Skip to main content

Actualités Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l’homme dialogue avec l’Expert indépendant sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre et entend des mises à jour concernant les situations en Iran, au Nicaragua et à Sri Lanka

21 Juin 2023

« Les personnes LGBT sont souvent marginalisées, stigmatisées et exclues des communautés religieuses simplement en raison de ce qu’elles sont. Embrasser la spiritualité et la foi est une voie qui doit être accessible à tous, y compris à toutes les personnes ayant des orientations sexuelles et des identités de genre diverses », a déclaré cet après-midi l’Expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et l’identité de genre, M. Victor Madrigal-Borloz, alors qu’il présentait devant le Conseil des droits de l’homme son dernier rapport intitulé « Liberté de religion ou de croyance, et absence de violence et de discrimination fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre ».

L’Expert indépendant a regretté que la religion et les droits humains des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans et de diverses identités de genre soient souvent placés dans des positions antagonistes dans le discours social et politique. Dans certains cas, les récits religieux ont été délibérément utilisés pour justifier la violence et la discrimination – souvent au mépris de la doctrine de ces confessions et au-delà de la portée du droit à la liberté de religion ou de conviction. Le sentiment de conflit qui en résulte sape l’idéal de coexistence humaine pacifique, a déploré M. Madrigal-Borloz.  Il faut condamner l’utilisation abusive de croyances religieuses comme excuse pour la violence contre les personnes LGBT ou le déni discriminatoire de leurs droits humains, a-t-il plaidé.

Suite à la présentation de ce rapport, de nombreuses délégations* se sont exprimées dans le cadre du dialogue avec l’Expert indépendant.  À l’issue de ce dialogue, M. Madrigal-Borloz a souligné que « si [son] mandat a réussi quelque chose, c’est avoir collecté des preuves, partout dans le monde, que les personnes LGBTI existent partout et qu’elles font partie intégrante de toutes les cultures ».

En début d’après-midi, le Conseil a en outre entendu Mme Nada Al-Nashif, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l’homme, présenter le rapport d’étape du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme en Iran et deux mises à jour orales du Haut-Commissaire et du Haut-Commissariat concernant respectivement les situations des droits de l’homme au Nicaragua et à Sri Lanka.

S’agissant de l’Iran, Mme Al-Nashif a indiqué qu’au cours de la période couverte par le rapport [du 1er août 2022 au 15 avril 2023], la situation générale des droits de l’homme dans le pays s’est nettement détériorée dans un contexte de détérioration continue des conditions socioéconomiques, aggravées par les sanctions et l’impact persistant de la pandémie de COVID-19.  Elle a indiqué que dans le cadre des manifestations qu’a connues le pays, il y avait eu de nombreuses allégations de torture et de mauvais traitements par les forces de sécurité lors d’arrestations et d’interrogatoires pour extorquer des aveux forcés, ainsi que des allégations de violences sexuelles et sexistes commises contre des femmes, des hommes et des enfants, en particulier en détention. La Haut-Commissaire adjointe a en outre souligné que le rapport du Secrétaire général note avec une vive préoccupation le nombre élevé de condamnations à mort et d’exécutions avec, en 2022, 582 personnes exécutées, soit une augmentation de 75 % par rapport à 2021.

S’agissant du Nicaragua, Mme Al-Nashif a indiqué que le Haut-Commissariat avait documenté des cas de violations graves des droits de l'homme commises par des agents de l'État, dans un contexte de détérioration constante de la situation des droits de l'homme. Elle a notamment relevé que les voix critiques continuent d'être réduites au silence dans un contexte généralisé de peur et de harcèlement de la part des autorités.

Concernant Sri Lanka, Mme Al-Nashif a notamment recommandé que le pays se dote d’un plan cohérent qui englobe les questions de vérité, de réparation, de mémoire et de responsabilité et crée un environnement propice à la réussite du processus de justice transitionnelle. Elle a également mis en garde contre « le vieux réflexe » consistant à utiliser des lois draconiennes pour réduire l'opposition et contrôler l'espace civique, et contre l'utilisation persistante de l'armée dans des fonctions de police.

Suite à ces présentations, l’Iran et Sri Lanka sont intervenus en tant que pays concernés.

