Contexte
Dans son premier rapport à l'Assemblée générale des Nations unies, la Rapporteuse Spéciale des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association, Mme Gina Romero, examinera les caractéristiques et les tendances mondiales de la diffusion de récits négatifs et stigmatisants à l'encontre de la société civile et des activistes.
Il est prouvé que divers acteurs, y compris des gouvernements dans différentes régions et dans des démocraties établies, ont de plus en plus tendance à utiliser des narratifs qui stigmatisent la société civile et les activistes. Ces narrations diffusés au niveau du discours public sont souvent utilisés pour justifier l'adoption de lois ou de politiques restrictives et pour réprimer la différence de perspectives.. En outre, la stigmatisation des manifestations et des mouvements sociaux peut entraîner de graves violations des droits de l'humains, y compris l'usage illégal de la force et des décès.
La question de la stigmatisation en tant qu'outil politique permettant de faire taire les voix critiques, d'étouffer les protestations, de justifier la répression et de se soustraire à l'obligation de rendre des comptes a été constamment documentée et soulevée par son prédécesseur dans de nombreux rapports thématiques et communications aux États. Les acteurs et les activistes de la société civile sont de plus en plus souvent qualifiés de menace pour la sécurité et le développement nationaux, d'antipatriotiques, d'atteinte à la souveraineté nationale, de « terroristes » ou d' « extrémistes violents », de « propagateurs d'immoralité » et d'autres termes désobligeants visant à les vilipender et à les salir.
Dans le contexte actuel d’une militarisation croissante, de menaces accrues pour la paix et la sécurité internationales et de menaces environnementales graves, il semble que ces narratifs se soient considérablement développés et répandus, et qu'ils créent un environnement hostile et un effet dissuasif pour la participation du public aux forums et aux débats nationaux et mondiaux. Il est évident que, dans de nombreux contextes, l'émergence de récits négatifs ciblant les droits d'association ou de réunion marque de sérieux revers démocratiques et le début ou le renforcement de voies autocratiques, qui compromettent gravement l'exercice de nombreux autres droits.
Pour que les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association puissent continuer à être effectivement exercés et à faciliter la participation des communautés affectées, des militants et des défenseurs des droits de l'humains aux débats critiques, et pour permettre la réalisation d'autres droits, il est essentiel de prévenir et de contrer l'émergence et la propagation de ces récits.
À l'approche du « Sommet de l'avenir », qui sera accueilli par l'Assemblée générale des Nations Unies les 22 et 23 septembre 2024, ce rapport constituera une occasion importante de réfléchir et de rechercher des solutions pour contrer les récits négatifs et stigmatisants. Garantir une participation significative des mouvements sociaux, de la société civile et des citoyens est crucial pour la mise en œuvre effective des engagements mondiaux liés à la Charte des Nations unies, à la Déclaration universelle des droits de l'humains et à l'Agenda 2030 pour le développement durable.
Objectifs
Les informations recueillies alimenteront le rapport thématique de la Rapporteuse Spéciale sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association, qui sera présenté lors de la 79e session de l'Assemblée générale des Nations unies en octobre 2024.
Le rapport vise à identifier et à analyser l'émergence et la diffusion de narratifs négatifs stigmatisant les mouvements sociaux, la société civile ainsi que les militants. Il évaluera également leur impact sur l'espace civique, sur la participation des citoyens aux débats critiques, sur la réalisation d'autres droits et sur l'efficacité et la durabilité de tout implication sur le futur. En outre, le rapport pourrait également servir de base à l'élaboration de stratégies d'alerte précoce visant à contrer ces discours négatifs afin d'éviter tout recul en matière de démocratie et de droits. Le rapport fournira également des recommandations sur la manière dont les acteurs nationaux et internationaux, y compris les Nations unies, peuvent prévenir et contrer les récits négatifs.
Questions clés et type de contributions demandées
Les États membres, les acteurs de la société civile, les institutions nationales des droits de l'humains et les chercheurs académiques sont encouragés à soumettre des contributions concernant les questions suivantes, en se concentrant sur les discours stigmatisants spécifiques en cours/en augmentation et émergents qui ont un impact sur la société civile et la participation du public à des débats critiques au niveau national, régional et international; et à fournir des exemples de bonnes pratiques, de stratégies et de recommandations pour prévenir et contrer de tels récits.
