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Déclarations Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage

02 Décembre 2020

Webinaire sur les formes contemporaines d’esclavage et la discrimination raciale : appui offert par la société civile aux survivants durant la pandémie mondiale

Déclaration de Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

Le 2 décembre 2020

Bienvenue à tous en cette occasion importante.

Chaque année, en ce jour, nous célébrons l’abolition de l’esclavage et nous renouvelons notre engagement solennel à l’éradiquer. Nous réaffirmons l’engagement du monde à libérer les plus de 40 millions de femmes, d’hommes et d’enfants qui, selon les estimations, sont aujourd’hui réduits en esclavage.

Jamais cet engagement n’a été aussi vital qu’aujourd’hui. À mesure qu’elle continue de s’aggraver, la pandémie de COVID-19 menace de déclencher de nouvelles vagues de pauvreté et d’inégalités, rendant des millions de personnes supplémentaires vulnérables à l’esclavage moderne.

Bien que le fait de posséder quelqu’un ait été aboli aux yeux de la loi, l’exercice de pouvoirs de facto de propriété sur d’autres êtres humains par la violence, la tromperie ou d’autres moyens persiste dans le monde entier.

Des personnes naissent encore esclaves, car leurs parents et leurs ancêtres étaient esclaves. Des personnes continuent d’être considérées comme des possessions. D’autres sont tenues par la coutume ou par la loi de travailler comme serfs ou comme travailleurs asservis, pour un maigre salaire, voire sans aucune rémunération.

Quelque 25 millions de personnes dans le monde sont soumises au travail forcé, dont une grande partie dans l’industrie du sexe.

Une victime de l’esclavage moderne sur quatre est un enfant, forcé de participer à un conflit armé, de travailler dans des mines, des maisons ou dans la rue, ou victime de la traite et vendu à des fins d’exploitation sexuelle commerciale et d’images de maltraitance d’enfants.

Les femmes sont les plus vulnérables à l’esclavage sexuel et domestique. Environ 15 millions de filles et de femmes vivent aujourd’hui dans un mariage auquel elles n’ont pas consenti. Les pratiques telles que la vente d’épouses et le lévirat – le mariage forcé des veuves avec des membres de la famille de leur mari – persistent.

De nombreuses victimes souffrent de multiples formes d’esclavage et subissent d’autres violations des droits de l’homme. Parmi les principales causes profondes de l’esclavage figure la discrimination raciale généralisée et de longue date, qui est étroitement liée à l’inégalité d’accès à la justice, à l’éducation, aux services de santé, à la terre, aux moyens de subsistance ou aux possibilités d’emploi décent.

Par exemple, la grande majorité des personnes en situation de servitude pour dettes en Asie du Sud appartiennent à des groupes minoritaires, qui sont pris pour cible et reçoivent souvent une protection inadéquate des autorités en raison de leur caste ou de leur origine sociale ou ethnique. En Amérique latine, le travail forcé et la servitude pour dettes sont infligés de manière disproportionnée aux peuples autochtones. Dans certains pays africains, des enfants continuent de naître dans des conditions d’esclavage. En Europe, certains groupes des diverses communautés roms continuent à organiser des mariages entre enfants et adolescents, ce qui a de graves conséquences sur les droits de l’homme, en particulier pour les femmes et les filles roms.

La crise sanitaire, économique et sociale mondiale que l’on connaît actuellement en raison de la COVID-19 a aggravé ces risques. Comme l’a indiqué le Rapporteur spécial sur l’esclavage, l’augmentation de la pauvreté, les pénuries alimentaires, la réduction des services publics et l’endettement, y compris pour les soins de santé, augmentent le risque que certaines personnes tombent victimes d’offres de travail sur le marché noir loin de chez elles. Les fermetures d’écoles augmentent le risque que les enfants soient contraints aux pires formes de travail des enfants ou à un mariage précoce et forcé. De plus, les familles dont les moyens de subsistance ont été réduits à néant sont contraintes à la servitude ou au travail forcé pour survivre.

La crise met en péril les conditions déjà précaires des personnes qui ont survécu et échappé à l’esclavage, dont certaines bénéficient de l’aide du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour la lutte contre les formes contemporaines d’esclavage. Il est important de noter que les organisations soutenues par le Fonds constatent actuellement une augmentation des besoins humanitaires des survivants de l’esclavage.

Dans certains cas, les restrictions de mouvement, bien que nécessaires face à la pandémie, empêchent les victimes d’exploitation d’être identifiées et secourues.
La protection du droit au développement devrait être au cœur de tous les efforts menés pour éliminer l’esclavage. Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 l’a reconnu en créant une cible spécifique sur l’éradication de l’esclavage et des pratiques esclavagistes. Nous ne pouvons pas permettre que cette lutte soit reléguée au second plan en cette période cruciale.

Nous avons besoin d’une action mondiale coordonnée, par les États, les acteurs internationaux et la société civile. De nombreux organismes des Nations Unies ont un rôle à jouer, et les synergies et coalitions entre les principales parties prenantes, comme l’Alliance 8.7, devraient être encouragées.

La situation actuelle rend notre travail difficile, mais nous sommes convaincus que notre action aura une forte incidence sur la vie de nombreuses personnes. Les efforts menés pour mettre fin à l’esclavage, prendre soin des survivants et leur donner les moyens de vivre dans la dignité sont décisifs pour la communauté internationale, et je félicite tous ceux qui y participent. Le webinaire qui a lieu aujourd’hui peut donner un nouvel élan à ces efforts.

J’espère que cela donnera également une nouvelle impulsion au travail crucial du Fonds de contributions volontaires pour la lutte contre les formes contemporaines d’esclavage. En cette période de grand besoin, j’encourage chacun à contribuer à cette cause vitale.

Merci.

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