et M. Tang Chenyuang.
Le Comité se réunira de nouveau cet après-midi à 15 heures afin d'examiner des projets d'observations finales sur le Yémen et le Sénégal, États parties dont les rapports ont été examinés au cours de la présente session.

Fin de l'examen du rapport du Mali
Répondant aux questions posées par les membres du Comité, M. Sinaly Coulibaly, Représentant permanent du Mali auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a déclaré avoir pris bonne note des observations relatives à la structure du rapport et a déclaré que le Mali en tiendra compte pour la rédaction de ses prochains rapports.
Le représentant a répondu aux questions posées par les membres du Comité s'agissant de la survivance de phénomènes de castes au Mali. À cet égard, il a indiqué que des femmes et des hommes appartenant à des castes occupent des postes importants dans le gouvernement et l'armée. Il a assuré que l'existence de castes n'entraîne pas de pratiques sociales discriminatoires. La Constitution du Mali consacre l'égalité de tous les citoyens devant la loi. Le représentant a insisté sur le fait que la notion de caste n'a pas la même signification au Mali que dans certains autres pays.
S'agissant du bilan de l'action du Médiateur de la République, le représentant malien a cité plusieurs exemples, attirant notamment l'attention sur l'annulation d'une décision administrative entachée d'illégalité et l'indemnisation par l'État de la personne qui avait été lésée. Il a par ailleurs souligné qu'une stratégie de lutte contre la pauvreté a été définie en partenariat avec la communauté internationale. Cette stratégie, a-t-il précisé, vise à créer les conditions de la participation de la population aux fruits de la croissance, au développement économique, humain et social, ainsi qu'à la bonne gouvernance. Le représentant a déclaré avoir pris bonne note des éclaircissements attendus
par les experts sur la jurisprudence en matière de discrimination. Il a par ailleurs déclaré avoir compris l'intérêt des indicateurs socioéconomiques pour apprécier la situation des groupes sociaux les plus exposés à la marginalisation.
Le représentant du Mali a affirmé que des textes de lois ont été adoptés sur la protection des enfants, dont peuvent bénéficier les enfants «talibé». À cet égard, il a souligné que le Mali a ratifié toutes la Convention relative aux droits de l'enfant. Il existe, a-t-il précisé, un parlement des enfants qui s'est notamment penché dans le cadre de ses travaux sur le cas des enfants des rues. Par ailleurs, un accord a été signé avec la Côte d'Ivoire en vue de lutter contre le phénomène du trafic des enfants. Cet accord a permis d'organiser le retour d'un grand nombre d'entre eux, a-t-elle souligné.
Le représentant a rappelé que le Mali compte 50,50% de femmes. La polygamie, a-t-elle précisé, représente 22.8% des unions, contrairement à ce qu'on pourrait penser. Le Mali a ratifié nombre d'instruments internationaux relatifs aux droits des femmes, et des mesures ont été adoptées pour assurer la promotion des droits de la femmes. À cet égard, l'accent est mis sur la santé, l'éducation, l'environnement, la participation à la vie publique. Le représentant a par ailleurs souligné que la situation en ce qui concerne l'excision est encore préoccupante puisqu'une large majorité de femmes sont encore victimes de cette pratique. La délégation a déclaré que des efforts sont actuellement déployés pour mettre en œuvre des plate-formes multi fonctionnelles pour tenter de réduire les écarts socioéconomiques entre les populations rurales et urbaines.
M. RÉGIS DE GOUTTES, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mali, s'est félicité de la reprise du dialogue avec ce pays a pris 15 ans. Il a salué les efforts déployés par l'Ambassadeur Coulibaly, en l'absence de représentants envoyés spécialement par le Gouvernement malien, pour répondre aux questions posées par les experts. Il s'est félicité que le rapport contienne un grand nombre d'informations très utiles, s'agissant notamment de la composition ethnique du pays, de l'apaisement dans le Nord du pays, de la situation socioéconomique, et du cadre institutionnel relatif aux droits de l'homme. Malheureusement, a-t-il regretté, on ne trouve pas suffisamment d'informations concernant l'application concrète des textes juridiques. M. de Goutte s'est par ailleurs félicité des efforts déployés par le Gouvernement malien pour favoriser l'enseignement en matière de droits de l'homme et a salué la franchise avec laquelle le rapport fournit un certain nombre d'indicateurs socioculturels.