Durant cette séance, les pays suivants ont par ailleurs exercé leur droit de réponse : Azerbaïdjan, Inde, Chine, Arménie, Cambodge, Tunisie, République populaire démocratique de Corée, Fédération de Russie, Nicaragua, Pakistan et Japon.

 

Demain matin, à 10 heures, le Conseil tiendra un dialogue interactif avec le Groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles.

 

Présentation d’un rapport du Secrétaire général et de mises à jour du Haut-Commissaire et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme concernant l’Iran, le Nicaragua et Sri Lanka

Le Conseil est saisi du rapport d’étape du Secrétaire général relatif aux progrès réalisés dans la mise en œuvre de la résolution 77/228 de l’Assemblée générale sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran (A/HRC/53/23, à paraître en français).

Présentant ce rapport, Mme Nada Al-Nashif, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l’homme, a indiqué qu’au cours de la période couverte par le rapport [du 1er août 2022 au 15 avril 2023], la situation générale des droits de l’homme en République islamique d’Iran s’est nettement détériorée dans un contexte de détérioration continue des conditions socioéconomiques, aggravées par les sanctions et l’impact persistant de la pandémie de COVID-19.

Mme Al-Nashif a précisé que le rapport du Secrétaire général se concentre sur les développements intervenus depuis le début des manifestations à l’échelle nationale ayant fait suite à la mort de Jina Mahsa Amini, âgée de 22 ans, survenue le 16 septembre 2022 trois jours après qu’elle fut tombée dans le coma et décédée en garde à vue. Les manifestations, qui se sont déroulées à différentes échelles dans les 31 provinces du pays, ont mis en évidence des griefs sous-jacents de longue date, notamment la discrimination dans la loi et la pratique à l’égard des femmes et des filles ainsi que des minorités, a souligné la Haut-Commissaire adjointe.

Dans certains cas, les forces de sécurité ont eu recours, dans le cadre de manifestations et d’opérations de sécurité à grande échelle, à une force disproportionnée qui a causé des morts et des blessés parmi les manifestants, ce qui fait craindre des homicides illégaux. Les détentions arbitraires de manifestants, de militants, de défenseurs des droits humains et d’avocats ont considérablement augmenté au cours de la période considérée, a souligné la Haut-Commissaire adjointe.

Selon les informations reçues, entre le 17 septembre 2022 et le 8 février 2023, le Haut-Commissariat estime que 20 000 personnes ont été arrêtées et détenues pour avoir participé aux manifestations ou les avoir soutenues, a indiqué Mme Al-Nashif. Le Haut-Commissariat estime que des milliers d’enfants figuraient parmi les personnes arrêtées, a-t-elle précisé. Au cours de la période considérée, au moins 44 enfants, dont 10 filles, auraient été tués par les forces de sécurité qui ont eu recours à la force meurtrière, a-t-elle ajouté.

Elle a en outre indiqué qu’il y avait eu de nombreuses allégations de torture et de mauvais traitements par les forces de sécurité lors d’arrestations et d’interrogatoires pour extorquer des aveux forcés, ainsi que des allégations de violences sexuelles et sexistes commises contre des femmes, des hommes et des enfants, en particulier en détention.

Depuis le début des manifestations, le respect des droits à la liberté d’opinion et d’expression et à l’accès à l’information s’est nettement détérioré, a poursuivi la Haut-Commissaire adjointe.  La politique de l’État est devenue plus stricte dans l’application du voile obligatoire, imposant des peines plus sévères, avec un impact significatif sur la vie quotidienne des femmes et des filles, a-t-elle en outre relevé.

Le rapport note également avec une vive inquiétude qu’au 2 mars 2023, plus de 1000 élèves, dont la majorité sont des filles, auraient été touchés par un empoisonnement présumé dans 91 écoles de 20 provinces, a indiqué Mme Al-Nashif. 

Le rapport note par ailleurs avec une vive préoccupation le nombre élevé de condamnations à mort et d’exécutions au cours de la période considérée. En 2022, 582 personnes ont été exécutées, soit une augmentation de 75 % par rapport à 2021. Trois enfants figuraient parmi les personnes exécutées en 2022. Sur le nombre total d’exécutions, 256 concernaient des infractions liées à la drogue. Le nombre de personnes exécutées parmi les communautés minoritaires reste disproportionné, en particulier pour des infractions présumées liées à la drogue ou à la sécurité.  Au cours de la période considérée, quatre personnes ont été exécutées pour leur participation aux manifestations dans tout le pays, avec de vives inquiétudes quant à leur droit à une procédure régulière et à un procès équitable, a ajouté Mme Al-Nashif

Les voies permettant d’assurer la reddition de comptes restent faibles et inefficaces, en particulier pour ce qui concerne la lutte contre les violations commises dans le contexte des récentes manifestations, a déploré la Haut-Commissaire adjointe.