A. Questions pour la société civile, les INDH et les chercheurs académiques :
- Quels sont les récits du domaine public dans votre pays qui, selon vous, ont un impact sur l'exercice des droits à la liberté de réunion pacifique et d'association ? Veuillez fournir des exemples concrets de ces récits (y compris les récits explicitement préjudiciables/stigmatisants et ceux qui ont un tel effet).
- Qui ont été les principales cibles de ces discours nuisibles/stigmatisants dans votre pays (ceux qui promeuvent des droits spécifiques, qui exercent le droit de protester, la dissidence, etc.)
- Quels sont les principaux acteurs qui génèrent des récits nuisibles contre la société civile, les droits de l'humains et ceux qui exercent leurs droits à la liberté de réunion et d'association dans votre pays ?
- Quels sont les moyens de diffusion de ces récits dans votre pays - quel a été le rôle des entreprises, y compris des entreprises technologiques, des médias, d'autres acteurs et groupes ?
Quels sont, selon vous, les principaux facteurs (nationaux, régionaux, internationaux) qui contribuent à la création et à la diffusion de ces récits négatifs ciblant l'activisme, la société civile, les mouvements sociaux et les libertés dans votre pays ?
Comment cesdiscours sont-ils liés à la législation en vigueur, les politiques et réglementations restrictives de votre pays qui ont un impact sur la liberté de réunion pacifique et les droits d'association ? Veuillez donner des exemples.
- Comment les discours stigmatisants/négatifs ont-ils eu un impact sur l'exercice des droits à la liberté de réunion pacifique et d'association dans votre pays ?
- Est-ce que vous/votre organisation/vos militants, associations ou communautés avec lesquelles vous travaillez/connaissez, ont été directement ou indirectement affectés par la diffusion de tels récits et comment ?
- Veuillez fournir autant de détails que possible, notamment sur la manière dont cela a affecté l'accès des organisations aux ressources (humaines, financières, etc.), leurs opérations et interactions avec les bénéficiaires, la coopération/l'engagement avec les autorités, les autres parties prenantes, la communauté des donateurs, les acteurs régionaux et internationaux, y compris avec les Nations unies ?
- Quel a été l'impact spécifique (le cas échéant) sur les OSC et les militants travaillant sur des questions concernant les groupes marginalisés, les populations autochtones, les droits des femmes, l'identité de genre, entre autres ?
- d) Veuillez fournir autant de détails que possible, par exemple sur la manière dont cela a affecté la capacité des communautés à se rassembler et à travailler ensemble, à participer à la prise de décision, à superviser l'action publique, à organiser ou à participer à des assemblées pacifiques, entre autres.
- Comment les récits stigmatisants influencent-ils l'inclusion et la participation du public dans les affaires publiques et dans les discussions sur les questions essentielles, y compris l'accès de la société civile et des mouvements sociaux aux forums multilatéraux ?
- En ce qui concerne le travail des OSC et les mouvements de protestation pacifiques appelant à un cessez-le-feu et à la protection des droits humains du peuple palestinien :
- Quelles ont été les implications de la rhétorique publique sur les manifestations pacifiques, les mouvements sociaux et le travail de la société civile en solidarité ou en soutien au peuple palestinien et exigeant au cessez-le-feu à Gaza ?
- Comment la rhétorique stigmatisant l'activisme en solidarité avec le peuple palestinien et les OSC palestiniens a-t-elle eu un impact sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association en général dans votre pays/domaine de travail ?
- Comment cette rhétorique peut-elle être contrée afin de protéger la liberté de réunion et d'association de ceux qui travaillent à la protection des droits humains du peuple palestinien et à la promotion de la paix et de la justice à Gaza?
- Quelles mesures devraient être mises en place pour protéger la société civile et ceux qui exercent leurs droits à la liberté de réunion et d'association contre la stigmatisation ? Pouvez-vous identifier des exemples concrets de récits positifs qui parviennent à neutraliser la stigmatisation ou à protéger la société civile, les mouvements sociaux et l'exercice des droits d'association et de réunion ?
- Que peuvent faire les États et les autres acteurs - entreprises, donateurs, acteurs régionaux, communauté internationale - pour créer et soutenir des contre-récits et inverser la stigmatisation ?