M. de Gouttes a attiré l'attention du Mali sur la place de la Convention dans la hiérarchie des normes et sur la possibilité pour les justiciables d'exercer des recours en cas de violation de leurs droits. Il a également demandé au Mali de fournir davantage d'information s'agissant du programme national de lutte contre la pauvreté. Il a également demandé des informations complémentaires sur l'application des textes qui incriminent la discrimination raciale ainsi que des informations sur les plaintes et poursuites judiciaires dans ce domaine. Des réponses sont également attendues, a-t-il déclaré, sur la situation des enfants victimes d'exploitation et sur la situation des femmes, notamment en milieu rural. Des informations seraient également les bienvenues s'agissant des effets de l'épidémie de sida au Mali.
Le rapporteur a par ailleurs attiré l'attention de la délégation sur la survivance de pratiques discriminatoires liées à l'ascendance, tout en déclarant avoir noté les explications selon les quelles le système de castes au Mali est le plus souvent lié à l'exercice d'un métier et ne trouve pas son origine dans les croyances religieuses. Des informations complémentaires sur le «cousinage à plaisanterie» seraient appréciées. Il serait enfin bienvenu que le Gouvernement précise les mesures qu'il envisage d'adopter pour mieux faire connaître la Convention. Le rapporteur a conclu en demandant au Mali d'apporter des éclaircissements, dans son le prochain rapport, s'agissant de l'article 8 de la Convention concernant le financement du Comité et de l'article 14 sur l'examen de communications individuelles.

Adoption d'une «recommandation générale» sur la discrimination fondée sur l'ascendance
Le Comité a tenu, les 8 et 9 août derniers, un débat général sur la question de la discrimination fondée sur l'ascendance. Il a examiné, hier et ce matin, une «recommandation générale» sur la question, qu'il a adoptée ce matin. Les recommandations générales adoptées par le Comité visent à aider les États parties à mieux s'acquitter de leurs obligations au titre de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Comité a adopté par le passé près de trente recommandations générales portant sur des dispositions de la Convention ou sur les mesures à prendre par les États parties en faveur des groupes particulièrement vulnérables s'agissant de la discrimination raciale. Ainsi, le Comité a adopté par le passé des recommandations générales sur la discrimination à l'égard des Roms, la dimension sexiste de la discrimination raciale, les droits des populations autochtones, les réfugiés et personnes déplacées.
Dans sa recommandation générale sur la discrimination fondée sur l'ascendance, le Comité demande aux États parties d'identifier les communautés victimes de discriminations fondées sur la caste et autres systèmes analogues. Le Comité recommande aux États d'envisager d'incorporer à leur constitution un amendement interdisant explicitement la discrimination fondée sur l'ascendance. Il invite notamment les États à prendre des mesures spéciales en faveur des groupes et communautés victimes de ce type de discrimination afin qu'ils puissent jouir de leurs droits de l'homme et de leurs libertés fondamentales, particulièrement en ce qui concerne l'accès aux fonctions publiques, à l'emploi et à l'éducation.
S'agissant plus particulièrement des discriminations multiples contre les femmes membres de communautés victimes de discrimination fondée sur l'ascendance, le Comité demande aux États parties de prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer les multiples discriminations dont elles sont victimes.
Aux termes de ce projet, le Comité recommande aux États de contrôler et de rendre compte des tendances qui aboutissent à la ségrégation des communautés fondées sur l'ascendance et d'œuvrer à l'élimination des conséquences négatives qui résultent d'une telle ségrégation. Le Comité recommande aux États parties de prévenir, interdire et éliminer les pratiques ségrégationnistes à l'encontre des membres de communautés fondées sur l'ascendance, y compris en matière de logement, d'éducation et d'emploi. Le Comité recommande par ailleurs aux États parties de prendre des mesures contre la diffusion d'idées fondées sur la haine raciale, y compris par le biais des médias et de l'internet. Le Comité recommande aux États de prendre des mesures pour garantir un accès égal à la justice à tous les membres des communautés fondées sur l'ascendance.