Dans l’ensemble, le rapport montre une détérioration du paysage des droits humains en Iran, associée à l’absence chronique de moyens significatifs et efficaces permettant à la population d’exprimer ses griefs ou de demander réparation, a conclu la Haut-Commissaire adjointe.

Conformément à sa résolution 52/2, le Conseil est par ailleurs saisi d’une mise à jour orale du Haut-Commissaire sur la situation des droits de l’homme au Nicaragua.

Présentant cette mise à jour, MME AL-NASHIF a indiqué que depuis sa dernière mise à jour, faite le 3 mars 2023, le Haut-Commissariat avait documenté au Nicaragua des cas de violations graves des droits de l'homme commises par des agents de l'État, dans un contexte de détérioration constante de la situation des droits de l'homme.

Ainsi, a précisé la Haut-Commissaire adjointe, les voix critiques continuent d'être réduites au silence dans un contexte généralisé de peur et de harcèlement de la part des autorités. Le 3 mai, 63 personnes auraient été détenues arbitrairement dans tout le pays ; 55 d'entre elles ont été accusées de « conspiration visant à porter atteinte à l'intégrité nationale » et de « diffusion de fausses nouvelles » - des délits utilisés régulièrement par les autorités pour criminaliser les opposants politiques et les défenseurs des droits de l'homme.

Ces derniers mois, le Haut-Commissariat a documenté des interdictions d'entrée au Nicaragua pour au moins six ressortissants nicaraguayens, ainsi que des obstacles à l'obtention de passeports par les parents de toute personne s'opposant ou perçue comme s'opposant au Gouvernement. Depuis mars, 119 organisations de la société civile et huit universités ont vu leur personnalité juridique annulée. La persécution des membres de l'Église catholique s'est intensifiée, le cas de l'évêque Rolando Álvarez étant emblématique de cette tendance, a ajouté Mme Al-Nashif.

Parallèlement, les populations autochtones continuent d'être victimes d'attaques et de harcèlement de la part des colons. Le 11 mars, cinq personnes ont été tuées dans la communauté autochtone Mayangna Wilú ; et un chef autochtone de la communauté Alal, dans la réserve de Bosawas, a été tué le 24 avril. Comme pour les attaques précédentes contre les peuples autochtones, le Gouvernement n'a pas condamné publiquement ces attaques ni publié d'informations sur les enquêtes, a fait observer Mme Al-Nashif.

Mme Al-Nashif a appelé les autorités nicaraguayennes à rétablir le dialogue avec le Haut-Commissariat ; à annuler les mesures qui érodent l'État de droit, l'espace civique et les droits de l'homme ; à libérer toutes les personnes privées arbitrairement de leur liberté et à rétablir les droits des personnes privées de leur nationalité ; de même qu’à profiter de l'examen devant le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, en octobre prochain, pour renouer avec le système onusien des droits de l'homme.

Conformément à sa résolution 51/1, le Conseil est en outre saisi d’une mise à jour orale du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme à Sri Lanka, y compris s’agissant des progrès accomplis en matière de réconciliation et d’établissement des responsabilités.

Présentant cette mise à jour, MME AL-NASHIF a d’abord relevé que la crise économique continuait d'avoir un impact grave sur les droits et le bien-être de nombreux Sri-lankais. Des discussions sont en cours avec les créanciers ; le Fonds monétaire international a approuvé cette année un ensemble de mesures de soutien, mas il sera essentiel de veiller à ce que le poids des réformes ne vienne pas encore aggraver les inégalités, a fait remarquer la Haut-Commissaire adjointe.