B. Questions aux États
- Comment évaluez-vous les perceptions dans votre pays, et quelles initiatives concrètes votre gouvernement a-t-il prises contre toute stigmatisation et permettre, par la législation et la pratique, ce qui suit:
- La participation aux affaires publiques dans les processus de prise de décisions au-delà des élections.
- Le travail des organisations non gouvernementales, de la société civile et des mouvements de défense des droits (y compris ceux financés par l'étranger) aux niveaux national et international. Veuillez fournir des détails et des exemples concrets.
- L'exercice des droits à la liberté de réunion pacifique et d'association, y compris sur des questions qui peuvent être considérées comme critiques à l'égard du gouvernement et de ses politiques. Veuillez fournir des détails et des exemples concrets.
- La formation et l'adhésion à des syndicats et leurs actions, y compris leur droit de grève. Veuillez fournir des détails et des exemples concrets.
- L'activisme, le plaidoyer et la mise en œuvre de projets visant à faire progresser : i) l'égalité des sexes et les autres droits des femmes, ii) la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre, iii) la protection contre le racisme et la progression des droits des personnes appartenant à des minorités nationales, ethniques, religieuses et/ou linguistiques, iv) les droits des personnes d'ascendance africaine et des peuples autochtones, v) le changement climatique et d'autres programmes environnementaux, vi) la consolidation de la paix, la vérité, la réconciliation, la mémoire et d'autres programmes connexes, entre autres. Veuillez fournir des détails et des exemples concrets, le cas échéant.
- Quelle a été la réponse de votre gouvernement à l'activisme en faveur des droits humains du peuple palestinien, du cessez-le-feu à Gaza et de l'obligation de rendre compte des violations du droit pénal international commises à l'encontre du peuple palestinien (si de telles activités ont eu lieu dans votre juridiction) ? Quelles mesures votre gouvernement a-t-il prises pour lutter contre la stigmatisation dans le contexte de ces manifestations, y compris en ce qui concerne toute mesure spécifique prise par les autorités en réponse à ces manifestations ?
- Comment vous assurez-vous que les définitions et autres dispositions incluses dans les lois, règlements et politiques visant à réglementer la liberté d'association et/ou de réunion pacifique dans votre pays n'ont pas d'effet stigmatisant sur la participation des citoyens aux affaires publiques, sur les activités de plaidoyer des ONG, de la société civile et des mouvements sociaux ? Quelles sont les garanties prévues pour s'assurer que ces mesures ont un effet stigmatisant sur la société civile, les associations et les militants ? Avez-vous mis en place des moyens pour contrôler et traiter les effets stigmatisants néfastes ?
- Veuillez fournir des informations sur ce que vous considérez comme de bonnes pratiques pour lutter contre la stigmatisation et promouvoir et protéger les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association dans les lois et les politiques, notamment en ce qui concerne la promotion de la transparence, la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme violent, d'autres questions liées à la sécurité et à la paix, et les questions de justice climatique, aux niveaux national, régional et international ?
- Comment garantissez-vous de larges consultations publiques et un engagement significatif de la société civile, des défenseurs des droits de l'humains et des représentants des personnes vulnérables et marginalisées, ainsi que des mouvements sociaux et des communautés, dans l'élaboration de ces politiques et de ces lois ?
- Quels sont les processus en place dans votre pays pour réaliser des études d'impact inclusives afin de garantir que, par leur mise en œuvre, les politiques et les lois ne créent pas d'effets stigmatisants sur les personnes exerçant leurs droits à la liberté de réunion et d'association pacifiques ?
- Quelles mesures votre gouvernement a-t-il prises pour protéger la société civile et les militants contre la stigmatisation et pour contrer les récits stigmatisants, notamment de la part des fonctionnaires et des personnes en position d'autorité, y compris au sein du gouvernement, des organismes chargés de l'application de la loi et des médias ? Quel a été le rôle de la société civile dans l'élaboration de ces mesures ?
- Veuillez fournir des exemples concrets que vous considérez comme des bonnes pratiques. - Quelles mesures votre gouvernement a-t-il prises pour lutter contre la stigmatisation de la société civile, des militants, des défenseurs de l'environnement, des mouvements sociaux, par les entreprises, y compris les entreprises technologiques ?