Les États sont priés d'adopter des mesures spéciales et concrètes en vue de garantir aux membres de ces communautés le droit de participer aux élections, de voter et de se présenter aux élections sur la base d'un suffrage universel et égalitaire. Le Comité recommande aux États de définir, adopter et mettre en œuvre des programmes de développement économique et social au bénéfice des membres des communautés fondées sur l'ascendance.
Le Comité recommande en outre aux États, aux termes de dispositions adoptées ce matin, de prendre des mesures fermes pour éliminer l'esclavage pour dettes ainsi que la pratique de certains travaux manuels, en particulier le ramassage des déchets, dans la mesure où ces pratiques sont associées à une discrimination fondée sur l'ascendance. Le Comité recommande par ailleurs aux États de prendre des mesures visant à réduire le taux d'absentéisme des enfants de toutes les communautés en accordant une attention particulière aux cas des fillettes. Le Comité recommande enfin aux États de retirer de tous les livres scolaires, les discours véhiculant notamment une image stéréotypée ou dégradante des communautés fondées sur l'ascendance et de les remplacer par des messages sur la dignité inhérente à chaque être humain et à l'égalité de tous devant les droits de l'homme.

Examen du projet d'observations finales sur le rapport du Canada
Dans les paragraphes du projet d'observations finales sur le rapport du Canada examinés ce matin, le Comité réitèrerait, si le projet devait être adopté, sa préoccupation s'agissant des taux élevés d'incarcération d'autochtones et de personnes d'ascendance africaine et asiatique, et recommande que le prochain rapport périodique du Canada contienne des informations sur l'efficacité des programmes adoptés en vue de limiter ces phénomènes. Le Comité demanderait au Canada de donner davantage d'informations détaillées sur les résultats obtenus en vue d'éliminer la discrimination raciale en matière d'emploi, aux niveaux fédéral, provincial et territorial, dans les secteurs publics et privés. Le Comité noterait avec préoccupation que les politiques actuelles en matière d'immigration peuvent avoir des effets discriminatoires sur les personnes en provenance des pays les plus pauvres. Le Comité exprimerait sa préoccupation quant au fait que la plupart des étrangers refoulés par le Canada sont originaires d'Afrique ou d'ascendance africaine. Le Comité exprimerait par ailleurs sa préoccupation quant aux allégations d'exclusion du système scolaire dans certaines provinces, d'enfants de migrants sans statut en espérant qu'il sera remédié à cette situation.
Aux termes de ce projet, le Comité noterait en outre avec préoccupation que dans l'immédiat après-11 septembre, des personnes d'origine musulmane et arabe ont souffert de haine raciale de violence et de discrimination de façon accrue. Le Comité se féliciterait toutefois du discours prononcé par le Premier Ministre du Canada à la Mosquée centrale d'Ottawa, condamnant touts actes d'intolérance et de haine à l'égard des musulmans. Il encouragerait le Canada à s'assurer que l'application de la loi antiterroriste ne conduise pas à des conséquences négatives pour les groupes religieux et ethniques, les immigrants, les demandeurs d'asile et les réfugiés. Le Comité exprimerait sa préoccupation quant aux informations sur des cas de discrimination raciale touchant des personnes d'ascendance africaine et asiatique et quant à l'expression de préjugés dans les médias. Le Comité inviterait par ailleurs le Canada à réexaminer la possibilité de faire la déclaration de l'article 14 de la Convention, relatif aux communications individuelles. Bien que le Canada ait exprimé des réserves sur les documents adoptés à Durban, le Comité recommanderait fermement au Canada de prendre en compte, dans sa mise en œuvre des articles 2 à 7 de la Convention, les éléments pertinents de la Déclaration et du Programme d'action de Durban.
Le Comité avait examiné, le 19 août, dans l'après-midi, des paragraphes du projet d'observations finales par lesquels le Comité noterait avec satisfaction le ferme engagement dont fait preuve le Canada à l'égard de la promotion des droits de l'homme. Il noterait en outre le rôle central joué par la loi sur le multiculturalisme et noterait également avec satisfaction la Déclaration de réconciliation faite par le Gouvernement fédéral, par lequel le Canada exprime ses plus vifs regrets pour les injustices commises à l'encontre des autochtones.



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