Mme Al-Nashif a par ailleurs affirmé que l'annonce d'un projet de création d’une commission de la vérité ou de mécanismes similaires de réconciliation devait retenir toute l'attention, car « Sri Lanka a connu trop de commissions spéciales dans le passé qui n'ont pas réussi à faire respecter l'obligation de rendre des comptes ». Le Bureau des personnes disparues n'a pas obtenu de résultats satisfaisants pour les victimes, a-t-elle notamment souligné. Mme Al-Nashif a recommandé que Sri Lanka se dote d’un plan cohérent qui englobe les questions de vérité, de réparation, de mémoire et de responsabilité et crée un environnement propice à la réussite du processus de justice transitionnelle.  Elle a annoncé à ce propos que le Haut-Commissariat apportait un soutien concret à plusieurs enquêtes pénales en cours.

La Haut-Commissaire adjointe a d’autre part mis en garde contre « le vieux réflexe » consistant à utiliser des lois draconiennes pour réduire l'opposition et contrôler l'espace civique, ainsi que contre l'utilisation persistante de l'armée dans des fonctions de police. En mars 2023, a-t-elle rappelé, le Comité des droits de l'homme s'est déclaré profondément préoccupé par l'utilisation abusive de la loi à l'encontre de journalistes, de défenseurs des droits de l'homme et d'autres acteurs de la société civile.  Mme Al-Nashif a encouragé le Gouvernement à abroger la loi sur la prévention du terrorisme et, dans l'intervalle, à appliquer pleinement un moratoire strict sur son utilisation.

Pays concernés

La République islamique d’Iran a affirmé que la résolution sur laquelle se base la rédaction de ce rapport [du Secrétaire général] est biaisée et injuste. Créer des mandats parallèles pour compiler des rapports de pays qui se chevauchent est inutile et gaspille des ressources, a ajouté la délégation iranienne, rappelant qu’un rapport impartial et indépendant doit se baser sur des preuves vérifiées. Par ailleurs, le rapport [du Secrétaire général] sous-estime l’impact des sanctions globales à l’encontre de l’Iran, qui impactent la vie de l’ensemble de la population dans tous les domaines, a poursuivi la délégation, ajoutant que les mesures coercitives unilatérales constituent un crime contre l’humanité et déplorant que cela ne figure pas dans le rapport.

Les accusations en série contre les autorités iraniennes, y compris les informations de discrimination institutionnalisée à l’encontre des femmes et des filles, ne reflètent pas la réalité de la situation générale en Iran, a d’autre part déclaré la délégation iranienne. Sur plus de 130 sources mentionnées dans le rapport, moins de 13 sont des sources internes en Iran et la plupart des autres proviennent de « la propagande anti-iranienne étrangère », a-t-elle affirmé. Les informations relatives aux manifestations dans le pays reprennent des termes inappropriés formulés par des canaux étrangers hostiles à l’Iran, a-t-elle insisté, affirmant que le rapport ne devrait pas reprendre « les allégations erronées venant de sources peu fiables ».

Sri Lanka a fait savoir que son Gouvernement s'attaquait aux problèmes sociaux et économiques sans précédent découlant de la crise économique. La stabilité politique a été rétablie et les conditions sur le terrain se sont considérablement améliorées pour la population, a assuré la délégation sri-lankaise. Parallèlement, et malgré les difficultés, le Gouvernement se concentre sur des mesures à long terme visant la réconciliation et la responsabilisation dans le cadre constitutionnel. La facilité de crédit élargie du FMI pour Sri Lanka a été approuvée récemment et les réformes nécessaires sont en cours, y compris l’introduction de mesures de protection sociale, a ajouté la délégation.

Le Gouvernement est aussi déterminé à préserver la paix et l'harmonie entre toutes les communautés tout en respectant les libertés fondamentales, a poursuivi la délégation.  Elle a mentionné plusieurs progrès à cet égard, en particulier la convocation d’une réunion, le 8 juin, pour passer en revue les questions relatives aux réformes législatives, au foncier, à la libération de prisonniers, à la décentralisation du pouvoir, à la commission vérité et réconciliation, au Conseil national foncier et au Bureau des personnes disparues.  Le Gouvernement poursuit en outre ses consultations avec toutes les parties prenantes sur le projet de loi antiterroriste et reçoit des avis pour s'assurer qu'il est conforme aux normes internationales tout en répondant aux besoins nationaux.  La délégation sri-lankaise a rappelé que son pays avait rejeté catégoriquement le mécanisme de collecte de preuves externe créé par les résolutions 46/1 et 51/1 du Conseil, vu ses implications juridiques et politiques. Néanmoins, Sri Lanka reste engagé de manière active et constructive dans les mécanismes réguliers de protection des droits de l'homme, a assuré la délégation.

Dialogue avec l’Expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et l’identité de genre

Le Conseil est saisi du rapport de l’Expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et l’identité de genre, intitulé « Liberté de religion ou de croyance, et absence de violence et de discrimination fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre » (A/HRC/53/37, à paraître en français).

Présentation du rapport

Présentant son rapport, M. VICTOR MADRIGAL-BORLOZ, Expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et l’identité de genre, a indiqué que ce document présentait les intersections entre deux principes indélébiles dans le cadre international des droits de l’homme : le droit à la liberté de religion ou de conviction et le droit d’être à l’abri de la violence et de la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.

L’Expert a regretté que la religion et les droits humains des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans et de diverses identités de genre soient souvent placés dans des positions antagonistes dans le discours social et politique. Dans certains cas, les récits religieux ont été délibérément utilisés pour justifier la violence et la discrimination – souvent au mépris de la doctrine de ces confessions et au-delà de la portée du droit à la liberté de religion ou de conviction. Le sentiment de conflit qui en résulte sape l’idéal de coexistence humaine pacifique, a déploré M. Madrigal-Borloz.  Il faut condamner l’utilisation abusive de croyances religieuses comme excuse pour la violence contre les personnes LGBT ou le déni discriminatoire de leurs droits humains, a plaidé l’Expert indépendant.

M. Madrigal-Borloz a expliqué avoir reçu de nombreuses contributions qui exprimaient des préoccupations concernant des chefs religieux ou de croyance qui alimentent la désinformation, les discours de haine et l’intolérance contre les personnes LGBT, notamment en les désignant comme boucs émissaires, en les présentant comme une menace pour la famille traditionnelle et en interprétant les doctrines religieuses pour exclure et promouvoir la violence et la discrimination contre l’homosexualité et la non-conformité de genre. Tout cela est préoccupant parce que les personnes LGBT peuvent être particulièrement vulnérables aux discours de haine, car l’exposition constante à ceux-ci peut conduire à l’exil, à la détresse émotionnelle et au suicide, a souligné M. Madrigal-Borloz.

« Les personnes LGBT sont souvent marginalisées, stigmatisées et exclues des communautés religieuses simplement en raison de ce qu’elles sont. Embrasser la spiritualité et la foi est une voie qui doit être accessible à tous, y compris à toutes les personnes ayant des orientations sexuelles et des identités de genre diverses », a insisté l’Expert indépendant.

M. Madrigal-Borloz a invité tout le monde à prêter attention aux voix et aux pratiques des communautés inclusives, ce qui peut aider à changer les récits affirmant que l’exercice de la liberté de religion ou de conviction est incompatible avec la jouissance égale des droits de l’homme par les personnes LGBT.

L’Expert a enfin précisé qu’il publierait avant la fin de son mandat les rapports concernant ses trois dernières visites de pays, qu’il a effectuées aux États-Unis, au Cambodge et au Royaume-Uni.

Aperçu du dialogue

Insistant sur l’universalité des droits humains, et en particulier sur le fait que, comme l’indique la Déclaration universelle des droits de l’homme, « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits », nombre d’orateurs se sont élevés cet après-midi contre l’invocation de la liberté de religion et de conviction pour justifier des discriminations et des actes de violence à l’encontre des LGBTI et d’autres personnes appartenant à des minorités sexuelles. De même, l’invocation de lois datant de l'ère coloniale pour criminaliser des relations homosexuelles consensuelles a été jugée inacceptable.

Plusieurs délégations ont décrit les mesures prises par leurs pays respectifs pour reconnaître et protéger les droits des personnes LGBT, notamment l’adoption de plans d’action pour la diversité et de cadres juridiques interdisant la discrimination pour des motifs liés à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre ; la légalisation du « mariage égalitaire » ; la facilitation du changement de sexe à l’état civil ; l’interdiction des thérapies de conversion ; ou encore la tenue d’un dialogue pour favoriser le respect et la tolérance entre les communautés religieuses et les personnes LGBTI. 

Les relations homosexuelles sont illégales dans 77 pays et passibles de la peine de mort dans cinq d'entre eux, a-t-il été rappelé. Les États ont été appelés à abroger les lois qui criminalisent les enfants, et leurs parents, en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre. A été mentionnée l'influence exercée par certains groupes évangéliques américains qui financent la haine en Afrique.  Il a été souligné que les personnes LGBTI, qui sont elles aussi en quête de spiritualité, peuvent aussi être croyantes.

Certaines réserves ont été formulées quant au contenu du rapport de l’Expert indépendant, en particulier en ce qui concerne les suggestions visant à remettre en question le droit de l'État à reconnaître une certaine tradition religieuse comme un élément fondamental de son identité, ou visant à obliger des écoles confessionnelles à prodiguer des enseignements contraires à leurs convictions.

L’Expert indépendant a été prié de dire comment inverser la tendance qui voit un nombre croissant d’États adopter vis-à-vis des personnes LGBTQI+ des législations discriminatoires et contraires aux obligations internationales en matière de droits humains.  L’Expert a en outre été prié de dire s’il existait des solutions régionales permettant de protéger les personnes contre la violence et la discrimination fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre, dans le contexte de la liberté de religion ou de conviction.

De nombreux intervenants ont remercié M. Madrigal-Borloz, dont le mandat s’achève bientôt, pour son travail depuis dix ans, en particulier son engagement à favoriser le dialogue avec les parties prenantes de toutes les régions du monde afin de dégager un consensus et de faire avancer l'agenda international sur l'inclusion et la diversité.

*Liste des intervenants : Brésil, Union européenne, Argentine (au nom d’un groupe de pays), Pays-Bas, Portugal, Liechtenstein, ONU Femmes, Royaume-Uni, Israël, Pérou, Luxembourg, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Viet Nam, Costa Rica, Belgique, République tchèque, Slovénie, Équateur, Islande (au nom d’un groupe de pays), Allemagne, États-Unis, France, Espagne, Australie, Colombie, Canada, Malte, Venezuela, Nouvelle-Zélande, Irlande, Afrique du Sud, Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), Autriche, Grèce, Suisse, Chili, Albanie, Géorgie, Cuba, Italie, Monténégro, Bolivie, Chypre, Népal, Uruguay, Hongrie, Thaïlande, Federatie van Nederlandse Verenigingen tot Integratie Van Homoseksualiteit - COC Nederland, Association lesbienne et gay internationale, GIN SSOGIE NPC, British Humanist Association, Humanists International, Swedish Federation of Lesbian, Gay, Bisexual and Transgender Rights, Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement, Swedish Association for Sexuality Education, Service international pour les droits de l'homme et Right Livelihood Award Foundation.

Réponses et remarques de conclusion de l’Expert indépendant

M. Madrigal-Borloz a mis en garde contre les mesures qui reviennent à contester l’universalité et l’interdépendance des droits de l’homme tout en suscitant des clivages au sein des sociétés et en niant un ensemble de libertés. Il a souligné que son rapport dénonce les discours qui instrumentalisent les droits de l’homme à des fins qui sont contraires à ces droits et contient des exemples de « bonnes pratiques » dont les points communs sont le principe du respect et l’idée de voir l’humanité dans autrui.

L’Expert indépendant s’est dit choqué par la déclaration du Gouvernement de l’Ouganda selon laquelle infliger la peine de mort pour homosexualité reviendrait à défendre les valeurs chrétiennes.

M. Madrigal-Borloz a remercié les organisations de la société civile du soutien qu’elles lui ont accordé tout au long de son mandat. « Si le mandat a réussi quelque chose », a souligné l’expert, « c’est avoir collecté des preuves, partout dans le monde, que les personnes LGBTI existent partout et qu’elles font partie intégrante de toutes les cultures ».

L’Expert indépendant a enfin rappelé qu’il avait, tout au long de son mandat, lancé des appels pour la reconnaissance de l’identité de genre fondée sur l’auto-identification et pour un monde débarrassé des thérapies de conversion et de la criminalisation de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre.

 

Lien : https://www.ungeneva.org/fr/news-media/meeting-summary/2023/06/le-conseil-des-droits-de-lhomme-dialogue-avec-lexpert

 

_______________

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel.
Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.

VOIR CETTE PAGE EN :